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L'EXPÉDITION DE CORSE DE 1769 ET SON ANNEXION

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La République de Gênes vend à la France ses droits sur la Corse (traité de Versailles) ; l'union est décrétée le 15 août 1768, mais la conquête française n'est effective que par la victoire de Pontenuovo sur les troupes de Pascal Paoli (8 mai 1769). Cette expédition de Corse de 1769 eut pour résultat l'annexion de cette île à la France.

Le corse Pascal Paoli.

Pascal Paoli

Dans les divers ouvrages que j'ai consultés, je n'ai trouvé que quelques mots seulement ayant rapport à cette operation militaire, doublement heureuse et pour nos armes et pour notre pays ; ainsi, entre autres, Novion y consacre trois lignes, Guizot cinq et Henry Martin à peu près huit.

La synthèse est certes une excellente chose, mais, parfois, nous aimons à connaître les détails de certains faits, ne fut-ce que pour fixer davantage notre attention, ou donner satisfaction à notre cœur trop souvent attristé et qui bat d'un légitime orgueil, toutes les fois, que, regardant en arrière, il voit la France grande et heureuse.

Or, en faisant des recherches aux archives départementales, j'ai trouvé une correspondance, certainement inédite, d'un militaire nommé Haly, qui prit part à cette expédition. Les lettres de cet officier sont adressées à son ancien compagnon d'armes, le général de Warren.

M. Haly, qui était témoin et acteur, a écrit pour ainsi dire jour par jour l'histoire de la campagne, principalement, toutefois, en ce qui concerne la partie du corps d'armée à laquelle il était attaché. Il donne, au point de vue technique, des détails que je n'ai trouvés nulle part et que j'ai cru devoir vous communiquer ; d'autant mieux qu'avant son départ pour la Corse, M. Haly terminait une lettre qu'il envoyait de Paris au général de Warren, le 5 mars 1769, par ces mots : « Quand je serai sur les lieux, j'espère avoir fréquemment occasion de vous mander de bonnes nouvelles de nos opérations et je pourrai vous en garantir l'authenticité ».

Avant de commencer la relation que j'ai extraite des lettres de M. Haly permettez-moi de vous dire seulement quelques mots sur les événements qui précédèrent cette campagne de 1769.

Depuis environ deux siècles, la Corse était sous la domination de Gênes. Les Corses, d'un tempérament vif et absolu, supportaient ce joug avec peine. Aussi, à diverses reprises, tentèrent-ils, non sans succès, de s'en affranchir. Le parti libéral avait déjà compté dans ses rangs de vaillants défenseurs et l'autorité de Gênes allait toujours s'affaiblissant, quand, enfin, Paoli prit en main l'étendard de l'indépendance et sut réunir autour de lui de nombreux partisans, attirés par son patriotisme et son intelligence.

Bataille des Corses avec les Génois.

La République de Gènes qui, antérieurement et avec des péripéties diverses, avait déjà réclamé plusieurs fois la médiation de la France pour rétablir son autorité, ne possédait pas davantage cette fois les ressources nécessaires pour resister au nouvel élan qui se produisait à l'appel de Paoli. Elle proposa à la France de lui vendre ses droits sur la Corse. Cette offre fut acceptée, et l'on signa à Versailles le traité du 15 mai 1768. 

Dès que les Corses eurent connaissance de ce marché, un cri de protestation s'éleva de toutes les parties de l’île. Paoli en profita pour raffermir son pouvoir et exalter ses partisans. Aussi, la première expédition que Louis XV envoya, afin de prendre possession de la Corse, rencontra-t-elle une résistance tellement énergique que le corps d'occupation fut reconnu insuffisant. En conséquence, la Cour décida qu'au printemps de 1769 on enverrait de sérieux renforts.

Après ce rapide exposé, je commence le récit contenu dans la correspondance de M. Haly ; je vous communiquerai même presque entièrement les deux dernières lettres. Cette lecture vous permettra d'apprécier par vous-mêmes le caractère, l'intelligence et le style de cet officier, et vous disposera à penser comme moi que les détails qu'il donne doivent être considérés comme parfaitement exacts.

