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HISTOIRE DU CHATEAU DE FOUGERES

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Le Château de la ville de Fougères.

Le vieux château de Fougères a bien changé d'aspect depuis le jour où ses fondateurs en ont posé la première assise sur le rocher qui lui sert de base ; il a subi bien des transformations successives et, s'il se présentait à nos yeux tel qu'il était jadis, nous aurions peine à le reconnaître. Chacun des siècles qui se sont écoulés, est venu l'un après l'autre modifier sa configuration, c'est ce qui le rend si curieux pour l'archéologue. On peut, en le visitant, faire pour ainsi dire un cours complet d'architecture militaire, et nous pensons qu'à ce point de vue, peu de monuments de ce genre offrent une aussi grande variété. La plupart des châteaux du moyen-âge appartiennent, pour leur plus grande partie du moins, à une même époque ; celui de Fougères présente des ouvrages de tous les temps et il nous montre des constructions, ou tout au moins des retouches très importantes, remontant à toutes les périodes de notre histoire.

Avant de commencer notre travail, nous croyons utile de donner un court historique du château.

" Le château a été fief de la famille des barons de Fougères, depuis sa fondation jusqu'en 1256 date à laquelle cette maison s'éteignit. Dans cette période de plus de deux siècles, le château fut pris deux fois. Une première fois en 1166 sous Raoul II de Fougères, le plus connu de cette famille, par le roi d'Angleterre Henri II Plantagenet. Une seconde fois en 1231 par le duc de Bretagne, révolté contre Blanche de Castille et Saint-Louis, qui avaient mis une garnison à Fougères. Les troupes du roi le reprirent d'ailleurs presque aussitôt. En 1256 la baronnie de Fougères passa à la maison de Lusignan, par le mariage de Jeanne, fille unique du dernier descendant de la maison de Fougères, avec Hugues de Lusignan. Le château resta dans cette maison jusqu'en 1314. Il revint alors au roi de France qui le donna en 1328 en apanage à la maison d'Alençon. Et en 1373, ayant reçu une garnison du duc de Bretagne, il fut pris de vive force par Duguesclin au nom du roi de France. En 1428 le duc Jean II d'Alençon vendit sa baronnie de Fougères au duc de Bretagne qui la conserva jusqu'en 1488. Durant cette période, qui est celle de la guerre de Cent Ans, Surienne, au service de l'Angleterre, enleva la place par surprise en 1449. Et ce fut une cause de la reprise de la guerre. Après un siège de deux mois, elle retombait aux mains du duc de Bretagne. Enfin, en 1488, dans la guerre entre la France et la Bretagne, l'armée française, sous le commandement de La Trémoille, s'empara du château. Quelques jours plus tard, la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier décidait du sort de Fougères et de la Bretagne. La Bretagne et Fougères rattachées à la France, le château perdait sa raison d'être. Il tomba dans le domaine du roi qui en donna la jouissance à des gouverneurs qui se sont succédé jusqu'à la Révolution. A la fin du XVIIIème siècle, à la période des aliénations du domaine royal, le château fut afféagé en 1784 au baron de Pommereul, lequel en devint propriétaire définitif en 1802. Dans l'intervalle, pendant la guerre civile, la grande armée vendéenne s'était emparée de la ville et du château de Fougères le 3 novembre 1793. En 1892, la ville de Fougères a acheté le château à la famille de Pommereul et en commença la restauration ". 

Bien que des travaux continus et presque incessants aient été faits au château pendant tout le moyen-âge, il nous semble qu'on peut les classer par époques et par séries, et nous en indiquerons sommairement neuf principales dont nous trouverons des traces fort reconnaissables. Enumérons-les tout d'abord et disons rapidement ensuite les ouvrages qui nous paraissent devoir être attribués à chaque période et les caractères auxquels on peut les reconnaître.

1ère EPOQUE. - Fondation, de 1000 à 1166.

2ème EPOQUE. - Constructions de Raoul II, de 1173 à 1200.

3ème EPOQUE. - Constructions des derniers seigneurs de la maison de Fougères, de 1200 à 1256.

4ème EPOQUE. - Constructions de la maison de Lusignan et vraisemblablement de Jeanne de Fougères, de 1256 à 1313.

