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LE DOYENNÉ D'UZEL

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Le recteur d'Uzel s'appelait Mathon ; il avait pour vicaire M. G. Le Masson.

Allineuc avait pour recteur M. Noël Rabeil, dont le vicaire était M. F. Garnier.

M. Le Méhauté était recteur de Merléac et ses vicaires étaient MM. Le Dantec, Denis et Hamon.

La trêve du Quillio était immédiatement dirigée par M. Le Bigot ; celle de Grâce par M. Carcreff ; celle de Saint-Hervé par M. G. Le Bigot ; M. Tardivel et son vicaire M. G. Le Covec, administraient Saint-Thélo.

L'attitude des recteurs et des vicaires du canton d'Uzel représente assez bien l'attitude du clergé français : la grand majorité, presque l'unanimité, se montra fidèle aux principe catholiques. Firent défection un vicaire d'Allineuc, Garnier ; M. Le Méhauté, recteur de Merléac et ses vicaires, s'il faut accepter sans contrôle le registre de cette paroisse. En effet, le registre paroissial de Merléac témoigne que, en 1793, MM. Le Méhauté, Le Dourneuf, vicaire, et Mathurin Hamon, J.-B. Le Dantec, Mathurin Denis, tous trois curés, ainsi que F. Collin, vicaire et chanoine de la ville Carhaix, prêtèrent le serment, le 6 prairial, an X de République.

Mais le même registre dit précédemment que M. Le Méhauté gouverna la paroisse de Merléac de 1783 à 1793, exclusivement sans doute, puisqu'il est constaté que M. Le Méhauté, à l'encontre de son habitude, n'a pas signé un acte de baptême au-delà de 1792. De plus, la main qui a recueilli les baptêmes des enfants de Merléac administrés pendant la tourmente par une quarantaine de prêtres, ne distingue pas M. Le Méhauté des autres ministres ; elle n'accole pas à son nom le titre odieux de curé constitutionnel ; elle ne stigmatise pas davantage les vicaires soi-disant assermentés. D'ailleurs, le clergé de Merléac eut un bon mouvement en 1790. Un extrait des délibérations du vénérable chapitre de Quimper relate ce qui suit : Le mardi 5 octobre 1790, le chapitre réuni à l'issue des vêpres, à l'occasion de la mort de Mgr. l'Evêque, présenta à un grand nombre de prêtres à signer purement et simplement la déclaration de Mgr. de Saint-Leu, évêque de Quimper, au procureur général syndic du département.... ont souscrit à la lettre de Mgr. de Saint-Leu, évêque de Quimper, contre la Constitution civile du clergé : MM. Le Méhauté, recteur de Merléac ; Fraboulet, prêtre de Merléac ; Denis, curé de Merléac ; Le Flahec, prêtre de Merléac. Comment donc M. Le Méhauté, sans parler des autres, après son acte d'énergie, a-t-il prêté serment à l'heure même où disparaissent Courcoux et Chevé, les intrus d'Uzel et de Saint-Thélo ? Comment donc ses vicaires, s'ils sont prévaricateurs, sont-ils confondus dans la confiance des fidèles de Merléac avec tous les bons prêtres demeurés au pays ? Les archives de Quimper pourraient peut-être faire le jour sur ces questions ; en attendant, je n'admets pas une condamnation grave que je trouve dénuée de preuves claires et authentiques, et je suis porté à croire que le clergé de Merléac été chargé d'une affreuse calomnie.

La lâcheté, ou l'ambition, ou l'ignorance firent donc peu de victimes dans le clergé titulaire du canton d'Uzel.

Ce qui est hors de doute, c'est que M. Mathon, recteur d'Uzel, donna l'exemple de la fidélité : nous lisons dans Geslin de Bourgogne que M. Mathon figura parmi les 180 prêtres qui signèrent la fameuse protestation du clergé contre le schisme constitutionnel, protestation qui passe pour avoir été rédigée par M. Haméon, recteur de Trégomeur, sous ce titre : Exposition de la doctrine catholique ; avec cet épigraphe : 0 Timothee, depositum custodi. Il est évident que les confrères de M. Mathon eussent signé des deux mains la protestation dont il s'agit, puisque, au prix de sacrifices héroïques, ils ont gardé intact le dépôt de la Foi.

