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CLÉDER VERS LE CONCORDAT (RÉGIME CONCORDATAIRE).

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Enfin signalons l'état paroissial de 1800 : 120 baptêmes (84 par M. Marzin, dont 3 de Plouescat, et 36 par M. Le Roux, qui ne paraît pas du 17 octobre au 12 décembre) et 32 mariages, dont 1 de Plouescat, tous bénis par M. Marzin. Le culte paraît dès lors exercé sous un régime de liberté surveillée.

Ainsi le 20 août 1800, au mariage de Jean Floc'h de Plounévez et Jeanne Le Mic de Cléder, la dispense des trois bans est mentionnée ; le 20 octobre, quand la liste reprend avec Paul Floc'h et Anne Cousquer, tous deux de Cléder, les trois bans ont été publiés. Et désormais ce sera l'habitude...

Mieux encore : les prêtres reviennent d'exil ou sortent de leurs cachettes, — quatre le même jour à Cléder, 23 février 1800, et le registre municipal les inscrit froidement :

M. Joseph Corre, « cy-devant prêtre », de Sibiril (45 ans, 1 m. 626, cheveux gris, yeux bruns, nez petit, bouche moyenne, visage plein) se présente aux agents municipaux de Cléder, avec huit témoins, dont trois de Cléder (Vincent Caer, Paul Grall, Yves Ollivier) et cinq de Sibiril (Fr. Boédec, Jean Bian, Claude Le Duc, Claude Autret, Marguerite Corre). Il avait résidé à Kerengat en Sibiril, dans une maison appartenant à celle-ci, de 1788 à Noël 1792, et il avait exercé publiquement les fonctions ecclésiastiques. Le 20 mai 1795 il s'était présenté à Lesneven devant le procureur-syndic Le Gall, pour faire sa déclaration de résidence : Sibiril.

M. Jean-Louis Kerrien, prêtre de Taulé (37 ans, 1 m. 571, cheveux noirs, yeux bruns, nez aquilain, visage ovale), avait résidé dans une maison de Jean Postec, à Cléder, du 1er décembre 1791 au 1er août 1792. Ses témoins furent Jean Postec, Vincent Caer, Paul Grall, Laurent Prigent, René Abiven, Paul Soun et Paul Pennors, de Cléder, avec Guillaume Le Jeune, de Sibiril.

M. François Prigent, « cy-devant curé » d'Henvic (39 ans, 1 m. 625, cheveux noirs, yeux roux, visage ovale), avait résidé à Plouescat, du 1er septembre 1791 au 24 août 1792, dans une maison de Marguerite Nédélec, veuve Le Got, qui vient en témoigner avec Jean-Marie et René-Marie Le Got, René et Denis Derryen, Pierre Guichou, Denis Elou, François L'Ansonner et Yves Le Goff de Plouescat.

Enfin Yves Postec, cy-devant prêtre de Cléder, (40 ans, 1 m. 625, cheveux châtains, visage rond). Ses témoins étaient Pierre et Joseph Le Jeune, de Sibiril, et Paul Grall, Fr. Mear, Fr. Grall, Jean Postec « frère et principal locataire du certifié », Laurent Prigent, Nicolas Inizan, de Cléder. Du 21 juin au 29 septembre 1792, il avait résidé chez Jean Postec. M. Yves Postec, le 11 juillet 1802, déclarera se fixer à Cléder.

Le 22 mars 1800, quatre autres arrivent à la mairie.

M. Jean Le Breton, recteur de Sibiril (67 ans, 1 m. 732, chauve, yeux bleus, nez aquilin), se présente accompagné par huit hommes de sa paroisse. Il y avait résidé du 1er juillet 1789 au 18 février 1792, date de son arrestation. Le registre de Cléder porte « en réclusion jusqu'au 18 fructidor de l'an III... à Quimper » et depuis à Sibiril. Mais l'inventaire officiel des meubles et effets des prêtres détenus aux Capucins de Landerneau affirme qu'il s'était rendu « volontairement » à Quimper en octobre 1792. Il était enfermé au monastère de Kerlot (d'où les religieuses Bernardines avaient été expulsées) dans la cellule 6 du second étage, avec M. Le Garrec, vicaire à Kerlaz. Il fut transféré le 11 novembre à Landerneau, où se trouvèrent 84 autres prêtres fidèles ; il fut logé dans le chœur de la Chapelle avec 18 compagnons de misère. Le 2 avril 1795, il fut libéré avec les 23 qui n'avaient pas été déportés, et il déclara vouloir se fixer à Saint-Thégonnec (Bernard Breton en était le maire en février 1792). — On n'a pas oublié sa conduite intrépide des débuts de la Révolution.