5ème EPOQUE. - Construction de la maison d'Alençon, temps de la guerre de cent ans, de 1328 à 1429.

6ème EPOQUE. - Construction de la poterne, XVème siècle.

7ème EPOQUE. - Réunion de la Bretagne à la France, fin du XVème siècle.

8ème EPOQUE. - Travaux décoratifs des gouverneurs, XVIème et XVIIème siècles.

9ème EPOQUE. - Travaux de M. de Pommereul, XVIIIème siècle.

 

Plan du château de Fougères (Bretagne).

 

Reprenons ces différentes périodes :

1ère Epoque. - Fondation, de 1100 à 1166.

Le château ayant été ruiné de fond en comble par Henri II, roi d'Angleterre en 1166, il ne reste de cette époque que des débris plus ou moins douteux. Cependant nous aurons à examiner les bases de certains remparts, les substructions de la tour de Coëtlogon, le très ancien chemin de ronde auquel s'appuie la partie cintrée de la tour de Coigny, les premières assises de la tour des Gobelins, etc. Nous ne serions pas surpris qu'il y ait là des restes plus ou moins informes, plus ou moins retouchés postérieurement du château primitif. Nous dirons les raisons qui pourraient nous le faire croire. Nous étudierons aussi à ce point de vue les restes de l'ancienne chapelle que l'on vient de mettre à découvert. Enfin nous constaterons, et cette fois sans hésitation, que les tranchées pratiquées dans le roc aux deux entrées de la vieille forteresse, les barrages destinés à retenir les eaux autour des murailles, datent de cette époque.

Nous n'insistons pas sur les caractères que présentent ces ouvrages on peut cependant remarquer les archières en fente longue et rectitigne bordées de pierres de granit grossièrement travaillées qui se voient près de la tour Surienne, au bas de la grande courtine qui la relie à la tour Mélusine.

2ème Epoque. - Constructions de Raoul II, de 1173 à 1200.

Les trois tours de l'avancée datent de ce temps ; mais, comme nous le verrons, elles ont subi d'importantes modifications. Il faut encore y rapporter les remparts au-dessous des machicoulis, la modification de la tour de Coëtlogon, et des chemins de ronde nord, la partie supérieure de l'arrière de la tour de Coigny, la construction d'un bâtiment servant à l'habitation, la reconstruction de la chapelle, la tour du cadran et les étages inférieurs de la tour des Gobelins.

Caractères de cette époque : voûtes en blocage plates et très solides, archières ayant intérieurement la forme d'un rectangle, avec les parois supérieure et inférieure horizontales et présentant extérieurement la figure d'une simple ligne verticale : archières plus soignées du chemin de ronde et de la tour de Coëtlogon présentant une fente rectiligne terminée à son sommet par une ligne cintrée. Escaliers en lignes droites se retournant carrément par des marches se coupant d'une façon grossière, créneaux sans machicoulis, préoccupation de la défense beaucoup plus que de l'élégance et du confortable, herses, traces de hourds, etc...

3ème Epoque. - Constructions des derniers seigneurs de la maison de Fougères, 1200-1256.

Partie cintrée de la Tour de Coigny, couronnement des courtines sud, entre la tour du Hallay et la tour Surienne.

Caractères : premiers machicoulis dont les consoles sont séparées par des arcatures cintrées. Archières se présentant à l'extérieur sous la forme d'une simple fente, comme à l'époque précédente, mais affectant à l'intérieur la forme d'un rectangle surmonté d'un second rectangle plus étroit.

4ème Epoque. - Constructions de Jeanne de Fougères, 1256-1313.

C'est la plus belle époque. Les constructions de cette date joignent la solidité à l'élégance et à la pureté des lignes. Le type de ces constructions est la tour Mélusine. Il faut rapporter au même temps le sommet de la tour des Gobelins, probablement le donjon dont on ne sait que fort peu de choses, le sommet de la grande courtine ouest et celui de la courtine nord, la petite tour Guibé, l'avant-dernier étage de la tour de Guémadeuc, le sommet de la tour du Hallay alors entourée d'une galerie crénelée.

