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ABBAYE NOTRE-DAME DE LA JOIE d'HENNEBONT

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Abbaye Notre-Dame de la Joie - Hennebont

 

I. FONDATION

Le duc de Bretagne Jean Ier avait commencé, dès 1251, la fondation de l’abbaye de Prières, dans la paroisse de Billiers, en faveur des moines de Cîteaux, et l’avait dotée l’année suivante.

La duchesse Blanche de Champagne ou de Navarre voulut de son côté faire une fondation semblable en faveur des religieuses du même ordre. Elle destina à cet effet une maison et ses dépendances, qu’elle possédait avec son mari, au nord de la nouvelle ville d'Hennebont.

Les religieuses de Cîteaux, appelées plus tard Bernardines, ont pour costume une robe blanche, un scapulaire noir, un voile noir et un manteau à l’église. Les dames de choeur sont spécialement chargées du chant de l’office et s’occupent d’écoles et de travaux manuels dans les intervalles libres.  Les soeurs converses sont appliquées à la cuisine et aux divers ouvrages de la maison.

A quelle date eut lieu cette fondation ? Une note de la fin du XVème siècle, mentionnée dans un procès de 1690, rapporte cet établissement à l’an 1251. Mais il y a là une erreur de chiffre, car un document plus ancien et parfaitement authentique donne la date de 1260. On lit en effet dans l’épitaphe de la duchesse fondatrice : Cy gist haulte et puissante dame Blanche de Navarre, femme de Jehan I, duc de Bretagne, qui fonda cette abbaye en l’an M. CC. LX. (Pr. 1, 979).

L’erreur provient de la perte de l’acte primitif de la fondation ; cette pièce existait encore en 1411, mais elle disparut ensuite, soit au milieu des guerres de la province, soit dans l’un des deux incendies qui ont ruiné le monastère.

Du reste cet acte n’est pas le seul perdu, car pendant les quinze premières années de l’existence du couvent, on ne trouve plus une seule pièce d’acquisition ou de donation ; et cependant c’est dans cet intervalle que doit se placer l’origine de plusieurs propriétés, dont l’abbaye se trouve peu après en jouissance. Ce monastère reçut le nom de La Joie de Notre-Dame, qui devint ensuite par inversion Notre-Dame de la Joie. Le duc et la duchesse promirent au nouvel établissement une rente annuelle de 400 livres monnaie.

A défaut de l’acte de fondation, définitivement perdu, voici la ratification donnée au mois de septembre 1276 par le fils aîné des fondateurs « A touz céans qui orront ou verront ces présentes lettres, Johan fiz enné au duc de Bretaingne, conte de Richemont, saluz en Deu. Sachient touz que nous avons gréé et ottrée, gréons anquore et ottréons que nostre chiere mère Blanche, duchesse de Bretaingne... denge (donne) et puisse donner en sa terre et en son héritage dou Perche à s'abbaie, nommée la Joie Nostre Dame de lez Henbont, à la dyocese de Vanes, cent livres de rente en pure aumonne à jamès, sanz riens que nos né nos hoirs puissions demander en icéaus cent livres de rente par auqune réson, ... et que encontre des dites choses n'irons jamès, né nos né nos hoirs. — Et au temoign de ce, nos le devant dit Johan donnames cestes présentes lettres à la dite Blanche nostre mère chière, séelées en nostre séau. Donné le mois de septembre, en l’an de grace mil dous cenz soixante sèze » (La Joie. — Original parchemin).

Cette rente de cent livres constituait un quart de la dotation ; le reste se levait ailleurs, en attendant une assiette définitive.

Cependant le domaine du couvent était assez restreint. Pour l’augmenter, le duc Jean Ier, par acte du mois de février 1278 (N. S.), passé devant l'Official de Vannes pendant la vacance du siège épiscopal, acheta de M. Alain de Spinefort, au prix de cent quarante livres monnaie, tout le terrain compris entre le Blavet et le chemin qui mène d'Hennebont au moulin de Saint-Peau et à Lochrist, avec tout ce qu’il contenait en prés, terres, bois et cours d’eau. — L’acte d’acquisition, redigé en latin, existe encore aux archives de l'abbaye, et fut soumis aux formalités ordinaires des bannies, de la prise de possession et du paiement du droit de mutation.

Cet immense terrain, d’une contenance de 360 journaux, forma le grand parc de l’abbaye, et prit le nom hybride de Coet-du-Duc, ou mieux Parc-du-Duc. C’est là que s’élevèrent plus tard les métairies des Granges et de la Bergerie.

L’établissement était en voie de prospérité ; la mort de la duchesse fondatrice n’arrêta pas sa marche. Cette princesse mourut au château de Hédé le 11 août 1283 ; son corps fut apporté à Hennebont, et inhumé avec l’habit religieux dans le coeur de l’église de Notre-Dame de la Joie. — Sa statue tombale fut faite à Limoges, comme le prouve cette note « Guillaume Le Borgne, chevalier, donne quittance de 450 livres pour la façon de la sépulture de Madame Blanche, duchesse de Bretagne, que le duc avoit commandé estre faite à Limoges (Pr. I. 1205).

Cette statue est en bois, plaquée de cuivre, et mesure environ deux mètres de longueur ; elle a les mains jointes, la tête posée sur un Coussin et les pieds sur un chien ; elle est aujourd’hui au musée du Louvre à Paris.

Le duc Jean Ier mourut lui-même le 8 octobre 1286, et fut inhumé à Prières. Son fils Jean II périt à Lyon, écrasé par la chute d’un mur en 1305. Son petit-fils Arthur II voulut enfin, en 1311, donner une assiette fixe et définitive à la rente de 400 livres monnaie qui formait la dotation de l'abbaye de la Joie. 

Hennebont : Abbaye Notre-Dame de la Joie, Blanche de Champagne

Blanche de Champagne

Voici l’acte qu’il en fit dresser « Nous Artur, duc de Bretaigne, conte de Richemont, faisons savoir à touz que nous baillons et assignons à religieuses damnes l'abbesse et le convent de la Joaie Nostre Damme prés Haimbont, de l’ordre de Citeaus, en la dyocèse de Vennes, diz et neuf quartiers de froment, et doze quartiers et une tercelée de saille (seigle), à la mesure d'Aurrai ; — item cinquante mesures de froment, à la mesure Queignart, à Caudan, valant deux quartiers et quatre tercelées et demie la mesure d'Aurrai ; — item, à Laustainc, quatre tercelées et demie de froment à la mesure d'Aurrai, et cinq tercelées de saille à la dite mesure, valant chacune tercelée de froment, à la mesure d'Aurrai, six soulz chacun an, et chacune tiercelée de saile, à la d. mesure cinq soulz chacun an de rente, à avoir et recevoir par la main de noz chasteillains des leus où les diz blez nous sont deuz, et ès leus desus nommez, chacun an à la feste de Touz-Sainz ; et est la summe dou pris d’iceux bleiz, rabatuz trèze soulz que nous leur enquitons, soixantedix et sept livres re seze soulz (Note : La quartier contenait huit tiercelées).Item, nous leur baillons et assignons sep-vinz livres (140) en deniers, à prendre et à recevoir sur noz fermes et rentes de Plozai (Plouay), et au plus près si ce ne valoit, chacun an, à la feste de la Saint-Iahan-Baptiste quarante livres, à la Saint-Michiel cinquante livres, et à la Chandeleur cinquante livres ; par la main de nostre chasteillain de Pontcalleic, qui sera pour le temps, ou de noz fermiers d’icelui leu. Item nous leur baillons et assignons douz cenz livres à prendre et à recevoir chacun an sur noz fermes de Hainbont et de Laustaine, moitié par moitié, aux termes qui ensèvent, c’est à savoir, à chacune feste de saint Iahan-Baptiste cinquante livres, et à chacune feste de sainct Michiel cent livres, et à chacune feste de la Chandeleur cinquante livres, par la main des fermiers des diz leu. — Item doze livres quatre soulz sur noz fermes de noz pescheries de Saint-Christ (Lochrist), par la main des fermiers d’icelles fermes à la dite feste de saint Michiel. Et est la summe de totes ces parties quatre cenz trante livres, pour les quels sommes nous leur baillons et assignons les choses desus dites, ès leus et ès termes desus nommez, par les mains ès diz chasteillains et fermiers à prendre et à lever chacun an, si comme desus est dit. Et n’est pas nostre entente que les dites religieuses aient nulle droiture sur les choses desus dites , fors tant seulement les bleiz et les summes de deniers desus dites, par les mains de noz genz desus diz, sanz plus à poeir demander ; et ont prins les bleiz desus diz absolument pour le prix desus dit. Et si les fermes desus dites ne povoient valoir les summes de deniers et de bleiz, dont nous les avons chargées, par quoi les dites religieuses ne puissent estre poiées aus termes desus nommez, nous serions tenuz à leur fève rester sus noz autres pièces. Et volons que si ceulz qui noz fermes tendront et recevront les dites choses pour le temps, qui seront en deffaut de poier ès dites religieuses les diz bleiz et deniers et ès termes desus diz, depuis que ils en seront requis souffisaument des dites dames ou de leur commandement, que pour chaque jour que ils en seront en deffaut, les dites dames puissent lever, et avoir d'iceulx de paine cinq soulz chacun jusques à tant que les dites dames soient poiées à plain des diz et deniers. En tesmoin des quèles choses, nous avons mis nostre séau en ces présentes lettres. — Donné à Succiniou, le vendredi anprès la Chandeleur, l’an mil trois cenz et diz.  (5 février 1311. N. S.). Et est à savoir que quatre cenz livres sont pour le fondement et le doaire de la Joaie de Nostre Damme près Haimbont, ... et trante livres qui demorent pour Marie de Savonnière » (La Joie. — Original parchemin).

Sur cet acte capital on peut faire plusieurs observations. Et d’abord la rente est assise en trois endroits principaux : Auray et dans les environs, à Plouay ou à Pontcallec, et enfin à Hennebont même. Ensuite cette rente est payable partie en grain et partie en argent.

La rente d'Auray et des environs resta toujours payable en grains, et ce fut un avantage pour la communauté dans la suite des âges. L’afflux de l’argent ayant amené l’augmentation progressive du prix des denrées, les grains subirent la loi générale de la hausse. La rente susdite, estimée valoir 77 livres 16 sous en 1311, valait 90 livres en 1400, 150 livres en 1630, et 300 livres en 1776. Si la rente avait été en argent, elle serait restée fixe, et en 1776, au lieu de recevoir 300 livres, on n'aurait touché que 77 livres 16 sous, comme à l’origine.

Les rentes de Pontcallec et d'Hennebont, ayant été mises en argent, restèrent toujours fixées au même chiffre, mais leur valeur relative alla toujours en diminuant, et en 1790 elle était loin d’avoir la valeur primitive. Voici quel était, d’après M. de la Borderie et d’autres auteurs, le rapport de la livre, aux siècles passés, avec le franc de nos jours : au XIIIème siècle, dans la seconde moitié, la livre valait 113 fr. 79 cent.  de notre monnaie actuelle (année 1903) ; au XIVème siècle, dans la première moitié, elle valait 82 fr. 50, et dans la seconde moitié 55 francs. D’où il suit que les 400 livres de rente données à l’abbaye de la Joie en 1311 vaudraient en 1903 environ 32.000 francs de notre monnaie.

La dotation fournie par les ducs ne fut pas la seule ressource des religieuses. Presque toutes les professes fournissaient une dot, ou au moins une pension alimentaire.  Les capitaux provenant de cette source servirent à la construction ou à l’entretien des bâtiments , et ensuite à l’acquisition de divers immeubles, dont le revenu combla plus tard le vide fait par la dépréciation de l’argent. Il faut donc maintenant connaître ces acquisitions, et les noms des abbesses qui les firent, de concert avec la communauté.

 

Hennebont : Abbaye Notre-Dame de la Joie

 

II ABBESSES

La première abbesse de la Joie fut Sibille de Boisgency, nièce de la duchesse Blanche de Navarre et religieuse du couvent de Saint-Antoine à Paris. Si les premières années de son administration sont inconnues, à cause de la perte des titres, il n’en est pas de même de la suite, où les documents abondent. C’est ainsi qu’on la voit acheter, en 1279, des terres à Talvern en Nostang et à Kercrom en Saint-Caradec, et en 1280 à Kervignac, à Saint-Caradec et à Inguiniel. En 1281, elle reçut en don la terre et la dîme de Morfouace en Ploërmel ; une rente de dix livres sur le port d'Hennebont, et divers immeubles situés à Coetguiler et à Kerdon en Plouay.  En 1282 elle fit cinq contrats d’acquisition ou d’échange en Kervignac Saint-Caradec, Bubry Languidic et. Meslan.  Aux années suivantes elle acquit une dîme à Lesivry en Plouhinec, un pré à Noguello en Kervignac, une rente en grains à Guégon, et reçut divers immeubles à Lesnan, en Plouay, et fit un accord pour la chaussée du moulin de Kersol en Languidic. Enfin, en 1308, elle consentit à l'échange de Morfouace pour une rente en grains à Pleugriffet, à l’échange de Coetulaire en Plouay pour des terres situées en Nostang, et acquit divers immeubles à Locmaria, dans la même paroisse de Nostang.

Toutes ces acquisitions sont constatées par des contrats dont les originaux sur parchemin existent encore aux archives de l’abbaye. Pour couronner son oeuvre, Sibille obtint, en 1311, la charte ducale, fixant définitivement la dotation du monastère, dont le texte a été donné ci-dessus, puis elle s’endormit dans le Seigneur le 12 juillet 1312.

2. La seconde abbesse, librement élue par la communauté, fut Jeanne Bizien. En 1316, elle reçut des enfants de Tanguy Le Médec la donation de leurs terres en Bubry, en reconnaissance des services rendus à leur famille par l’abbaye. En 1323, elle acquit le tiers du moulin de Locjan en Riantec, en échange d’une rente de quarante sous en Inguiniel. En 1334, elle acheta une rente de vingt sous à Kervern en Riantec.  Enfin, en 1338, elle fit reconnaître ses droits sur divers immeubles de Mendon, en cédant une rente de douze sous. Et c’est tout ce qui reste des actes de cette abbesse, qui mourut en 1339. Armes : D’argent ci la fasce de sable, accompagnée en chef d’une étoile de gueules et en pointe d’un croissant de même.

3. Jeanne Amaury, qui lui succéda, vit commencer en 1341 la longue et sanglante guerre entre Charles de Blois et Jean de Montfort, pour la succession au trône ducal. Elle accepta, en 1348, une rente de dix sous, pour la sépulture et l’anniversaire de Pierre-Bonabes de Spinefort. En 1353 elle bailla la tenue de Kerhuitel en Quistinic à Main de Chefdubois, pour vingt sous de ferme et seize deniers de chef-rente par an. En 1362, elle accepta une rente annuelle de quatre livres, pour la sépulture de Thomase de Malguénac, et la célébration de quatre messes par an. Enfin, en 1368, Agnès Galaine, de Bubry, lui donna tous ses biens meubles et immeubles pour être inhumée à la Joie et participer aux prières de la communauté (Ibid.). Amice de Kergroèzes et Jeanne de Pestivien paraissent avoir été successivement ses coadjutrices.

4. Jeanne de Chasteaugal, élue en 1369 ou 1370, reçut en 1371 une rente perpétuelle de quatre livres pour la dot de Plésou Piques, qui voulait être «  soeur et nonnenne », et en 1372 une rente de dix sous en Riantec pour la sépulture de Henri Caudan, bourgeois d'Hennebont. En 1374, Guyomar Coquin, de la paroisse de Saint-Gilles, fit don de tous ses biens au monastère, et fut reçu comme frère convers et participant à tous les avantages spirituels de l’ordre. La même abbesse, pour résister efficacement aux entreprise du vicomte de Rohan et du sire de Guémené, se fit reconnaître, en 1388, comme dépendante directement du duc. Elle mourut vers 1390. Armes : De gueules à 3 châteaux d’or, 2, 1.

5. Adelice Le Barbu, qui recueillit sa succession, obtint en 1392 des lettres du duc pour le paiement des rentes de Pleugriffet, et puis d’autres ordres pour les rentes d'Auray et de Pontcallec. Elle reçut de nombreuses petites rentes sur diverses maisons d'Hennebont et des environs. En 1405, elle obtint la protection du duc pour son moulin de Haidan en Merlevenez, et reçut en 1412 et 1413 divers immeubles situés à Mané-er-Forn en Caudan et à Villeneuve en Saint-Caradec. Elle mourut en 1416. Sa famille portait pour armes : D’or au sautoir alésé et fleuronné d’azur. Adelice était soeur de Henri Le Barbu, qui fut successivement abbé de Prières et évêque de Vannes et de Nantes.

6. Marguerite Le Barbu, nièce des précédents, accensa dès 1417 une maison sise à Hennebont, reçut ensuite diverses rentes et divers immeubles dans le voisinage et accepta en 1422 une donation de terres à Kergayon en Kervignac, faite par Jénéquin Wyse. Elle fit, en 1429, un accord avec Guillaume de Baud, receveur héréditaire de l'abbaye à Languidic, et obtint en 1437 une ordonnance du duc pour le paiement de la rente de 200livres sur la recette d'Hennebont. 