En présence de la persécution religieuse, les prêtres fidèles à leur divin mandat, firent à leur conscience des questions opposées : devons-nous nous maintenir à notre poste, ne pas craindre ceux qui tuent le corps et, à l'imitation du Bon Pasteur, sacrifier notre vie pour nos brebis ? Devons-nous plutôt déjouer le calcul des impies qui guettent, par l'effusion de notre sang, l'extinction du royaume de Dieu ? Le moment est-il venu d'observer la parole du Maître : Lorsque vous serez persécutés dans un lieu, fuyez dans un autre ; fuyez dans un autre, non pas pour y dormir, mais pour y prêcher la bonne nouvelle et revenir sur vos pas réparer les ruines que l'orage aura causées ? Quoiqu'il en soit, les nôtres émigrèrent en grande majorité et choisirent pour lieu d'exil le territoire anglais, espérant avec raison y trouver meilleur accueil, plus de ressources, plus de sécurité, et l'occasion de donner une leçon de bonnes moeurs à l'hérésie. Les prêtres habitués, eux-mêmes, ne voyaient pas clairement le parti qu'ils devaient prendre. Il est vrai, comme nous l'avons insinué plus haut, que jusqu'au début de 1793, la loi ne les inquiète qu'autant qu'ils auront occasionné des troubles ou que leur éloignement aura été demandé par six citoyens domiciliés dans le même département. Ils sont inquiets néanmoins. Ils peuvent se convaincre, les uns que le sacerdoce lui-même sera poursuivi jusque dans les inoffensifs, jusque dans les apostats ; les autres qu'ils doivent se montrer plus que jamais les auxiliaires des pasteurs absents, ou que, peut-être, la Providence par un de ses coups imprévus brisera bientôt dans leurs mains les armes des méchants. De fait, la majeure partie de nos prêtres non titulaires demeura dans le pays.

M. Mathon partit un des premiers, dans le mois d'octobre 1791. Il se réfugia d'abord à Jersey, suivant M. G. Lesage, ancien recteur de Saint•Thélo, ensuite à Exeter où le place M. le docteur Hamon en 1798 (Voyez la Semaine Religieuse de Saint-Brieuc, jeudi 15 décembre 1887, page 599). M. Mathon ne s'empressa pas d'abréger son exil, je ne sais pour quelle raison ; il rentra à Uzel où il exerça le saint ministère pour la première fois sous le titre de curé d'office, le 1er janvier 1803. L'exilé, paraît-il, avait merveilleusement compris la vanité des honneurs les plus dignes et la responsabilité qu'entraîne la charge des âmes : M. Mathon échangea son poste d'Uzel contre le vicariat de Saint-Gouéno. Il mourut dans ce pays du Mené et fut enterré à Plessala.

M. Le Masson, vicaire de M. Mathon, passa également à Jersey et de là dans la grande île, suivant les mêmes auteurs. Il est mort en 1800, à Salisbury probablement. Du moins résidait-il dans ce lieu en 1798.

M. le docteur Hamon signale la présence à Jersey d'un M. Rabeil, d'Allineuc, toujours en 1798. Est-ce le recteur d'Allineuc ? Non : c'est son frère cadet. M. Rabeil aîné est mort en 1797. Où ? Mystère. S'est-il réellement expatrié ? M. Lesage affirme ; le registre des sépultures d'Allineuc se tait. Mais quand ce recteur s'est-il exilé ? ce n'est pas en 1794 et 1795, puisque les registres de Merléac attribuent à M. Rabeil, recteur d'Allineuc, un grand nombre de baptêmes administrés dans le cours entier de ces deux années. S'il s'est exilé plus tôt, il est revenu au pays dans les plus mauvais jours de la Terreur ; s'il s'est embarqué pour Jersey en 1796, on comprend peu qu'il s'éloigne alors que ses confrères s'apprêtent à rentrer. Pour élucider cette discussion, il faudrait ce que nous n'avons pas : des documents précis. D'après le docteur Hamon, M. Le Bigot, curé de la trêve de Saint-Hervé, était à Londres en 1798, après avoir séjourné à Jersey, suivant le carnet de M. Lesage.