Caractères : Beauté des formes jointe à la solidité, machicoulis à consoles superposées. Archières souvent en forme de croix à l'extérieur, présentant à l'intérieur la forme de larges baies voûtées en anse de panier ; on y a pratiqué plus tard des ouvertures circulaires pour les canons. Salles souvent octogones, portes sans herses, mais à pont-levis à bascule, parfois à chaîne, surmontées de moulures en accolade. Escaliers tournants à colonnette centrale. Fenêtres rectangulaires, un peu étroites, sans meneaux. Belles cheminées de granit.

5ème Epoque. - La maison d'Alençon, guerre de cent ans.

C'est le temps de la construction du grand bâtiment des gouverneurs, du pavillon de Richelieu.

Caractères : L'architecture est en pleine décadence. Les bâtiments construits pendant cette période ont presque tous disparu, tandis que des ouvrages plus anciens subsistent avec toute leur beauté. Murs peu épais et peu solides. Fenêtres larges et rectangulaires avec croisillons en granit à arêtes vives et à lignes pures. A part cela, peu d'élégance de forme.

6ème Epoque. - Construction de la poterne XVème siècle.

Une portion notable de ce travail a disparu. Il paraît du reste n'avoir été jamais achevé.

Caractères : Machicoulis à double console arrondie. Meurtrières rondes, surmontées d'une ouverture carrée, parfois rectangulaires. Place des canons au-dessus du rempart indiquant une forme courte et large assez singulière.

7ème Epoque. - Réunion de la Bretagne à la France.

Les deux grosses tours.

Caractères : Construction massive ; murs très épais indiquant les progrès de l'artillerie, à laquelle on cherche à opposer plus de résistance. Vastes canonnières pratiquées dans les murailles. Machicoulis ornés de trèfles élégants. Grandes fenêtres rectangulaires à meneaux. Formes ne manquant pas de beauté, mais plus lourdes que celles des constructions de Lusignan.

8ème Epoque. - Travaux décoratifs des Gouverneurs XVIème et XVIIème siècles.

La tour de Coigny tranformée en chapelle, les corps de garde de l'avancée, les petits pavillons de Schombert et de Romilly, le balcon extérieur, la porte de Thémines. Les eaux de la fontaine de Bémouche amenées dans les cuisines. Les jardins disposés en terrasses, etc.

Richelieu fait démolir le donjon et démanteler le sommet des tours et des courtines ; grandes transformations. Le château commence à tomber en ruines.

Caractères : Les ouvrages de défense ont absolument cessé ; le château devient la demeure des gouverneurs qui cherchent à l'orner. La porte de la tour de Coigny donnant entrée dans la chapelle, présente le type des travaux de cette époque. Constructions souvent sans caractère, comme les corps de garde de l'avancée, élevés sur des bâtiments plus anciens ou adossés aux courtines qu'ils surélèvent en leur tirant leur ancien aspect. Courtines abaissées, parfois détruites en partie. La tour du cadran convertie en latrines. Epoque de grande décadence.

9ème Epoque. Travaux de M. de Pommereul.

Création de l'escalier circulaire extérieur et augmentation du bâtiment du corps de garde aux dépens de la courtine qui unissait les tours de Guémadeuc et de la Haie Saint-Hilaire. Constructions du dernier étage de la première de ces tours. Même travail au sommet de celle du Hallay. Le travail le plus important de cette époque est la construction des étages supérieurs des deux grosses tours et de leur disgracieuse toiture aujourd'hui disparue. Elles sont ainsi disposées pour servir de logement à des prisonniers de guerre. Après la révolution, démolition de la tour de Coëtlogon et du bâtiment des gouverneurs. Le château tombe tout à fait en ruines.

Caractères : Constructions généralement disgracieuses et peu solides, ne visant qu'à l'utilité du moment. Pierres de tuffeau encastrées dans les murs, portant des inscriptions qui ont été mutilées pendant la Révolution.

 

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I- LES FAITS HISTORIQUES.

 

Après avoir exposé les principales phases de l'histoire architectonique du château de Fougères, il reste à raconter très succinctement les événements dont la vieille forteresse fut le théâtre.

Chateau de Fougeres (Bretagne).

I- Siège de 1166.

Ce n'est pas ici le lieu de raconter la crise terrible qui affligeait alors la Bretagne, gouvernée par le duc Conan IV (1156-1166) que l'histoire a flétri du nom de « Petit », prince qui ne sut pas défendre son duché contre les entreprises de Henri II Plantagenet, roi d'Angleterre et duc de Normandie, et qui eut même la lâcheté d'abdiquer devant son adversaire.

