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LE DOYENNÉ DE SAINT-MICHEL

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LA MÉAUGON.

Au moment de la terrible Révolution de 1793, la paroisse de La Méaugon avait pour recteur M. Valentin Gautier, qui avait obtenu sa cure au concours. L’abbé Guillaume Méheux en était le vicaire.

M. Gautier dut quitter sa paroisse et partir pour l’exil. Il se réfugia en Angleterre, à Alwick, avec les recteurs de Pommeret et de Pléneuf. Il y mourut très probablement, car je ne trouve aucune trace de lui après la Révolution dans les notes précieuses que j’ai reçues de M. l’abbé Hellier, vicaire à Langoat. Je retrouve bien un M. Gautier à l’enterrement de M. Méheux ; mais ce ne peut être M. Valentin Gautier, puisque M. Boëtard dit qu’il succéda comme recteur à M. Méheux. Ce M. Gautier est, je crois, M. François Gautier, dont nous allons parler bientôt. M. Méheux partit aussi pour l'Angleterre en 1791. Il revint des premiers pour donner tous ses soins à cette paroisse, où il mourut le 20 octobre 1804, dans la 46ème année de son âge, muni des sacrements de l’église.

M. Jouanny vint à la Méaugon comme curé constitutionnel en août 1791. On le nomma officier public et il tint les registres de l’état civil jusque l’an VII de la République. On croit qu’il ne resta pas longtemps dans cette paroisse, toujours est-il qu’il ne fut pas remplacé. Plusieurs prêtres fidèles vinrent à des intervalles différents faire des baptêmes dans cette paroisse, suivant le témoignage de M. Boëtard, qui devint recteur en 1804 et qui, sur l’ordre de Mgr. Cafarelli, rédigea un registre des baptêmes sur le témoignage d’hommes dignes de foi.

Parmi les prêtres qui s’exilèrent, nous trouvons, de La Méaugon, M. François Gautier que M. Hamon appelait dans ses lettres le jeune homme du four de la rue. M. Gautier songea à tirer parti de sa situation et devint à Alwick précepteur des enfants d’un médecin. Il y resta longtemps et répondait à ceux qui le pressaient de revenir : « Quidquid est timeo Danaos. — A moins que ce parti ne soit écroué, nous n’avons plus de beaux jours à espérer ». M. Gautier est auteur de plusieurs ouvrages sur l’éducation assez estimés. A son retour d'Angleterre, il fut nommé comme desservant à Trémuson. Il y fit quelque temps les fonctions de curé d’office et pria Mgr. Caffarelli d’y nommer un autre desservant. Longtemps il a tenu école à La Méaugon.

 

PLÉRIN.

Ici le travail devient plus facile, grâce au précieux registre de Plérin. Ce registre est dû aux soins intelligents de M. l’abbé Couppé, de douce et sainte mémoire, qui voulait ainsi transmettre à ses successeurs l’histoire claire et précise de la paroisse, d’après les anciens documents qu’il possédait.

En 1789, le recteur de Plérin s’appelait M. Jacques-Etienne Vitel, né à Saint-Brieuc en 1739. Il fut d’abord recteur de Pommeret, puis installé recteur de Plérin le 22 décembre 1777. Son caractère doux et conciliant lui acquit bien vite l’affection de ses paroissiens. Il savait si parfaitement les sept volumes de la théologie de Collet, dit M. Le Sage, qu’il les aurait récités au chapitre, à la page. La Révolution le força de quitter sa chère paroisse. Au mois de juin 1791, il abandonna le presbytère, mais continua d’administrer la paroisse sous les yeux du pauvre curé constitutionnel. Il fut enfin obligé de céder à la force et il s’enfuit à Jersey sur un bateau de pêche. Il en revint des premiers et il employa le reste de sa vie à réparer les ruines de la Révolution. Il rendit son âme à Dieu au mois de novembre 1817, après 40 ans d’un saint ministère.