Grâce au vicomte de Rohan, elle put reconstruire, en 1445, la chaussée du moulin de l'abbaye à travers le Blavet, à condition de ménager une ouverture pour le passage des poissons ; à la même condition elle put établir plus bas une autre digue.  En 1451, elle acquit par échange la terre de Saint-Eleran en Languidic, et mourut l’année suivante, regrettée de toute la communauté. Le grand sceau, dont elle se servait en 1431, la représente debout, tenant de la main gauche la crosse abbatiale.

7. Jeannc de Coetivy, élue en 1452, était soeur de Prigent, grand-amiral de France, et d'Alain, cardinal de Sainte-Praxède. Voulant faire des réparations à l’église et au monastère, elle sollicita l’union du prieuré de Lochrist à sa maison : ce que le Pape lui accorda, pour la durée de sa vie, par bulle du 1er mars 1453. Une seconde bulle du 15 juillet 1455 rendit cette union perpétuelle. Cette annexion, préparée par le cardinal de Coetivy et par le duc de Bretagne, valut à l’abbesse de la Joie le titre de prieure de Lochrist et le droit de recteur primitif de la paroisse de Saint-Gilles-Hennebont. Jeanne de Coetivy mourut sur la fin de 1468, et dès le 7 janvier suivant la prieure obtenait du duc François II la confirmation de l’union de Lochrist. Armes : Fascé d’or et de sable de 6 pièces.

8. Isabeau de Bellouan était abbesse de la Joie le 24 novembre 1469, suivant les registres de la chancellerie, et le 7 décembre suivant elle recevait une donation de terres situées à Kermario en Saint-Caradec. Armes : De sable à l'aigle éployée d’argent.

9. Amette de Kergroèzes, élue vers 1470, accepta, en 1475, le don des moulins du duc et de ses pêcheries à Lochrist, en diminution de 52 livres 4 sous de la rente due sur Hennebont, et demanda, en 1478, l’autorisation de faire un moulin à Sterbouest pour ses sujets de Riantec. Elle acheta un terrain à la Villejan en Pleugriffet, et consentit à l’échange d’immeubles situés à Kergaion, à Brandérion et à Saint-Eléran. Fatiguée du gouvernement de la maison, Amette résigna son titre, vers 1488, en faveur de sa nièce, Guillemette Rivallen, et ne mourut que quelques années après. Armes : Fascé d’argent et de sable de 6 pièces.

10. Guillemette Rivallen, rejetée par les visiteurs de l’ordre, le 2 mars 1491, et remplacée par Henriette du Val, élue canoniquement, réussit à se maintenir et obtint des lettres de protection de la duchesse Anne et de Maximilien d’Autriche.  Elle eut la douleur de voir, le 25 juillet 1510, un incendie dévorer l'église, la trésorerie, le chapitre, le dortoir, et une grande partie du cloître. En 1514, elle posa la première pierre de la belle église de Notre-Dame-de-Paradis à Hennebont, et donna une centaine de livres pour aider à la construction.  Guillemette mourut à la fin de 1519 ou au commencement de 1520. Armes : D’argent au chevron de gueules, accompagné de 3 quintefeuilles de même.

11. Marie Omnès, régulièrement élue en 1520, fit une transaction, en 1523, avec les religieux de Lanvaux, au sujet des pêcheries de Lochrist. Elle obtint, en 1527, une sentence de l’Officialité, qui reconnaissait ses droits sur Notre-Dame-de-Paradis, et faisait défense aux habitants de s’immiscer dans la perception et l’emploi des offrandes. Le Parlement confirma ce jugement en 1537. Elle vit réduire, en 1541, le nombre des notaires de sa juridiction à huit, fit serment de fidélité au roi en la même année, et mourut en 1545. Armes : Losangé d'argent et de sable, au ciboire d'or sur le tout.

12. Françoise Omnès était abbesse le 5 février 1516. En 1556, elle fit serment de fidélité au roi, en la Chambre des Comptes, et consentit un échange avec Yves Huby d'Hennebont. Elle fit un accord pour la rente de Pontcallec en 1561, exigea la rente de Rosnarho en 1571, et fit une transaction pour la rente de Pleugriffet en 1577. Elle rendit un aveu général des biens de la  communauté le 23 juin 1578, et mourut l’année suivante. Armes : Comme ci-dessus

13. Catherine de Carné fut élue le 25 juin 1579, confirmée par l’abbé de Citeaux le 9 juillet, bénite par l’évêque de Vannes le 29 juillet, et pourvue par le Pape le 15 octobre 1580. Pour payer les décimes extraordinaires au roi, elle emprunta en 1586 la somme de 99 écus de la soeur Françoise de Kermorvan, et lui céda en retour la jouissance viagère de deux tenues. Elle mourut d’apoplexie aux Montagnes, en Ploemeur, le 22 juin 1589, et fut inhumée à la Joie. Ses armes de famille étaient : D’or à deux fasces de gueules.

14. Françoise de Kermorvan, élue pour lui succéder, fut installée le 25 août 1589. Fut-elle confirmée par l’abbé de Cîteaux et par le Pape ? On l’ignore, car les registres des Insinuations ecclésiastiques de cette époque sont perdus. Elle se démit volontairement de sa charge en 1591 et ne mourut qu'en 1595. Armes : D’argent à la croix ancrée d’azur.

15. Catherine Geffroy, élue le 30 avril 1591, fit aussitôt réparer le cloître et refaire en 1592 le grand dortoir. Harcelée par la sénéchaussée et les habitants d'Hennebont, pour l'église de Notre-Dame-de-Paradis, elle fit reconnaître de nouveau ses droits en 1594 et 1601 ; elle permit toutefois d’y célébrer les offices paroissiaux, en attendant la construction d’une autre église, à la charge d’entretenir l’immeuble en bonne réparation. Elle mourut au commencement de 1605. Armes : D'argent à la fasce d'azur accompagnée de 3 étoiles de gueules, et une merlette d'azur.

16. Thomase de Rieux, fille de Guy Ier de Châteauneuf, nommée directement par le roi Henri IV, le 7 juin, pourvue par bulle du 12 septembre 1605, prit possession le 24 février 1606, et fut bénite à Nantes le 17 juin 1607. Elle fit serment de fidélité au roi en 1618, et obtint en 1620 et 1623 diverses sentences contre les boulangers et les habitants d'Hennebont, qui refusaient de faire moudre leurs grains à ses moulins.  Elle songea à résigner son abbaye en 1623, prit une coadjutrice en 1626, fit un aveu général des biens et droits de la communauté, et mourut le 18 novembre 1628, en laissant quelques dettes. Elle fut enterrée dans le choeur de son église.  Armes : D’azur à 9 besants d’or.

17. Louise Robert, fille d’un avocat de Paris et religieuse de Saint-Antoine, fut demandée en 1623, bénite comme coadjutrice par l’évêque de Vannes en 1626, et succéda en 1628. Elle obtint en 1629 une sentence de la sénéchaussée d'Hennebont condamnant le seigneur de Pontcallec à payer la rente due au monastère et tout l’arriéré, et une autre sentence en 1635 concernant son droit exclusif de recevoir les oblations faites à Notre-Dame-de-Paradis aux fêtes réservées. Elle obtint aussi un arrêt du parlement en 1641 pour défendre aux habitants d'Hennebont de bâtir malgré elle un Sanatorium dans le Bois-au-Duc. Elle mourut le 9 juillet 1547 et fut inhumée dans son église. Armes : D’argent à 3 pattes de griffon de sable.

18. Madeleine Le Coigneux, fille du président du parlement de Paris, nommée par le roi et instituée par le Pape, fut bénite le 15 août 1648 par Charles de Rosmadec, évêque de Vannes. Elle augmenta considérablement l’enclos réservé aux religieuses et eut à défendre ses droits de mouture et ses pêcheries du Blavet. Elle fit reconnaître par les commissaires du roi, en 1673, la juridiction féodale de l'abbaye, et rendit un aveu détaillé le 14 avril 1680. Après avoir procuré divers avantages à sa maison, elle mourut le 2 décembre 1688, et fut enterrée dans son église. Armes : D’azur à 3 porcs-épics d’or.

19. Susanne de Ploeuc du Tymeur, religieuse de la Joie, fut nommée par le roi et prit possession le 6 janvier 1689. Elle dut réclamer la rente de Pontcallec, et s'opposer à quelques prétentions de Madame du Bouetiez. C’est elle qui fit construire en 1693 la maison abbatiale. Elle accepta, la même année, la conversion en argent d’une rente en grains de Ménéac et la fit approuver par la communauté ; puis en 1696 elle fit un arrangement avec le seigneur du Rongoet pour un arriéré de rentes. Elle mourut le 7 octobre 1705. Armes : D'hermines à 3 chevrons de gueules.

20. Jeanne-Rogère de Blanchefort, prieure du Reconfort en Bourgogne, fut nommée par le roi abbesse de la Joie le 1er novembre 1705, pourvue par bulle du 2 janvier 1706, bénite à Paris par le cardinal de Noailles, et prit possession le 22 janvier. En 1711, elle fit un accord avec le président de Marhoeuf pour la pêche dans le Blavet, et en 1712 elle obtint une nouvelle condamnation contre les entreprises des paroissiens à Notre-Dame-de-Paradis. Son décès arriva le 4 mars 1719.

21. Antoinette-Jeanne du Fay d'Athyes de Cilly, religieuse de Montreuil, nommée à la Joie par le roi le 11 mars 1719, pourvue par la Pape le 18 avril, prit possession le 12 septembre suivant. Le principal acte de son gouvernement fut l’aveu général et détaillé qu’elle fit des biens et des droits du monastère, le 7 juin 1725. Cet aveu fut attaqué sur plusieurs points par le procureur du roi, et donna lieu à une série de procédures jusqu’à l’arrêt du parlement du 16 mai 1733. Mme de Cilly mourut à Rennes, le 12 août 1731, et fut enterrée dans l’abbaye de Saint-Georges de cette ville. Armes : D’argent semé de fleurs de lys de sable.

22. Marie-Guillemette de Langle, prieure de la Joie, fut nommée abbesse par le roi le 2 septembre 1731, pourvue par bulle du 20 novembre, et prit possession le 8 janvier 1732.  Elle ne fit que passer sur le siège abbatial, mourut le 13 novembre 1738 et fut inhumée dans son église. Armes : D’azur au sautoir d’or, accompagné de 4 billettes de même.

23. Thérèse du Bouetiez de Kerorguen, d’une famille d'Hennebont, professe de la Joie, nommée abbesse le 18 janvier 1739, pourvue le 25 février, prit possession le 14 avril. Elle rendit aveu au roi le 23 juin 1749, en reproduisant presque textuellement la déclaration du 17 juin 1725 ; mais un arrêt du Conseil d'Etat, du 20 avril 1750, supprima les droits de péage, prétendus par l'abbaye à Hennebont, Lochrist, Languidic et Kergohan. Elle mourut en 1756. Armes : D’azur à 2 fasces d’argent accompagnées de 6 besants d’or

24. Madame de Bertin, soeur de l’évêque de Vannes et religieuse du monastère de Coiroux, au diocèse de Limoges, fut nommée à l'abbaye de la Joie en 1756. Elle obtint, le 18 juillet 1761, un arrêt provisoire du parlement, renouvelant aux boulangers d'Hennebont l’obligation de porter à ses moulins tous les grains entrés chez eux. Elle résigna sa charge en 1766.

25. Marie-Perrine de Verdière, professe de la Joie, fut nommée abbesse par le roi le 26 janvier 1766, pourvue par le Pape le 19 février et prit possession le 30 avril suivant.  En vertu d’un édit du Mois de mai 1768, elle consentit avec sa communauté à payer une portion congrue de 500 livres au recteur d'Hennebont et de 200 livres à son curé, et garda en retour toutes les dîmes de la paroisse. En 1772, elle obtint enfin un arrêt définitif contre les boulangers récalcitrants. Elle donna sa démission en 1776, pour permuter avec la suivante, et mourut en 1778. Elle portait : De gueules 4 tourteaux ?

26. Madeleine-Clotilde de la Bourdonnage, abbesse de Saint-Sulpice, au diocèse de Rennes, depuis 1755, fut nommée à la Joie le 17 novembre. 1776, pourvue le 17 décembre et prit possession le 6 février 1777. Elle gouvernait tranquillement sa communauté quand la Révolution vint tout bouleverser. En 1790, elle déclara, ainsi que toutes ses religieuses, vouloir persévérer dans son état ; elle n’en fut pas moins expulsée avec elles à la fin de septembre 1792. La maison conventuelle, avec ses dépendances immédiates, fut vendue le 13 décembre suivant, pour 81.000 livres. Ainsi finit un établissement qui avait duré 352 ans, sous 26 abbesses successives. Armes : De gueules à 3 bourdons d’argent, 2, 1.

 

III. RELIGIEUSES

En ce qui concerne les religieuses de la Joie, il est impossible d’en donner une liste complète : les registres des professions sont tous égarés ou perdus. Voici quelques noms recueillis çà et là.

Soeur Sibille de Boisgency, 1260, 1ère abbesse, morte en 1312.

Soeur Jeanne de Bizien, 2ème abbesse en 1312, morte en 1339.

Soeur Jeanne Amaury, 3ème abbesse en 1339, morte vers 1369.

Soeur Amice de Kergroèzes, citée en 1349, morte en 1363.

Soeur Jeanne de Pestivien, mentionnée en 1363 , morte en 1367.

Soeur Jeanne de Chasteaugal, 1360, 4ème abbesse en 1369.

Soeur Plésou Piques, novice en 1371.

Soeur Elisabeth de Kermadio, mentionnée en 1374.

Soeur Yolande de Navalloet, citée également en 1374.

Soeur Adelice Le Barbu, 1375, 5ème abbesse en 1390, morte en 1416.

 

XVème siècle

Soeur Marguerite Le Barbu, 1400, 6ème abbesse, 1416-1452.

Soeur Marguerite de Gouyon, mentionnée en 1440 et 1450.

Soeur Adelice de Coetnizan, citée en 1440 et 1452.

Soeur Jeanne de Coetivy, 1440, 7ème abbesse 1452-1468.

Soeur Catherine de Kerlois, 1440, prieure en 1451.

Soeur Louise da Val, mentionnée en 1451.

Soeur Isabeau I de Bellouan, 1451, 8ème abbesse, 1469-1470.

Soeur Havoise Le Barbu, vivante en 1451.

Soeur Amette de Kergroèzes, 1451, 9ème abbesse, 1470-1488.

Soeur Jéhanne de St-Goueznou, 1451, prieure 1469-1483.

Soeur Margilie de Ploeuc, 14151, prieure 1483.

Soeur Catherine Le Baillif, mentionnée en 1451.

Soeur Marguerite de Plusquellec, 1475-1483.

Soeur Jeanne Le Parisy, mentionnée en 1475 et 1483.

Soeur Marie Droniou, citée en 1475 et 1483.

Soeur Marie Avalleuc, citée en 1475, 1483 et 1491.

Soeur Guillemette Rivallen, 1475, 10ème abbesse, 1488-1520.

Soeur Jeanne de Lopriac, mentionnée en 1475 et 1510.

Soeur Agathe de Quilbignon, citée en 1475 et 1527.

Soeur Henriette du Val, 1475, élue en 1491, démissionnaire.

Soeur Marguerite Plonéour, 1465, prieure 1479.

Soeur Isabeau II de Bellouan, citée en 1475 et 1483.

Soeur Agathe de Kerguéhennec, mentionnée en 1483 et 1510.

Soeur Jeanne de la Marche, vivante en 1483 et 1510.

Soeur Isabeau de Kerguiris, citée en 1483 et 1527.

Soeur Catherine de Quénécan, mentionnée en 1483.

 

XVIème siècle

Soeur Jeanne Gouzillon, mentionnée en 1510.

Soeur Jeanne Gombaud, citée en 1510 et 1520.

Soeur Adelice Foucault, 1510, prieure 1527.

Soeur Marie Omnès, 1540, 11ème abbesse, 1520-1545.

Soeur Agathe de Kerguiziau, vivante en 1510.

Soeur Elisabeth de Coethirgoas, citée en 1510.

Soeur Catherine do Kerméno, mentionnée en 1510.

Soeur Jeanne Le Molléan, vivante en 1510.

Soeur Jacquette de la Court, citée en 1510 et 1527.

Soeur Perronnelle de la Couldraye, en 1527.

Soeur Louise de Kergrois, mentionnée en 1527.

Soeur Gilette de Malestroit, citée en 1527.

Soeur Françoise de Malestroit, aussi en 1527.

Soeur Adelice du Dresnay, mentionnée en 1527.

Soeur Marguerite de. Kernevenoy, citée en 1527.

Soeur Catherine Lesmars, vivante en 1527.

Soeur Catherine de Kermorvan, citée en 1527.

Soeur Hélène Le Flo, mentionnée en 1527 et 1578.

Soeur Marie de Stanghingant, en 1527, 1578 et 1586.

Soeur Guillemette Kerseauf, vivante en 1527.