(Le 5 mai 1800, M. Breton revint à la mairie déclarer qu'il était resté caché à Cléder et qu'il va se retirer à Sibiril).

M. François-Marie Quiviger (49 ans, 1 m. 710) fait la déclaration légale exigée : « Reparaissant aujourd'hui dans la société, après être resté sans se montrer, pendant que des lois dont on a reconnu l'abus l'exposaient à la déportation si l'on avait eu connaissance de son asile, il vient déclarer à l'administration qu'il est et demeure sur son territoire, et qu'usant de sa liberté il entend incessamment se retirer sur la commune de Sibiril, le tout afin que l'administration, pendant sa résidence dans son ressort, puisse user à son égard de toute surveillance, se réservant, en changeant de domicile, de mettre l'administration dans le ressort de laquelle il passera, dans le même cas de facilité et de surveillance, attendu qu'il se flatte par sa conduite de ne contribuer qu'à la paix et à l'union ».

Déjà, en 1795, il avait déclaré vouloir se fixer à Sibiril — après les décrets de pacification des Conventionnels en mission dans l'Ouest — comme son collègue M. Corre.

MM. Marzin (35 ans, 1 m. 625) et Le Roux (37 ans, 1 m. 679) viennent déclarer leur intention de se fixer à Cléder... On peut croire que le secrétaire Ollivier et les « requérants » avaient le sourire ! Toute la paroisse ne savait-elle pas le dévouement de ses prêtres, prétendus déportés, qui lui prodiguaient leur dévouement depuis sept années au risque de leur vie ?

Et voici un témoignage patent de la tolérance officielle. C'est le registre paroissial pour 1801 ; il porte cette suscription : « Cayer destiné à constater les cérémonies religieuses des baptêmes et des mariages dans l'étendue de la paroisse de Cléder, à l'usage des prêtres catholiques, apostoliques et romains » (26 feuilles) et paginé 1 PN, etc., le 7 décembre 1800 par M. Péron, « vicaire général de Léon ».

Le baptême de Marie Manac'h, de Brogourouan (5 janvier 1801) est célébré « par le soussigné prêtre ». La signature Marzin est effacée et biffée, et il n'y en a aucune autre. Jean Aminant, de Scavennou, est baptisé le 16 janvier « par le prêtre soussigné », qui ne signe pas. De même le mariage d'Hervé Queffurus et d'Anne Abgrall, de J.-M. Postec et Jeanne Ollivier, le 9 février, de Jean Chigot et Marie Jézéquel, le 11 ; puis 3 autres baptêmes... et à partir du 15 mars 1801 ; « le soussigné prêtre » signe enfin « Laurent, recteur de Cléder ». Quand était-il rentré ?...

C'est le 6 mars 1801 qu'il s'était présenté (63 ans, 5 pieds et demi, cheveux blancs, yeux bruns, port relevé, visage plein) devant le maire Paul Tanné et le greffier par intérim Postec : simple déclaration de résidence.

Le 24 mars, c'est un vieillard usé, M. Guillaume Héliez, accompagné de ses témoins, tous Clédérois : J.-M. Troadec, Jean Gézot, Guillaume Denniel, Yves Rovalec, Jean Rohou, Bernard Guillou, Hervé Isac et François Rosec. Il a 66 ans, il est petit de taille : 1 m. 571 ; il a des yeux bleus et une figure maigre. Prêtre à l'île de Bas (Batz) avant la Révolution, il s'est réfugié à Cléder depuis avril 1793 et il y a résidé depuis sans interruption. Il signe d'une écriture fatiguée, comme débile.