L’un des vicaires de Plérin s’appelait M. Yves-Marie Hamono. A l’arrivée des curés constitutionnels, il fut obligé de s’enfuir et d’aller se cacher dans sa famille ; mais au départ du citoyen Morgan, il quitta sa retraite, vint occuper le presbytère et administra la paroisse avec un grand zèle, jusqu’au mois de septembre 1792. S’étant trouvé dans l’obligation de faire une absence, le maire et les officiers municipaux requirent l’autre vicaire, M. François Sylvestre, pour exercer les fonctions de curé. Il tint les registres jusqu’au mois de novembre de la même année.

M. Hamono, suivant le témoignage de M. le chanoine Perrichon et de M. Burel, revint passer à Plérin toute la tourmente révolutionnaire et continuer en secret d’administrer les sacrements. Il habitait les environs du Légué, où il dut mourir.

M. Sylvestre se réfugia en Angleterre et dut rejoindre quatre prêtres fidèles de Plérin, MM. Jean Le Barbier, Mathurin Burel, Jean-Marie Pendezec et Jean Laloyer, qui, le 29 septembre 1792, reçurent ordre du directoire de quitter sous huit jours le territoire du département, et dans quinzaine le territoire de la République.

Je ne sais ce que devinrent pendant la persécution MM. Quémar, Le Moine et Cotard, tous trois prêtres habitués de Plérin. Ils restèrent probablement cachés dans la paroisse, autrement ils seraient partis avec les autres.

Un jeune diacre de Plérin, l’abbé Le Sautiller, François-Mathurin, fut arrêté par ordre du tribunal révolutionnaire. Condamné à la déportation, il fut conduit à Rochefort et embarqué au commencement de 1794. Les privations de tout genre, les mauvais traitements joints aux chaleurs de l’été le réduisirent en peu de temps, et la mort vint mettre un terme à ses souffrances épouvantables le 19 juillet 1794. Il n’était âgé que de 27 ans. Il fut enterré à l'île d'Aix.

M. Hamono ne fut pas le seul prêtre fidèle à faire du ministère à Plérin pendant la Révolution. M. Jean-François Le Pouliquen y passa tous les mauvais jours. Ce saint prêtre visitait les infirmes et les malades, faisait des baptêmes et des mariages ; joignant la fine prudence au zèle discret, il put accomplir son ministère sans être dénoncé, et puis Dieu le récompensait et bénissait visiblement son zèle. Il eut le bonheur de faire rendre au culte catholique l’église paroissiale. Le jour de Pâques 1801, il la fit solennellement purifier par un ancien capucin, le P. Aimé de Moncontour, M. Mathurin Perron, qui accomplit cette cérémonie au milieu de l’enthousiasme et de la joie des fidèles. M. Le Pouliquen exerça les fonctions de curé jusqu’à l’arrivée de M. Vitel, de M. Hamon, de M. Michel, de MM. Burel, Sylvestre, Laloyer et Le Barbier.

La paroisse de Plérin eut pourtant elle aussi ses intrus. Le premier fut Nicolas-Julien-Marie Philippe, de Ploufragan, homme d’un caractère doux et paisible ; il prêta le serment plutôt par faiblesse que par ambition. Il laissait le recteur légitime administrer les sacrements, et après quelques semaines de présence à Plérin, touché de repentir, il quitta la paroisse et se retira dans sa famille.

Le citoyen Morgan fut désigné pour le remplacer. Effrayé de l’attitude peu bienveillante pour les intrus de la population, il ne se rendit pas à Plérin.

