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Claude CHAPALAIN, prêtre guillotiné à Brest
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.

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Tanguy JACOB et Claude CHAPALAIN, Marie CHAPALAIN, veuve Macé, leur receleuse.

229. — Tanguy JACOB, fils d’Yves et de Renée Falchun, naquit au manoir de Mesnaot en Saint-Pabu, le 6 mars 1751, et fut baptisé le lendemain. Claude CHAPALAIN vit le jour deux ans plus tard, le 8 mai 1753, au Bourg-Blanc, du mariage de François et de Marguerite Conq. Il reçut le saint baptême le jour même de son entrée dans la vie. On ignore où Tanguy Jacob et Claude Chapalain firent leurs études secondaires. Mais les archives du Grand Séminaire de Léon les montrent étudiant en même temps dans cet établissement. Tanguy Jacob est ainsi noté par son supérieur : « scientiâ, 2e classe ; virtute, 1re classe ».

Pour son ordination aux ordres mineurs, Chapalain a comme note : « de la 3e classe, a fait des progrès, est pieux ».

Le 12 septembre 1788, Claude Chapalain signe pour la première fois dans les registres paroissiaux du Bourg-Blanc ; et à son nom il ajoute « sous-diacre ».

Tanguy Jacob et Claude Chapalain reçoivent en même temps le sacerdoce dans l’ordination générale des Quatre-Temps de septembre 1779.

Dès le mois de janvier 1780, Claude Chapalain est nommé curé, c’est-à-dire vicaire à Sizun, et signe avec cette qualité sur les registres du Bourg-Blanc. Le 31 mars 1780, nous relevons la première signature de M. Tanguy Jacob comme « curé de Saint-Pabu ».

Et la vie de ces deux prêtres s’écoule, pour l’un à Saint-Pabu, pour l’autre à Sizun, comme la vie ordinaire d’un prêtre de paroisse à cette époque, ne laissant d’autres traces durables de leur activité extérieure que des rédactions d’actes de baptême, de mariage et de sépulture.

230. — Mais voici venir la Révolution. A la protestation de l’évêque de Léon, Mgr de la Marche, contre la nouvelle Constitution civile du clergé français, les prêtres de son diocèse adhèrent en grand nombre et, parmi les signatures, on compte celle de Tanguy Jacob, « curé de Saint-Pabu », et Claude Chapalain, « curé de Sizun » (22 octobre 1790).

On sait que le dimanche 30 janvier 1791, les municipalités furent invitées à demander aux prêtres en fonctions le serment d’adhésion à la Constitution civile du Clergé. Le recteur de Saint-Pabu, Tanguy Jacob, le refusa.

A Sizun, le clergé de la paroisse comprenait MM. Floc'h, recteur, Chapalain, curé, et plusieurs prêtres habitués ; à l’exception de deux de ces derniers, tous refusèrent le serment, ils furent obligés, par suite de l’arrêté pris le 21 avril 1791 par les administrateurs du Finistère, de s’éloigner de leurs paroisses d’une distance d’au moins quatre lieues.

231. — M. Claude Chapalain quitta dès lors Sizun. Il se retira d’abord dans sa paroisse natale, au Bourg-Blanc, car d’après sa déposition lors de son arrestation, il déclare, en 1794, n’avoir fréquenté Plouguin que depuis deux ans. D’autre part, un habitant du Bourg-Blanc se souvient que son grand-père, nommé Jean-Marie Le Gall, né en 1818 et mort en 1894, racontait que sa mère avait assisté à un baptême fait dans une grange au Bourg-Blanc par Claude Chapalain. En 1793, celui-ci se trouvait à Plouguin, et, parmi les cahiers rédigés par les prêtres fidèles pendant la Révolution, M. l’abbé Carof, recteur actuel de Plouguin, possède un acte de baptême dressé le 4 février 1793 par Claude Chapalain. En 1794, il baptise encore François-Marie Coz, fils de François et de Marie Pellé. Quant à M. Jacob, il signe la dernière fois sur les registres de Saint-Pabu le 19 août 1792, puis il erre autour de sa paroisse, et dans le cahier précité, on peut lire les actes de trois baptêmes faits par M. Jacob dans la paroisse de Plouguin pendant les deux années 1793 et 1794.

Tout ce ministère, et bien d’autres qui ne nous seront jamais révélés ici-bas, ne s’accomplissaient cependant pas sans courir des risques terribles. Dès le 29 novembre 1791, les administrateurs du Finistère avaient ordonné l’arrestation de tous les prêtres réfractaires jugés suspects « d’incivisme ».

Le 29 juin 1792, la même administration, faisant sienne le décret adopté par l’Assemblée nationale, mais dont l’effet demeurait suspendu par suite du veto royal, arrêtait que les prêtres septuagénaires et infirmes seraient incarcérés à Audierne et que les autres seraient déportés.