M. de Chauvelin ayant été rappelé en décembre 1768, laissa M. de Marbeuf à la tête de l'ancien corps expéditionnaire.

Les régiments de renfort qui furent désignés pour aller en Corse étaient notamment Champagne et Aquitaine, chacun à quatre bataillons, Bourgogne et Provence qui n'étaient qu'à deux bataillons, puis les régiments Irlandais de Bulkely et de Roscommon. Ces deux derniers régiments, composant la brigade irlandaise au service de la France, furent placés sous les ordres de M. de Sérent.

Champagne et Provence s'embarquèrent dès le 5 mars 1769 pour San-Fiorenzo et les autres régiments ne tardèrent pas à les suivre. Les officiers généraux qui furent désignés pour aller en Corse furent M. de Vaux, commandant en chef, M. de Boufflers et M. d'Escoulombres. Ce dernier avait servi dans la cavalerie.

M. de Vaux arriva en Corse dans le courant d'avril et prit immédiatement ses dispositions pour l'établissement des troupes qui venaient de débarquer, et aussi de celles qui se trouvaient déjà, comme nous l'avons vu, aux ordres de M. de Marbeuf et composaient l'ancien corps expéditionnaire.

Le 1er mai, M. de Vaux campa à Oletta avec 23 bataillons, la légion de Lorraine, ci-devant Hainault, et la légion de Soubise. L'autre moitié de l'armée formait la réserve commandée par M. de Marbeuf, qui, avec cinq bataillons dont faisaient partie les régiments de Bulkely et Roscommon campa le 2 mai dans la plaine de Mariana, ayant le pont de Biguglia en avant de son centre, le village du même nom derrière sa droité et l'étang ou lac de Biguglia à sa gauche.

Le 4, M. de Sérent, commandant les deux régiments irlandais, ayant été chargé d'éclairer la droite du Bivinco, jusqu'auprès de Burgo, avec 7 à 800 hommes, et en même temps de tâcher d'exciter la garnison de cette place à faire une sortie, fut suivi peu après par M. de Marbeuf et toute la réserve qui campa à une lieue du Bivinco.

Le 5, M. de Marbeuf fit lever le camp de ses troupes pour pousser jusqu'au Golo, faisant semblant de vouloir passer cette rivière pendant que M. de Sérent se tenait au bas de la montagne de Burgo, d'où l'on tira quelques coups de canon sans effet.

Alors que M. de Marbeuf avec la réserve prenait ces dispositions, M. de Vaux canonnait et prenait Olmetta, Murato et San-Pietro qui se rendaient après une faible et peu longue résistance. Voyant cela, l'ennemi s'empressa d'évacuer également Burgo, après avoir encloué les cinq pièces de canon qui s'y trouvaient.

M. de Sérent monta aussitôt à Burgo avec quelques compagnies de chasseurs.

M. de Marbeuf, qui jusque-là avait tenu toutes ses troupes sous les armes dans la plaine de Mariana, se mit alors en marche afin de repousser tous les ennemis que l'on trouverait en deçà du Golo, où les Corses avaient des redoutes vis-à-vis du pont. Un détachement de dragons de Soubise ayant traversé à gué le Golo, chargea et sabra avec la plus grande bravoure tous les Corses qui furent rencontrés. Malheureusement, une trop grande ardeur ayant entraîné nos dragons jusqu'à un ravin où se tenaient cachés plusieurs centaines de Corses, ils essuyèrent un feu meurtrier qui causa la mort de M. Simon, officier fort regretté dans le corps, ainsi que celle de quatre ou cinq cavaliers. Cinq autres furent blessés, dont trois mortellement.

De nos grenadiers qui avaient attaqué dans une autre partie de la plaine, il n'y en eut que deux de blessés.

Telles furent, en totalité, les pertes de notre armée pour nous rendre maîtres de Burgo qui, l'année précédente et encore dans des temps plus reculés, avait coûté de si grands sacrifices aux assaillants.

Le 6, les troupes de M. de Sérent campaient sous Burgo.

Du côté de M. de Vaux, tout plia également devant lui. Après avoir soumis, comme nous l'avons dit, Olmetta, Murato et Santo-Pietro ainsi que leurs environs, il finit par s'emparer du camp de Saint-Nicolas, ce qui le rendit entièrement maître du Nebbio. Le général poussa alors des détachements en avant jusqu'au mont Tenda, afin de pouvoir s'emparer de Lento, d'où il pouvait se porter promptement sur Corte.

Dans ces diverses opérations, M. de Vaux n'eut à déplorer que la perte du capitaine d'Eptingue, d'un autre officier et d'une trentaine d'hommes.