Soeur Françoise Omnès, 1535, 12ème abbesse, 1546-1579.

Soeur Anne de Quénecquivillic, 1560, prieure 1578 et 1586.

Soeur Catherine de Carné, 1578, 13ème abbesse, 1579-1589.

Soeur Françoise de Kermorvan, 1578, 14ème abbesse, 1589-1591.

Soeur Catherine de Kerguizec, citée eu 1578 et 1586.

Soeur Julienne de Chefdubois, aussi en 1578 et 1586.

Soeur Isabeau de Keroulas, mentionnée en 1578.

Soeur Susanne Brullé, citée en 1578 et 1586.

Soeur Marie Bino, mentionnée en 1578 et 1586.

Soeur Isabeau de Quélen, vivante en 1578 et 1586.

Soeur Catherine Geffroy, 1578, 15ème abbesse, 1591-1605.

Soeur Catherine du Glas, mentionnée en 1578 et 1606.

Soeur Marguerite de Kervenozael, 1586, prieure 1606.

Soeur Amice Eudoux, mentionnée en 1586 et 1606.

Soeur Marguerite de Chefdubois, vivante en 1586.

Soeur Jeanne de la Tour, citée en 1586.

Soeur Claude du Couédic, également en 1586.

Soeur Jeanne de Penfeuteniou, vivante en 1586.

 

XVIIème siècle

Soeur Thomase de Rieux, 1600, 16ème abbesse de 1605 à 1628.

Soeur Aliette Le Picard, mentionnée en 1606.

Soeur Catherine Le Pavec, citée aussi en 1606.

Soeur Renée de Kerguiziau, vivante en 1606 et 1620.

Soeur Jeanne Le Yar, mentionnée en 1606.

Soeur Jeanne Jourdain, citée également en 1606.

Soeur Perronnelle Goayre, vivante en 1606 et 1620.

Soeur Jacquette Goayre, citée aussi en 1606 et 1620.

Soeur Jacqueline Brandin, mentionnée en 1606.

Soeur Jacquette du Bouëtiez, citée aussi en 1606.

Soeur Charlotte de Masle, vivante aussi en 1606.

Soeur Jeanne Alinel, mentionnée en 1620.

Soeur Renée N...., citée également en 1620.

Soeur Susanne de Vollant, vivante en 1620.

Soeur Elisabeth de Jégado, mentionnée en 1620.

Soeur Louise Robert, 1620, 17ème abbesse de 1628 à 1647.

Soenr Julienne Menach, mentionnée en 1620.

Soeur Julienne de Beaulic, citée aussi en 1620.

Soeur Madeleine Le Coigneux, 18ème abbesse, 1648-1688. 

Au temps de cette abbesse se trouve une lacune considérable dans les noms des soeurs. De Plus, la division régnait alors dans la communauté. Voici ce qu’en dit dom Lobineau, dans la vie de Mme du Houx, p. 500 : « La dissension regnoit depuis longtemps a l'abbaie de la Joie. Les évêques, les lieutenants généraux de la province, les membres du parlement s’étoient inutilement emploïez pour y mettre la paix. Ce grand ouvrage était réservé à Mme du Houx. Elle partit de Rennes le 4 décembre de l’an 1659, et avant que de rien commencer elle se mit en retraite à l'abbaïe. Après cela, assistée des conseils du P. Huby, jésuite, qui se trouva au même lieu, elle emploïa de si vives persuasions auprès des religieuses, qu’elles ne pensèrent plus qu’à se réunir. Elles s’assemblèrent dans une grande salle, par où devoit passer leur abbesse. Dès qu’elle parut, toutes se jetèrent à ses pieds, et lui protestèrent qu’elles vouloient désormais vivre dans une parfaite union. Mme du Houx, qui accompagnoit l’abbesse, leur parla avec son éloquence ordinaire, et toutes, sans en excepter une seule, lui répondirent qu’elles s’en remettoient entièrement à sa prudence pour tout ce qu’elle ordonneroit. Alors M me du Houx dressa un acte, qu’elles signèrent sur le livre des Evangiles. Ensuite on chanta le Te Deum, tandis que les religieuses s’embrassoient les unes les autres pour marque d’une éternelle réconciliation.  Après cette cérémonie elles entrèrent en retraite, où Mme du Houx leur rendit de très grands services ; puis elle prit congé de la communauté où elle avait demeuré deux mois ». On ignore les noms des religieuses mêlées à cette affaire.

Plus tard on trouve les noms suivants.

Soeur Susanne de Ploeuc du Tymeur, prieure 1684, 19ème abbesse.

Soeur Anne-Honorée de Ploeuc, en 1684 et 1693.

Soeur Catherine Le Séneschal, mentionnée en 1684.

Soeur Françoise du Port, citée en 1684 et 1693.

Soeur Catherine Le Febvre de la Silandaye, 1684, 1719.

Soeur Geneviève de Lopriac de Kermasonnet, 1682, 1719.

Soeur Julienne Pezron, d'Hennebont, 1684.

Soeur Elisabeth Sachot, citée en 1684 et 1693.

Soeur Marguerite-Marie Le Trancher, 1684, 1693.

Soeur Renée Hauys de Kerveret, 1684, 1693.

Soeur Charlotte de Montgogué, 1684, 1693, prieure 1712, 1719.

Soeur Julienne du Bois, mentionnée en 1693.

Soeur Renée de Coniac, citée également en 1693.

Soeur Anne de Robien, rencontrée en 1693.

Soeur Susanne de Poulpiquet, citée en 1693.

Soeur Marie Pezron, 1693, prieure 1711.

Soeur Marie Le Gouvello, mentionnée en 1693 et 1711. 

Soeur Catherine-Gabrielle de Lopriac de Coetmadeuc, 1693, 1719. 

Soeur Catherine-Gabrielle Le Veyer de la Porteneuve, 1693, 1791.

Soeur Jacquette Boutouillic, mentionnée en 1693.

Soeur Renée de Pluvié, rencontrée en 1693.

Soeur Thomase du Lèziart, également en 1693.

Soeur Louise-Isabelle Le Mintier, citée en 1693.

Soeur Michelle Jubin de Kervily, en 1693 et 1712.

Soeur Thérèse de Coniac, mentionnée en 1693 et 1712.

Soeur Angélique Eudo de Kerdron, en 1693 et 1719.

Soeur Madeleine Eudo de Kerdron, citée en 1693.

Soeur Jeanne-Rogère de Blanchefort, 20ème abbesse, 1705-1719.

Soeur Antoinette du Fay de Cilly, 21ème abbesse, 1719-1731.

Soeur Marie-Guillemette de Langle, 1693, 22ème abbesse 1731-1738.

Soeur Françoise Le Flô, mentionnée en 1693.

Soeur Marguerite de Villelongue, citée en 1693.

Soeur Anne de Cleguenec de Meslien, en 1693 et 1719.

Soeur Marie des Portes de St-Nudec, en 1693 et 1719.

Soeur Louise-Marie de Beauvais, citée en 1693 et 1719.

Soeur Marie de la Tronchaye, mentionnée en 1693 et 1711.

Soeur Renée de Sérent, mentionnée en 1693, 1712 et 1719.

Soeur Vincente Pellissier, citée également en 1693 et 1719.

Soeur Thérèse du Léziart, mentionnée en 1693, 1712 et 1719.

Soeur Renée du Léziart, citée aux mêmes dates.

Soeur Hiéronyme Rogon de Coisquet, aux mêmes dates.

 

XVIIIème siècle

Soeur Hélène Des Cartes, mentionnée en 1712 et 1719.

Soeur Rose de La Mare-Alain, citée aux mêmes dates.

Soeur Marie Le Flô, mentionnée aux mêmes dates.

Soeur Renée Rogier du Crévy, encore aux mêmes dates.

Soeur Anne Rogier de Villeneuve, toujours aux mêmes dates.

Soeur Marie Thomé de Keridec, mentionnée en 1712.

Soeur Cunégonde de Maillé de Carman, en 1712 et 1719.

Soeur Marie de Talhoet de Sévérac, : aux mêmes dates.

Soeur Thérèse du Bouétiez de Kerorguen, 1712, 23ème abbesse.

Soeur Charlotte de Lopriac de la Haute-Touche, en 1712 et 1719.

Soeur Louise de Guer de Pontcallec, mentionnée en 1712.

Soeur Marie-Anne de Kerpaen de Kersallo, 1742, prieure 1769.

Soeur Louise de la Pierre de Frémeur, citée en 1712 et 1719.

Soeur Jeanne de Keraly du Fau, mentionnée aux mêmes dates.

Soeur Marie-Anne de Tharsy, citée en 1712.

Soeur Marie-Anne du Bahuno de Kerolain, en 1712.

Soeur Louise de Tinteniac de Kymerch, en 1719.

Soeur Marie-Anne de Talhoet de la Grationnaye , 1719-1769.

Soeur Françoise Geslin de la Villesolon, en 1719.

Soeur Anne Le Mayer, mentionnée en 1719.

Soeur Jeanne de Perrien, citée en 1719 et 1769.

------ Ici se trouve une nouvelle lacune. -----

Soeur N... de Bertin, 24ème abbesse, 1756-1766.

Soeur Marie-Perrine de Verdiére, 25ème abbesse, 1766-1776.

Soeur Madeleine-Clotilde de la Bourdonnaye , 26ème abbesse.

Soeur Thérèse Le Mayer du Fresque, 1769.

Soeur Marguerite Guyomar, 1769.

Soeur Madeleine Ladu de Vieuxchamp, 1769.

Soeur Hélène-Monique de Langle, 1769, expulsée en 1792.

Soeur Antoinette de Lee, 1769, expulsée en 1792.

Soeur Sainte Le Métaer de Hourmelin, 1769, expulsée en 1792.

Soeur Marie-Jeanne Le Meslier de Longueville, 1769, expulsée en 1792.

Soeur Marie-Joséphine Le Mintier, 1769.

Soeur Marie-Rose Billette de Villeroehe, 1769, ex pulsée en 1792.

Soeur Servanne Guinguené de Champvallon, 1769.

Soeur Julienne-Françoise Guinguené de Champvallon , 1769 , expulsée en 1792.

Soeur Charlotte de Lantivy de Kerveno, 1769, morte.

Soeur Catherine Langlais de Prémorvant, 1769, morte.

Soeur Marie-Joséphine de Feydeau, 1769, morte.

Soeur Anne-Thérèse Boudin de Lannuguy, 1769, expulsée en 1792.

Soeur Jeanne-Geneviève du Bouilly, 1769, expulsée en 1792.

Soeur Florence Hémery, expulsée en 1792.

Soeur Antoinette Gardye, expulsée en 1792.

Soeur Marie J. F. Hervé, expulsée en 1792.

Soeur Susanne L. A. Hannier, expulsée en 1792 .

Soeur Thérèse Menégal, expulsée en 1792.

Soeur Marie-Joseph Bouczo, expulsée en 1792.

Soeur Françoise-Adelaïde Le Levroux, expulsée en 1792.

Soeur Angélique Richard de la Marre, expulsée en 1792. 

Soeur Louise de Douville, expulsée en 1792.

Soeur Charlotte de Douville, expulsée en 1792.

Soeur Jeanne Ch. de Keruzec, expulsée en 1792.

Soeur Marie Le Rouxeau de St-Dridant, expulsée en 1792.

Soeur Thérèse-Eléonore Even, expulsée en 1792.

Soeur Marie-Cécile 0llivier, expulsée en 1792.

 

Aux religieuses de choeur, il faut ajouter les soeurs converses.

Voici les noms des sept qui vivaient en 1790.

Soeur Marie Raude, 85 ans, morte le 1er janvier 1792. 

Soeur Anne Vieuxloup, 73 ans, morte le 20 janvier 1792.

Soeur Jeanne Eon, 64 ans.

Soeur Aimée-Scolastique Rio, 57 ans.

Soeur Louise-Jacquette Le Tallec, 52 ans.

Soeur Anne-Madeleine Le Rebours, 56 ans, sortie en 1791.

Soeur Marie-Anne Le Meur, 52 ans.

Le nombre des religieuses de la Joie a varié suivant les temps. Aux XVème et au XVIème siècle on comptait en chapitre au moins 16 religieuses. En 1693, il y en avait 37 ; en 1719, 34 ; et en 1790, 23.

A ces nombres il faut ajouter les religieuses, absentes du chapitre pour maladie ou autre cause, ainsi que les  novices et les soeurs converses, qui ne prenaient aucune part à l'administration des affaires.

 

IV. MONASTÈRE

Après les religieuses vient le monastère : c’est l’ordre naturel. Il ne nous reste aucune description du monastère primitif, bâti au XIIIème siècle mais en tenant compte du plan généralement suivi dans les constructions monastiques, notamment à Prières et à Lanvaux, on peut reconstituer l’abbaye de la Joie. Qu’on se représente un cloître carré, borné au nord par l'église, à l'est, au sud et à l'ouest, par trois corps de logis, le tout en style de l'époque. (Voir le plan).

Hennebont : Abbaye Notre-Dame de la Joie

Hennebont : Abbaye Notre-Dame de la Joie

 

L’église, en forme de croix latine, avait son sanctuaire à l’est, avec l’autel Majeur et une grande fenêtre au-dessus.  La chapelle du nord était ouverte au public, celle du sud pouvait à la rigueur servir de sacristie. L'inter-transept était surmonté d’un petit clocher. La nef était en majeure partie, sinon en totalité, réservée aux religieuses : c’était leur choeur, deux rangées de stalles longeaient les murs.

Les trois corps de logis renfermaient : à l'est la salle capitulaire, au midi le réfectoire, à l'ouest la cuisine, sans compter d’autres pièces ; au premier étage se trouvaient le dortoir des religieuses, la lingerie et divers autres appartements. Au-dessus de vastes greniers.

Il y avait de plus, ça et là dans l'enclos, divers bâtiments accessoires servant d’étables, de buanderie, de grange ou de décharge. A la porte de l’enclos, du côté du Blavet, à gauche en entrant, se voit encore le logement des deux confesseurs cisterciens des religieuses. Cet édifice est actuellement ce qu’il y a de plus ancien à la Joie. Le rez-de-chaussée offre une corniche composée de consoles superposées, comme les machicoulis du XIVème ou XVème siècle ; le premier étage, plus récent, est daté de 1669, et présente un balcon avec quatre colonnes ; le toit est brisé en mansarde, et une tourelle ronde décore l’uni des angles de la maison.

Outre le bâtiments, l’enclos renfermait une fontaine, un vivier, des jardins, des vergers et des arbres de haute futaie ; sa contenance était de 15 journaux environ.

Les bâtiments primitifs subirent nécessairement diverses modifications dans le cours des siècles : les uns se ruinèrent et durent être relevés ; d’autres furent détruits par des incendies. Ainsi, le 25 juillet 1510, un grand incendie, comme on l'a déjà noté, dévora l’église, la sacristie, le chapitre, le dortoir au-dessus, et une grande partie du cloître. La communauté se mit aussitôt en mesure, pour restaurer les murs dégradés et refaire les charpentes et les toitures. D’après quelques fragments de registre, on voit l’abbesse Guillemette Rivallen faire marché, en 1512, avec « Denys Silvestre, couvreulx de Kemperlé, pour couvrir le dortouer, le tour du clouestre et le revestouer ». L’église avait été précédemment réparée et recouverte ; il ne restait plus que les verrières à refaire.

Le 21 février 1512 (N. S. 1513), marché fut fait avec Pierre Bodinaye, de Vannes, et Jehan Monternault, pour la vitrerie de l’église, moyennant la somme de 97 livres. « La grant vitre du grant aultier sera de verre, et au soufflet (tympan) y aura un écusson des armes du roy, et deux aultres escussons, l’un de Bretaigne, et l’aultre my-partie de France et de Bretaigne. Item, au carré de la dite vitre y aura ung panneau, tenant troys piez de hault, où y aura une ymaige du Cruxiffy, et le fond du panneau sera de verre de couleur oupvré. Es deux panneaux des deux costés du dit Cruxiffy, seront en l’un l’ymaige de Nostre-Dame, et en l’aultre l’ymaige de Mgr Saint Jehan, et les fonds seront de voyre oupvré. Item, en ung aultre panneau, au dessoubz du Cruxiffy, y aura une ymaige de Nostre-Dame de Joye, assise en une chaire ; ès panneaux vis-à-vis y aura les présentations des deux fondateurs, ainsin qu’ils estoint en l’ancienne vitre, armoyées de leurs armes. Item, aux troys panneaux d’ambas, y aura en celluy du mylieu une ymaige de N.-D. de Pitié ; en ung costé la présentation de Madame (l’abbesse) par Saint-Guillaume, et en l’aultre feu Messire (de Guébriant, recteur) de Gourin, présenté par Saint-Christoffle ; en l’archet du mylieu y aura un écusson des armes de Madame, et autour des panneaux y aura des bordures de feillages. Item, la vitre de l’aultre pignon sera de verre blanc, avec ung escusson des armes du roy et de la royne, ung escusson du cardinal d’Avignon (Coetivy) et ung aultre de Madame. Item, les cinq vitres qui sont à la longère de l’église, du côté devers la cour, seront de verre blanc, avecques les armes du roy et de la royne et de Madame en chacune. Item, les trois petites fenestres haultes de l’aultre partie de l’église seront pareillement de verre blanc, avec les mesmes escussons en chacune ».