Puis vint la loi du 26 août de cette année avec son exil obligatoire, celle des 21-23 avril 1793, celle des 29-30 vendémiaire de l'an II, la chasse aux prêtres organisée et tarifée le 6 janvier 1793. MM. Tanguy et Chapalain bravèrent tout cela pour ne pas laisser sans secours les âmes des catholiques que l’on prétendait entraîner dans le schisme et, de là, dans l’irréligion.

232. — C’est au milieu de ces périls, sans cesse renaissants, que MM. Tanguy et Chapelain virent arriver le mois d’octobre 1794. Plus on étudie l’histoire de la Révolution, plus on voit clairement que la chute de Robespierre, le 9 thermidor, n’avait été qu’une simple révolution de palais : des jacobins affolés par la peur d’être tués supprimèrent Robespierre et ses partisans, sans se douter des conséquences de leur acte pour le rétablissement de la liberté des citoyens ; en tout cas les lois qui proscrivaient le culte catholique romain et ses ministres ne furent ni abrogées, ni même alors atténuées en Bretagne ; voilà pourquoi à la suite d’une battue organisée par le représentant du peuple Bernard Tréhouard, de Saint-Malo, les prêtres Tanguy et Chapalain, dénoncés par un appelé Talhouarn, furent surpris le 23 septembre 1794 chez la sœur de l’un d’eux, MARIE CHAPALAIN, qui leur donnait l’hospitalité. Cette courageuse chrétienne était née au Bourg-Blanc, le 1er février 1751. Elle avait reçu le baptême le jour même. Après avoir épousé, vers 1771, un cultivateur appelé Henry Mazé, elle vivait au village de Kernizan, dans sa paroisse natale. Elle était veuve en 1786 et exploitait en commun avec son gendre et ses enfants les terres attachées à sa ferme.

233. — Comme on ne jouissait pas d’un instant de tranquillité à cette époque, lorsqu’on recélait des prêtres réfractaires, la pieuse veuve Mazé avait envoyé son jeune fils, François Mazé, âgé de 12 ans, en sentinelle dans un des champs dominant les environs, durant qu’elle s’apprêtait à donner à dîner à M. Tanguy ainsi qu’à son frère ; il était onze heures ; les prêtres se disposaient à manger la soupe, quand tout à coup le petit François Mazé entre en courant : « Ar païaned, ar soudarded ! les païens, les soldats ! » cria-t-il. Les prêtres descendent aussitôt et pénètrent dans leur cachette avec un nommé Olivier Le Guen, jeune homme de Saint-Pabu, qui mangeait en bas et qui avait besoin de se cacher, car il était déserteur.

On entend bientôt un bruit de pas, et les soldats pénètrent dans la cour de la ferme ; ils cernent la maison d’habitation, puis un officier, escorté de quatre soldats et d’un administrateur du district, entre dans la vieille demeurance. La veuve Mazé va au-devant d’eux, cependant que sa fille, qui sort à peine de couches, brisée par l’émotion, se tient assise près du foyer. « Qu’y a-t-il pour votre service ? » demande en breton la veuve Mazé. — « Il y a que je commence par arrêter ce galopin qui est là et que nous avons vu courir tout à l’heure pour vous donner l’alarme », dit le gradé en mettant la main au collet du petit Mazé ; « mais c’est inutile, nous savons que tu caches des prêtres réfractaires. Soldats, fouillez-moi cette pièce, il y a là une cachette derrière un lit clos ».

Les soldats ont vite fait de déplacer armoires et lits clos, et voici que derrière un de ces meubles, dans renfoncement du mur, bien qu’adroitement dissimulée, la cachette signalée par Talhouarn est vite mise à jour ; les soldats en font sortir trois hommes. Sans même les interroger, le chef s’adresse à sa troupe : « Puisqu’ils se cachent, c’est qu’ils sont coupables ; soldats, mettez-leur les menottes, et joignez à eux le garnement que voici », ajoute-t-il, en désignant le jeune Mazé. — « Qui est la maîtresse ici ? » demande ensuite l'officier aux deux femmes. — « C’est moi », répond la veuve Mazé. — « Saisissez-vous maintenant de cette femme », commande-t-il sans pitié. Mais sa fille, malgré sa faiblesse, refoulant toute émotion, se lève et s’adressant à l’officier : « C’est mon mari et moi qui tenons cette ferme, s’écrie-t-elle, c’est moi qui ai reçu les prêtres ; si quelqu’un est coupable devant la Nation, c’est moi ». « Taisez- vous, ma fille, dit la mère ; vous avez une famille à élever, n’enlevez pas une mère à ses enfants ; ne croyez-vous pas que je sois mûre pour le Ciel ? Laissez-moi partir avec ceux-ci et, s'il faut verser son sang, que la volonté de Dieu soit faite ! Quand on a la conscience en paix, on ne craint pas la mort ».

Sur les représentations du maire de Plouguin, on décida cependant de relâcher la fille Mazé, épouse Le Gall, comme malade de ses couches et intransportable, la confiant à la surveillance de la municipalité.

