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LA GROTTE DE TOUL FAROUGUEL

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Petit nains de Bretagne

Il y a de cela fort longtemps que la mer a creusé une grotte dans le flanc de la falaise à Beg-ar-Forn. Cette grotte du nom de Toul Farouguel (ou encore Toull ar garlandoned), située non loin du bourg de Saint-Michel-en-Grève, est la demeure des Kornandoned, petits lutins noirs. On les dit voleurs d'enfants. En effet certains d'entre eux ont une fâcheuse tendance à préférer les nourrissons michelois aux leurs propres. Ce sont de petits êtres noirs, de la taille d'un doigt, tout velu, à figure grimaçante, à voix rauque ou cassée, avec de long cheveux et de larges chapeaux, qui empêchent de les reconnaître. Ils sont chaussés de petits sabots à bout pointu.

Créatures réincarnées, originaires, semble-t-il, de Saint-Michel-en-Grève et condamnées par une puissance inconnue à une longue pénitence, ils sont dotés de pouvoirs plus ou moins magiques: ils peuvent quelquefois se grandir à la taille humaine ou, pour disparaître, se rapetisser à celle d'un insecte. On les dit méchants, et ils ont la mauvaise habitude d'exciter les tempêtes. Ils se cachent pendant le jour ; on ne les voit pas, mais on les entend souvent remuer. On les représente quelquefois recouverts de goémon. Ils sont d'ailleurs malins, d'une vivacité et d'une agilité surprenante. Impossible de mettre la main sur eux. Pour les chasser, il suffit d'avoir sur soi un bâton de charrue, nommé " baz-an-arar ". Il s'agit en fait d'une petite fourche de bois servant au nettoyage du soc de la charrue. Une fois le soleil couché, on se garde bien d'approcher de leur retraite. Ils ont le pouvoir de se rendre invisible et de comprendre le langage des oiseaux. Il ne se tient d'ailleurs pas une conversation dans la paroisse de Saint-Michel-en-Grève, qu'ils ne connaissent, si le vent vient à la surprendre.

Un soir, à la nuit tombante, un vieux pêcheur de Saint-Michel-en-Grève revient seul d'une pêche à pieds, où il est resté très tard, et, son panier sous le bras, il longe la côte au beau milieu des rochers situés en bas de la falaise de Beg-ar-Forn. Il marche pieds nus sur le sable mouillé qui étouffe le bruit de ses pas, lorsqu'au détour de la grotte de Toul Farouguel, il aperçoit plusieurs Kornandoned qui causent entre eux en gesticulant et en se lamentant, mais notre pêcheur n'entend rien de ce qui se dit. Ce même pêcheur se promène un jour au large de Beg-ar-Forn et voit avec surprise ces Kornandoned nager autour de sa barque. Il les reconnaît parmi les poissons auxquels ils ressemblent par leur forme. Les autres pêcheurs ne les aperçoivent pas. Leurs barques sont mystérieusement et lentement poussées vers les écueils et les rochers. Ils s'en étonnent d'ailleurs, car il n'y a pas un brin de vent. Mais notre vieux pêcheur, lui, connaît les mauvais tours que ces Kornandoned peuvent jouer aux pêcheurs. Il s'en méfie. Les Kornandoned se font un malin plaisir d'embrouiller et d'emmêler les lignes, de manger l'amorce sans se faire prendre, de couper les amarres des bateaux, de trouer ou déchirer les filets de pêche. Certains vident les casiers. Ils poussent même quelquefois l'effronterie jusqu'à sauter sur le dos des pêcheurs et à leur retirer la casquette en ricanant. Ils sont d'ailleurs souvent la source de violentes disputes et querelles entre les pêcheurs.

Un des grands divertissements des Kornandoned est de danser (la danse des Kornandoned) la nuit au clair de lune, sur la grève ou sur les gros galets placés à l'entrée de leur grotte en faisant beaucoup de bruit avec leurs pieds. Si pendant qu'ils dansent ainsi, " un promeneur attardé a la mauvaise idée de traverser la lieue de grève où ils font leurs ébats, ils l'appellent par son nom, et s'il a l'imprudence de répondre, il est entraîné dans le tourbillon de leur ronde, jusqu'à ce qu’ épuisé de fatigue, il tombe mourant sur le sol ". Ils se servent, semble-t-il, de petites cornes suspendues à leurs ceintures pour jouer de la musique. Qui ne connaît qu'un seul conte breton, connaît au moins " la danse des Kornandoned " et son refrain:

Dilun,

Dimeurs ha dimerc’her,

Diriaou ha dirguener ;

Lundi,

Mardi et Mercredi,

Jeudi et vendredi.

