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L'INDUSTRIE DES TOILES EN BRETAGNE AVANT LA RÉVOLUTION

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Les toiles dites Bretagne, fabriquées particulièrement dans le pays de Léon et les environs de Saint-Brieuc, Quintin et Loudéac ; ainsi que celles de Nantes, Clisson, Dinan, Fougères et Vitré, étaient l'objet d'un des commerces les plus florissants de la province de Bretagne jusqu'au milieu du dix-huitième siècle époque qui marque l'apogée de la prospérité de cette industrie.

La production des toiles avait déjà beaucoup diminué, et ce commerce périclitait, au moment où Suzanne Richard constate la rareté de ce tissu à Morlaix. La vulgarisation des étoffes de coton porta un coup mortel à l'industrie des toiles de Bretagne.

Au milieu du dix-huitième siècle, on fabriquait annuellement six à sept mille balles de toiles dites Bretagne, larges et étroites, qui, à cette époque valaient, en moyenne 1.300 fr. la balle, ce qui donne l'énorme chiffre de neuf millions de francs de marchandises de cette nature s'expédiant, chaque année des ports bretons de Morlaix, Saint-Malo et Nantes. Les sept huitièmes étaient expédiés en Espagne. Outre la toile dite Bretagne, il y avait : les crez (ou crées) de différentes largeur, les gratiennes, les toiles à carreaux, les toiles à torchons, les toiles d'usage, la toile blanche dites de ménage ; les toiles d'emballage, la toile à voiles, la roscone, etc.

Les crez se fabriquaient surtout dans le Léon, et les Bretagne, aux environs de Saint-Brieuc et de Loudéac. D'après les calculs établis par Cambry (Cambry, Voyage dans le Finistère) la production de toutes ces toiles s'élevait à une valeur de onze à douze millions par an.

L'Espagne et le Portugal, qui en consommaient la majeure partie, envoyaient en échange d'autres marchandises ; mais la valeur de celles-ci ne dépassant pas cinq cent mille francs, c'était donc un retour d'argent de près de onze millions que valait à la France l'industrie des toiles de Bretagne.

On comprend par là quelle était alors la richesse des pays de Quintin, Loudéac, Uzel, Moncontour, principaux centres de production des toiles. Les marchés de ces quartiers offraient le spectacle d'une activité extraordinaire.

« Cinquante à soixante gros marchands, montés sur leurs petits bancs, recevaient des mains de leurs facteurs les pièces présentées par les tisserands et les petits fabricants, discutant, acceptant, refusant ; faisant porter dans leurs dépôts les toiles choisies : donnant des bons sur les banquiers qui suivaient les marchés... Quelle vie ! quelle animation ! quelle richesse sur ces places maintenant, et depuis si longtemps déjà, désertées et mortes !... Les campagnes retentissaient du bruit des métiers, du vacarme causé par les marteaux de bois pilant la toile en cadence. Chaque ruisseau aboutissait à une blanchisserie, chaque maison laissait entendre le ronflement des rouets et le chant monotone des fileuses, ou le tictac régulier des métiers... Tout cela a disparu.... » (Robert Oheix).

Le commerce des toiles de Bretagne était régi par une réglementation toute spéciale. Avant que les pièces ne fussent mises en vente, elles étaient, chez le fabricant, visitées par un inspecteur et deux négociants, nommés inspecteurs-marchands, que l'on changeait tous les trois mois. Les pièces reconnues sans défaut recevaient alors la marque de la ville [Note : Le 16 octobre 1791, l'assemblée constituante supprima les bureaux établis pour la marque des toiles. Mais, dès l'an VI, la déconsidération produite par les fraudes de toute espèce, dans la vente de ce tissu, fit sentir le besoin urgent de l'établissement des marques de commerce. Une loi fut présentée, en ce sens, au Conseil des anciens, mais rien ne fut décidé à ce sujet].