M. Le Bigot dût sortir de Saint-Hervé quand M. Mathon sortit d'Uzel après la Révolution. M. Le Bigot, de concert sans doute avec son voisin, revint tard au pays. Son poste étant canoniquement occupé par M. Dourneuf en qualité de desservant, M. Le Bigot fut nommé recteur de Saint-Gouéno.

Un autre M. Le Bigot, curé de la trêve du Quillio, émigra, je ne sais où, à la fin de 1791 ou au commencement de 1792. Toujours est-il que de 1794 à 1802 un M. Guiomar signe les actes du saint ministère en qualité de curé d'office.

Les prêtres de Saint-Thélo émigrèrent à Jersey. M. Tardivel, recteur, quitta sa paroisse dans le mois d'octobre 1792, et M. Le Covec, son vicaire, un mois plus tôt. M. Tardivel mourut dans cette île en 1796, témoin l'extrait mortuaire qui suit : L'an 1796, le premier jour de février, Pierre Tardivel, recteur de la paroisse de Saint-Thélo, diocèse de Saint-Brieuc, en Bretagne, âgé de 64 ans, décédé d'hier, a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse. G. BERTRAM, recteur de Saint-Brelade, en l'Isle de Jersey.

Cet extrait est certifié conforme à l'original par le soussigné, et le juré justicier de la cour royale autorise à y ajouter foi.

M. Guillaume Le Covec revint à Saint-Thélo en 1797, y exerça publiquement les fonctions curiales dans les mois d'août et de septembre, et s'enfuit de nouveau. M. Le Sage prétend que M. Le Covec se réfugia à Saint-Quay et dans les environs. C'est possible ; toutefois les archives de ce lieu n'en font aucune mention. M. Lesage ajoute que M. Le Covec ne rentra pour la seconde fois qu'en l'année 1800. Erreur ; puisque M. Le Covec a enregistré de sa main deux baptêmes conférés par lui, l'un en 1798, l'autre en 1799, ce qui porte à croire que ce brave vicaire s'éloignait le moins possible de sa paroisse natale et saisissait la moindre lueur d'espérance pour mettre fin à son exil.

Enfin son zèle pour le salut des âmes cessa de gémir : en 1800 M. G. Le Covec fut nommé curé d'office de Saint Thélo et curé desservant en 1804.

M. Carcreff, curé de la trêve de Grâce, si l'on s'en rapporte au dernier acte de son ministère en 1792, à son apparition en 1797, à sa seconde fuite, semble avoir partagé le sort de M. Le Covec qui d'ailleurs était son parent. Cependant M. Carcreff n'est rentré définitivement à Grâce qu'en 1802. Dans l'exercice de son ministère, il joint à son nom le titre de curé d'office et successivement le titre de curé de fait.

De tous les prêtres du canton d'Uzel, aucun, à notre connaissance, ne fut incarcéré ni condamné à la déportation si ce n'est un enfant de Merléac, vicaire à Trébrivan M. Jean-François Le Coëdic, qui fut déporté dans l'île de Ré le 30 mai 1799 et libéré le 13 janvier 1800.

Seulement M. Josse, curé de la trêve de Caurel, arrêté sur la terre de Trévé et fusillé sur celle de Saint-Caradec, a été enterré dans le cimetière de Saint-Thélo. Cependant j'avoue avec peine que sa tombe n'est plus comme autrefois un lieu de prière, un lieu béni pour les enfants qui tardent à faire leurs premiers pas.

Notons que la foi du doyenné d'Uzel fut admirable. Voyez plutôt : plus de soixante prêtres, durant le cours de la Terreur, exercèrent, tantôt dans une paroisse, tantôt dans une autre, toutes les fonctions du culte catholique. On avait beau donner la chasse aux prêtres, suivant l'expression sauvage du proconsul Fouché, les prêtres avaient un gîte, dix gîtes, cent gîtes gardés par des fidèles aussi discrets que dévoués, par des fidèles qui ne bronchaient pas devant la menace de la loi : tout citoyen qui recélera un prêtre sujet à la déportation, sera condamné à la peine de mort et ses biens seront confisqués.