Enfin, le 30 juin 1513, fut passé un autre marché pour vitrer le réfectoire, le chapitre et le dortoir, au prix de onze livres et cinq sols.

En 1589, commencèrent en Bretagne les troubles de la Ligue. Les religieuses de la Joie, craignant le pillage de leur maison, enfouirent dans le bois de l'abbaye plusieurs croix d’argent, des ornements précieux et diverses pièces d’or et d’argent. La guerre s’étant prolongée, on perdit de vue l’endroit précis de la cachette, mais le souvenir du trésor se conserva fidèlement dans la maison. En 1677, près d’un siècle après l’enfouissement, des particuliers trouvèrent par hasard ce trésor et se le partagèrent. La communauté en ayant eu connaissance et pouvant prouver ses droits de propriété, s’adressa directement au roi Louis XIV, et celui-ci, renonçant à sort droit éventuel d’épaves, lui permit de poursuivre en justice les détenteurs.

En 1592, l’abbesse Catherine Geffroy dut réparer le cloître et refaire le grand, dortoir.

Vers 1650, l’abbesse Madeleine Le Coigneux, voulant faire plaisir à ses religieuses en augmentant l’étendue de leur clôture, fit entourer de murs un vaste terrain situé au midi de l’enclos primitif et le fit annexer à la clôture régulière. Il y avait là une grande prairie, un verger et des terres labourables. Les deux enclos ainsi réunis contenaient environ 40 journaux de terre.

A l’est de l’enclos, depuis Hennebont jusqu’au Blavet, s’étendait une immense propriété, appelée jadis le Parc-du-Duc, et contenant environ 360 journaux de terre. Les religieuses y possédaient une belle forêt et sept métairies, appelées les Granges et la Bergerie. Le tout était en dehors de la clôture régulière.

A ces biens temporels vinrent s’ajouter en 1680 des biens d’un autre ordre ; l’église du monastère s’enrichit des reliques de saint Clément Alacrius, martyr. En 1678, on avait trouvé dans le cimetière de Cyriaque à Rome les corps de saint Clément Alacrius et de sainte Dorothée, sa femme, avec l’inscription suivante Clemens Alacrius et Dorothea ejus uxor in pace et pro Christo. Ils avaient donc souffert le martyre pour le Christ. Le Père Clément de Ploërmel, provincial des Capucins de Bretagne, se trouvant à Rome au chapitre général de son ordre, au moment de la découverte, obtint du pape le corps de saint Clément Alacrius, avec pouvoir de l’exposer à la vénération des fidèles et de le donner à telle église ou chapelle qu’il lui plairait de choisir.

« En vertu de ce pouvoir, dit-il, dans une lettre du 9 septembre 1679, nous avons donné et transporté, donnons et transportons, par ces présentes, le susdit corps saint à Madame l’abbesse de la Joye et à sa communauté, pour estre exposé à la vénération des fidèles dans l’église de la dicte abbaye, après qu’elles en auront obtenu la permission de Mgr l'évesque de Vannes, ou d'un grand vicaire, luy ayant au préalable représenté l’authentique avec la boeste où est enfermé le dit corps, pour en faire l’ouverture et les vérifications en tel cas requises »

Les formalités remplies, le reliquaire fut transporté à Hennebont, et l’on se prépara pour la translation solennelle à l’abbaye. Voici la relation manuscrite d’un témoin, M. Julien Caignart, de Brangolo :

« Le 14 juillet 1680, fut faite la translation des reliques de saint Clément Alacrius, au couvent de l'abbaye de la Joye, avec grande pompe et magnificence. Touttes les compagnies de la ville estoient soubz les armes. On alla à une heure d’après midy prendre les reliques aux Capucins, de là on alla à Nostre-Dame, puis chez les PP. Carmes, et de là à l'abbaye. Estant rendus là, on chanta les vespres en musique, après quoy le R. P. François de Lannion, capucin, prescha et fit admirablement bien l'éloge du saint ; après le sermon, salut du Saint-Sacrement. Après quoy on partit processionnellement  mettre le feu dans le bucher, qui estoit au milieu de la rivière, et qui estoit très beau. Le vicaire de Hennebont, nommé Yves Coquet, le séneschal (Mathurin du Vergier de Menéguen), et l’alloué (Joseph Le Milloch de Brangolo), allèrent en bateau, avecque chaque son flambeau ardent à la main, mettre le feu dans le bucher. Pendant que le feu y estoit, on lança des fuzées admirables ; et aussi on fit jouer le canon et les boîtes pendant toute la solanité. Toutes les paroisses à la ronde furent processionnellement rendre leurs hommages au grand saint ; elles alloient lever leurs processions à Nostre Dame d'Hennebont, et quand elles arrivoient prés le boys de l'abbaye, les violons et grands tambours venoient au devant, pour les conduire jusque dans l’église, pendant lequel temps on tiroit des boites incessamment ».

Le corps de saint Clément Alacrius fut conservé à l’abbaye de la Joie jusqu’à la révolution française. Sauvé alors de la destruction et transporté à Hennebont, il est (en 1902) religieusement gardé dans la chapelle de l’hôpital de cette ville, avec ses titres authentiques.

A l’époque de cette translation, la communauté de la Joie était prospère et les vocations étaient nombreuses. Le logement devenant insuffisant, l’abbesse Suzanne de Ploeuc fit construite en 1692 et 1693 un nouveau bâtiment, dans lequel elle put s’installer avec plusieurs autres religieuses.  C’est l’édifice qu’on appelle encore aujourd’hui l'abbatiale. Il consiste en trois corps de logis, formant les trois côtés d’un carré (voir le plan, lettre C) En avant, vers le couchant, s’étendait le jardin particulier de l’abbesse.

Entre la maison abbatiale et l’entrée principale de l’église, on construisit un portique, et au-dessus une salle capitulaire qui servait de trait d’union entre les deux parties du monastère. C’est grâce à ce trait d’union, qui existait encore en 1835, lors de la confection du cadastre d'Hennebont, qu’on a pu restituer sur le papier l’axe de l’église et l’emplacement du couvent ancien. Les mesures exactes de ces deux édifices, détruits et rasés depuis la Révolution, sont aujourd’hui.  inconnues, mais leur emplacement est certain. C’est dans l’église qu’étaient enterrées les abbesses : les simples religieuses étaient ordinairement inhumées dans un cimetière spécial situé entre le sanctuaire de l’église et le mur de clôture.

Quant à la superficie du terrain, elle a subi des modifications, au gré des propriétaires successifs. Le cadastre donne la délimitation des pièces de terre en 1835. Une trentaine d’années plus tard, en 1864, l’ancienne distribution a été complètement changée, pour faire place à un parc anglais.  On n’a conservé que les édifices et quelques vieux arbres de l’allée grandiose qui traversait l’enclos du nord au sud. 

 

V. FIEF

Comme l'abbaye de Prières, celle de la Joie eut aussi une juridiction temporelle sur son territoire et sur les habitants qui l’occupaient : c’était la concession que faisaient généralement les ducs de Bretagne aux établissements religieux fondés par eux.

Le noyau de ce fief ne comprit d’abord que l'emplacement du monastère et le parc donné par le duc fondateur ; dans la suite il s’étendit considérablement par les acquisitions de métairies et de tenues dans les paroisses de Saint-Gilles-Hennebont, Languidic, Merlevenez, Riantec, Saint-Caradec, etc ...

Les hommes de ces territoires devaient payer des chefs-rentes à l'abbaye, obéir à sa justice et suivre ses moulins et ses fours. De son côté, l'abbesse devait au duc foi et hommage, prière et oraison.

Un aveu du 7 juin 1725 mentionne, parmi les droits des religieuses, « la jurisdiction de l'abbaye, qu’elles sont en droit et possession de temps immémorial de faire exercer en titre de haute et basse justice, sur toutes et chacune leurs terres, et sur tous leurs sujets et vassaux, tant en fief qu’en domaines congéables, et autres tenans biens d'icelles ; — et la tenir exercer en l’auditoire royal , d'Hennebont, après l'audience de la juridiction royale, par sénéchal, alloué et lieutenant, procureur d’office et greffier, avec droit d’y nommer tel nombre de procureurs, notaires et sergents qu’il est nécessaire pour le service de la dite juridiction ; — elles sont aussi en droit et possession d’en faire tenir les plaids au bourg de Lochrist en la paroisse de Saint-Gilles, au bourg de Languidic, en celuy de Merlevenez, et ailleurs on s’étendent les fiefs de la dite abbesse. Au milieu du parc et enclos du duc est le patibulaire à trois piliers de la juridiction de la dite abbaye ; dans lequel parc et sur la rue de Poulhallec est situé le four banal de la dite abbaye ». (La Joie. H. Original parchemin)

Cette juridiction féodale n’était pas une usurpation, comme le prouve suffisamment l’acte suivant de 1673 :

« Entre le procureur général du roy en la Chambre royalle des Domaines establye à Rennes, demandeur, d’une part, et dame Magdelaine Le Coigneux, abbesse de l’abbaye de Notre-Dame de la Joye, deffenderesse, d’autre part ;

Veu par la d. Chambre royalle l’édit de Sa Majesté du mois de novembre 1672, portant entre autres choses qu’il serait procédé à la recherche des justices usurpées par les particuliers et communautez, dans l’estendue de la province et duché de Bretagne...

Veu un acte du 29 (?) juin 1310, passé par la jurisdiction de l’abbaye de la Joaye, entre l’abbesse du d. lieu et le sieur de Guergelin ; — Trois procès des années 1334, 1368, 1397, qui sont retraits d’héritages soubz la mouvance de la jurisdiction de la d. abbaye ; — Un adveu fourny par le seigneur de Talhoet aux officiers de la mesme abbaye ; — Trois autres pièces, par lesquelles il s’apprend que dans la d. abbaye il y a droit de jurisdiction sur les subjects et estagers en dépendans, dattées des 12 et 24 janvier 1474 et 5 décembre 1477 ; — Seize pièces, qui sont adveux rendus aux officiers de la d. jurisdition par les seigneurs de Guergelin, de Keroualan, de Kerveno, de Kerlivio et de Kerguenaudy, des années 1410 à 1664.

Quatre aveux du temporel de la d. abbaye, renduz au roi en sa Chambre des comptes, le 23 juin 1578, 13 juin 1583, 5 mars 1627 et 5 may 1630, dans lesquels les abbesses s’inféodent du droit de haute, moyenne et basse justice sur leurs hommes et subjects, et cinq arrestz de présentation et réception d’iceux adveux ; — Quatre cahiers d'hommages et pledz généraux de la d. juridiction, et trais anciens registres du greffe d’icelle, des années 1561, 1615, 1633, 1635 ; — Douze pièces de procédures faites et passées en la d. jurisdiction en datte des années 1584, 1585, 1587 ; Une sentence de mort contre un particulier accuzé de vol en 1583 ; Un bail de la conduite d’un homme condamné à mort par la d. jurisdiction ; — Un arrest rendu en conséquence, qui le condamne aux gallères perpétuelles ; — Un règlement fait par les commissaires du roy en l’an 1541, qui fixèrent le nombre des notaires d’icelle à huit ; Sept pièces, qui sont sentences de réception de sêneschal de la d. jurisdiction ; — La Chambre a maintenu et conservé la d. Le Coigneux au droit et possession de haute, moyenne et basse justice, dans son abbaye de la Joye, fiefs et bailliages en dependans, conformément à ses tiltres et adveuz cy-dessus, sans qu’elle puisse faire exercer la dite justice sur autres fiefs que ceux mentionnez ausd. adveuz, faisant deffenses à toutes personnes de l’y troubler ny empescher, à peine de tous dépens, domages et interrests. Faict en la d. Chambre royalle à Rennes le 30 décembre 1673 — Signé : Bodier » (La Joie H. Original parchemin).

Une sentence de mort contre un particulier accuzé de vol en 1583 ; Un bail de la conduite d’un homme condamné à mort par la d. jurisdiction ; — Un arrest rendu en conséquence, qui le condamne aux gallères perpétuelles ; — Un règlement fait par les commissaires du roy en l’an 1541, qui fixèrent le nombre des notaires d’icelle à huit ; Sept pièces, qui sont sentences de réception de sêneschal de la d. jurisdiction ; — La Chambre a maintenu et conservé la d. Le Coigneux au droit et possession de haute, moyenne et basse justice, dans son abbaye de la Joye, fiefs et bailliages en dependans, conformément à ses tiltres et adveuz cy-dessus , sans qu’elle puisse faire exercer la dite justice sur autres fiefs que ceux mentionnez ausd. adveuz, faisant deffenses à toutes personnes de l’y troubler ny empescher, à peine de tous dépens, domages et interrests. Faict en la d. Chambre royalle à Rennes le 30 décembre 1673 — Signé : Bodier » (La Joie H. Original parchemin).

La condamnation à mort, mentionnée ci-dessus, existe encore aux archives de l'abbaye. En voici le texte, qui n’est pas dépourvu d’intérêt : « Veu par nous Jacques de Lys, escuier, sieur du Tertre, conseiller du roy, lieutenant général du prévost de méssieurs les mareschaulx de Bretaigne, le proceix criminellement intenté en la juridiction de l'abbaye de Notre-Dame de la Joye près Hennebond instant le procureur du roy en icelle, et noble homme Jacques de Stanghingant, sieur de Kermario, partye adhérée, à l’encontre de Jean Jaffrézo, aultrement Bras, prisonnier et accusé d’avoir, en aide d’autres ses complices, rompu et brisé une fenestre au derrière de la maison de Kermario, la nuit du jeudy absolud, septiesme jour d’apvril dernier, et par icelle entré en une chambre, et en icelle avoir vollé et brigandé plusieurs biens meubles à la valeur de deux centz escuz, partyes des d. meubles describez au d. proceix ; enquestes faictes, interrogations et responses, confession du d.  prisonnier, recolemens et confrontemens de tesmoigns, procès-verbal du seneschal de la d. juridiction de l’abbaye, par lequel conste des d. volleries et fondrementz de maison.  ensemble le mauvais renom du d. prévenu, conclusion diffinitiffve prinse par la partye adhérée et du procureur de la d. abbaye, le prévenu ouy en présence du Conseil, le tout considéré ; 

Nous, avecque l'advis et oppinyon de MM. les séneschal et alloué de la juridiction royalle de Henbond et aultres juges et advocatz en nombre, suivant l’ordonnance, avons déclaré et déclarons le d. Jean Jaffrezo deuement et suffizamment atteint et convaincu de la d. vollerie el fondrement de maison pour réparation de quoy l’avons condempné et condempnons estre prins par l’exécuteur criminel des prisons royalles du d. Henhond, les mains liées, la corde au col, conduict et mené à la justice patibulaire de la juridiction de la d. abbaye, et illec sera pendu et estranglé jusques à extermination de vye, ses biens meubles confisqués à la d. juridiction pour les frais de justice ; et au par avant souffrir le dernier supplice estre submiz à la torture d’escarpins à feu pour révélation de ses complices ; l’exécution de la présente sentence renvoyée par devant les juges de la d. juridiction de l'abbaye. Faict et arresté en la Chambre criminelle des prisons royalles d'Henbond, le 9ème jour de may. 1583, Signé Jacques de Lys. — Jean de la Couldraye, seneschal, — L. Lancellot, — Jean Huby, etc ... La sentence cy-devant a esté ce jour (12 mai) leue et prononcée au d. Jean Jaffrezo dict Bras, prisonnier et condempné à souffrir mort, faict se agenouiller, et suivant icelle mis à la question d’escarpins, et procédé à son interrogatoire... puis faict venir Missires Alain Hamon et Jacob Le Bartz, presbtres, curés de la paroisse de Saint-Caradec, pour le confesser et advertir du salut de son âme, pour se préparer à la mort, se submettre à la cognoissance et miséricorde de Dieu, et ordonné à Guillaume Allain , exécuteur des haultes oeuvres, lequel aurait exécuté le d. Jean Jaffrézo au patibulaire de la d. court et juridiction de l'abbaye, jusqu’à extermination de vie, le jeudy 12ème jour de may 1583. Signé : M. Gelloux, greffier » ( La Joie. H. — Expéd. parch.).

Les ducs de Bretagne, héritiers directs des fondateurs, maintinrent constamment la juridiction et les privilèges de l'abbaye. En 1388 (N.. S.) le duc Jean IV condamna formellement les prétentions que le vicomte de Rohan et son fils, le sire de Guémené, manifestaient A l’égard des droits seigneuriaux de l'abbaye. En 1431, le duc Jean V chargea ses officiers judiciaires de gérer les causes de l'abbaye de la Joie comme les siennes propres, afin d’épargner aux religieuses les ennuis et les dépenses des procédures.

Mais sous les rois de France, la situation changea peu à peu.  Certains commissaires et procureurs du roi, emportés par leur zèle, finirent par contester, non pas la juridiction de l'abbaye, — elle était trop bien établie, mais quelques unes de ses prérogatives accessoires.