On raconte que les Kornandoned sont contraints de rester sur terre en chantant chaque nuit inlassablement les noms des premiers jours de la semaine, ayant oublié les autres (à savoir le samedi et le dimanche), jusqu'à ce qu'un chrétien les leur apprenne. Il faut savoir que le mercredi est leur jour férié. Le samedi et le dimanche sont des jours néfastes pour eux, c'est pourquoi ils se gardent bien de les rajouter dans leur chant.

A Saint-Michel-en-Grève, il n'est d'ailleurs pas bon de s'absenter et de laisser les enfants seuls à la maison pour aller assister à des veillées ou à des pardons. Abandonner ses enfants est considéré comme indigne d'une mère et pris de compassion maternelle certains Kornandoned emportent l'enfant abandonné quitte à laisser le sien en échange comme le rapporte cette histoire: "Une micheloise qui avait l'un des plus beaux bébés du monde, commit un jour l'imprudence d'aller s'amuser au feu de la Saint-Jean, abandonnant la pauvre petite créature seule dans son berceau. A son retour, elle remarqua avec effroi et stupéfaction qu'un changement s'était opéré sur le bébé pendant son absence. A la place de la charmante créature qu’elle avait quittée, elle trouva un être vorace (il mangeait de la bouillie comme sept) et hideux au visage déformé et ridé. Il s'agissait en fait d'un enfant-vieillard, fils ou fille d'un Kornandon. Il paraissait vieux, bien plus vieux que les plus anciens de St Michel".

Nous ne savons, en fait, pas grand chose d'autre sur les Kornandoned. Si l'on s'en rapporte à la tradition, ces Kornandoned voient les générations se renouveler, les siècles se succéder, et eux sont immuablement toujours les mêmes, puisqu'on affirme qu'ils ne meurent pas. Il y a fort longtemps, on les voyait souvent le soir à la lisière des bois sombres qui entouraient Saint-Michel-en-Grève, au milieu des bruyères désertes ou au sommet des rochers qui surplombaient la lieue de grève. Ils vivaient en paix et en harmonie avec les êtres humains de l'époque. Leur demeure se trouvait sous les menhirs que l'on respectait. On les aimait bien et ils rendaient d'énormes services à cette époque. On les utilisait souvent pour retrouver les vaches égarées. On les disait inoffensifs, serviables et bons. Ils rendaient de grands services dans les fermes. Un bon Kornandon dans une ferme était un trésor. On laissait même de temps en temps une crêpe à leur intention. Une coutume voulait qu'on leur laisse le samedi soir, la dernière crêpe qui s'appelle " ar grazen " (la grillée). Toute petite et faite avec le reste de la pâte, celle-ci était réservée aux Kornandoned. Ces derniers redoutaient le froid et ne sortaient donc guère de leurs caches souterraines pendant l'hiver. Un refrain que l'on chantait quelquefois à Saint-Michel-en-Grève, en berçant les jeunes enfants mentionne cette coutume :

Bin, Ban, Corriganan 

Pelec’h e moc'h epad ar goan ? 

Barz un toullic, barz an douar

Da gortoz an amzer clouar.

Bin, Ban, Naine,

Où es-tu pendant l'hiver ?

Dans un petit trou, dans la terre,

Pour attendre le temps tiède.

Certains anciens habitants de Saint-Michel prétendent que l'on trouve encore aujourd'hui des Kornandoned à Beg-ar-Fom. Mais ils sont méchants et espiègles. Et ceci est dû à l'ingratitude et à la méchanceté humaine. Il s'agirait d'espèces ayant vécu sous les menhirs anciennement situés à Saint-Michel-en-Grève (Parc Pelven, Parc Peuleven,..) et détruits sans ménagement par la main ravageuse de l'homme soumis à un productivisme forcené, qui ne croit ni en Dieu, ni en l'homme, mais seulement à l'argent. Ces Kornandoned estiment que leurs bons services ont été mal payés en retour. Ils aimaient vivre en paix sous ces menhirs où ils purgeaient leur peine tout en se sentant en sécurité, loin des dangers de la mer. De nos jours, leur humeur morose et leur méchanceté envers les humains viendraient de l'amertume de leur expulsion et de leur exil dans cette grotte de Toul Farouguel, mais ce n'est qu'une hypothèse parmi tant d’autres.

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