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CAHIER DE DOLÉANCES DE DINGÉ EN 1789

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Subdélégation de Hédé. — Dép. d'Ille-et-Vilaine, arr. de Rennes, canton de Hédé.
POPULATION. — En 1792, 1.538 hab. (P. DELARUE, Le clergé et le culte catholique en Bretagne, t. V, p. 35).
CAPITATION. — Total en 1770, 1.101 l. 2 s. 5 d., se décomposant ainsi : capitation, 723 l. ; 21 d. p. l. de la capitation, 63 l. 5 s. 3 d. ; milice, 96 l. 10 s. ; casernement, 176 l. 17 s. 2 d. (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 3981). — En 1778, 379 articles, dont 71 inférieurs à 3 l. (Ibid., C 3982).
VINGTIÈMES. — En 1788, 1.621 l. 13 s. 9 d.
FOUAGES. — 27 feux 1/2 1/16. — Fouages extraordinaires, 537 l.. 16 s. 2 d.

OGÉE. — A 8 lieues au S.-S.-E. de Saint-Malo, à 6 lieues 1/4 de Rennes, à 2 lieues de Hédé. — 1.500 communiants. — La majeure partie de ce territoire est occupée par la forêt et les landes de Tanoir [Tanouarn]. Les terres labourées y sont en si petit nombre qu'à peine suffisent-elles à la subsistance des habitants.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblée, le 29 mars, à la sacristie, lieu ordinaire des délibérations ; le président n'est pas mentionné. — Comparants : Julien Annex ; Claude Chabot ; J. Chabot ; Symphorien Mariais ; T. Aougtin ; Joseph Thebault ; Joseph Roulleaux ; Michel Riollier ; François Migret ; Julien Chertier ; Julien Bretagne ; Pierre Gallais ; Toussaint Hulocher ; Mathurin Gallais ; Louis Chabot ; Joseph Giboire ; Jean Lecompte ; P. Baudouin, syndic ; C. Moncefrot (?) ; Joseph Chabot ; Joseph Bouvier ; Jean Clerel ; Joseph Peron ; Julien Mariais ; Joseph Lequien ; Jean Taupin ; Jean Hervais ; René Gentil ; François Huraut ; J. Le Ray ; Noël Rouaux ; Jean Augtin ; Guy Gallais. — Députés : Julien Annex La Touche et Joseph Chabot. « Sur la représentation faite par le général aux trésoriers en charge, saisis de la clef du coffre par le sieur procureur fiscal de Combourg, de représenter le registre de délibérations inclus dans ledit coffre placé contre les règlements dans la grande chambre du presbytère, et sur le refus du sieur recteur qu'on entrât dans ladite chambre pour en faire l'ouverture », on décide de rédiger le présent procès-verbal sur une feuille volante. L'assemblée se borne à donner son adhésion à « tout ce qui pourra être fait, soit par la commune de Rennes, soit par les députés en cour des différentes communes, pour parvenir au but que nous nous proposons », aux arrêtés du Tiers des 22-27 décembre et à sa propre délibération du 28 décembre, dont elle joint copie.

On voit par le procès-verbal qu’il n’y a pas eu de cahier rédigé.

 

DÉLIBÉRATION du 28 décembre 1788.

Le général de la paroisse et les notables habitants, réunis en l'étude du notaire rapporteur, en raison de l'opposition faite par le recteur [Note : Le recteur de Dingé était, depuis le 24 décembre 1746, Pierre-Marie-Jean Le Douarin de Trévelec (GUILLOTIN DE CORSON, Pouillé…, t. IV, p 503)] à la tenue de cette assemblée, et informés par la voix publique que MM. de la communauté de ville de Saint-Malo auraient adressé à notre recteur leur arrêté du 12 novembre pour lui être communiqué, noue le lui aurions fait demander, mais, en bon prêtre et membre de la noblesse, il nous a répondu ne point l'avoir et que d'ailleurs noue ne devions pas nous mêler de ces affaires là ; pourquoi nous avons d'abord arrêté qu'il sera écrit à la communauté de ville de Saint-Malo pour la remercier de son zèle pour la régénération de l'ordre du Tiers Etat et la prier que, toutes les fois qu'il s'agira de cette grande cause et des autres intérêts temporels du général, d'adresser tous leurs paquets directement à ses trésoriers, de crainte qu'en l'avenir on ne lui recèle les avis les plus importants.