Ainsi, en 1683, le commissaire de la réformation du domaine du roi ayant refusé de reconnaître les droits de l’abbesse dans l’église de Notre-Dame de Paradis, il fallut procéder et en appeler au parlement de Bretagne. La Cour, par un arrêt rendu à Vannes le 21 juillet 1684, « reformant le jugement, maintint l'abbesse dans le droit et la possession de concéder des bancs et tombes dans la chapelle de Notre-Dame de Paradis, et de percevoir les rentes à elle deues pour raison des dites concessions ; — dans la possession des écussons et armoieries estant dans les chapelles de Notre-Dame de Paradis, prieuré de Lochrist et église paroissiale de Saint-Gilles, — dans le droit de faire bannir par les sergents de sa juridiction la solennité des festes des dites chapelles, — et dans sa proche mouvance des tenues contestées...  ». — Le commissaire du roi ayant aussi attaqué la juridiction de l'abbesse sur les tenanciers à domaine congéable, obtint d’abord, en 1688, une sentence favorable ; mais le parlement, appelé à statuer définitivement, rendit le 29 mars 1695 l'arrêt suivant :

« La Cour, faisant droit dans le chef de la sentence du 2 octobre 1688, qui déboutait la demanderesse (l’abbesse) du droit de faire exercer sa jurisdiction sur ceux possédant des tenues à titre de domaine congéable, sous l'uzement de Broérec, dépendant de la d. abbaye, a mis et met l’appellation et ce dont a esté appelé au néant ; corrigeant et reformant le jugement, a maintenu l’abbesse de la Joye dans l'exercice de la jurisdiction haute, moyenne et basse sur les domaniers à domaine congéable, dépendant de la d. abbaye de la Joye, compris dans les anciens adveux, sans qu’elle puisse la prétendre sur les acquisitions et fondations nouvelles. Signé Picquet ». Voilà donc une restriction très nette : la juridiction acquise sur les anciennes tenues ne s'étendra plus aux nouvelles tenues que le monastère pourra acquérir.

Le 7 juin 1725, Mme de Cilly ayant fourni un aveu, copié presque entièrement sur les précédents, se vit contester de nombreux articles par le substitut de la sénéchaussée d'Hennebont, puis par le procureur général du roi à Rennes. Il fallut encore procéder. Le parlement, saisi de l’affaire, rendit l’arrêt suivant le 16 mai 1733 : 

La Cour, après avoir signalé quelques erreurs de détail, ajoute : « Attendu le désistement du procureur général, du 1er août 1731, de l’opposition par lui formée à l'arrest du 29 mars 1695 (ci-dessus), l’a débouté de la d. opposition ; en conséquence... a mis l’appellation et ce dont a été appelé au néant ; corrigeant et reformant, dit qu’il a été mal remontré et permis d'appeller ; et faisant droit sur les (nouvelles) conclusions du procureur général du roy, fait deffence au procureur du roy et juges royaux d'Hennebont de rien entreprendre sur les droits, dans lesquels l'abbesse est maintenue par le présent arrest ; décharge la dite abbesse des condamnations d’amende et de dépens énoncées contre elle par la sentence du 11 septembre 1727, et déboute les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions. Signé : Le Clavier ». Les frais de ce procès montèrent pour le couvent à la somme respectable de 867 livres 11 sous 6 deniers. Enfin, une dernière attaque eut lieu à propos des droits de péage. Les aveux de l’abbaye mentionnaient : « Le droit de percevoir les devoirs de trépas et coutumes, en entier des foires qui se tiennent au bourg de Saint-Gilles, et un tiers de ceux qui se lèvent aux foires de Lochrist, de Saint-Germain, de Languidic et de Kergohan ». (1725). L’affaire fut portée au Conseil d'Etat et se termina en 1750 par la sentence suivante : « Vu par le roy étant en son Conseil les titres et les pièces représentées en exécution de l’arrêt rendu en icelui le 29 août 1724, et autres rendus par les dames abbesse, prieure et religieuses de l’abbaye de Notre-Dame de la Joye, se prétendantes en droit de percevoir des droits de péage dans les lieux de Saint-Gilles, de Lochrist, de Languidic et de Kergohan en Bretagne...  Le roy étant en son Conseil, conformément à l’avis de ses commissaires, a supprimé et supprime les droits de péage prétendus par les abbesse et religieuses de Notre-Dame de la Joye, aux lieux de Saint-Gilles, Lochrist, Languidic et Kergohan : leur fait Sa Majesté très expresses inhibitions et défenses et à tous autres de percevoir aucuns droits de péage sous quelque dénomination que ce soit, sur les voitures ; bêtes de somme, bestiaux, denrées et marchandises passant par les d. lieux ou ailleurs dans leurs dépendances, à peine contre elles de restitution des sommes qui auroient été exigées, d’une amende arbitraire au profit de Sa Majesté, et contre leurs fermiers ou receveurs d'être poursuivis extraordinairement comme concussionnaires et punis comme tels, suivant la rigueur des ordonnances. Déclare Sa Majesté qu’il n’a point été statué par le présent arrêt sur les droits, si aucuns sont dus, sur les bestiaux, denrées et marchandises amenés dans les d. lieux, pour y être vendus, les jours de foires et de marchés, ni sur les droits de foires et marchés, attendu que les dits droits ne sont point sujets à la vérification, ordonnée par l’arrêt du Conseil du 29 août 1724 ; Fait au Conseil d'Etat du roi, Sa Majesté y étant, tenu à Versailles le 20 avril 1750. Signé : Phélypeaux ». (La Joie. H. Imprimé).

 

VI. MOULINS ET PECHERIES.

Les moulins constituaient jadis un monopole dont les seigneurs étaient jaloux. Tout fief, digne de son nom, avait un ou plusieurs moulins, et tous les sujets de la banlieue devaient y porter leurs grains à moudre. 

Le duc Jean Ier, en bâtissant la nouvelle ville d'Hennebont, construisit un moulin sur le Blavet et lui soumit tous les habitants de la nouvelle cité. Les habitants du vieil Hennebont restèrent soumis au moulin de leur seigneur particulier, qui était alors le sire de Léon. En fondant le monastère de la Joie et en lui donnant un territoire particulier en fief, il lui céda, suivant l’usage, le droit d’avoir un moulin pour son usage particulier et pour celui de ses propres sujets ou vassaux. L’abbaye profita de ce droit, et construisit un moulin au dessus de celui du duc, vers Lochrist, avec un barrage ou une chaussée dans la rivière, pour faire une retenue d’eau. A mesure que le domaine de l'abbaye s’étendit, il fallut avoir d’autres moulins pour les besoins et les convenances des nouveaux sujets. Ainsi, des 1292, on voit la première abbesse de la Joie s’occuper de la chaussée du moulin de Kersol en Languidic, acquis pour le service des vassaux du voisinage. De même, en voit construire en 1405 le moulin de Hédan, pour servir aux sujets de l'abbaye en Merlevenez, et en 1485 le moulin de Sterbouest, pour la commodité des vassaux en Riantec. 

En 1445, les religieuses de la Joie ayant fait reconstruire leur moulin de Lochrist et réparer la chaussée, des serviteurs et officiers du vicomte de Rohan se permirent de ruiner la dite chaussée, sous prétexte qu’elle empêchait les saumons et les autres poissons de remonter jusqu’au pont de Lochrist, où commençait la pêcherie de leur maître. Sur la plainte des religieuses, le vicomte écrivit : «... Nous, entendu ce que dit est, ne voulans pas la diminution du d. moustier, esgart que en partie il a esté fondé (!) de noz prédicesseurs, dont Dieu ait les âmes, et affin que plus affectueusement les d. religieuses et celx qui seront après elles soient tenues prier Dieu pour nous et noz subcesseurs, leur avons donné et donnons congié et licence de réparer et maintenir pour le temps à venir leur d. escluse en la manière et forme que est celle du duc au dessoulz, et pourveu que elles lessent, durant le temps de la pesche de nos pescheries, une partielle brèche ouverte, come est celle du duc, affin que le poisson puisse monter et venir à noz d. pescheries... Donné en notre manoir de Penret, soulz notre signe manuel et signet le XIIème jour d'aougst l’an mil IIIIcc quarante et cinq. ALAIN DE ROHAN. ».

L’année suivante, Jehan de Saint-Ciffer, propriétaire à Kerglau en Inzinzac, voulut s’opposer à l’établissement d’une digue dans le Blavet, entre le parc des religieuses et son terrain ; l'abbaye de son côté réclama quelques îlots dont il s’était emparé. Par une transaction du 26 août 1446, le d. Jehan permit de terminer la digue jusqu’à son terrain, à condition de laisser une ouverture pour le passage du poisson et d’avoir part a perpétuité aux prières de la communauté.  En retour, les religieuses lui abandonnèrent les îlots contestés. Si les moulins de l'abbaye avaient été rebâtis, ceux du duc demandaient aussi une reconstruction prochaine. Ils menaçaient ruine quand, en 1474, le duc François II résolut de les céder aux religieuses de la Joie, pour diminuer la rente qu’il leur devait sur son domaine d'Hennebont. Cette cession capitale mérite d’être rapportée textuellement. 

« Sachent tous que par devant nous, en nostre court de Nantes, furent en ce jour présens et personnellement establis très hault et très puissant prince François, par la grace de Dieu duc de Bretagne, comte de Montfort, de Richement, d'Etampes et de Vertus, nostre souverain seigneur, d’une partie, et frère Henry Pligeau, au nom et comme procureur général des honnestes religieuses les abbesse et convent de la Joye Notre-Dame, près Henbont, d’autre partie. Les quels ont par devant nous, fait, gréé et octroyé, et par ces présentes font, gréent et octroyent, l’un d’eux à l’autre, contract de permutation et eschange, en la forme qui ensuit ; c’est à savoir que nostre d. souverain seigneur a baillé, cédé et transporté, et par la teneur de cestes, baille, cède et transporte aux d. abbesse et convent, ce stipulant et acceptant par leur d. procureur, pour la d. abbaye, et en partie de la fondation d’icelle,  les moullins et leurs emplacemens, biez, chaussée, estang, attaches et retenue d’eau et autres appartenances, avec leur distroit et tous les profits, revenus et émolumens d’iceluy distroit, en la manière accoutumée, tout entièrement, sans aucune chose en retenir, excepter ni réserver, fors les droits et la souveraineté du d. seigneur et autres choses cy après déclarées ; Ceulx moulins vulgairement nommés les Moulins du duc,  autrement les moulins de la mer, et situés sur la rivière de Blaouez au dessus de la ville d’Henbont et au parc prés la d.abbaye ; avec tous et tels droits que nostre d. seigneur a, et luy peut ou doit appartenir et compéter ès pescheries de Lochrist, sur la d. rivière de Blaouez, o tous leurs droits, profits, revenus et appartenances d’icelles ; celles choses prisées valoir de levées et revenus par chacun an la somme de cinquante deux livres quatre sous de rente, sans autre estimation ni prisage en devoir estre fait.. La d. somme de cinquante deux livres quatre sous à estre déducée et rabbatue de la somme de deux cens douze livres quatre sous de rente que celles abbesse et religieuses, par raison de la fondation de la d. abbaye, ont accoutumé prendre et avoir de rente et annuelle pension sur la recepte, terre et seigneurie de Henbont et par la main du receveur ordinaire de nostre d. seigneur en la d. terre ; ... sauf à payer et continuer à l'oultre-plus d’icelle annuelle pension, montant à la somme de huit vingt livres de rente par chacun an. Aussy dit apointé et réservé, pour la part de nostre d. souverain seigneur, que celles abbesse et convent doivent tenir et tiendront les d. moulins o leur distroit et les d. pescheries de nostre d. souverain seigneur, sous la jurisdiction et seigneurie de. Henbont, .. et que les hommes et subjets d'icelle jurisdiction de Henbont, qui sont et doivent estre du distroit des d. moulins, ne seront subjets à estre justiciés par la cour des d. abbesse et convent, ainczois en demeure toute la cognoissance et justicement, tant pour le fait de la moulte que autrement, à icelle court de Henbont. Et pour ce que celles abbesse et convent possèdent autres moulins de la fondation de la d. abbaye, situés sur la d. rivière de Blavouez entre les d. moulins du duc et le village de Lochrist, nostre d. souverain seigneur a voulu, consenti et octroyé que les hommes et subjets de son distroit soient et puissent estre contraints, par les temps des petites eaux ou des réparations, à mouldre et obéir aux moulins de la d. abbaye, pourveu que la poursuite et contrainte en soit faite par la cour de Henbont... Ce fut fait, gréé et octroyé le XIIème jour de janvier M.CCCC.LXXIV (N. 1475) ». — (La Joie. H. Copie).

Désormais la clientèle de l'abbaye comprit, à côté des anciens tributaires de ses moulins, toute la population d'Hennebont, qui dépendait précédemment des moulins du duc. Il est vrai qu’en retour le couvent perdait une rente fixe de 52 livres par an, et qu’il avait à faire une dépense considérable pour rebâtir ou restaurer les moulins du duc. A peine en possession de leurs nouveaux droits, les religieuses durent les défendre. Des gens peu scrupuleux, craignant moins des femmes que le duc, osèrent commencée des digues dans le Blavet et pécher des saumons, des lamproies et autres poissons. Le duc, qui jouissait auparavant et exclusivement du droit de pêche depuis le pont de Lochrist jusqu’au pont d'Hennebont, et qui l’avait cédé aux religieuses, ayant été informé de cette usurpation, prescrivit, le 1er mai 1479, à son procureur général Jacques de la Villéon, de vérifier les faits et d’en faire ensuite bonne justice, « sans avoir esgard à exception quelconque ».

D’un autre côté, le moulin du duc n’était pas encore restauré en 1503, les religieuses reculaient devant la dépense et trouvaient que le moulin de l’abbaye suffisait aux besoins de la ville d'Hennebont. Quelques mécontents refusaient cependant de se rendre à leur moulin qui était un peu plus éloigné que celui du duc. Par un mandement du 30 septembre de cette année, il fut ordonné à tous les sujets sans distinction de porter leurs grains à moudre au moulin de l'abbaye, à défaut de celui du duc ; ce qui fut renouvelé par une sentence de la chancellerie de Bretagne du 28 mai 1510. 

Plus tard, le 1er février 1531 (N. S. 1532), la dame de Guémené, dont relevait le vieil Hennebont ou Saint-Caradec, fit un accord avec l'abbesse de la Joie et la communauté et leur céda le droit de mouture en son fief : par ce moyen l'abbaye réunit tous les habitants d'Hennebont sous le monopole de ses moulins. En retour, la dame de Quémené eut le droit de pêche jusqu’au milieu du Blavet en face de ses terres d'Inzinzac et Saint-Caradec. Cependant l’assujettissement aux moulins de l’abbaye gênait certains individus, qui voulaient s'affranchir de cet impôt, notamment les boulangers. L’affaire fut portée devant la cour d'Hennebont, et le sénéchal Jacques de la Couldraye, sieur de Kerboutier, se basant sur les actes et jugements antérieurs, donna sa sentence le 9 mai 1620 :

« Nous enjoignons et ordonnons, dit-il, à toutz les habitantz et boullangers de la ville et fauxbourgs de Hennebont et aux autres subjets du roy en la d. juridiction qui sont soubz la banlieue des moulins du parc et bois de la d. abbaye, de porter ou faire porter touz et chaincuns leurs bleds mouldre ausd. moulins, de quelque espèce qu’ils puissent estre ; leur faisons prohibition et deffense de les faire mouldre ailleurs, sur peine de confiscation des d. bledz ou farines ; faisons aussi pareilles inhibitions à touz moulniers des moulins circonvoisins de venir prendre ou recueillir, par eux ou par gens de leur part, aucuns bledz en la d. ville, soubz quelque prétexte que ce soit, ny les faire garder et cacher par les d. habitantz, pour frustrer l'abbesse de ses droitz, sur peine de confiscation des chevaux, boeufs et charrettes qui seront trouvés porter les d. bledz, et de soixante livres d'amende, et autres plus grandes peines qui seront veues appartenir... » (La Joie. H. Exp. parchemin).

Cette sentence fut confirmée par un arrêt du parlement, du 10 juillet 1623. C’est en vain que les Ursulines d'Hennebont tentèrent de s’affranchir du droit de mouture vis-à-vis l'abbaye de la Joie ; elles furent condamnées par la cour royale d'Hennebont, le 20 mai 1666, et cette condamnation fut maintenue par le parlement le 13 décembre 1667. 

Au bout d’un siècle, il fallut renouveler, ou du moins expliquer la défense faite aux boulangers et aux meuniers. Le parlement, par un arrêt provisoire du 18 juillet 1761, et un arrêt définitif du 6 février 1772, déclara que les boulangers d'Hennebont qui achetaient du grain et le logeaient chez eux ou en ville, étaient obligés de le faire moudre aux moulins de l'abbaye ; mais s’ils l’achetaient au marché, sans le loger en ville, ils pouvaient le faire enlever immédiatement pour le faire moudre au dehors. Quant aux meuniers circonvoisins, ils pouvaient acheter du grain au marché et le revendre en farine aux jours de marché seulement, mais il leur était défendu de prendre en ville le grain des particuliers, sujets de l'abbaye. Toute contravention était passible d’une amende de trente livres au profit du monastère, et les farines introduites en fraude étaient soumises en outre au droit de mouture.