Disons seulement que la lutte inégale et héroïque du baron de Fougères, devenu l'âme d'une ligue bretonne constituée pour s'opposer aux ambitions du roi d'Angleterre, eut un caractère profondément patriotique.

Raoul II en cette occasion joua un rôle prépondérant et soutint noblement la cause de la Bretagne entière.

La guerre se concentra autour de Fougères qui, bientôt, se trouva investi par les troupes anglaises commandées par le roi Henri II en personne. Les secours que Raoul de Fougères espérait ne venant pas, le baron, après une résistance opiniâtre, dut se rendre (1166).

Le château fut ruiné par l'implacable roi anglais.

La chronique de l'abbé du Mont Saint-Michel, Robert de Thorigny, contemporain de ces faits, nous apprend que le roi Henri II d'Angleterre détruisit le château de fond en combles ; expression qu'il ne faut peut-être pas prendre absolument à la lettre, mais qui témoigne néanmoins d'un désastre considérable. Les fouilles ont montré de nombreuses pierres qui semblent rougies par le feu ; elles porteraient à croire que l'incendie joua un rôle important dans l'oeuvre de destruction.

Ce malheureux siège fut donc un événement de première importance et particulièrement pénible pour les Fougerais.

Pourtant Raoul II ne perdit pas courage. Bientôt après la place de Fougères était remise en état de défense.

II- Les sièges de saint Louis (1231) et de Du Guesclin (1373).

Pierre Mauclerc, duc de Bretagne du chef de sa femme Alix de Bretagne, se révolta contre Blanche de Castille et saint Louis.

Plusieurs de ses barons, et notamment Raoul III de Fougères, se séparèrent de lui et rendirent directement hommage au roi de France (1230), « sauf le droit de l'héritier de Bretagne » encore mineur.

Saint Louis mit alors une garnison à Fougères.

D'après dom Morice, Mauclerc, en juin 1231, s'empara brusquement de notre château, qui fut repris presque aussitôt par les troupes du roi.

Le passage de saint Louis à cette époque est signalé à Laval et l'on dit à cette occasion qu'il quitta cette ville pour se rendre à Fougères. D'autre part, on sait que l'armée royale avait pour objectif la place de Saint-Aubin-du-Cormier, résidence favorite de Mauclerc, où fut signée une trêve le 4 juillet 1231.

Il est donc tout à fait vraisemblable que saint Louis soit venu lui-même reprendre la place de Fougères.

Après cet épisode assez mal connu, il faut attendre jusqu'au temps de la guerre de Cent Ans et de la guerre de Succession en Bretagne pour assister au château de Fougères à des faits d'armes dignes d'attention.

Jean IV, duc de Bretagne (1345-1399), après avoir juré fidélité au roi de France, Charles V, fut convaincu d'avoir traité secrètement avec Edouard III d'Angleterre (1370). Il dut s'enfuir de l'autre côté de la Manche devant les menaces des Bretons révoltés contre lui.

Le connétable Du Guesclin, au nom du roi de France, qui voulait empêcher une descente des Anglais dans la péninsule, entra en Bretagne où toutes les places fortes, à l'exception de quatre, lui ouvrirent leurs portes (1373). Notre ville, qui avait reçu une garnison du duc Jean IV, essaya de résister, bien que le comte d'Alençon Pierre le Loyal, seigneur de Fougères, accompagnât Du Guesclin.

Mais on ne résistait pas facilement au grand connétable : la garnison perdit « six vingts hommes » et dut se soumettre.

III- La surprise de Surienne et le siège du duc François Ier (1449).

Trois quarts de siècle plus tard, en 1449, les Anglais, rompant brusquement une trêve de la guerre de Cent Ans, firent attaquer Fougères par un capitaine aragonais à leur solde, du nom de Surienne, qui avait préalablement envoyé des espions dans notre ville sans méfiance.

Escaladant les murailles pendant la nuit, « sous la direction d'un homme expert en ce genre d'opérations, et qu'on appelait Thomassin l'Eschielleur » (DE LA BORDERIE, IV-352), la troupe de Surienne put entrer dans le château sans coup férir, prenant la garnison au lit.