Paoli ne devait pas supposer qu'on le poursuivrait si vivement. Il ne pouvait s'imaginer que M. de Vaux ferait avancer, dans les terrains si peu propices où il se trouvait, son train d'artillerie composé de pièces de différents calibres (depuis 4 jusqu'à 16) sans compter les mortiers et les obusiers.

C'était si bien l'impression de Paoli, que deux Anglais, mylord Pembroke et le chevalier Thomas Tancred, qui revenaient de passer quelques jours avec lui et que M. Haly avait eu occasion de voir à Bastia avant l'entrée en campagne, parièrent plusieurs centaines de guinées que les Français ne seraient pas à Corte avant le mois de septembre, attendu, disaient ces Anglais, qu'ils savaient pertinemment qu'il était impossible de traîner de l'artillerie dans un pays comme la Corse.

D'ailleurs, Paoli était persuadé que M. de Vaux reposerait ses troupes et se reposerait lui-même chaque fois qu'il prendrait une ville ou remporterait un avantage. Ce fut ainsi que sans aucune défiance, il passa la nuit du 4 au 5 mai à Murato où il manqua si bien, paraît-il, d'y être fait prisonnier par les volontaires, que, pour se sauver, il fut obligé d'abandonner son cheval et d'escalader un rocher qui eut été humainement impraticable, en toute autre occasion. C'était une situation au moins fâcheuse pour un héros comme Paoli, et il a dû en garder longtemps un triste souvenir.

M. de Sérent resta quelques jours à Burgo. Il les employa à soumettre plusieurs villages voisins. Lucciana qui avait énergiquement résisté l'année précédente, fut évacuée presque entièrement par les habitants, de même que par les religieux du beau couvent qui s'y trouvait. Les uns et les autres se retirèrent sur les montagnes. Ils ne tardèrent pas toutefois à revenir, mais on mit en prison tous ceux qui vinrent offrir leur soumission sans rapporter leurs armes. On pensa même qu'il serait d'un bon effet de les faire transporter en France, car il n'y avait rien à passer à ces gens qui, généralement, étaient rusés et en qui, pour le moment, on ne pouvait avoir confiance. Tous cependant paraissaient consternés et découragés. Toutefois, on ne voulut pas avancer sans être certain que la soumission était complète, et comme on acquit la certitude qu'il restait encore des armes cachées, on fut obligé de sévir et même de mettre le feu au couvent de Lucciana.

Le 13 et le 14 mai, la brigade de de Sérent fut renforcée par l'arrivée de deux bataillons de Languedoc et de toute la légion de Lorraine, commandée par le baron de Viomesnil. Le 15, on poussa une reconnaissance en avant sur les bords du Golo et l'on découvrit un endroit où l'on pourrait passer à gué. La légion de Lorraine partit du camp, le 16, à cinq heures du matin. Elle put passer la rivière à l'endroit reconnu la veille et se porter dans la plaine de Casinca, à une demi-lieue en avant, s'inclinant toujours à droite vers un bois situé entre Vescovato et quatre redoutes construites sur le mont qui fait face au pont du Golo et le commandaient de manière à le rendre inaccessible.

En même temps, les sept bataillons d'infanterie que composaient la division de Marbeuf se présentèrent à une certaine distance du pont et s'y mirent en bataille, ayant quatorze compagnies de grenadiers et chasseurs avec deux petites pièces de canon en avant, et feignant toujours de vouloir forcer le passage du pont pendant que l'infanterie de la légion de Lorraine dans le bois, soutenue par la cavalerie dans la plaine, tournait les redoutes pour les prendre à revers, de manière à couper au besoin la retraite aux troupes que gardaient les batteries. L'ennemi n'avait en tout dans le bois et dans les redoutes que six a sept cents hommes, mais ce peu de forces, dans les positions où elles se trouvaient, eût suffit pour donner de la tablature à nos troupes, si les ennemis avaient opposé une très vigoureuse résistance. Il est vrai qu'ils tiraillèrent beaucoup dans le bois, mais de loin, et ils finirent par se laisser pousser de poste en poste jusqu'à la hauteur de Loretto où ils abandonnèrent même une petite tour qu'ils auraient pu défendre plus longtemps

Ce fut alors que les deux pièces de canon attachées à la division de Marbeuf tirèrent quelques coups à cartouches sur les lignes qui faisaient communiquer entre elles les redoutes. En même temps, les grenadiers et les chasseurs ayant fait un léger mouvement en avant, l'ennemi se décida à abandonner les redoutes, se retirant par les hauteurs afin d'éviter l'infanterie de la Légion qui arrivait sur eux. Ils furent poursuivis de très près par les grenadiers et les chasseurs.