Au mois de janvier 1793, le citoyen Dépery, Antoine-Jean, né à Valenciennes, vint prendre possession de la cure de Plérin. Il avait reçu la tonsure des mains de l'Evêque d'Arras le 22 septembre 1754. Le 22 septembre 1792, l’évêque Jacob lui conféra les ordres mineurs, le sous-diaconat, le diaconat et la prêtrise. L’assemblée nationale l’élut pour curé de Plérin le 28 octobre, et l’évêque Jacob confirma l’élection le 4 novembre. Son triste ministère ne fut pas de longue durée ; car, accablé de remords et de dégoûts, il remit trois mois après, le 15 avril 1795, ses lettres de prêtrise entre les mains du maire de Plérin, promettant, par serment, de ne plus remplir aucune fonction sacerdotale. Il fut rejoindre son prédécesseur à Ploufragan et il y mourut dans une extrême misère.

La paroisse de Plérin fut vraiment énergique et pleine de foi pendant la tourmente révolutionnaire. Il y avait à la tête de la commune un maire dont la noble et courageuse attitude fit beaucoup pour le maintien du bon ordre et de la paix. Il s’appelait M. Ville Hellio Rouxel. Il fut aidé par plusieurs vertueux municipaux, nous dit le journal de Catherine Briand. Ils firent tous leurs efforts pour conserver leur pasteur. Le 5 juin 1791, ils envoyaient à Saint-Brieuc une députation porter une pétition signée de plus de 400 signatures pour obtenir son maintien. Leur demande fut inutile ; mais Dieu la récompensa en leur conservant de saints prêtres... Ils furent obligés de voir leur église transformée en un temple de la Raison. On écrivit au portail, sur une longue bande, en enduit de chaux, la charte religieuse du temps. Le peuple français reconnaît l’existence de l’être suprême et l’immortalité de l’âme... Sur le refus du maire, un citoyen des environs fit l’inventaire de tous les objets servant au culte. Les ornements et les linges sacrés furent chargés sur une charrette, emportés à Saint-Brieuc, vendus à l'encan et achetés par la populace de Saint-Brieuc. Les vases sacrés furent enlevés et envoyés plus tard à la monnaie. Toutes les chapelles furent vendues et achetées par des habitants de la paroisse. Les acquéreurs de la chapelle Saint-Eloi ont constaté par écrit qu’elle ne leur appartenait pas. Etienne Jamet remit à la fabrique la chapelle de Notre-Dame d'Argantel. Saint-Laurent du Port-Horel et le Légué furent également remis à la fabrique avec Saint-Maudez ou Notre-Dame de Couvran. Toutes ces chapelles, légitimement. acquises par les habitants, servirent au culte et les habitants pouvaient y offrir à leur Dieu leurs prières et leurs larmes. L’administration d’alors s’en émut, elle dénonça ce fait le 15 septembre 1798 au directoire exécutif de Port-Brieuc (aujourd'hui Saint-Brieuc), afin que ce mal fût arrêté dans sa naissance. Ce fut le dernier effort de l’impiété révolutionnaire dans cette paroisse. Lors de la spoliation de l’église, une main pieuse avait enlevé la statue de la Sainte Vierge avec un piédestal, elle la rendit à l’église lorsque M. Le Pouliquen la rendit au culte en 1801.

La petite communauté des soeurs blanches de Plérin fut aussi dispersée pendant la Révolution ; et je trouve dans la notice de M. l’abbé Le Mercier des pages admirables relativement à cette dispersion. Elles furent d’abord condamnées à une amende de 3.000 francs ; puis dans le mois de janvier 1793, on vint les chasser de leur demeure. Avant de se séparer, la supérieure et ses filles consommèrent les saintes espèces, sur les conseils d’un prêtre caché dans les environs, et s’unirent à leur Dieu au moment d’être séparées par les hommes. Toutefois elles ne subirent point cette injustice, sans faire une protestation très belle et très ferme. Le maire et les officiers municipaux firent une nouvelle protestation ; mais tout fut inutile. Il fallut céder. Et la supérieure, brisée par l'affliction, pressa sur son coeur ses filles désolées, en leur donnant ses derniers conseils, et elles se séparèrent. Six d’entre elles restèrent malgré tout dans leur couvent ; mais le 25 juin elles en furent chassées de vive force. Le maire réclama leur maison comme maison communale et il l’obtint pour la leur rendre.