Ensuite, l'un des membres ayant représenté un autant dudit arrêté, qui lui a été confié à Combourg, il en a été fait lecture et le général a dit :

Le fardeau excessif des subsides et des charges publiques de toutes espèces que les peuples supportent seuls en cette province, telles que la corvée, les casernements, les collectes, les louages, les droits d'usage, les frais de milice, les entrées de ville, etc., la répartition inégale de la capitation et des vingtièmes auxquels la noblesse contribue, et les énormes vexations qu'on se permet surtout contre les gens de campagne, à raison de toutes ces charges, sont sans doute la cause efficiente de la misère ; mais cette cause elle-même tire sa source de ce que le peuple des villes n'a jamais été valablement représenté et efficacement défendu aux Etats de la province par des députés nobles eu anoblis, ou aspirant à l'être, ou tenant leur état de la noblesse et du clergé, et de ce que surtout le peuple des campagnes, cette classe d’hommes la plus précieuse et la plus intéressante, n'y a jamais été représentée par aucun député qui l'ait défendue contre l'oppression des grands, l’avarice des financiers et surtout les exactions et monopoles des ingénieurs des grandes routes, espèce de gens pire que les financiers.

Le peuple, en effet, paye seul le fouage : à la vérité, dans le príncipe, cet impôt était pour lui l'équivalent ou la compensation de la charge, impossée aux nobles à raison de leurs terres, de servir le prince à l’armée ; il était juste alors que cet impôt ne portât que sur le peuple, mais depuis plus de deux siècle les nobles ne s’entretiennent plus avec leurs bannières à l’armée du prince, ils sont aux-mêmes payés comme le soldat plébéien ; leus charge ayant donc cessé, il est de l'ordre et de l'équité que leur privilège cesse et qu'ils participent à ce succès à raison de leurs possessions.

Il était encore juste que les casernements ne fussent dans le principe que la charge des peuples, parce que dans ces temps les nobles défendaient les peuples à leurs dépens et que le droit de protection oblige au moins le protégé à loger son protecteur ; heureux s'ils en avaient été quittes à si bon compte ! Mais, encore une fois, la noblesse ne fait plus la guerre qu'aux dépens de la nation ; elle doit donc, comme les peuples, contribuer aux casernements.

La capitation devrait être un impôt égal et proportionné aux facultés de chaque citoyen ; cependant, ô injustice criante ! tel gentilhomme de 3, 4, 5, 6, 7 à 80 mille livres de rente ne paye que 6, 8, 10, 12, 15, 18 et 24 livres de capitation, tandis que son pauvre fermier partiaire, qui n'a de réel que le fruit de ses travaux, paye 12, 15, 18, 24 et souvent 30 livres. La tête d'un riche vaut-elle donc moins que celle d'un pauvre ?

Pourquoi encore la corvée est-elle seule à la charge des peuples ? Les nobles et les ecclésiastiques ne sont-ils pas ceux qui profitent le plus de la commodité des grandes routes pour l'exploitation de leurs grands domaines et l'importation de leurs denrées ? Ubi emolumentum, ibi onus esse debet ; ils doivent donc contribuer à cette charge publique en proportion de ce qu'ils en retirent.

Si les subsides sont trop onéreux, la manière dont on les exige de nous, pauvres laboureurs, l'est encore plus : on attend les gentilshommes cinq à six ans pour le paiement de leur capitation, mais pour nous autres, le terme est-il échu, premier et second avertissement, première et seconde contrainte, et souvent premier, second et troisième emprisonnement, et le tout de concert entre un huissier et un receveur pour s'enrichir l'un et l'autre à nos dépens ; même manœuvre pour les fouages et les vingtièmes, et le pis c'est que les collecteurs exigent souvent des redevables le double et le triple de ces frais.

La corvée est encore plus ruineuse pour les paroisses de campagne (voir note qui suit). Que de garnisons envoyées par chacun an et payées à grands frais aux caprices d'un ingénieur partageant pour l'ordinaire les profits de la contrainte !

