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JEAN DE PLOEUC, EVEQUE DE TREGUIER.

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Jean de Plœuc (ou Ploeuc) gouverna l'église de Tréguer [aujourd’hui Tréguier] pendant onze ans, de 1442 à 1453, — et c'est à peu près là tout ce que nous apprennent sur son compte D. Morice et le P. Albert. Cet évêque méritait mieux ; car il a été véritablement par ses fondations, ses travaux, sa charité, l'un des plus grands bienfaiteurs de l'Eglise et de la ville de Tréguer au XVème siècle : comme on l'apprend d'une notice latine, écrite, semble-t-il, peu de temps après sa mort et insérée dans un ancien catalogue des évêques de Tréguer. Ce catalogue, dont j'ai retrouvé dernièrement une copie à la Bibliothèque Impériale, est dit avoir été pris  d'un « livre ancien estant aux archives de l'église de Treguer, parlant des benefices et dignitez de ceste eglise ». Tout ce que je vais dire sur Jean de Plœuc est résumé ou traduit de ce catalogue.

Cet évêque naquit au Tymeur, paroisse de Poullaouen, diocèse de Quimper. Il était docteur ès-lois quand il fut élu d'une voix unanime par le Chapitre de Tréguer pour remplir le siège épiscopal de cette église, le 4 mai 1442 ; et la même année le pape Eugène IV confirma cette élection par ses bulles datées de Florence.

Jean de Ploeuc s'occupa en premier lieu de rehausser l'éclat et la dignité du culte dans son église cathédrale. Comme elle n'avait point encore de psalette, il en fonda une, composée d'un maître et de six enfants de choeur : pour assurer l'avenir de cet utile établissement, il y attacha à perpétuité plusieurs dîmes en Penguénan et la plus grande partie de celles de Pédernec ; mais la psalette n'ayant pu jouir effectivement de ces dîmes que dix ans après son institution, c'est Jean de Ploeuc lui-même qui pendant tout ce temps pourvut à son entretien de ses propres deniers.

C'est lui aussi qui procura l'établissement des douze vicariats et du sacriste de la cathédrale de Tréguer, et qui y fit annexer à perpétuité l'église paroissiale de Tredarzec. En reconnaissance de ces fondations importantes, chaque jour après Complies, les enfants de la psalette faisaient, au tombeau de Jean de Ploeuc, la recommandation des âmes des fidèles défunts, avec un De profundis et les collectes des morts. Ce tombeau était situé à l'entrée du choeur, et devant le jubé de la cathédrale de Tréguer. Chaque jour aussi, avant et après chacun de leurs repas, au Benedicite et aux grâces, les enfants de la psalette faisaient mémoire de leur premier fondateur en priant pour son âme.

Jean de Ploeuc ne s'occupa pas seulement des cérémonies du culte, mais aussi de l'édifice qui en était le théâtre. Les travaux que lui attribue notre catalogue sont véritablement considérables. C'est lui, en effet, qui fit commencer et achever ce cloître si élégant que les artistes et les archéologues admirent encore aujourd'hui au Nord de la cathédrale de Tréguer ; il construisit une sacristie ou revêtuaire (revestiarium), et au-dessus une bibliothèque pour le Chapitre. L'intérieur de la cathédrale était alors fort mal décoré et même par endroits assez délabré ; elle n'avait point de pavé ; le maître-autel était pauvre, les murailles nues, et quelques fenêtres sans vitraux de couleur, etc. Jean de Ploeuc pava son église ; il fit peindre les voûtes et les parties supérieures des murs, où l'on vit, grâce à lui, resplendir les effigies des anges, des patriarches et des prophètes. Il fit placer à ses propres frais une grande verrière dans la fenêtre du transept méridional, fit refaire le grand autel avec son retable et toute sa décoration ; fit réparer les grandes orgues de la cathédrale et y en établit de petites qui n'existaient point auparavant. Il fit transcrire à ses frais, à Avignon, et apporter de là à Tréguer, un grand Commentaire sur le droit-canon, dont il dota la bibliothèque du Chapitre. Il donna à la fabrique de la cathédrale un drap de soie d'un grand prix, de couleur pourpre, tissu de fil d'or et brodé de figures, qu'il avait aussi tiré d'Avignon pour faire sa chapelle épiscopale ; il y ajouta des tapisseries pour tendre le choeur aux grandes fêtes.

On pense bien que notre évêque n'oublia point saint Yves, si cher aux Bretons et surtout au diocèse de Tréguer ; Jean de Ploeuc, en effet, fit faire à ses frais la grande verrière de l'église de Saint-Yves de Kermartin, où se dessert aujourd'hui, si je ne me trompe, la paroisse du Minihy-Tréguer (aujourd’hui Minihy-Tréguier).