Telle est en résumé l’histoire si belle et en même temps si glorieuse de Plérin pendant la Révolution.

 

PLOUFRAGAN.

La paroisse de Ploufragan avait pour recteur depuis 1741 M. Olivier-René Rouaut. Il était encore à Ploufragan en 1792, puisqu’il fit un baptême à Trémuson cette année-là même. En 1791, il avait signé l’écrit du recteur de Trégomeur, M. Haméon. M. Haméon réfutait l’écrit de l’intrus Le Coz de Quimper, et il voulait faire signer sa brochure remarquable par tous les prêtres fidèles à son Dieu comme lui. Son écrit avait pour titre : Exposition de la doctrine catholique sur les matières agitées en ce temps, avec un abrégé des preuves sur lesquelles elle est fondée, par les ecclésiastiques du diocèse de Saint-Brieuc. M. Rouaut devint malade et infirme en l’année 1792. La mort lui épargna les douleurs de l’exil.

Il avait pour recteur ou curé M. François Rouaut qui dut s’exiler en 1792 ; car il n’est plus question de lui à partir de cette année, et l’on retrouverait assez probablement son nom, puisqu’il était président de la fabrique. M. le recteur de Ploufragan et son vicaire avaient pour coopérateurs infatigables : Jean Philippe et François Orhan, qui leur étaient d’un grand secours dans les travaux du saint ministère. M. Jean Philippe était secrétaire de la fabrique. — Il y avait en outre dans la paroisse M. Nicolas Philippe, prêtre habitué, qui était maire et procureur, et enfin M. Claude Philippe. D’après la tradition, MM. Jean Philippe et François Orhan tenaient un petit collège, dans le lieu dit le Tertre Botrel.

Nicolas Philippe devint recteur constitutionnel de Plérin, en 1791, comme nous l’avons vu. On vit alors paraître, comme vicaire, Columban Philippe, qui dut s’exiler en 1792 avec M. François Orhan et Claude Philippe, je ne saurais dire quel fut le lieu de leur exil : ce fut probablement Jersey, car, parmi les prêtres réfugiés dans cette île, je trouve un M. Philippe, de Ploufragan.

M. Jean Philippe resta à Ploufragan. Rien ne m’indique qu’il ait prêté le serment et, quelque difficile que fût la position des prêtres fidèles, la population de Ploufragan avait assez d’énergie et de foi pour le conserver envers et contre tout. Toujours est-il qu’il signe tous les registres jusqu’en 1805, époque où il devint le vicaire de M. Connen, qui dut remplacer M. Amice, puisqu’aux funérailles de M. Guillaume Pierre Méheust, recteur de Trémuson, le 20 octobre 1804, je trouve M. Amice signant desservant de Ploufragan.

Je ne sais auquel des MM. Philippe il faut attribuer l’éloge de M. Le Sage ; mais je ne puis passer sous silence ce qu’il en dit : « Un homme de mérite avait opté la solitude et le silence. Il se nommait Philippe. Retiré dans un hermitage sur la paroisse de Ploufragan, il y consuma sa longue vie à étudier et à prier ».

Pendant la tourmente révolutionnaire, plusieurs faits mémorables se passèrent à Ploufragan, tout à l’honneur des paroissiens qui avaient à la tête de leur commune un homme lettré, intelligent et profondément chrétien, dont le nom doit être précieusement conservé. Il s’appelait Le Moulnier.