Pour les pêcheries du Blavet, elles avaient aussi fourni leur contingent de préoccupations et de procès à l'abbaye. Dès avant 1656, le sieur Claude Le Milloch, procureur d'Anne de Rohan, princesse de Guémené, était accusé d’avoir usurpé des gorets ou bardeaux dans la rivière. En 1666, un sieur Le Tallec, avec plusieurs complices, avait ruiné un bardeau appartenant au monastère, et avait même jeté à la rivière le confesseur des religieuses, qui voulait l’arrêter. Enfin, le 19 janvier 1671, le parlement prononça l’arrêt suivant :

« ... La Cour, faisant droit aux demandes respectives, a maintenu la dite de Rohan et la d. Le Coigneux, abbesse, dans le droit de pesche par moitié en la rivière du Blavet, depuis le pont de Hennebont jusques à celui de Lochrist, la d. de Rohan en la moitié d’icelle vers Inzinzac, et la d. Le Coigneux en l’autre moitié vers l'abbaye, à l’exclusion des lieux où la d. Le Coigneux a des terres et fiefs à elle appartenans des deux costés de la d. rivière, dans les quels la d. Cour l’a maintenu privativement au droit de pêche dans la d. rivière. A maintenu la d. de Rohan aux droictz de goretz vis à vis du moulin d'en-bas de l'abbaye, jusques à la moitié de la d. rivière, et condamne la d. Le Coigneux a démolir jusques au milieu d’icelle le bardeau par elle innové et rompu par Louis dé Rohan ;  A pareillement maintenu la d. de Rohan en la moitié des goretz du grand pont de Lochrist vers lnzinzac et la d. Le Coigneux en l’autre moitié des d. goretz, et en entier en ceux du petit pont, et en celuy du moulin d'en-bas jusques à la moitié de la d. rivière de son costé. La condamne à restablir et rabaisser les chaussées et biez du moulin d'en-haut et d'en-bas et du duc, à la mesme hauteur qu’ils estoient avant l’instance, et fait deffences d’avoir aultres goretz sur la d. rivière que ceux cy devant spécifiez.. » - (Original parchemin).

Une autre difficulté surgit plus tard entre l'abbaye et M. Guillaume de Marboeuf relativement au cours de l’eau du Blavet. Ce seigneur était propriétaire de la pêche depuis le pont de Lochrist en remontant jusqu’au pont Augan : il était intéressé à ce que le poisson pût descendre et remonter facilement dans la rivière, et il fallait déterminer d’une manière précise les dimensions de l’ouverture ou du trou à ménager dans la chaussée du grand moulin de l'abbaye. Le parlement régla ce qui suit :

« La Cour ordonne que l’ouverture du trou, nommé le Toul-ar-Guiniech, qui est vis-à-vis le grand moulin d'en-bas de l'abbaye de la Joye, demeurera de dix pieds de largeur dans surface, et que le dit trou restera bouché de cinq pieds de hauteur seulement, à prendre du fond de la rivière dans la dite étendue, et que le mur du d. trou aura cinq pieds d’épaisseur seulement ; Ordonne pareillement que la chaussée, autrement nommée le grand bardeau, qui traverse la rivière, et qui est proche le moulin d'en-haut, demeurera dans l’état où elle est présentement, et qu’à cet effet il en sera fait estat et procès-verbal. Fait au parlement à Rennes, le 26 novembre 1711. Signé : Piquet ».

 

VII. PAROISSE.

Lorsque le duc Jean Ier fonda la ville close d'Hennebont, à l’extrémité de la paroisse de Languidic, il avait la, paraît-il, un village nommé Trémoec, et une chapelle dédiée à saint Gilles. Toujours est-il que la paroisse qui y fut érigée prit le nom de Saint-Gilles-Trémoec. Cette paroisse s’étendait dans la campagne jusqu’au prieuré de Lochrist, qui dépendait de Saint-Gildas de Rhuys. A une date inconnue, la paroisse fut unie au prieuré, de sorte que le prieur de Lochrist fut en même temps recteur de Saint-Gilles-Trémoec et eut la grosse dîme de la paroisse. Quand le prieur dut rentrer au monastère de Rhuys, il fut remplacé dans la paroisse par un vicaire perpétuel, mais il conserva la grosse dîme et le titre de recteur primitif

Telle était la situation lorsque, le 1er mars 1453, sur la demande du cardinal de Coetivy, l’abbesse de la Joie obtint de Nicolas V, sa vie durant, l’union du prieuré de Lochrist à son monastère, pour aider aux réparations. 

Le 15 juillet 1455, le pape Calliste III rendit cette union perpétuelle, et depuis lors jusqu’à 1790 l’abbesse jouit des droits de recteur primitif et de la faculté de présenter le vicaire perpétuel de la paroisse. 

Le vicaire perpétuel, ici comme ailleurs, avait ordinairement pour sa rétribution un tiers des dîmes et de plus le casuel des cérémonies. A partir de 1571, il eut la faculté de choisir une pension fixe en argent, renonçant à sa part des dîmes. Le vicaire de Saint-Gilles ne profita de cette liberté qu’en 1769, en acceptant un traitement fixe de 500 livres pour lui et de 200 pour son curé : ce que l'abbaye promit de payer, en gardant toutes les dîmes.

L’église paroissiale de Saint-Gilles n’était point dans la ville close ; elle s’élevait en face de la porte de Broërec, auprès de la contrescarpe. Par suite de cette situation, elle eut beaucoup à souffrir pendant les différents sièges que la ville dut soutenir au XIVème siècle, et elle fut définitivement ruinée à la fin du XVIème par l’attaque du prince de Dombes. « Au mois d'aougt 1590, dit une note des registres de baptêmes, fut l’église parrochialle transférée à Notre Dame de Paradis, pour le démolissement advenu de l’église parrochialle »

L’église de Notre Dame de Paradis à une histoire, et il est nécessaire de la rappeler ici. Son nom de Paradis est du champ de foire où elle s’élève. Dès 1507, François Michart, maréchal-ferrant de la rue Neuve, conçut le projet de construire sur cette place une chapelle sous le vocable de Notre-Dame. Il y éleva d’abord un petit oratoire en planches, et tout aussitôt de nombreux fidèles y affluèrent et y déposèrent leurs offrandes. 

En 1514, Michart, ayant demandé et obtenu les autorisations nécessaires de l’évêché de Vannes, de la sénéchaussée d'Hennebont et de l'abbaye de la Joie, fit placer la première pierre de l’édifice par l’abbesse Guillemette Rivallen, qui donna à cette occasion, une centaine de livres pour aider à la construction. Les vastes proportions de l’église prouvent que dès l’origine les offrandes recueillies devaient être très considérables ; cependant elles devinrent insuffisantes, et bientôt même il fallut aller quêter dans le reste du diocèse. Les recettes et les dépenses étaient soumises à l’abbesse, qui surveillait tout, comme recteur. 

Après dix ans de travaux, le choeur était terminé, et la nef assez avancée pour songer à une dédicace. En conséquence, le dimanche 19 juin 1524, la consécration en fut faite par Geoffroy Le Borgne, évêque titulaire de Tibériade, « de l’ordre des Carmes, demeurant au Bondon près Vannes, appelé et défrayé par François Michart, qui fit tous les frais de la cérémonie »

Le zélé maréchal mourut trois ans après, savoir le 1er avril 1527, et fut inhumé dans l’église qu’il avait bâtie. Les travaux toutefois n’étaient pas encore finis, et la tour notamment attendait une flèche, qui ne fut construite que plusieurs années plus tard.

Les habitants d'Hennebont, sous la présidence du sénéchal, se réunirent pour nommer un trésorier de l'oeuvre, après la mort de Michart. L’abbesse de la Joie, laissée volontairement de côté dans cette élection, s’adressa directement à l'Officialité de Vannes et obtint, le 19 avril 1527, une sentence défendant aux habitants de s’immiscer dans l’emploi et la perception des offrandes. Les habitants, au lieu de se soumettre, s’adressèrent à la justice civile. La chancellerie de Bretagne, saisie de l’affaire, déclara, le 16 décembre 1635, que l’abbesse aurait seule la perception, l’administration et la jouissance des oblations, à la charge de faire parachever et entretenir la nouvelle église. Cette sentence fut définitivement confirmée par le parlement, le 22 septembre 1537. 

A partir de ce moment, l’abbesse put faire travailler tranquillement à l’achèvement de l’édifice. L’église de Notre-Dame de Paradis est le principal monument d'Hennebont. « La façade occidentale, dit Cayot-Delandre, est admirable de légèreté et d’élégance ; c’est d’abord un gracieux portail à festons trilobés, puis de chaque côté de ce portail, deux hauts contreforts terminés en clochetons ; puis un beau clocher, flanqué de deux tourelles menues, qui se relient avec lui par des galeries jetées en arcs-boutants ; puis au-dessus de tout cela une flèche mince et hardie, qui s’élève à une hauteur de plus de 50 mètres » (Morbihan, p. 471).

Au fond du portail, deux portes en anse de panier donnent accès dans l’église, qui est divisée en trois nefs, sans transepts, et qui mesure environ 45 mètres de longueur sur 17 mètres de largeur. Il y a quatre travées d'architecture, et les arcades ogivales à plusieurs retraits sont portées par pénétration sur des piliers octogones. Le choeur est polygonal et éclairé par deux étages de fenêtres. 

C’est dans cette église que fut transféré, en 1590, le service paroissial, par suite de la ruine de l’église de Saint-Gilles. L’abbesse de la Joie avait consenti à ce transfert, mais elle eut bientôt lieu de s’en repentir. Les habitants d'Hennebont, se regardant comme chez eux à Notre-Dame, voulurent aussitôt s’emparer des offrandes et oblations faites à l'église. L’abbesse, s’appuyant sur l’arrêt du parlement de 1537 et sur la prescription, s’y opposa formellement. 

Le sénéchal d'Hennebont, juge et partie dans l'affaire, défendit, le 23 juin 1591 et le 27 juin 1593, à l’abbesse « et à tous aultres de par elle, de toucher et s’immiscer à la recepte des aumosnes et offrandes de la d. chapelle, sur paine de 50 escuz d’amende, jusques avoir apparu ses tiltres, si aucuns elle avoit, et de non empescher n’y troubler le vicaire de Saint-Gilles d’y célébrer le service divin, jusqu’à ce que aultrement en fust ordonné ».

L’abbesse, naturellement, en appela au parlement, et voici l’arrêt qu’elle obtint : « ..... La Cour dit qu’il a esté mal jugé, bien appelle par l'appellante ; corrigeant et amendant les jugements, a maintenu et maintient la d. appellante en la possession et saisine de la chapelle dont est question, et a fait et fait deffences aux intimez de la troubler en la jouissance d’icelle, et condamne les d. intimez aux despens, tant des causes principales que d'appel. Fait à Nantes, en parlement, le 26ème jour de may, l'an 1594. — Signé : Chupeau ». (La Joie. — Expéd. parch.).

Cette sentence n’arrêta point les efforts des habitants, excités sous main par le vicaire Jean Guyomarh. L’abbesse dut recourir de nouveau au parlement pour faire renouveler l’arrêt et y ajouter une sanction pénale : «... La Cour a fait et fait inhibition et deffense aux deffendeurs de troubler la demanderesse sur la possession, jouissance et prééminences de la chapelle de N.-D. de Paradis, maisons, terres et autres droits et dépendances, offrandes, aumosnes et oblations, qui se feront en icelle, pour la perception des quelles elle aura la clef du tronc de la d.  chapelle, et les pourra faire recevoir par tel prestre et religieux ou domestique que bon luy semblera ; et néantmoins la dite Cour a permis et permet au recteur et ses successeurs de dire les grandes messes dominicales, services et offices accoustumés à une église paroissiale, et avoir les fonts baptismaux en la d. chapelle, en attendant la construction d’une autre église, parce que pendant qu’ils se serviront de la d. chapelle, ils seront tenus de l’entretenir en bonne et deue réparation, et que la jouissance qu’ils feront ne portera aucun préjudice aux droits, prérogatives et prééminences de la d. demanderesse ; et a condamné et condamne les d. habitans de Hennebond aux despens de l’exécution du jugement du 26 may 1594, taxez et modérez à la somme de 33 escus un tiers (90 livres), sans despens du présent incident. Fait au parlement à Rennes le 21ème jour de mars 1601. Signé Lauriolle » (Ibid.).

Cet arrêt fut renouvelé le 12 août 1613. Les paroissiens de Saint-Gilles avaient conservé longtemps l’espoir de rebâtir leur église, mais les fonds leur firent toujours défaut, et ils finirent par se croire presque chez eux dans l’église de N.-D. de Paradis. De là ces envahissements continuels sur les droits de l’abbesse, la résistance obligatoire de celle-ci, et l’intervention si fréquente de la justice.

En 1635, M. Bonaventure Pitouays, sieur de la Villeneuve, ayant usé de violence pour empêcher de faire la quête à l’église au nom de l'abbesse, se vit déférer à la cour royale d'Hennebont et subit la leçon suivante : «... Nous avons fait déffances au vicaire, prestres et marguilliers de cette paroisse, et autres, de troubler à l'advenir la dame abbesse en la perception de ses droitz d’offrandes, oblations et aumosnes, en la d. église de N.-D. de Paradis ; ce faisant, de ne porter aucun plat ny quester en icelle pendant l’office et grande messe qui s’y célébreront aux jours de festes de Nostre-Dame et dédicace de la d. chapelle, sy ce n’est pour les pauvres honteux de cette ville, et après que le plat de la d. dame abbesse aura couru ; et pour la faute et violance commise par le d. Bonaventure Pitouays, l’avons condempné en six livres d'aumosnes applicables au bastiment de l'hospital, avec deffence de retomber en pareille faute sur les peines qui eschent, et condempné aux dépens de l’instance, modérez à dix livres, espices non compris. Faict et arresté à Hennehond , en la chambre du conseil, ce 30ème jour d’aoust 1635. Signé : L. du Pérenno, seneschal. — Vincent Le Flo, alloué. — Jan Hamon, lieutenant.. » (Ibid.). L’abbesse continua donc à jouir des quêtes aux fêtes réservées, à avoir ses écussons dans les grandes vitres du sanctuaire, ainsi que dans le porche au-dessus des deux portes d’entrée, à concéder des sépultures dans l’église et à jouir des prééminences et droits honorifiques des patrons.

Aux quatre principales fêtes de l’année, à celle de l'Assomption et de la dédicace de N.-D. de Paradis, célébrée le dimanche après le 24 juin, on mettait, à la grand'messe et aux vêpres, une crosse sur l’autel, en signe de dépendance. Tous les ans, la dédicace était annoncée par la conduite d’un boeuf dans toute la ville, avec sonneurs, un des sergents de l'abbaye portant au devant une crosse abbatiale faite de fleurs (Note 1653). 

Les paroissiens de Saint-Gilles ne pouvaient renoncer à leurs prétentions. Condamnés par un arrêt du 15 mai 1679, rendu sur la requête de l’abbesse Madeleine Le Coigneux, ils revinrent à la charge du temps de l'abbesse Jeanne de Blanchefort. Ils osèrent ôter de l'église le banc de l'abbaye, et voulurent s'attribuer le droit d'y concéder des bancs et des tombes moyennant finance. L'abbesse fut encore obligée de recourir au parlement de prouver ses droits par les jugements antérieurs. 

Renouvelant ses décisions précédentes, « la Cour fit itératives défenses au vicaire de la paroisse de Saint-Gilles de Hennebont et à tous autres, de troubler la dite de Blanchefort, abbesse de la Joye, sur la jouissance et perception des droits, maisons, terres, aumônes, oblations et autres dépendances de la chapelle de Notre-Dame de Paradis, d’y donner aucun droit de banc et de sépulture, et d’y faire aucun changement sans le consentement de la dite de Blanchefort, sur les peines qui y eschéent, le tout conformément à l’arrest du 15 may 1679. Fait en parlement à Rennes, le 8 avril 1712. Signé : M. Piquet ».

Les paroissiens ainsi déboutés de leurs usurpations, furent condamnés aux frais qui montaient à 493 livres. Depuis ce temps, la paroisse et l’abbaye vécurent en paix. La Révolution vint plus tard supprimer le monastère de la Joie, et confisquer l’église de N.-D. de Paradis. Après le Concordat de 1801, l’église fut rendue au culte catholique et servit exclusivement à la nouvelle paroisse d'Hennebont.

 

VIII. AVEUX.

Rien ne saurait donner une meilleure idée des biens de l’abbaye que la reproduction des aveux de la maison. Voici le sommaire de la déclaration fournie au roi, le 7 juin 1725, par Mme de Cilly, abbesse de la Joie. 