Toute la division put alors passer le pont. Les pertes du côté des Français consistèrent en une vingtaine d'hommes de la Légion, tant tués que blessés.

Voilà comment nous nous emparâmes de ce pont qui autrefois coûta, dit-on, cinq à six mille hommes aux Allemands lorsqu'ils tentèrent la conquête de l’île de Corse.

On ne peut rendre assez hommage à l'intelligence de M. de Viomesnil, ni à la précision avec laquelle il perça le bois pour gagner les hauteurs et arriver à point sur les redoutes. De l'activité de ses troupes a dépendu tout le succès que nous remportâmes dans cette journée. Cette affaire ne s'était terminée que vers onze heures et demie. Les régiments s'étant reposés aux redoutes pendant environ deux heures, se remirent en marche précédés des grenadiers et des chasseurs qui continuaient à poursuivre les fuyards ; mais comme il fallait toujours monter, les troupes ne purent arriver à San-Angelo qu'à neuf heures du soir. Les équipages n'ayant pu arriver en même temps, on fut obligé de passer la nuit au bivac ; heureusement que le bois ne manquait pas.

Les villages de Vescolato Loretto et Vinzolesco et nombre d'autres dont la Casinca est composée, se soumirent aussitôt ainsi que plusieurs couvents qui craignaient d'essuyer le sort de celui de Lucciana. On put s'emparer d'une grande quantité de fusils et de munitions que Paoli avait fait cacher dans les couvents, ainsi que de nombre de gens que la peur seule retenait près de ce chef et qui semblaient très aises de le quitter.

Le 16 mai, M. de Vaux passa également le Golo et vint camper à Merozaglia, Paoli ayant abandonné Rostino après avoir mis le feu à un couvent où il avait établi ses magasins. Ormessa, situé à une lieue de Corte, vint aussitôt faire sa soumission.

Quant à Paoli, il se retira avec les huit à neuf cents hommes qui lui restaient.

Comme je l'ai promis en commençant, voici presque in extenso les deux dernières lettres de M. Haly.

Au Camp de San-Angelo, le 25 mai 1769.
Mon Général, j'ai eu l'honneur de vous envoyer le 17 et fort à la hâte un petit détail des opérations du jour précédent au sujet du passage du Golo et des différents Pièves qui se sont soumis en conséquence. Une partie de la grande armée s'est ensuite avancée jusqu'à Corte, et le 22 le fort qui tenait encore s'est rendu, de sorte que M. de Vaux a été mis en possession de cette métropole sans aucune perte. Il s'occupe maintenant à y former des magasins. De notre côté, nous sommes ici encore chargés de la communication et faisons des chemins pour faciliter les convois qui passent jour et nuit. Nous recevons aussi des soumissions. Tout ce qui est en deçà du Tavignano est à nous ; de même que la ville d'Aléria qui vient de se soumettre. A l'égard des divisions de la droite, nous apprenons, dans le moment, que le Niolo s'est soumis. Clément Paoli qui s'y est retiré avec ses partisans a été obligé de quitter cet asile qu'il regardait comme inaccessible pour nous et de se retirer seul du côté de Vico, ses troupes ayant joint leur soumission à celle des habitants. Ainsi, voilà notre général qui a conquis en vingt jours tout ce qui est en deçà des monts. La partie qui est au-delà des monts ne tardera pas à subir le même sort ; il ne s'agit pour cela que de pousser des détachements en avant, ce qui se fera, je présume, aussitôt l'établissement des magasins à Corte achevé. Du côté de M. de Narbonne, qui se trouve sur le chemin d'Ajaccio à Bogognano avec huit bataillons, il y travaille déjà, mais il serait à souhaiter qu'il fût plus en force pour pouvoir former divers corps en état de se porter de différents côtés et dominer les montagnes par là avec sûreté. Ce serait le moyen le plus sûr de joindre Clément Paoli qui sera obligé de se retirer par ce côté-là. Son frère Pascal Paoli s’est retiré à Vivario. On lui suppose le dessein de vouloir gagner Porto-Vecchio aussitôt qu'il pourra se défaire du petit nombre d'adhérents qui lui reste, gens qui n'ont aucun domicile et qui sont beaucoup plus à craindre pour lui que pour nous dans l'état où se trouvent ses affaires. Il ira de là peut-être voir Messieurs les Anglais qui ont si généreusement souscrit des sommes pour la Liberté qu'il n'a pas réussi à défendre. Il est étonnant qu'il n'ait pas mieux répondu à leur attente dans un pays où chaque habitant est soldat, où chaque maison est une forteresse et où la nature du terrain même conspire contre les progrès de ceux qui attaquent. Ici, tout est position pour ceux qui défendent, et défilé pour les assaillants, etc.