234. — Les prisonniers passèrent la nuit à la prison de Ploudalmézeau, puis celle du lendemain à celle de Saint-Renan. Ce furent leurs gîtes d’étapes en attendant d’être incarcérés à Brest.

Le surlendemain, 25 septembre, ils arrivèrent dans cette ville où ils furent interrogés par le général Robinet, assisté de trois administrateurs brestois. On a publié ailleurs intégralement les procès-verbaux qui furent dressés à cette occasion et nous ont transmis leurs réponses.

M. Jacob s’y déclara prêtre réfractaire, sans domicile fixe, ancien curé de Saint-Pabu, ne vivant que des charités qu’il recevait dans les paroisses de Saint-Pabu, Plouguin et Plourin. Il reconnut aussi sans hésiter pour lui appartenir une custode qu’on lui présenta. M. Chapelain fit à ses interrogateurs des réponses à peu près identiques. Ils évitèrent l’un et l’autre de compromettre davantage les personnes qui leur avaient donné asile.

Quant à Marie Chapalain, veuve Mazé, elle se refusa nettement de déclarer, comme on le lui conseillait, pour sauver sa vie, qu’elle n’avait cédé qu’à la force en recevant les deux prêtres [Note : La tradition veut qu’elle ait répondu aux personnes qui lui conseillaient ce subterfuge : « Moi mentir ! moi renier mon frère ! il vaut mieux mourir ensemble »] et se borna à dire que si elle avait hospitalisé les deux proscrits, c’est qu’ils en avaient besoin.

235. — Le 26 septembre, les accusés furent emprisonnés au château de Brest, dit alors Fort-la-Loi, ainsi qu’en fait foi le registre d’écrou de cette forteresse.

Le 3 octobre, les représentants du peuple ordonnèrent aux membres du tribunal criminel de Quimper de se transporter à Brest pour les juger. Dès le 12 octobre, l’accusateur public commençait l’instruction de cette affaire et, le 14 de ce même mois, les prisonniers de Kernisan comparaissaient devant le tribunal chargé de les condamner à mort. Aucun doute n’était possible en effet sur la sentence à rendre. Les lois d’exception contre les prêtres réfractaires étaient toujours en vigueur, de même les lois contre les personnes qui oseraient leur donner asile. On a publié ailleurs le texte du jugement qui fut rendu contre MM. Tanguy Jacob et Claude Chapalain. Ils furent l’un et l’autre condamnés, le 14 octobre 1794, à subir la peine capitale aux termes de la loi des 29-30 vendémiaire an II, en qualité de prêtres réfractaires, demeurés cachés en France pour y faire du ministère, malgré l’injonction que la loi leur faisait de se déporter. Marie Chapalain devait, elle aussi, partager leur sort aux termes de la loi du 22 germinal an II, pour avoir sciemment abrité les deux proscrits. L’arrêt homicide fut rendu aux 11 heures du matin et l’exécution dut avoir lieu ce jour même. Nous employons le terme « dut », car telle était alors la diligence prescrite par la loi qui faisait périr les prêtres. Quant à la preuve positive, elle nous fait défaut, car on a négligé d’insérer le décès des trois guillotinés sur les registres d’état civil brestois.

236. — Mais, du fait même de leur exécution, on ne peut douter. Le registre d’écrou de leur prison utilise pour justifier leur sortie de prison le terme éloquent « condamnés à mort ». Un contemporain de leur supplice, M. Henry, administrateur du diocèse de Léon durant la Révolution, affirme lui-même leur exécution à Brest ; enfin un chant, dit « complainte de M. Jacob, recteur de Saint-Pabu », composé peu après son supplice et encore chanté de nos jours, conserve son souvenir dans les populations qu’il a évangélisées. De même au Bourg-Blanc, patrie de M. Chapalain, un chant en langue bretonne a fixé dans la mémoire des fidèles le nom de M. Chapalain indissolublement lié à celui de son héroïque sœur.

Les représentants de la famille de M. Chapalain sont du reste encore nombreux aujourd’hui à Plouguin et sont persuadés que leur grand-oncle et sa sœur ont été mis à mort en haine de la Foi. Il en est de même à Plourin pour M. Tanguy Jacob et son souvenir demeure toujours vivace dans cette paroisse.

BIBLIOGRAPHIE. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne, op. cit. (1845), II, p. 5. — Téphany, Histoire de la Persécution religieuse, etc., op. cit. (1879), p. 540. — Peyron, Les prêtres mis à mort, etc., op. cit. (1919), p. 77. — Chanoine Saluden, Procès et supplice des confesseurs de la Foi Tanguy Jacob, Claude Chapalain et Marie Chapalain, Brest, 1927, in-8° ; on y trouve toutes les pièces de leur procès.

(Archives du Finistère, série M, dossiers du tribunal criminel du Finistère, non cotés).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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