« La dite dame abbesse et les religieuses déclarent que :

1° la dite abbaye est de fondation ducale, et en fief amorty, de la charité et piété de très illustre princesse Blanche de Navarre, de l’authorité et consentement de haut et puissant prince Jean Ier, duc de Bretagne, son seigneur et mari ;... au milieu de la dite abbaye, dédiée sous le titre de N.-D. de la Joye, est le tombeau de ladite princesse Blanche de Navarre, au-dessus de laquelle tombe est sa statue en habit de religieuse et en peinture ; en la grande et principale vitre de ladite église, et en plusieurs autres endroits sont les armoiries du roy, des feus ducs de Bretagne et de ladite dame Blanche de Navarre ; .. elles tiennent ladite abbaye et tous les droits cy-après à la charge de foy et hommage seulement, et à devoir de prières et oraisons, sous la jurisdiction royale d'Hennebont, en la paroisse de Saint-Gilles.

2° Les maisons abbatiale et conventuelle et autres logements, avec leurs cours, jardins, vergers, pourpris, parc et clôture de ladite abbaye, cernés de murailles de pierre et mortier, le tout contenant 40 journaux, donnant d’orient et nord sur le chemin de ladite abbaye à Hennebont, bois et dépendances d’icelle, et du midy et occident sur prés des PP. Carmes, sur le lieu nommé Coet-du-Duc, et sur la rivière de Blavet. 

3° Le grand parc de ladite abbaye, nommé vulgairement le Coet ou Parc-du-Duc, dans lequel sont situées les métairies des Granges et de la Bergerie, contenant 300 journaux. 

4° Dans le quel parc, et sur la rue du Poulhallec, sont situés le four banal de ladite abbaye, avec douze maisons et un pavillon affermés 300 livres par an. 

5° Au milieu du dit parc et enclos est le patibulaire à trois piliers de la jurisdiction de la dite abbaye, qu’elles sont en droit et possession de temps immémorial de faire exercer... 

6° Au nord du dit bois, sur la rivière de Blavet, sont situés les moulins communément appelés les Moulins au Duc, avec la chaussée traversant la dite rivière. 

7°. Et au dessus sont aussy les moulins de la dite abbaye, avec chaussée traversant la dite rivière.

8° Au distroit et suite des quels moulins sont sujets les hommes et vassaux de la dite abbaye, les manants et habitants de la ville et fauxbourgs d'Hennebont. 

9° Le droit exclusif de pescheries et gorets au dessous du petit pont de Lochrist. 

10° Le droit de pescheries et gorets dans l’étendue de la rivière de Blavet, depuis le passage de Lochrist jusqu’au pont mer d'Hennebont, sauf les réserves de M. le prince de Guemené.

11° Le droit de pesche avec bateaux et filets, dans l’étendue de la dite rivière, et par moitié seulement en face des domaines de M. le prince de Guémené.

12° Deux prés vers Lochrist, joints aux moulins.

13° Le prieuré de Sainte-Croix, autrement Saint-Christ, avec sa chapelle et la métairie y attenante, contenant 20 journaux.

14° A cause du d. prieuré, l’abbaye a tous les droits de curé primitif à Saint-Gilles d'Hennebont et à Saint-Gilles-des-Champs, avec la dixme, les oblations, et le droit de présentation.

15° La chapelle de N.-D. de Paradis, avec son cimetière, laquelle église, par concession des précédentes abbesses sert d’église paroissiale aux habitants d’Hennebont.

16° La d, abbaye a en la d. chapelle toutes les prééminences, droits honorifiques, et ses écussons dans les premières et grandes vitres du sanctuaire et dans le porche. 

17° Elle a aussi droit et est en possession d’y établir les économes et administrateurs, d’y concéder les droits de tombes, d’enfeus, de bancs, de faire bannir la feste et assemblée de la d. chapelle par les sergens de sa jurisdiction, et de permettre ou interdire les danses et les luttes accoutumées. 

18° La d. abbaye a encore, après Sa Majesté, les premières prééminences dans l’église de Saint-Gilles (des Champs), et ses armes en divers endroits. 

19° Le droit de percevoir les devoirs de trépas et coutumes, en entier des foires qui se tiennent au d. bourg de Saint-Gilles, un tiers de ceux qui se lèvent aux foires de Lochrist, de Saint-Germain et de Kergohan. 

20° Une maison en la rue du Vicaire à Hennebont, avec son jardin et courtil, affermée 42 livres par an.

21-49. Rentes diverses sur 23 maisons, sur plusieurs immeubles et tombes, 54 livres 7 sols 4 deniers.

Les deux métairies nobles de Kermario et le moulin de Hentguer, en Saint-Caradec-Hennebont. 

Le moulin de Kerorsol, en Languidic. 

Le moulin à vent de Hédan, en Merlevenez. 

Le moulin à mer de Sterbouest, en Riantec.

A ces biens il faut ajouter les nombreuses tenues disséminées en Saint-Gilles, Saint-Caradec, Caudan, Quistinic, Languidic, Brandérion, Nostang, Merlevenez, Plouhinec, Riantec, Kervignac, Plouay, Inguiniel, Bubry et Lanvaudan. On en trouvera la liste plus loin, à propos des ventes nationales. 

Pour ne pas donner une idée fausse des richesses de l’abbaye, il est bon de rappeler que le monastère ne possédait que le sol ou le fonds de ces tenues, pour lequel il percevait une rente fixe et légère, consistant en argent et en grains, et que les édifices et arbres appartenaient à l'édificier ou domanier. Il faut enfin ajouter les rentes féodales sur divers immeubles des paroisses ci-dessus. Ces rentes étaient très faibles, parce qu'elles étaient très anciennes ; elles servaient surtout à rappeler la juridiction du seigneur féodal. Voici du reste quel était en 1653, c’est-à-dire 72 ans avant l’aveu ci-dessus, l’état des revenus de l’abbaye. Il est tiré d’un Mémoire du temps, et il est ici fidèlement reproduit, en changeant seulement l’ordre de quelques articles. 

«  Les bleds sont icy estimés à raison de 22 livres la perrée de froment, et 15 livres la percée de seigle, prix de l’an passé 1652. La livre de beurre est de cinq soulz. 

1° La vente du foin de l’enclos, environ : 200 livres

2° Les métairies des Granges et la bergerie paient la tierce partie de tous leurs grains, valant 1.800 plus 45 livres de convenant et 70 livres de beurre : 1859 livres 10 sols.

3° Les perrières des Oranges et une rente des Carmes : 17 livres.

4° Les métairies de Kermario, en Saint-Caradec, affermées : 250 livres.

5° Rentes des tenues et chef-rentes, en argent : 440 livres 5 sols. Les mêmes en grains, estimées : 985 livres.

6° Le casuel des nouveautés, rachats et ventes : 150 livres.

7° Le logis de la rue du Vicaire, affermé : 53 livres 10 sols.

8° Le four à ban d'Hennebont : 75 livres.

9° Le grand logis près de Notre-Dame : 150 livres.

10° Une rangée de sept maisons, avec jardins derrière : 148 livres.

11° Rentes sur d’autres maisons et tombes : 43 livres 8 sols.

12° Troncs des offrandes à N.-D. et à Lochrist : 60 livres.

13° Droits de coutume aux foires, avec un pré : 51 livres.

14° Les moulins du Bois et du Duc, affermés 100 perrées de froment et 70 perrées de seigle : 3.250 livres.

15° Les moulins de Kerorsol, de Hédan, de Sterbouet et Hentguer, affermés en grains et argent : 639 livres.

16° Les trois pescheries du Blavet, affermées huit saumons, quelques douzaines de lamproies, et .. : 500 livres.

17° Rente en argent sur le domaine du roy à Hennebont, de la fondation des ducs de Bretagne : 196 livres.

18° Rente foncière en argent sur la terre de Pontcallec, par fondation des ducs de Bretagne : 168 livres.

19° Rente de 16 perrées de froment et 16 de seigle sur Rosnarho, Kergléverit, etc. près d'Auray, de la fondation des ducs de Bretagne : 240 livres.

20° Rente sur les droits de havre d'Hennebont due par le seigneur prince de Guémene : 12 livres.

21° Rente de 45 mines de froment sur Pleugriffet, due par le sgr. marquis de Coetlogon, affermées : 600 livres.

22° Rente de 2 quartiers de froment et 2 d’avoine, sur le gros des dixmes de Ménéac : 40 livres.

23° Sur la dixme de Guégon, qui a été beaucoup délaissée, il ne revient de ferme que : 3 livres.

24° Sur la dixme de Lisivry en Ploemeur, il est deu par ferme 5 perrées et demie de seigle, donnant : 82 livres.

25° La dixme de Saint-Gilles, affermée 32 perrées de seigle, qui font par argent environ : 480 livres.

26° Les pensions des religieuses donnent...... 3.200 livres. Total : 15.692 livres 11 sols. Toutes ces rentes se payent actuellement l'abbaye, sans parler d’une infinité d'autres qui sont délaissées depuis longtemps » (La Joie. Mémoire sur papier).

Quand on compare les chiffres précis du Mémoire de 1653 avec les rares données de l’Aveu de 1725, on trouve quelques différences. Cela tient aux dates des deux documents : les prix ont été toujours en augmentant dans le cours des siècles. Il en est de même des maisons possédées par l’abbaye à Hennebont, ou simplement grevées d’une rente : leur nombre a varié suivant les époques. En 1790, le chiffre total des recettes est plus élevé qu’en 1653, toujours pour la même raison : la surabondance du numéraire, et par suite la dépréciation graduelle de l’argent et l’augmentation des prix. Le total du revenu, suivant la déclaration fournie en mars 1790 à l'Assemblée nationale, montait, déduction faite pour réparations et entretien des immeubles, à la somme de 23.352 livres. Avec cette somme il fallait payer les contributions civiles et religieuses, nourrir et entretenir trente religieuses, deux confesseurs, et un certain nombre de domestiques, subvenir aux frais du culte, rétribuer le recteur, le curé, le médecin, le pharmacien, faire des aumônes, etc, etc...

 

IX. REVOLUTION.

La Révolution, poussée par les sociétés secrètes, s’avançait menaçante pour l'Eglise. L’Assemblée nationale, s’occupant de ce qui ne la regardait pas, suspendit, dès le 27 octobre 1789, l’émission des voeux solennels dans les monastères. Le 13 février 1790, elle fit un pas de plus, en refusant de reconnaître désormais les voeux solennels, et en supprimant les ordres et congrégations où l’on faisait de pareils voeux. Tous les religieux et religieuses furent autorisés à sortir de leurs maisons, en faisant une déclaration devant la municipalité du lieu. En conséquence, la municipalité d'Hennebont se transporta à l'abbaye de la Joie, le 28 juin 1790, pour interroger les religieuses. « Ayant prié Madame l’abbesse de faire assembler dans son parloir intérieur toute la communauté, nous l’avons interpellée, disent les officiers municipaux, de s’expliquer si elle étoit dans l’intention de sortir des maisons de l'Ordre ou d’y rester, elle nous a répondu qu’elle était dans l’intention de vivre et mourir dans sa communauté... Nous avons ensuite fait la même interpellation aux dames religieuses et aux soeurs converses, les unes après les autres, et toutes sans exception ont fait la même déclaration que Mme l’abbesse. Signé : de la Bourdonnaye, abbesse de la Joie. — Soeur Le Mayer du Fresque. — Soeur de Lannuguy. — Soeur de Lée. — Soeur du Hourmelin. — Soeur de Longueville. — Soeur Billette. — Soeur Ginguené. — Soeur du Bouilly. — Soeur Hémery. — Soeur Gardye. — Soeur Hervé. — Soeur Hannier. — Soeur Menégal. — Soeur Bouczo. Soeur Le Levroux. — Soeur Lamarre. — Soeur L. de Douville. — Soeur C. de Douville. — Soeur de Keruzec. Soeur Rouxeau. — Soeur Even. — Soeur 0llivier »

Un autre but de la visite des officiers municipaux était de faire l’inventaire du mobilier de la maison et particulièrement de l’argenterie : le gouvernement voulait avoir un état complet des biens meubles, comme il avait déjà le tableau des biens immeubles ; il ne voulait rien perdre du fruit de sa confiscation.

Les agents municipaux trouvérent donc, en fait d’argenterie à la sacristie, 4 calices et leurs patènes, 2 ciboires, une patène, une boite pour les saintes huiles, une croix, 2 petits chandeliers, 8 grands chandeliers, 1 bénitier, 1 encensoir avec Sa navette, 4 burettes, 2 plateaux, une sainte Vierge sur un piédestal, 3 reliquaires, une petite couronne, une petite lampe, un ostensoir, une crosse en vermeil, la croix d’or de l’abbesse et son petit anneau d’or. 

Ils trouvèrent à l’abbatiale : une écuelle et sou couvercle, une cuillère à potage, 5 cuillères à ragoût, une grande fourchette, 22 couverts, 15 cuillères à café, 2 cuillères à sucre, 5 couteaux à pieds d’argent ; ailleurs, pour les directeurs, les pensionnaires et les infirmes, ils rencontrèrent : une petite écuelle et son couvercle, une cuillère à potage, 2 cuillères ragoût, une grande fourchette, un gobelet, 12 couverts et 6 cuillères à café. 

Les religieuses n’avaient pas d’argenterie ; on trouva chez elles : 39 plats d’étain, 33 écuelles d’étain et 34 assiettes aussi d’étain. Il y avait du linge et des meubles en proportion pour le service de la cornmunauté. Quant au mobilier des cellules, les religieuses déclarèrent qu’il était d’usage dans la maison que chaque dame fournit ses meubles, linges et menus objets à sa disposition, et payât même la réparation de sa cellule.  Signé : Jérôme, maire.— Huo de Kermorvan, off. mun. Fraboulet, proc. de la com. — 0l. des Brûlais, secr. greff. (Q. 538). 

Le gouvernement, qui avait confisqué les biens et les revenus de Notre-Dame de la, Joie, servait un traitement de 2.000 livres à l’abbesse, de 700 livres à chacune des dames de choeur, et de 350 livres à chacune des soeurs converses. Mais quelle différence entre jouir directement de ses biens et recevoir une sorte de pension alimentaire ! 

Bientôt, pour toucher cette pension, le gouvernement prescrivit d’élire une économe dans chaque communauté, ce qui pouvait se faire à la rigueur ; et de plus d’élire une supérieure dans chaque maison, ce qui était une usurpation de pouvoir. A l'abbaye de la Joie, il y avait une difficulté de plus, c’est que l'abbesse était inamovible. 

Aussi, quand le maire d'Hennebont, M. Jérôme, se présenta au monastère, le 10 janvier 1791, et fit assembler la communauté en chapitre, à l’effet d’élire une supérieure et une économe, conformément aux décrets de l'Assemblée nationale, l'abbesse lut la protestation suivante : « Messieurs, l’autorité de l'Eglise, qui m’a placée à perpétuité dans cette maison, et qui ne m’a pas dépouillée de mes droits, l’autorité des décrets de l'Assemblée nationale, qui en plus d’un endroit parlent des abbesses perpétuelles et inamovibles, auraient peut-être dû suspendre la démarche que vous faites parmi nous. Je proteste donc, Messieurs, contre cette démarche illégale ; ne croyez pas cependant que par cette protestation je veuille retarder une élection, que vous regardez comme légitime ; je veux au contraire vous la faciliter, mais je ne veux y prendre part, ni pour élire, ni pour être élue. Je prendrai par la suite avec mes supérieurs les moyens de décharger la conscience de mes religieuses.  A l'abbaye de N.-D. de la Joie, le 10 janvier 1791. De la Bourdonnaye, abbesse de N.-D. de la Joie ».

 « Lecture faite de la dite protestation, la communauté a néanmoins, et par pure obéissance à la loi, procédé à l’élection d’une supérieure, au scrutin et à la pluralité des suffrages, lesquels se sont réunis en faveur de Mme de la Bourdonnaye, vers laquelle toute la communauté s’est aussitôt présentée, pour la prier d’accepter la place à laquelle les suffrage libres l’ont portée : ce qu’elle a refusé, et ce qu’elle a ensuite accepté.

De retour au susdit chapitre, et procédant à l’élection de l’économe de la dite maison, les suffrages se sont réunis en faveur de Mme Billette, qui a aussi déclaré accepter. 

Fait double les d. jour, mois et an, sous les signatures des religieuses et du dit commissaire ». (L. 786).

L’année 1791 s’annonçait bien pénible pour les religieuses. On commençait déjà la vente de leurs biens, et on devait la continuer jusqu’au bout. Un autre sujet de douleur pour elles fut de voir leurs deux directeurs, le P. Antoine Duquesne et le P. Pierre-Marie Taillart, se mettre dans le mouvement et prêter le serment la constitution civile du clergé. Le premier, âgé de 57 ans ; le second, âgé de 34 ans, appartenaient, comme les religieuses, à la congrégation des Bernardins. 

Un décret de l'Assemblée nationale, du 23 mai 1791, déclara conserver les communautés de femmes composées de plus de quinze personnes. C’était le cas de N.-D. de la Joie. Mais combien de temps durera cette tolérance ? L’année 1792 s’annonça sous de sombres auspices. Dès le mois de janvier, la commune d'Hennebont demanda le renvoi des Filles de Saint-Vincent-de-Paul de l’hôpital de la ville : ce qui fut accepté par le directoire du district et autorisé par le directoire du département. 