On se souvient que les pauvres intrus reçurent de nos populations un accueil déconcertant. Ils étaient heureux d'avoir pour les abriter la redoutable puissance de leurs maîtres. Au défaut de la force, nos populations employèrent pour expulser les intrus une arme bien trempée, le mépris. Le Courcoux d'Uzel, sorti on ne sait d'où, comme l'oiseau qui porte à peu près le même nom, résista un an et deux mois ; Le Bourguillant de Saint-Hervé, moine de Langonet, essaya en 1792, mais sans succès, de rivaliser avec des prêtres habitués : MM. Blivet, Le Dourneuf et Glen ; Le Chevé de Saint-Thélo, prêtre d'Uzel, dura à peine trois mois. Celui-ci avait tenté Laurenan. Laurenan protesta et traduisit sa répulsion sur un air bien choisi : le ciel en est le prix.

Nous avons des pasteurs, - Successeurs des apôtres, - Nous n'en voulons point d'autres. - Ce sont des imposteurs. - Nous avons des pasteurs.

L'imposteur quitta Laurenan, maudissant, son sort sur un air inconnu :

Par le diable envoyé - A saint Thélo, curé, - Laurenan j'abandonne. - Le petit et le grand - M'appellent protestant - Et déserteur de Rome.

A Saint-Thélo l'envoyé du diable fut pris au sérieux, si bien qu'à sa messe on préférait le rosaire. Et on continua de chansonner le déserteur de Rome.

Pendant qu'ici la foi de nos ancêtres se débattait noblement pour ne pas périr, un fait religieux, hautement religieux, se passait là-bas dans une île Anglo-Normande, et parce que son souvenir nous touche de près, nous nous faisons une joie de le consigner ici. Il est question de l'abbé Gofvry. Passer à l'étranger pour les louables motifs que nous savons, c'est bien ; mais à l'étranger comme chez soi il faut vivre et de pain et de la parole de Dieu. Une foule d'émigrés catholiques ne devait pas former un troupeau sans pasteur, une famille sans père, une église sans docteur. Mgr. de la Marche fut le pasteur ; l'abbé Caron, le père ; l'abbé Gofvry, le docteur. Chacun de ces hommes de Dieu besognait de son côté. L'abbé Gofvry fonda à Jersey, pour les ecclésiastiques proscrits, l'oeuvre des conférences théologiques qui porta d'excellents fruits. L'abbé Gofvry, dit le Journal de l'émigration, quand il était professeur, prenait pour sujet de ses leçons la doctrine du Concile de Trente sur le dogme et la discipline ; cette doctrine était encore le sujet de ses conférences en exil. Avouons que ce choix s'adaptait parfaitement à la circonstance, si l'on se souvient que les pères du Concile de Trente ont précisément formulé contre les protestants les canons du dogme et de la discipline catholiques. Vivant au sein de l'église réformée, exposés à ses arguments spécieux, nos prêtres avaient besoin de lumières et pour se préserver de la contagion de l'erreur et pour rendre compte de leur foi et pour la venger et pour la semer. On voit maintenant si la semence a germé.

Un jour l'abbé Gofvry toucha d'un mot au patriotisme du prêtre catholique. C'était en face du commandant militaire de Jersey. Celui-ci, se croyant menacé de la descente du vainqueur de Quiberon, proposa aux ecclésiastiques français de travailler aux fortifications et de prendre les armes contre les républicains carmagnoles. Au nom de tous ses confrères, l'abbé Gofvry représenta, en substance, que la gratitude la mieux fondée n'oblige pas à la félonie, que les lois et les convenances s'opposent aux corvées auxquelles il est question d'assujettir le clergé français, que, du reste, le clergé, en cas d'invasion, rendra à ses hôtes tous les services compatibles avec sa profession. L'abbé Gofvry eut gain de cause aux applaudissements de tous. On ne parla plus d'obliger les prêtres à travailler aux fortifications, ni à porter les armes. Ce fut le dernier service que rendit notre compatriote au clergé proscrit de France. Si Saint-Pol-de-Léon est fier de son vaillant évêque ; si Rennes est fier de son Vincent de Paul, le diocèse de Saint-Brieuc, le canton d'Uzel, la paroisse d'Allineuc ne rougissent pas d'avoir donné le jour à l'abbé Gofvry.

L'abbé Gofvry mourut à Jersey, à l'âge de soixante-dix ans, le 15 janvier 1796, sept mois avant le départ des réfugiés pour la Grande-Bretagne.

(le diocèse de Saint-Brieuc durant la période révolutionnaire).

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