Note : La tâche de cette paroisse, sur la route de Rennes à Dol, était, en 1788, longue de 1.473 toises ; elle avait son centre à une lieue du clocher (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 4883). — Une nouvelle répartition de la tâche avait été ordonnée par la Commission intermédiaire le 23 mai 1788, à la suite d'une réclamation des syndics, appuyée par le recteur depuis 1780, date de la dernière répartition, il était mort, disait la requête, plus de la cinquième partie des corvoyeurs ; la plupart des fermiers qui occupaient de grandes métairies ont quitté la paroisse ; des habitants ont été demeurer ailleurs ; quelques autres en ont remplacé une partie. On a remis, à la vérité, des députés à la place des morts, mais leurs rôles de répartition leur ont été remis imparfaitement. Les héritiers des corvoyeurs ont partagé les tâches de grand chemin ; plusieurs de ces héritiers ne demeurent point en Dingé ; les députés ne savent où les prendre ni quelles tâches leur étaient données et sont par là hors d’état de les faire travailler et de nommer les absents » (Ibid., C 4888).

L’inégalité dans la répartition des vingtièmes est évidente : tel gentilhomme ne paye pas le quarantième ; nous avons essayé inutilement de le recharger ; l’influence de son ordre, toujours cousin germain de celui de l’Eglise, l’a maintenu à son ancien taux et a perpétué l’injustice.

Nous payons tous les ans à Sa Majesté, avec les fouages, une taxe pour être maintenus dans l’usage des landes, communs et égalois qui s’étendent dans notre province : cependant il y en a deux ou trois assez considérables, où nous ne pouvons laisser aller nos bestiaux sans payer dix, quinze ou vingt sols d’assens pour chaque chef, ou, s’ils y sont saisis sans être assencés, il faut les racheter tant pour l’amende que pour les autres ingrédients de la cérémonie (voir note qui suit).

Note : La forêt de Tanouarn, contenant, avec les landes et panages qui l'entouraient, cinq à six mille journaux de terre, appartenait à la baronnie de Combour (A. DE LA BORDERIE, Le régaire de Dol et la baronnie de Combour, dans les Mém. de la Soc. archéol. d’Ille-et-Vilaine, t. II. 1862, p. 182, et GUILLOTIN DE CORSON, Grandes seigneuries de Haute-Bretagne, t. II, p. 138), mais une portion de lande, mesurant 1.021 journaux, appartenait au domaine royal de Hédé et avait été afféagée le 16 décembre 1780, par le subdélégué de Hédé, à Ms Le Minihy aîné, procureur au Parlement, moyennant le cens perpétuel de deux livres une once de beau blé froment par journal (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 1920).

Deux forêts avoisinent nos terres : en été, nos bestiaux, chassés par les mouches, vont-ils s'y réfugier, des gardes avides sont aux aguets, les saisissent et c'est la plus grande grâce qu'on n'exige pour les rendre qu'un tribut qui n'excède pas la moitié ou les trois quarts de leur valeur.

Le voisinage des bois nécessite le port d'armes pour défendre ses bestiaux et moissons contre les bêtes féroces, mais vis-à-vis des tyrans l'intention la plus directe est toujours mal interprétée : vous portez un fusil, donc vous chassez ; un garde vous trouve : aussitôt, procès-verbal, répétition, etc., et vous payez l'amende et les frais.

Avons-nous le malheur de déplaire à nos seigneurs ? Les procureurs fiscaux ont vingt verges pour nous châtier en purgeant nos bourses, et souvent ils le font sans y être invités.

Qui ne conviendra pas aussi que toutes ces causes accidentelles consomment notre ruine ? Qui ne dira pas avec nous : pauvre peuple, comment le fruit de tes travaux peut-il suffire à tant de vexations ? Est-il donc étonnant qu'il y ait dans les campagnes tant de misérables, tant de mendiants ? Les causes de tant de maux n'auraient sans doute jamais existé ou n'auraient pas existé longtemps, si nous avions eu un député aux Etats de la province, qui s'y serait opposé ou s'en serait plaint sans cesse avec la plus grande énergie, car nous présumons assez bien de la noblesse et des grands bénéficiers pour croire qu’ils n’auraient pu voir si souvent, si publiquement, le tableau de la misère de tant d’individus utiles sans y être sensibles, sans joindre eux-même leurs efforts pour faire cesser les plaintes en faisant disparaître la cause du mal.