Le 2 juin 1792, les administrateurs du district de Saint-Brieuc décrétèrent le démembrement de la paroisse de Ploufragan ; mais ils avaient compté sans la résistance énergique des habitants qui les forcèrent à céder. Le conseil général de Ploufragan convoqua une assemblée des notables pour le 24 du même mois, afin d’aviser aux moyens de s’opposer au démembrement de leur paroisse (Semaine Religieuse de 1890, p. 384-385). Parmi les raisons qu’ils invoquent, ils mettent en premier lieu la difficulté de procurer les secours spirituels aux malades. L’assemblée arrête que les citoyens catholiques romains y jouiront de l’entier exercice de leur culte. Elle veut que les prêtres non assermentés soient préservés de toute violence, qu’ils soient considérés comme citoyens qui ont bien mérité de la paroisse où leur vie a été une exhortation continuelle à la religion et à toutes les vertus sociales. Elle demande enfin qu’il ne soit fait aucune innovation dans le gouvernement religieux de la paroisse. Quelques jours plus tard, tous les prêtres de Ploufragan étant poursuivis, Le Moulnier réunit le conseil général de la commune, le 15 août 1792, et sur les 4 heures de l’après-midi, il fit à tous ses conseillers réunis un discours remarquable que nous avons tous lu dans la Semaine Religieuse (1890), pour défendre ses prêtres avec fermeté ; mais sans colère, ni passion. Les limites de ce travail ne me permettent guère de le reproduire.

Honneur et louange à cet homme de bien ; car il a bien mérité de son Dieu, de ses prêtres et de ses concitoyens. Honneur aussi à la paroisse de Ploufragan qui a montré une si grande énergie et une si grande foi. Dieu l’en a récompensée en lui épargnant bien des hontes et bien des apostasies.

 

PORDIC.

Pendant la Révolution, les habitants de Plérin déploraient souvent le triste sort de leurs voisins de Pordic. Cette paroisse fut en effet bien malheureuse, et quelque triste qu’en soit l’histoire, je vais la résumer, m’aidant en cela du cahier de paroisse fait par les soins de M. Renaut. Je ne ferai point l’éloge de ce cahier, puisque l’évêque de Saint-Brieuc, Mgr. Le Mée, a daigné féliciter l’auteur. Ce cahier a été admirablement complété par M. l'abbé Marsouin.

La paroisse avait pour recteur, au moment de la Révolution, un moine de Beauport, nommé Odio Baschamps ; jusqu’à l’époque du serment exigé par le décret du 24 décembre 1790, il s’était conduit en vrai religieux et en bon pasteur. Il avait de la mémoire, de l’assurance, une prestance avantageuse, un débit passable. Il jouissait d’une certaine réputation et M. Le Sage le mettait parmi les gros bonnets de la classe des assermentés. Son mérite, à son estime du moins, le mettait au-dessus du commun, et il crut qu’en prêtant le serment il pourrait devenir évêque. Le diable le conduisit faire une retraite de six semaines, et au bout de ces six semaines, il monta en chaire pour prononcer le serment d’apostasie. Il entraîna les trois quarts de la paroisse dans son schisme, malgré la protestation énergique de M. Joseph Le Pouliquen, l’un de ses curés.

L’apostasie n’eut pas sa récompense ; on lui préféra, à Saint-Brieuc, le fameux Jacob. Il s’en revint, un peu honteux, à toute la vitesse de son cheval qui l’attendait, tout sellé, tout bridé. Jacob l’appela auprès de lui, pour en faire son bras droit, et lui donna le titre de vicaire principal. Odio Baschamps quitta donc Pordic avec M. Paturel, également de Pordic, qu’il menait avec lui pour en faire le secrétaire de Jacob. Un bon matin, il trouva écrit sur sa porte, son éloge, en trois mots : La religion t’avait blanchi, la Constitution t’a noirci, l’enfer te rougira. A l’arrivée de Mgr. Caffarelli, il parut éprouver un grand soulagement lorsqu’on leva les censures. Il mourut subitement peu après. Habillé de blanc comme moine de Beauport, il prit la soutane noire en devenant constitutionnel.