Le 6 avril 1792, le jour du Vendredi-Saint, un décret de l'Assemblée législative supprima les congrégations religieuses qui étant vouées à l’enseignement ou au soin des malades, avaient été jusqu’alors conservées. Leur expulsion toutefois ne fui pas immédiate ; elle s’opéra graduellement. 

Ainsi les Ursulines d'Hannebont, sommées le 23 juin de prêter le serment à la constitution, furent alors obligées de sortir de leur maison. Les autres communautés de femmes, dans le Morbihan, furent presque toutes conservées jusqu’au 1er octobre. 

Voici la lettre écrite, le 27 septembre 1792, par le directoire du département aux divers districts : « Le moment approche, Messieurs, où les couvents de religieuses doivent être évacués. Si les religieuses de votre arrondissement se disposaient à faire difficulté de sortir de leurs maisons, il serait nécessaire de prendre des moyens pour le leur faire exécuter. Celui qui nous parait le plus convenable et le plus propre à éviter les esclandres que ces femmes ne manqueraient pas de faire, si elles sortaient toutes ensemble, serait d’en faire sortir un certain nombre par jour, de manière que ces couvents fussent totalement vides pour le 1er octobre. — On ne doit pas autoriser ces dames à sortir avec leurs habits de religieuses. Cette toilette ne serait propre qu’à exciter le fanatisme. Nous comptons sur le zèle des municipalités des lieux de votre ressort, où se trouvent des monastères, pour l’exécution de ces dispositions. Nous vous prions de leur en faire part. Les administrateurs composant le directoire du département du Morbihan : Bigarré, vic. pr. — Danet aîné. — Brüe. — Lucas. — Le Goaesbe. — Gaillard. pr. g. syn. ».

Le même jour, les dits administrateurs écrivirent directement aux religieuses de la Joie. « Il nous est revenu, Mesdames, que vous vous formiez des doutes sur l’exécution de la loi qui ordonne que vous évacuerez, le 1er octobre prochain, les maisons que vous habitez. Une pareille illusion ne pouvant avoir été répandue que par vos ennemis, nous nous empressons de la dissiper, en vous prévenant que les districts sont très expressément chargés de l’exécution de cette loi, soit par eux-mêmes, soit par les municipalités, à qui ils sont les maîtres de la déléguer » (L. 786).

Cette cruelle sentence fut exécutée sans pitié, et les pauvres religieuses quittèrent, en pleurant, un asile où elles espéraient mourir. Elles se retirèrent chez leurs parents, ou chez des amis charitables, en attendant peut-être une restauration qui ne devait pas venir.

Le 16 août 1793, la Convention ordonna l’arrestation des Suspects, sans prendre la peine de définir ce qu’elle entendait par ce mot. Aussitôt les prisons regorgèrent de nobles, de prêtres, d’ouvriers et même d'inoffensives religieuses. C’est ainsi que l'abbesse de la Joie, Mme de la Bourdonnaye, et sa compagne, Mme du Bouilly, furent internées a Vannes, dans l’hôpital de Saint-Nicolas, avec 112 autres religieuses. On ignore ce que devinrent les autres exilées de la Joie. Ce n'est que le 27 janvier 1795 que la Convention ordonna l’élargissement des religieuses détenues. Les soeurs Hémery, Hervé et Bouczo se fixèrent à Hennebont et y finirent leurs jours.

 

X. VENTES NATIONALES.

Pendant qu’on persécutait les religieuses, on vendait leurs biens. Voici l’acte de vente du monastère et de son enclos, du 13 décembre 1792.

« La maison conventuelle de la ci-devant abbaye de la Joie, consistant en plusieurs corps de batimens spacieux, cloîtres, préaux, pavillons, église, cours, aire à battre, batimens servant à l’exploitation des terres ; l’enclos cerné de murs, consistant en jardins, jardinets, vivier, bassin, bois, verger, prairies, pâtures et terres labourables, contenant 40 journaux et 26 cordes. Et avant l’adjudication il a été arrêté que dans la vente ne seraient point compris les meubles, les ustensiles, notamment ceux de la boulangerie, le tombeau et la statue (de la duchesse), l’horloge, les orangers, deux frênes abbatus, ... ; mais que le chemin situé entre le mur de l’enclos et la rivière, les arbres dont il est planté, ceux bordant le mur du côté opposé, entre la porte Saint-Julien et la grande porte de l’enclos avec le terrain qu’ils occupent, et tout celui situé plus loin entre le mur de l’enclos et le chemin qui conduit aux bois, appartiendraient aux acquéreurs de la maison et de l’enclos. Au dessus de l’enchère de 75.000 livres, mise à la séance du 15 novembre dernier, aujourd'hui (13 décembre 1792) .... au 10ème feu allumé, Hébert a unis 81.100 livres ; au 11ème feu allumé et éteint sans que personne ait mis aucune enchère au dessus ; le Directoire (d'Hennebont), oui le procureur syndic et procurateur, a définitivement adjugé la d. maison conventuelle de l'abbaye de la Joie, enclos et dépendances ci-dessus détaillés au dit citoyen Noel Hébert, négociant à Lorient, qui a déclaré faire valoir en son nom et celui de Julie Martin, son épouse, de moitié avec Jean-Antoine Martin et Catherine Rolland, son épouse, présens et acceptans, pour la d. somme de 81.100 livres. A la charge par les d. adjudicataires de payer le prix de leur adjudication dans les termes fixés par les décrets de l'Assemblée nationale, savoir, dans la quinzaine 13.432 livres 4 sous 9 deniers, le restant en douze ans à compter de ce jour, savoir chaque année un douzième et les intérêts du restant. Et ont les d. adjudicataires signé avec le directoire : Noel Hébert. — Desseaux. — Levan. — Jaffray. — Chabrié, secr. » (Ventes VI. p. 52, 29).

Le même jour, les bois taillis comprenant 108 arpents 76 perches, et les bois de futaie comprenant 42 arpents 54 perches furent adjugés à Jean-Lucien Laigneau, pour la somme de 85.300 livres.

Ces deux gros lots mis à part, il s’agit maintenant de donner le tableau sommaire, paroisse par paroisse, des ventes nationales des biens de l'abbaye.

Saint-Gilles-Hennebont :

La Bergerie, vendue le 16 décembre 1790 à M. Gaignoux : 10.300 livres.

Taillis, pré et parc, 23 décembre 1790, au même : 8.850 livres.

Taillis et près du Vicariat, 23 décembre 1790, à P. Le Fur : 8.650 livres.

Deux maisons, rue Neuve, 20 janvier 1791, à Gohier, Le Bihan : 3.050 livres.

Maison du four banal, 20 janvier 1791, à Le Bihan : 3.450 livres.

Bois et pâture, le 10 février 1791, à Pathelin : 1.850 livres.

Bois de haute futaie, 10 février 1791, à Le Goff : 3.750 livres.

Tenue à Saint-Gilles, 17 mars 1791, à Jehan Lestrohan : 4.775 livres.

Deux métairies aux Granges, 24 mars 1791, à Ch. Le Fur : 18.125 livres.

Deux métairies aux Granges, 21 mars 1791, à P. Le Fur : 17.400 livres.

Métairie aux Granges, 24 mars 1791, à Jehan Le Fur : 9.000 livres.

Métairie aux Granges, 24 mars 1791, à Jehan Lestrohan : 10.000 livres.

Métairie aux Granges, 24 mars 1791, à P. Conan : 9.025 livres.

Métairie du Pavillon, 24 mars 1791, à A. Périer : 12.500 livres.

Grand pré de la Joie, 24 mars 1791, à A. Périer : 22.300 livres.

Parc au mil de la Joie, 24 mars 1791, à A. Gohier : 8.175 livres.

Deux tenues à Saint-Gilles, 19 mai 1791, à La Villesgris : 7.150 livres.

Tenue à Villeneuve-Kerlairon, 19 mai 1791, à La Villesgris : 2.425 livres.

Tenue à Kerambart, le 3 juin 1791, à Veuve Courio : 1.525 livres.

Terres à Lochrist-Inzinzac, mai 1791, à divers... : 2.143 livres.

Pré à Saint-Piaux, le 21 juillet 1791, à Ch. Le Fur : 1.425 livres.

Deux tenues à Lochrist, 25 août 1791, à M. Chardon : 4.650 livres.

Huit maisons, rue Neuve, 8 mars 1792, à divers. : 14.500 livres.

Moulins et pêcheries, 4 juin 1797, à L. Coroller : 10.135 livres.

Fonds d’une prairie, 2 avril 1798, à L. Coroller : 12.121 livres.

Tenue à Saint-Gilles, le 6 juillet 1798, à P. Le Fur : 415 livres.

Saint-Caradec-Hennebont :

Métairies de Kermario, 16 décembre 1790, à M. Le Beau : 45.600 livres.

Tenues du Hentguer, 27 janvier 1791, à M. Le Beau : 14.200 livres.

Moulin du Hentguer, 27 janvier 1791, à Bodenan : 2.400 livres.

Tenue à la Villeneuve, 10 mars 1791, à M. Corvest : 3.725 livres.

Tenue Raoul au bourg, 17 mars 1791, à Veuve Caris : 2.050 livres.

Petites tenues au bourg, 27 octobre 1791, à divers : 3.785 livres.

Tenue au bourg, le 7 mars 1798, à Jehan Coeffic : 7.417 livres.

Tenue Evano au bourg, 28 mars 1798, à Veuve Tesserot : 2.016 livres.

Fonds de 4 maisons et terres, 1807, à divers : 1.500 livres.

Caudan :

Tenue à Kerhonno, 10 mars 1791, à M. Dessaux : 625 livres.

Tenue à Kerulvé, le 10 mars 1791, à L. Huet : 1.100 livres.

Tenue au Cosquer-Kermamenic, 19 mai 1791, à Jehan Nicolas : 2.800 livres.

Languidic :

Tenue à Botcunolé, 20 janvier 1791, à J. Le Calvé : 3.425 livres.

Deux tenues à Keranhun, 20 janvier 1791, à J. Allio : 10.700 livres.

Tenue à Kervannic, 27 janvier 1791, à M. Le Beau : 18.000 livres.

Tenue à Kerguéven, 27 janvier 1791, à Veuve Le Rouzo : 3.800 livres.

Tenue à Kerieu, 3 février 1791, à Th. Kernen : 1.525 livres.

Tenue à Kerorsol, 3 février 1791, à M. du Saulchoy : 3.025 livres.

Tenue à Tréauray, 17 mars 1791, à F. Caillosse : 1.500 livres.

Moulin de Kerorsol, 9 juin 1791, à Y. Le Marec : 2.500 livres.

Tenue au Braigno, 11 juin 1791, à P. Le Bolay : 505 livres.

Tenue au Braigno, 21 juillet 1791, à Ch. Le Fur : 2.625 livres.

Tenue à Kernec, 21 juillet 1791, à J . 0llier : 9.400 livres.

Tenue à Penhoet, 25 août 1791, à M. Bijotat : 1.625 livres.

Tenue à Kerrudec, 5 janvier 1798, à L. Nouail : 14.041 livres.

Tenue à Toul-er-Roh, 8 juillet 1807, à Gallois : 1.640 livres.

Loge à Lambézégan, 8 juillet 1807, à Louvel : 924 livres.

Brandérion :

Tenue au bourg, le 12 mai 1791, à A. Le Quéven : 3.025 livres.

Tenue à Milledec, le même jour, à M me Le Jeune : 3050 livres.

Tenue au bourg, 22 mai 1798, à J. Philippe : 5.114 livres.

Nostang :

Tenue à Locmaria, 17 février 1791, à M. Kerler : 925 livres.

Tenue à Saint-Thomin, 21 juillet 1791, à Le Bihan : 230 livres.

Tenue à Saint-Hernan, 21 juillet 1791, à M. Dessaux : 550 livres.

Merlevenez :

Moulin à vent du Hédan, 17 mars 1791, à Gigon : 2.000 livres.

Tenue à Keralan, le 17 mars 1791, à Le Hunsec : 4.400 livres.

Tenue à Lesmoal, le 12 mai 1791, à Ph. Le Goff : 810 livres.

Tenue à Keralan, 21 juillet 1791, à M. Le Jeune : 4.100 livres.

Tenue à Trévalzun, 21 juillet 1791, à M. Le Jeune : 4.125 livres.

Tenue au bourg, 19 mai 1791, à Aupy pour N... : 174 livres.

Tenue au bourg, 7 janvier 1798, à J. Le Borgne : 11.653 livres.

Tenue au bourg, 11 mars 1798, à A. Brédec : 10.020 livres.

Plouhinec :

Tenue au Loch, le 17 février 1791, à M. Barbeur : 4.025 livres.

Tenue à Kerfourcber, 17 février 1791, à M. Dessaux : 4.000 livres.

Tenue à Lézivry, le 19 mai 1791, à M. Filliaux : 3.200 livres.

Tenue au Loch, le 21 juillet 1791, à M. Lapotaire : 1.700 livres.

Riantec :

Tenue à Kervern, 17 février 1791, à M. Dessaux : 1.600 livres.

Tenue à Branroch, 17 mars 1791, à M. Fornier : 1.725 livres.

Tenue à Saint-Léon, le 21 avril 1791, à M. Durand : 2.455 livres.

Deux tenues à Kervern, le 21 avril 1791 à M. Durand : 5.830 livres.

Deux autres à Kervern, 19 mai 1791, à P. Lavaysse : 2.675 livres.

Deux autres à Kervern, 16 juin 1791, à M. Durand. : 2.175 livres.

Moulin de Sterbouest ?

Deux tenues à Kerner, 19 mai 1791, à G. La Villesgris : 2.900 livres.

Deux autres à Kerner, même jour, à P. Lavaysse : 2.175 livres.

Deux autres à Kerner, même jour, à Fornier, Tohic : 2.730 livres.

Tenue au bourg, 21 juillet 1791, à Le Tohic : 1.511 livres.

Tenue au bourg, le même jour, à M. Le Jeune : 1.000 livres.

Tenue à Kervern, 15 avril 1807, à J. Jéhanno : 1.461 livres.

Tenue à Kerner, le même jour, à F. Josse : 1.563 livres.

Tenue à Kerner, 22 avril 1807, à Veuve Stéphan : 1.385 livres.

Kervignac :

Tenue au bourg, 3 février 1791, à Jehan Perron, édificier : 2.375 livres.

Tenue à Locmaria, 17 mars 1791, à J. Le Garff : 400 livres.

Tenue à Kerhiénay, 20 juillet 1791, à J. Lestrohan : 1.200 livres.

Tenue à Kerguéhennec, 27 octobre 1791, à M. Dessaux : 6.075 livres.

Tenue à Branzéhan, 27 octobre 1791, à M. Beaulieu : 3.650 livres.

Tenue au bourg, le 2 août 1799, à Ch. Le Fur : 358 livres.

Tenue au Moustoir, 8 juillet 1807, à M. Gallois : 2.151 livres. 

Plouay :

Tenue à Toulgoédo, 19 mai 1791, à M. La Villesgris : 2.725 livres.

Tenue à Coetulair, 16 juin 1791, à Veuve Le Gal : 1.100 livres.

Inguiniel :

Deux tenues à Kerguéno, 25 août 1791, aux Henry : 4.375 livres.

Tenue à Kerguiton, 25 août 1791, aux Henry : 1.625 livres.

Tenue à Kerguiton, 11 mars 1798, à J. Le Quéré : 4.017 livres.

Bubry :

Deux tenues à Kerlérien, 19 mai 1791, à M. Le Jeune : 2.975 livres.

Tenue au bourg, 8 juillet 1807, à L. Rioux : 506 livres.

Tenue à Kerlevenic... 

Lanvaudan :

Tenue à Kerantorner, 3 février 1791, à Veuve Glouet : 1.575 livres.

Tenue à Saint-Symphorien, 17 mars 1791, Veuve Glouet : 2.825 livres.

Tenue à Penprat, le 17 mars 1791, à L. Le Cren : 3.200 livres.

Plusieurs des immeubles ci-dessus, adjugés en 1791, et délaissés par les adjudicataires, furent remis en vente en 1798, et cédés à des prix très élevés, à cause de la dépréciation des assignats. Quant au monastère, l'église et la maison conventuelle furent démolies par l'acquéreur. Les matériaux servirent à bâtir, au nord et à l’ouest de l'abbatiale, une usine pour le fer. Telle était la destination des édifices en 1835, lors de la confection du cadastre le tout appartenait A MM. Baudy, frères, banquiers à Paris. En 1840, M. Laurent, ingénieur Lorient, acheta la Joie, puis démolit l'usine et rebâtit l’aile sud de l'abbatiale, telle qu’on la voit au début du XXème siècle. M. de Marguerye ne fit que passer à la Joie en 1845. M. Quéro, son successeur dans la propriété, détruisit en 1864 toute la distribution ancienne de l’enclos, pour en faire un parc anglais. Son fils refit l’angle sud-est de l’abbatiale, et vendit son domaine en 1896 à M. Perrin, ingénieur des mines, qui le possède au début du XXème siècle, vers 1903 (J.-M. Le Mené). 

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