Tout achat était interdit hors du lieu désigné pour les marchés et il était défendu aux fabricants d'être revendeurs. Chacun d'eux ne devait écouler, dans le commerce ou chez les particuliers, que les toiles qu'il avait fait fabriquer sur ses propres métiers et par des tisserands à ses gages. Mais ce sage règlement, garantie de la bonne qualité de la marchandise, tomba en désuétude et, à la fin du XVIIIème siècle, les fabricants étaient presque tous en même temps revendeurs de toiles qu'ils n'avaient pas fait fabriquer eux-mêmes.

Un fonctionnaire, nommé par le gouvernement, était chargé de la vérification des toiles. Désigné sous le nom de « Commis à la marque des toiles » il recevait des appointements annuels de huit cents livres. Ses fonctions consistaient à faire, à peu près tous les mois, des tournées et visites chez les blanchisseurs, pour empêcher l'emploi d'ingrédients corrosifs dans le blanchissage de la toile ; et chez les marchands de la campagne, pour réprimer l'achat clandestin des toiles, les fraudes des toileux à longs pouces et les autres abus contraires aux dispositions prises par le roi dans ses « Lettres patentes sur le règlement des toiles appelées Bretagne ».

Ces lettres sont du 19 février 1736 « régistrées par le Parlement le 22 mars 1736 » (A Rennes, chez Guillaume Vatar, imprimeur ordinaire du Roy du parlement et du droit), et contiennent une réglementation commerciale, en 49 articles, qui, pour la plupart, sembleraient aujourd'hui bien rigoureux, minutieux et même vexatoires. Elle atteignait du moins son but qui était d'assurer la sécurité de l'acheteur et le bon renom des toiles de Bretagne, en rendant la fraude presque impossible.

Les peines édictées étaient fort sévères et leur application paraît avoir été plus dure encore. Les délits poursuivis furent généralement : le défaut de laize, le pliage irrégulier, la vente en dehors des temps et lieux réglementaires, l'usage d'aunes trop courtes, et, dans le blanchissage, l'emploi d'ingrédients corrosifs. Les amendes étaient très fortes, presque hors de proportions avec les délits : cinq cents livres et trois cents livres par délit constaté, avec confiscation des toiles. Une partie de ces amendes était attribuée aux hospices du pays.

Indépendamment des peines encourues, la confusion était grande pour celui qui se faisait dresser un procès-verbal pour fraude. C'était la déconsidération et le déshonneur vis à vis de ses collègues de la « Fabrique », corporation alors fière et puissante, qui, tels nos syndicats modernes, englobait la plus grande partie des négociants en toile pour le soutien et la défense de leurs intérêts professionnels. Aussi, quelquefois, les contrevenants préféraient-ils laisser leurs toiles aux mains du commissaire, plutôt que de se faire connaître, surtout quand ils pensaient n'être pas trahis par leur marque particulière, le plus souvent illisible pour quiconque n'était pas familiarisé avec ce grimoire industriel.

Parfois aussi des délinquants, trop bien protégés en haut lieu, parvenaient à se tirer d'affaire à meilleur compte et obtenaient remise de la peine encourue et, même, mainlevée de la saisie. C'était un affront des plus graves pour le commissaire-poursuivant qui, pourtant, exerçait généralement ses fonctions avec une conscience extrême. Mais on sait que de tout temps : « La raison du plus fort fut toujours la meilleure » et que l'humble pot de terre s'est souvent brisé contre le pot de fer, en cheminant à ses côtés.

Les négociants en toile devenaient, pour la plupart, riches et puissants et il n'était pas rare de les voir acquérir de superbes châteaux, mis en vente par suite de la pauvreté de leurs derniers seigneurs. Le toileux en eût, tout aussi volontiers, acheté les titres et les ancêtres si cette... « marchandise » se fût vendue à l'encan, mais une noble lignée est l'un des rares et précieux dons de Dieu que l'or ne saurait obtenir.

Dans l'antique et seigneuriale demeure, pleine de glorieux souvenirs, le toileux établissait son quartier général, ses magasins et dépôts de marchandises ; ou se retirait, après fortune faite, pour y vivre en châtelain, ajoutant parfois, à son nom roturier, le nom de la terre dont il devenait le seigneur. Cela a souvent donné lieu à des confusions entre les familles et, quand vint la Révolution, presque tous les noms de ce pays, dit gallo, étaient accompagnés de particules ou de titres plus ou moins authentiques.