Il eut pour successeur à Pordic, dans l’ordre constitutionnel, Pierre François Le Clech, économe de Beauport. C’était un jeune homme passablement lettré, mais peu théologien. Il était assez paisible et d’un prosélytisme assez modéré. Quand les catholiques lui représentaient dans le particulier son erreur, il répondait : vous avez raison et vous faites bien de ne pas me suivre. En 1792, il changea le titre de curé contre celui d’officier public. Il prit la fuite vers la fin de mars 1794. Abeat proditor. Il se rétracta plus tard et devint curé de Plouha, où je le trouve en 1818. Odio Baschamps avait pour curés, François-Joseph Pouliquen et Antoine Mottais des Prévelles ; et pour prêtres auxiliaires, MM. L. Antoine Hourdel, Jean Saintilan, Antoine Mottais de la Ville Morel, François Richard, Drillet, Domalain, François-Marie Le Pouliquen.

François-Joseph Le Pouliquen fut déporté à l'île de Ré, où il arriva le 16 juillet 1799, à l’âge de 37 ans.

François-Marie Le Pouliquen s’exila près de Londres, où je le trouve en 1798.

Antoine Mottais de la Ville Morel alla en l'Angleterre où il gagnait son pain par le travail des mains, suivant témoignage d’un de ses petits neveux.

Quelques prêtres fidèles restèrent cachés à Pordic ; car, on m’a raconté qu’un jour les soldats de la République s’étant présenté chez Marie Epivent, femme Duchêne, de la Ville-Guy, cette brave chrétienne les reçut de son mieux et les renvoya bien rassasiés. Son sang-froid et son amabilité préservèrent ainsi le prêtre qu’elle cachait. Une autre brave chrétienne, la bonne Giquel disait un autre jour : « Dieu nous protège tout de même ; car nous savons bien tous où nos prêtres sont cachés et personne ne le dit ».

M. Richard resta à Pordic pendant toute la Révolution sans prêter le serment, nous dit M. Renaut. Sa conduite fut toutefois celle d’un prêtre constitutionnel. Il avait du bon sens et de la science, sans prétention aucune ; mais son caractère indolent et pusillanime le rendait incapable de la moindre énergie et le fit toujours éviter tout ce qui pourrait le gêner. Il accepta même d’être le vicaire d ‘intrus Bouétard, en 1800, et ce ne fut qu’en 1818 que, frappé d’interdit par Mgr. Caffarelli, il reconnut tout l’odieux de sa conduite et fit une rétractation solennelle et publique, qu'on lut en chaire devant lui.

Le citoyen Le Clech eut pour vicaires les citoyens Berret et Dobet, de Plurien, jeunes prêtres ordonnés par Jacob.

Leur ministère de perdition était facile, puisque personne ne les contrariait.

L'Eglise devint une salpêtrière, puis elle fut vendue avec la chapelle du Vaudic au citoyen Richard, prêtre, qui les acheta les deux pour 5 francs, et les remit en 1800 au citoyen Bouétard qui voulut en faire son vicaire.

Pendant la Révolution, une religieuse bénédictine, de l'Abbaye Saint-Georges, de l’ordre royal de Lorges, à Rennes, Dame Anne Nouël de la Ville-Hulin, se vit expulsée de sa communauté. Elle se réfugia dans un cabinet à la Ville-Hulin, qui faisait alors partie de Pordic. Son frère, attaché à la personne du roi, avait émigré. Elle était la nièce de Mgr. Le Mintier. Tous ces titres lui valurent bientôt une dénonciation. Enlevée brutalement de chez elle, elle fut conduite à Saint-Brieuc le 16 juillet 1794. Elle fut jugée à 4 heures, et à 6 heures elle avait donné sa vie pour son Dieu et pour son roi. Aux questions qu’on lui posait elle répondit avec fermeté : « Je connais ma religion... Je donnerais ma vie pour mon roi, si ma mort pouvait lui donner la vie.... ».