La réunion de toutes ces considérations et autres qu'il serait trop long de déduire détermine le général de Dingé à donner unanimement une adhésion pleine et entière audit arrêté de la communauté de ville de Saint-Malo, même à ceux des autres villes de la province. En conséquence, nous avons nous-mêmes arrêté de prier les mêmes municipalités et de les exhorter instamment, ainsi que leurs députés aux Etats, de se réunir pour former les demandes consignées auxdits arrêtés touchant l'élection, le nombre et les qualités des députés du Tiers des villes et des campagnes, tant aux Etats de la province qu'aux Etats généraux, ainsi que dans les bureaux de commissions soit intermédiaires, soit formées pendant la tenue même des Etats, touchant la répartition égale des fouages ordinaires et extraordinaires, la restitution de ce que le Tiers a trop payé à cet égard, la répartition égale du casernement et de la capitation sur les possessions des trois ordres, la suppression de la corvée, l'établissement des casernes dans les principales villes, la réunion d'une des places de procureur général syndic des Etats à l'ordre du Tiers et l'alternative de celle de greffier en chef, touchant l'élection du président du Tiers, qui ne pourra jamais être ni noble ni anobli, l'introduction dans l'ordre du clergé des députés de MM. les recteurs des villes et campagnes, pourvu qu'ils ne soient pas nobles, soit aux Etats de la province, soit aux Etats généraux, et leur interdiction aux délibérations de leur paroisse et à la répartition de la capitation et des vingtièmes, l'extinction des lods et ventes des contrats d'échange, des droits de guet, bouteillage, assens et autres de même espèce, qui n'ont pour principe que la loi la plus forte dans les mouvances des seigneurs particuliers, l'abolition du droit de franc-fief, vu que la cause qui l’a fait établir ne subsiste plus, l'admission et concurrence des membres de l'ordre du Tiers dans toutes les dignités ecclésiastiques et les emplois civils et militaires, même à ceux qui donnent des commandements supérieurs, la réunion des menses abbatiales à une caisse économique qui sera établie dans cette province et régie sous la protection du souverain par des membres mi-partie du clergé et de la noblesse et mi-partie du Tiers, pour le produit être employé à faire un fonds honnête aux recteurs et vicaires qui ne sont pas gros décimateurs (voir note 1 qui suit) et à subvenir aux besoins des malheureux en cas d'incendie, de grêle, d'inondation et autres accidents désastreux (voir note 2 qui suit). Nous prions de plus lesdites municipalités de charger leurs députés aux Etats de faire les plus grands efforts pour que toutes ces demandes du Tiers lui soient enfin octroyées sans aucunes restrictions ni modifications et, jusqu'à avoir obtenu cette justice, de ne consentir à aucuns subsides et, dans le cas que les ordres de l'Eglise de la Noblesse, trop attachés à leurs intérêts et aux anciens préjugés, s'ils refusent de porter toutes ces demandes jusqu'au pied du trône élevé spécialement pour la protection du peuple, qui forme la classe la plus nombreuse et la plus laborieuse de l'Etat, la pépinière des deux autres, et d'y faire le possible pour en obtenir l'adjudication, ce que nous avons tout lieu d'espérer de la justice de notre souverain, puisque toutes ces demandes ne sont que la réclamation des droits imprescriptibles que nous tenons directement de Dieu et de la nature et dont des usages fort longs et la plus longue possession n'ont pu nous dépouiller.

Note 1 : Le revenu de la cure, au milieu du XVIIIème siècle, était de 1.200 l. environ et comprenait la presque totalité des dîmes (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série G. Pouillé de l'évêché de saint-Malo, v° Dingé). Le prieuré des Vaux possédait les traits de Pont-Rocher, des Petits-Vaux, affermés à Michel Besnard, avec les terres du prieuré, moyennant 230 l. (P. DELARUE, Le clergé et le culte catholique en Bretagne, t. V, p. 39) ; à l’abbaye de la Vieuville appartenait la dîme de Malnoë, affermée 36 l. à Jean Cleret (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série H, fonds de l’abbaye de la Vieuville, liasses 39 et 41, et série Q, registre des déclarations reçues au bureau des Domaines de Dol, fol., 23 v°).

Note 2 : Il y avait à Dingé une fondation dont le revenu montait à 113 l, par an ; le général nommait un économe pour recevoir ces rentes, et le recteur les distribuait en grain et en toile en présence de cet économe et des trésoriers en charge (GUILLOTIN DE CORSON, Pouillé…, t. III, p. 380).

Arrêté ledit jour pour être envoyée et déposée copie où besoin sera.

[40 signatures].

(H. E. Sée).

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