Le 12 juin 1801, devant le maire Paul Tanné et son adjoint Jean Postec — le mot « citoyen » est supprimé — se présentent MM. Laurent, Marzin et Le Roux, en vertu d'une circulaire du sous-préfet de Morlaix, datée du 3, arrivée à Cléder le 11. Ils sont interpellés de faire la promesse de fidélité à la Constitution.

« Il est trop connu, répondent-ils, que de notre temps les serments et promesse de fidélité ont été fréquemment exigés, rappelés, prêtés, rétractés, et violés, au scandale de la religion et au détriment de la tranquilité publique, que les formules ont été multipliées et différemment interprétées ; qu'il en est de même de la loi du 21 nivôse (11 janvier 1800), qui prescrit la promesse et qu'il existe une grande division dans le clergé de France touchant la promesse de fidélité à la Constitution; qu'il y a lieu d'espérer que les malheurs auront une fin prochaine, parce qu'on attend que l'authorité ecclésiastique ne tardera pas à se prononcer, puisqu'on assure qu'il existe une Congrégation de Cardinaux, nommés par le Saint-Père le Pape pour tréter les affaires de l'Église gallicane ».

Aussitôt que la dite Congrégation aura parlé, ils promettent de se conformer entièrement à ses décisions.

« Qu'on [nous] accorde ce délai... Dans l'intervalle, [nous promettons] de continuer à prêcher la paix, la concorde et l'union parmi nos concitoyens, de vivre soumis à l'autorité et aux lois qu'elle porte pour le maintient de l'ordre et de la tranquilité publique ».

Certes l'opinion des trois prêtres de Cléder ne manquait pas de sagesse, et ils étaient en droit d'attendre que leur évêque, toujours à Londres, donnât par ses vicaires généraux, MM. Péron et Henry, des instructions précises, ou que le Concordat déjà signé mais non promulgué, fixât aux yeux de tous les volontés du Souverain Pontife. Mais le préfet Rudler exigeait une promesse dans les termes « sacramentaux ». Le maire et l'adjoint n'ayant pu l'obtenir (et sans doute les textes du Cahier officiel ne traduisent pas, dans leur austère rigueur, les sentiments intimes des parfaits paroissiens qu'étaient Paul Tanné et Jean Postec), écrivirent et signèrent en trois lignes :

« Vu le refus des ministres susnommés, nous leur avons par provision interdit l'entrée de l'église, et intimé à chacun d'eux de se retirer sur-le-champ dans le lieu de son origine ».

Ainsi le sous-préfet, le préfet et la Loi pouvaient se tenir satisfaits. Mais l'église n'existant plus (un hangar l'avait remplacée depuis longtemps) et l'intimation demeurant sans effet ni sanction, la sentence municipale fut évidemment suivie de poignées de mains à la ronde, très cordiales.

Du reste, l'affaire ne traîna pas. Huit jours après, 19 juin 1801, les trois prêtres revinrent à la mairie, cette fois pour prêter le serment requis. « Etrangers à toutes les dissentions civiles et politiques, comme la Religion que nous professons nous l'impose, nous venons donner à la puissance temporelle une garantie de notre soumission, sauf néanmoins la religion catholique, dont la loi garantit le libre exercice à cette condition ; en conséquence, nous promettons fidélité à la Constitution et signons ».

Chacun des trois écrit de sa main et signe la formule : « Je promets fidélité à la Constitution et je signe ».

Paul Tanné, maire, signe seul le procès-verbal. (Il mourut peu après et fut remplacé le 11 décembre 1801, par René Morel, de l'Odegalet, désigné par le préfet).

Revenons aux registres de l'état paroissial.

Du 14 juillet au 9 septembre, M. Marzin ne fait aucun acte. Le 17 décembre, Missire César-Louis Marzin baptisa sa filleule Marie-Louise Rosec, de Kerdilin (représenté par Louis Rosec), la marraine fut Marie Postec.

L'abbé Henry, vicaire général de Léon baptisa, le 30 septembre, François Laot, de Creac'hmorvan, et Pierre Stéphan, de Kerezean.