Il est probable que le régiment passera l'hiver dans ce pays-ci, mais nous espérons retourner en France au printemps. On compte que d'autres régiments, particulièrement ceux de quatre bataillons, y passeront aux mois de juillet et août. Au reste, nous ne sommes pas, à beaucoup près, autant à plaindre, dans ce pays-ci, qu'on le croit partout ailleurs.

J'ai l'honneur d'être avec un attachement aussi respectueux qu'inviolable, mon Général, votre très humble et très obéissant serviteur. HALY.

Au camp de San-Angelo, le 16 juin 1769.
Mon Général, je m'empresse de vous annoncer le départ de Paoli que s'est embarqué le 13 à Porto Vecchio, à onze heures du matin, avec son frère Clément Paoli, Nicodème Pascalini, Joanni Pasquini, Joanni Carlo et deux ou trois autres chefs qui veulent l'accompagner dans les revers de sa fortune. Ils ont amené avec eux une centaine de déserteurs français, le tout à bord de deux bâtiments portant pavillon anglais, escorté par un troisième vaisseau que l'on prenait pour une frégate anglaise. Ainsi, le voilà à l'abri de nos chebecs qui croisaient autour de l'île dans l'espérance de le prendre. Il a été conduit au lieu de l'embarquement par un grand nombre de Corses qu'il a congédiés ensuite en leur disant que le meilleur parti à prendre pour eux était de se soumettre aux troupes du roi et que le plus tôt serait le mieux. En conséquence, ils ont joint leur soumission à celle de tous les Pieves au-delà des monts, de sorte que nous voilà paisibles possesseurs de notre conquête, et il est probable que M. de Vaux fera assembler incessamment des représentants de la nation à Corte pour leur annoncer les volontés du roi à leur égard, et en même temps pour prendre les mesures les plus propres à affermir la tranquillité publique et à rendre la nation heureuse.

Voilà une campagne bien heureuse et bien agréable pour le général qui en a eu la direction et qui paraîtra fort brillante si on la compare à celle de l'été dernier.

J'ai eu l'honneur de vous mander notre passage du Golo et la prise de Corte, dans leur temps. J'espère que mes lettres vous sont parvenues assez tôt et que j'ai été le premier à vous annoncer ces événements. Je tâcherai, s'il est possible, de vous faire passer celle-ci par le courrier de M. de Vaux, s'il passe par ici. J'ai l'honneur d'être. etc. HALY.

Le courrier attendu passa évidemment, puisque la lettre arriva bien à destination.

J'en ai fini avec les lettres de M. Haly, et cette champagne de 20 jours. J'ajouterai seulement deux mots. Le 15 août 1769, par conséquent à deux mois de date de cette dernière lettre, alors que la Corse était bien définitivement acquise à la France, Napoléon Bonaparte naissait à Ajaccio.

D'autre part, je lisais l'autre jour qu'après de longs pourparlers, le corps du général Pascal Paoli enterré en 1807 au cimetière de Saint-Pencrace, à Londres, allait être transféré dans son pays natal, et qu'une députation du Conseil général de la Corse se rendrait prochainement en Angleterre pour aller chercher les cendres du héros Corse et les ramener en grande pompe à Corte. Les éminentes qualités de Paoli et son prestige sur ses compatriotes sont incontestables, mais il n'est pas moins vrai qu'en 1793, sous la convention, comme en 1768, et en 1769, sous Louis XV, grâce aux subsides de l'Angleterre, Pascal Paoli, au nom de l'indépendance Corse, a combattu énergiquement l'annexion de cette île à la France, et a été un adversaire acharné des Français.

M. Léon Lallement.

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