Les Anglais firent un butin énorme, qui montre la prodigieuse richesse de notre pays à cette époque. Ce butin, estimé alors à deux millions d'écus d'or, vaudrait en notre monnaie d'avant-guerre, d'après la valeur attribuée à l'argent par d'Avenel pour cette époque, 64 millions de francs. Selon d'autres évaluations, on pourrait porter cette valeur à 108 millions ; et cela sans compter les dégâts estimés à 7.000 pièces d'or (225 ou 380.000 francs selon les évaluations).

Le duc de Bretagne François Ier, assisté de son oncle le connétable de Richemont, pour reprendre la ville (4 novembre 1449) qui lui appartenait, dut l'assiéger deux mois durant.

Pour préserver les remparts du choc des boulets, les assiégés les garnissaient de balles de laine et de sacs remplis de fumier et de terre, matériaux que les assiégeants s'efforçaient d'attirer avec de grands crochets.

Surienne obtint de quitter la place avec les honneurs de la guerre.

Ces événements firent un bruit énorme en France. Ils furent l'occasion de la reprise de la guerre de Cent Ans, et le commencement du succès définitif des armes françaises qui depuis une vingtaine d'années, grâce au secours miraculeux de Jeanne d'Arc, connaissaient enfin la victoire.

IV- Le siège de La Trémoille (1488).

Quarante années se passèrent dans la paix, mais non dans la quiétude : c'est l'époque des intrigues compliquées qui précédèrent la réunion de la Bretagne à la France.

Les Bretons, sentant le danger d'une conquête et d'une annexion, fortifiaient leurs places fortes. C'est alors qu'à Fougères on doubla les portes de la ville en y construisant des « boulevards » ; que l'on édifia les grosses tours du château ; que l'on ménagea un peu partout, dans les vieux murs, des embrasures à canons.

Ces précautions étaient à peine prises que la guerre éclatait entre la France et la Bretagne (1487).

L'armée française, forte de 15.000 hommes, s'empara de Saint-Aubin-du-Cormier (vers le 10 octobre 1487); et l'année suivante, venant de Châtillon-en-Vendelais [Note : L'armée française s'était emparée d'Ancenis le 19 mai 1488 ; elle y resta un mois. Elle fit ensuite un séjour assez long à Châtillon-en-Vendelais avant d'attaquer Fougères], et ayant à sa tête La Trémoille, l'un des plus grands capitaines du temps, elle mit le siège devant Fougères (12 juillet 1488), défendu par une garnison de 3.000 hommes sous le commandement de Jean de Romillé.

Malgré sa force, la ville ne put tenir que huit jours ; elle dut se rendre le 19 juillet 1488. Le chroniqueur Juligny assure que La Trémoille, pour pouvoir approcher des remparts, fit détourner le cours du Nançon.

Cela veut dire sans doute que la chaussée de la Couarde fut rompue, ce qui du même coup mettait l'étang à sec et vidait les fossés du sud-ouest.

Il est probable que c'est auprès de la porte de Rillé que la rupture fut effectuée, car un compte nous montre, après le siège, six hommes occupés durant huit jours à « curer la porte de Rillé », ce qui indique qu'un certain désordre s'était produit en cet endroit.

L'armée bretonne fut battue par les Français près de Saint-Aubin-du-Cormier (28 juillet 1488).

La paix qui suivit (21 août 1488) maintint Fougères dans la dépendance du roi.

Bientôt, du reste, par suite de la réunion de la Bretagne à la France, le duché devint une des plus belles et des plus fidèles provinces de cette grande nation.

V- Les guerres de religion.

Fougères avait donc cessé d'être une ville frontière, perdant ainsi son importance militaire.

Les guerres de religion lui redonnèrent une passagère notoriété.

Sous le couvert d'attachement au parti de la Ligue, le Gouverneur de Bretagne, Mercœur, dissimulait des desseins d'une folle ambition. Il ne rêvait pas moins, dit-on, que de rétablir à son profit le duché de Bretagne en revendiquant de prétendus droits de sa femme, héritière des Penthièvre.

Après s'être emparé de Nantes et de Rennes, il marcha sur Fougères (21 mars 1589).