La signature de M. Joseph Le Roux reparaît aux sept mariages qu'il célèbre du 7 au 14 octobre 1801, et un baptême du 25.

M. Le Borgne était rentré d'Angleterre le 28 avril 1801 ; mais nous ne voyons pas qu'il ait servi à Cléder cette année-là : le préfet Rudler tenait trop à la lettre et à l'esprit des lois jacobines : il fit emprisonner plusieurs des prêtres rentrés d'émigration. C'est seulement le 7 avril 1804 que M. François Le Borgne reparaît au registre : il signe « vicaire de Cléder ».

Le registre 1802 est paraphé par « Henry, vic. gén. de Léon », MM. Laurent, Marzin et Le Roux signent les actes. Mais du 10 (ou 13) janvier au 1er avril, M. Marzin ne paraît pas. Et le 11 juillet, Yves Postec, prêtre de Cléder, baptise Catherine Lazou, de Kerugant. C'est le recteur qui fait la plupart des baptêmes, M. Marzin la plupart des mariages, M. Le Roux, les autres.

Le 12 nivôse an X (2 janvier 1802), sept prêtres léonards déportés rentrent d'Angleterre sur le Voltigeur : MM. Le Got, ex-curé de Cléder, 42 ans, aveugle ; Duval, ex-curé de Guilers, 79 ans, paralytique et aveugle ; Lharidon, ex-curé de Lesneven ; Floc'h, ex-curé de Guissény, 47 ans ; Boutin-Bazinière, ex-curé de Roscoff, 47 ans ; Niquet, ex-chanoine de Saint-Pol, 68 ans ; Cloarec, ex-recteur de Tréflez, 45 ans. Ils débarquèrent à Morlaix.

Comme les 31 prêtres rentrés le 19 floréal an IX (9 mai 1801) ils prêtèrent serment de soumission aux lois ; mais avec la même restriction qu'eux. En conséquence, ils furent détenus jusqu'à soumission intégrale, à part les deux aveugles, M. Duval et M. Le Got, que le ministre de la Police, le 24 pluviôse an X (13 février 1802) eut la bonté d'autoriser à rentrer dans leurs familles, pour être « mis en surveillance ».

M. Le Got en 1803 baptisera Jean Cotour de Poulskavennou (il signe « desservant de Cléder ») ; M. Laurent, recteur, signe aussi après cette note : « la famille a déclaré que M. Le Got a baptisé... ». C'est M. Laurent qui fait la plupart des actes, cette année-là... On n'était pas très fixé sur les titres concordataires, même en 1804. Ainsi, le 8 janvier 1804, sur le même registre 1803, le baptême de Fr. Floc'h, de Kerdevezoc'h, et celui de Thérèse Stéphan, de Kerezean, puis le 15 janvier celui d'Hervé Troadec, de Kerabret, sont signés Laurent, vicaire de Cléder ; le mariage d'Yves Séité et Marie Herri, le 17 janvier, est signé Laurent, desservant de Cléder ; le lendemain, M. Laurent signe « desservant principal de Cléder » au baptême de Jeanne Ollivier, et ainsi jusqu'au 2 février, qu'il redevient simple « desservant ».

M. Marzin disparaît à partir du 19 janvier : les temps héroïques perdaient un témoin et acteur intrépide. M. Le Roux, à partir du 4 avril : il avait travaillé à une époque très difficile avec M. Marzin. Ils s'en allèrent, et nous saurons dans l'éternité quel fut leur brisement... Du moins ils auront mérité l'éloge qu'un vicaire général d'alors, l'héroïque M. Henry, faisait des 118 prêtres léonards restés au pays malgré la rigueur des lois : « Ces cachés, écrivait-il à Mgr Dombidau de Crouseilhes, donnaient les plus beaux exemples de constance, de sainte intrépidité, de zèle, de pénitence, de concorde, d'habileté dans l'espèce de guerre qu'ils faisaient, d'amour pour l'unité des principes, d'exactitude à se plier aux agendas qu'ils recevaient » (de Mgr de la Marche, exilé, et de MM. Henry et Péron, ses vicaires généraux).

(René Cardaliaguet).

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