Il mena aussi à bien une affaire qui n'était point de petite conséquence pour l'honneur de son église et de sa ville épiscopales. Jean V, duc de Bretagne, avait exprimé par son testament la volonté d'avoir sa tombe dans la cathédrale même de Tréguer, non loin de celle du glorieux saint Yves ; mais à l'époque de sa mort, survenue en 1442, la chapelle où devait reposer sou corps n'étant point encore prête à le recevoir, les restes mortels du prince furent déposés provisoirement dans la cathédrale de Nantes. Une fois en possession de ce dépôt, les Nantais se sentirent pris d'un vif désir de le garder, et trouvèrent mille prétextes pour ne le point rendre.

Jean de Ploeuc comprit que le meilleur moyen de vaincre leur résistance était d'achever entièrement le tombeau et la chapelle du duc, afin d'ôter tout motif plausible à cette mauvaise volonté. C'est ce qu'il fit, et le résultat répondit à son attente : en 1452 selon le manuscrit que nous suivons, en 1451 selon Albert-Le-Grand, le corps de Jean V fut enfin solennellement inhumé dans l'église cathédrale de Tréguer. Jean de Ploeuc ne s'occupait pas que de son église, et c'est à lui que Tréguer dut, on peut le dire, sa place centrale, la place de la Ville (platea ville), comme l'appelle notre manuscrit : elle existait déjà cependant ; mais notre prélat la fit élargir et aplanir à ses frais, opération qui nécessita l'enlèvement d'une masse énorme de terres : cette place n'avait non plus jamais eu de pavé ; il en donna un à toute la partie comprise entre la cathédrale, la Cohue et la porte de l'évêché.

Le manoir épiscopal lui dut aussi des accroissements considérables : « Il fit construire, dit notre manuscrit, la grande tourelle (magnam cochleam) de ce manoir avec les habitations et les divers bâtiments qui y touchent, et aussi les grandes étables, la grande grange et le grand puits de l'évêché ».

Sa charité pour son peuple se manifesta de plus d'une manière. Une fois, dans une année de disette et de cherté des grains, an temps des semailles, il fit distribuer aux pauvres et aux laboureurs tous les blés qu'il avait dans ses greniers, et se trouva ainsi réduit à en emprunter lui-même du Chapitre pour son entretien et celui de sa maison.

Je ne dis rien de ses aumônes continuelles ni des messes qu'il faisait dire incessamment pour les pauvres gens qui n'auraient pu les payer. Mais je ne puis omettre le trait suivant qui se rapporte à un usage particulier de cette époque. La pénitence publique était alors et depuis longtemps tombée en désuétude ; mais certaines cérémonies en dérivant continuaient de subsister. Ainsi, l'on avait encore coutume de prononcer le mercredi des Cendres l'exclusion hors de l'église des personnes coupables de certains péchés graves et publics, et ces personnes n'étaient ensuite admises à la communion pascale qu'avec des lettres d'absolution scellées du sceau de l'évêque ; pour ces lettres comme pour tous les actes ainsi scellés, le secrétaire de l'évêché avait un droit de sceau, assez peu considérable, mais onéreux néanmoins pour le petit peuple. Que faisait alors notre bon prélat ? Il déposait, pendant la semaine sainte, son sceau épiscopal chez le portier de l'évêché, qui scellait gratis toutes les lettres d'absolution.

Son austérité égalait sa charité et croissait en quelque sorte avec l'âge. Dans les dernières années de sa vie, il jeûnait presque continuellement et s'abstenait entièrement de manger de la chair ; ce ne fut que dans sa dernière maladie, sur les conseils répétés de ses confesseurs et de ses médecins, qu'il consentit à rompre cette abstinence pendant un peu de temps.

Il fut pris de cette maladie en 1453 : les médecins lui ayant ordonné de changer d'air, on le transporta au manoir de Coadélan (in manerio de Coatezlan), d'où Dieu, qu'il avait servi avec tant de zèle, le rappela à lui le 6 juin. Il y avait à son lit de mort un grand concours de peuple de toute condition, et un plus grand encore, le lendemain à ses funérailles, quand on rapporta son corps dans son église cathédrale, où il fut enterré, comme je l'ai déjà dit, à l'entrée du choeur, devant le jubé.

L'auteur anonyme que nous suivons résume en ces quelques lignes l'épiscopat de Jean de Ploeuc : « Il défendit et exerça louablement l'autorité ecclésiastique de sa charge qu'il transmit pleine et entière à ses successeurs, sans avoir craint cependant de s'en servir lui-même contre les grands et les puissants, quand ils le méritaient par leurs fautes. Il mit un zèle tout spécial à protéger, entre toutes ses ouailles, les clercs et les pauvres, et aima toujours au plus haut point sa cité épiscopale ». (A. L. B.).

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