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JEAN DE COETQUIS, EVEQUE DE TREGUIER

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Le même manuscrit qui nous fournit tant de détails curieux sur l'épiscopat de Jean de Ploeuc, contient aussi sur son successeur Jean de Coetquis, évêque de Tréguer (Tréguier), 1453 à 1464 [Note : D'après l'ancien catalogue que nous suivons, Jean de Coetquis fut transféré de Rennes à Tréguer, par bulles du Pape Nicolas V, du 8 des calendes d'août (27 juillet) 1453, et il fit son entrée solennelle en sa ville épiscopale le 11 avril suivant], quelques renseignements dignes d'être recueillis. Il ne s'agit à la vérité que d'un seul épisode de l'histoire de ce prélat, mais cet épisode est curieux ; et au soin mis par le vieux chroniqueur à nous le raconter, on comprend que les faits dont il s'agit avaient dû remuer vivement le peuple de Tréguer. Ici je me bornerai à traduire :

« Sous l'épiscopat de Jean de Coetquis il y eut à Guingamp une assemblée où les commissaires du duc de Bretagne, Pierre II, les principaux seigneurs du pays et l'évêque lui-même se trouvèrent ensemble pour s'occuper de diverses matières intéressant le bien public. Il y fut proposé, entre autres choses, de mettre sur les vins vendus dans la ville et dans le minihy [Note : Le Minihy de Tréguer était un vaste territoire situé autour de cette ville, jouissant du droit d'asile et de diverses franchises] de Tréguer un devoir de billot [Note : On appelait devoirs de Billot les droits qui se levaient sur les vins ou autres boissons vendues en détail ; ce nom vient, dit-on, de ce que l'on attachait à un poteau ou Billot la pancarte contenant le tarif de ces droits. Je ne prends point d'ailleurs la responsabilité de cette étymologie] dont les produits devaient être affectés à la reconstruction des murailles de Guingamp. On pria donc l'évêque de prêter son consentement à cette mesure, au moins pour un temps fixé, en protestant que cela ne lui pourrait porter préjudice pour l'avenir ; mais il s'y refusa absolument.

Cependant, deux ans après cette assemblée, d'autres commissaires du Duc se présentèrent à Tréguer au sujet de la même affaire, accompagnés d'une troupe de gens d'armes. Ils commencèrent, à la vérité, par solliciter de nouveau le consentement de l'évêque à l'exécution de la commission ducale dont ils étaient chargés, touchant la levée et collecte du devoir de billot imposée sur le minihy de Tréguer. Au lieu de donner cette autorisation, l'évêque leur interdit de rien faire de semblable, sous peine des censures ecclésiastiques et toutes autres peines pertinentes. Les commissaires se retirèrent irrités de cette réponse, et se mirent à exécuter leur commission dans les maisons qui entourent la place de la Ville.

Sitôt que l'évêque en fut informé, il convoqua son Chapitre et le clergé de la ville, fit revêtir aux chanoines, aux vicaires et aux chapelains leurs habits de choeur, et lui-même s'étant armé de ses ornements pontificaux, de la chape, de la mitre et de la crosse pastorale, se rendit processionnellement avec eux la croix en tête, sur la place de la ville, devant les maisons mêmes où les commissaires, avec une escorte d'archers du Duc et d'autres gens d'armes, procédaient à l'exécution de leur commission en levant de fait sur les habitants leur inique impôt.

Il y avait là un grand trouble et une confusion étrange. On était alors vers la fin d'octobre, tout près du jour de la Translation de Saint-Yves, qui est le 29 de ce mois ; nombre de pèlerins et d'habitants des paroisses environnantes se trouvaient en conséquence réunis à Tréguer, pour gagner les indulgences de cette fête et profiter de la foire qui se tenait le même jour. Pèlerins et paysans, joignant leurs réclamations à celles des citadins, avaient engagé contre les commissaires une querelle des plus vives. L'évêque arrivant sur ces entrefaites avec sa procession, fit faire halte devant les maisons où étaient alors les exécuteurs des ordres ducaux, et se mit courageusement en devoir de fulminer contre eux les sentences d'excommunication. Les commissaires, à cette vue, restèrent frappés de stupeur, s'adoucirent tout à coup, et enfin, grâce à Dieu, grâce aussi, comme on le croit pieusement, grâce à l'intercession particulière du bienheureux saint Yves, ils se retirèrent sans continuer davantage leur exécution.

Cependant tout ne finit pas là. Certains conseillers du Duc, pour faire leur cour au prince, l'excitèrent et l'irritèrent violemment contre Coetquis. Cet évêque et sa cité, disaient-ils, s'étaient rendus coupables du crime de rébellion et de lèse-majesté ; l'évêque même n'avait-il pas fait sonner les cloches à grande volée pour convoquer le peuple à la révolte ? etc. Mais le bon prélat ne se laissa point ébranler ; confiant en la protection divine et en l'intercession des bienheureux patrons de son église, saint Tugdual et saint Yves, il se rendit lui-même près du prince. Longtemps celui-ci refusa de le voir ; enfin quelques-uns des conseillers du Duc, plus favorables à l'évêque, s'entremirent pour l'arrangement de cette affaire : Coetquis fut admis à présenter la justification de sa conduite et il sut se faire écouter. Le résultat fut que le Duc, pleinement informé des privilèges de l'église et de la ville de Tréguer, perdit tout ressentiment, et finit par renvoyer l'évêque avec sa bonne grâce en lui conservant tous ses privilèges. Succès qui parut tenir du miracle, car on avait très-généralement prédit à l'affaire une issue toute opposée.

Jean de Coetquis mourut à Tréguer au palais épiscopal, le 23 septembre 1464. Son corps fut inhumé le lendemain dans la Cathédrale, près du siège où se place l'évêque. Puisse son âme goûter à cette heure la joie du paradis ! ».

Il semble facile de fixer de très-près la date des évènements rapportés par notre chroniqueur. Le duc Pierre II mourut en effet le 9 septembre 1457 ; donc l'exécution tentée à Tréguer par ses commissaires pour la levée du devoir de billot ne peut être plus récente que le mois d'octobre 1456. Mais elle dut avoir lieu justement en cette année-là, car elle était postérieure d'environ deux ans à l'assemblée de Guingamp où le billot fut proposé. Or, Coetquis assistait à cette assemblée en qualité d'évêque de Tréguer, et comme il ne prit possession de son évêché par procureur que le 26 mars 1454, l'assemblée ne peut être plus ancienne que le mois d'octobre 1454 ; et l'exécution des commissaires du Duc ne pouvant être plus récente que l'an 1456, il suit que ces deux époques concordent. Donc en 1454, vers le mois d'octobre, eut lieu l'assemblée de Guingamp, et sur la fin d'octobre 1456, la ville de Tréguer fut le théâtre des évènements décrits par notre chroniqueur. (A. L. B.).

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