Si les toileux devenaient grands seigneurs, quelques gentilshommes aussi, dans le but de remédier au mauvais état de leurs finances, fort endommagées par les folles dépenses du Grand Règne, eurent la mauvaise inspiration de se faire toileux. Mais l'aune du marchand seyait mal à des mains habituées, de père en fils, au maniement de l'épée, ou encore de la charrue, instrument de conquête pacifique, vainqueur des terres arides qu'elle sait rendre fécondes.

Généralement le négoce ne réussit guère à ces fils des preux. Bien peu virent, au frottement de la toile, briller d'un nouvel éclat le blason de leurs ancêtres. A ce contact, hélas ! disparut, le plus souvent, le peu d'or qui y demeurât encore (J. Baudry).

 

Quelques arrêts du Conseil d'Etat du Roi et lettres patentes du Roi concernant l'industrie de la toile fabriquée en Bretagne :

- 1er juin 1693. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi qui ordonne que " jusque au 1er octobre prochain les toiles fabriquées en Bretagne, que les négocians feront porter à Lille pour faire sortir du Royaume, seront déchargez de tous droits ".

- 19 juin 1703. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi qui ordonne que " les toiles propres à faire des voiles de vaisseaux, navires et bastimens de mer, appelées Noyales, des fabriques de la province de Bretagne, pourront être transportées par terre de la dite province de Bretagne à Dunkerque, en payant pour tout droit 40 sols du cent pesant pendant la présente guerre seulement ".

- 18 septembre 1708. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi, qui ordonne que " pendant la présente guerre, à commencer du premier jour du mois d'octobre prochain les marchands et négocians de Bretagne et de Normandie qui voudront faire des envois en Espagne par la voie de terre, des toiles provenant des manufactures desdites provinces, pourront les faire sortir par le port de Bayonne ".

- 11 mai 1719. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi qui défend à tous les marchands et négociants de "contrefaire et plier les Toiles de Laval, en Toiles de Bretagne ".

- 6 mars 1725. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi, qui ordonne que " les droits spécifiés dans la Pancarte des droits et devoirs dûs aux Ports et Havres de Bretagne du 25 juin 1565, seront perçus sur toutes les marchandises y dénommées ; et en conséquence, condamne plusieurs marchands de Landerneau, au payement des droits de cinq sols monnoye faisant six sols Tournois, sur chaque cent aulnes de Toiles qu'ils ont fait charger à Landerneau ".

- 4 juin 1732. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi qui ordonne que " des pièces de toile, fabriqué de Laval , saisies sur le nommé Tufferie et autres seront coupés de deux aunes en deux aunes pour avoir été vendues pour Toiles de Bretagne ".

- 19 février 1736. Lettres patentes du Roi portant " règlement pour les toiles appelées Bretagnes, qui se fabriquent dans la province de Bretagne ".

- 19 février 1736. Lettres patentes du Roi portant " règlement pour les toiles appelées Crées et Enveloppes, qui se fabriquent dans la province de Bretagne ".

- 29 mai 1736. Lettres patentes du Roi portant " règlement pour les toiles appelées nantoises, de Clisson, façon de Clisson, hauts et bas Brins de Dinan, de Saint-Georges Beurières, Peltre, Brins communs de Fougères, de Vitré, de halle et d'emballage, et autres différentes sortes de toiles appelées sortes ou d'usage, sans autre dénomination particulière qui se fabriquent dans la province de Bretagne ".

- 6 septembre 1740. Arrêt du Conseil d'Etat du Roi qui permet aux négociants de Vannes d'expédier par le port de cette ville les toiles appelées Bretagne qu'ils enverront à l'étranger.

- 16 décembre 1780. Lettres patentes du Roi portant " règlement pour la fabrication des toiles et toileries dans la généralité de la Bretagne ".

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