Pendant que les autres paroisses retrouvaient ou espéraient retrouver leurs pasteurs fidèles, le citoyen Jacob venait installer à Pordic un nouvel intrus, François-Rodolphe Bouétard. Cette installation solennelle eut lieu le 27 avril 1800, comme en fait foi le procès-verbal inscrit au registre de paroisse. Ce citoyen avait une grande mémoire, mais peu ou point de jugement. Toute sa science consistait à débiter mot à mot Collet, à qui voulait l’entendre. Il eut pour vicaire François Richard et pour prêtre auxiliaire Julien Colin.

M. François Le Pouliquen parvint à s’évader le 18 mai 1800 et de retour bientôt à Pordic, il fit la guerre aux prêtres intrus. Il fut aidé par M. Mottais à son retour d'Angleterre. Ne pouvant avoir l’église paroissiale, ils réunissaient les chrétiens à la chapelle de Saint-Jean de la Noë, qui a subsisté jusqu’en 1820. La chapelle ne put bientôt plus suffire. Ils la prolongèrent par une tente dressée au pignon de l’orient. L’intrus travaillait de son côté, ne craignant même pas d’insulter les fidèles et de les appeler brebis galeuses. Il trouvait parfois réponse à ses insultes, et un dimanche une bonne mère de famille (Françoise Gaubert, veuve Guy) lui répondit : « Nous allons à Dieu et vous au diable ».

Cet état de chose dura jusqu’au 27 janvier 1804. L’intrus Bouétard fut envoyé par Mgr. Caffarelli à Plouvara, dit M. Renaut, mais plus probablement à La Méaugon où nous voyons arriver, en 1804, M. Bouétard. Il put pourtant être transféré de Plouvara à La Méaugon.... Malheureusement, il fut remplacé par un autre intrus. Mgr. Caffarelli se trouvait dans l’obligation de les nommer.

Michel Gallet vint donc comme recteur à Pordic le 27 janvier 1804. Suivant l’ordre de l’évêque, il rétracta son serment dans l’église de Lamballe avant de venir à Pordic ; mais, hélas, toute sa conduite prouva qu’il restait dans ses errements. Ce ne fut qu’en 1817 que M. Petitbon, vicaire, osa dire publiquement que tous les sacrements administrés en vertu des pouvoirs donnés par l’évêque Jacob étaient nuls. Michel Gallet quitta, Dieu merci, la paroisse le 21 février 1817. M. Petitbon fut nommé curé d’office. Le 4 mai 1817, M. Renaut fut nommé recteur et donna à la paroisse une mission de 21 jours qui fit un bien immense. La paroisse put enfin revenir à son Dieu et trouver des prêtres fidèles.

 

TRÉMUSON.

La paroisse de Trémuson avait pour recteur, depuis 1746, M. Y. Le Chaix, de Plérin, qui s’exila en Angleterre et resta près de Londres à attendre le moment de revenir à son peuple qu’il aimait tant. Il arriva des premiers dans le pays et retourna à sa paroisse où il mourut, l’année 1804, en odeur de sainteté, après l’avoir conduite longtemps avec zèle et y avoir fait beaucoup de bien.

Parmi les prêtres qui signèrent la brochure du recteur de Trégomeur répondant à l’intrus Le Coz, qui était plus littérateur que théologien, je trouve la signature d’un M. Guesnier, de Trémuson : cela donne à penser qu’il en était peut-être le vicaire. Ce M. Guesnier dût s’exiler et rentrer presque en même temps que le recteur. Toujours est-il qu’il succéda à M. Y. Le Chaix, comme recteur, en 1804. Il mourut probablement peu de temps après, ou peut-être en partit, car en 1805 je trouve comme recteur M. François Le Pouliquen, qui succédait lui-même à M. Corguillé, d'Hillion, qui demanda son changement et fut nommé à Coëtmieux.

Trémuson eut un curé constitutionnel, Le Pennec, de Plouvara. Il ne dut pas y faire grand mal, car, à son retour, M. Le Chaix recouvra toute l’influence que lui avaient mérité son zèle et sa piété.

(le diocèse de Saint-Brieuc durant la période révolutionnaire).

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