Les Fougerais avaient eux-mêmes pris généralement parti pour la Ligue. Ils ne firent pas de résistance. En l'absence du Gouverneur de Fougères, alors retenu prisonnier à Nantes par Mercoeur, le commandant du château, M. de Gréal, rendit la place à Mercoeur moyennant 1.500 écus (près de 30.000 francs d'avant-guerre).

C'est alors (fin de 1589 ou début de 1590) que René de Langan, seigneur du Bois-Février (en Fleurigné, près de Fougères), équipant une troupe à ses frais, tenta de reprendre Fougères pour le roi. Ayant échoué, il fut retenu prisonnier par Mercoeur durant trois ans au château de Fougères.

Le roi avait nommé le prince de Dombes Gouverneur de Bretagne, en remplacement de Mercoeur, révolté.

Le prince, à son tour, marcha sur Fougères (1590). Il lança contre le château quelques boulets dont la trace se voit encore à la base de la tour de Guibé ; mais il ne se décida pas à entreprendre un siège.

Mercœur, qui avait établi son quartier général à Fougères, ne fit sa soumission qu'en 1598. Le roi accorda alors aux Fougerais des Lettres d'amnistie.

VI- La rébellion de Guémadeuc.

Convient-il de mentionner comme épisode militaire la rébellion de Guémadeuc ?

C'était un Gouverneur de Fougères au début du XVIIème siècle.

Violent, passionné, exigeant et malhonnête, il s'était fait détester. On l'accusait déjà de plusieurs méfaits, lorsqu'aux Etats de Bretagne de 1615, il eut avec le baron de Nevet une querelle de préséance, à la suite de laquelle Guémadeuc attaqua traîtreusement Nevet et le mit à mort.

Des poursuites furent entamées. Le duc de Brissac, lieutenant général du roi en Bretagne, fit investir le château de Fougères et en donna la garde au sieur de Launay.

A cette nouvelle Guémadeuc, furieux, rassemble quelques soldats, surprend le château, en chasse de Launay, et follement se déclare en rébellion ouverte.

Il fallut envoyer des troupes pour le réduire.

Guémadeuc fut condamné à mort, le 27 septembre 1616, et exécuté à Paris, place de Grève. Le jugement ordonnait que sa tête fût « portée en la ville de Fougères, plantée au bout d'une pique, et fichée sur le principal portail du château ».

La femme de Guémadeuc, Jeanne Ruellan, était fille de ce fameux Gilles Ruellan qui, d'abord simple domestique à Antrain, et époux de la fille d'une fruitière de Fougères, fit une si prodigieuse fortune qu'il put acheter de nombreuses seigneuries, recevoir des Lettres de noblesse et des titres, marier très richement ses enfants, et acquérir une telle influence qu'il put s'entremettre pour réconcilier Mercœur avec le roi.

Profitant de la haute situation de son père, Jeanne Ruellan était allée, pour sauver son mari, se jeter aux pieds du roi qui répondit : « Si c'est la justice qui fait régner les rois, je dois préférer la justice à la miséricorde. Pour ses biens, qui me sont confisqués, je vous les donne ».

La malheureuse veuve entra au Carmel de Paris.

VII- Prisonniers de guerre.

A diverses reprises, les locaux du château, non occupés par le Gouverneur, servirent pour l'internement non de prisonniers d'Etat [Note : Il en fut question, cependant, mais le projet n'eut pas suite], mais de prisonniers de guerre.

En 1645, vers la fin de la guerre de Trente Ans, on y enferma 24 prisonniers espagnols pris au fort de Wardick ; et en 1707, 300 Anglais faits prisonniers au cours des guerres de Louis XIV.

En 1758, on décida de transférer au château de Fougères des prisonniers anglais pris à Saint-Cast et à Camaret, et détenus à Josselin ; mais on recula devant les frais de mise en état du château.

Cependant, en 1778-1779, M. de Pommereul fit de grands travaux pour rendre le château capable de recevoir 3.000 prisonniers de guerre.

M. de Pommereul avait même envisagé le nombre de 3.600.

Voici comment ils devaient être répartis :
Salle de Mortemart : 470 hommes.
Salle de Sévigné : 460 hommes.
Salle de Pontpignan : 315 hommes.
Pavillon Richelieu : 245 hommes.
Pavillon Coëtlogon : 124 hommes.
Pavillon Schombert : 50 hommes.
Pavillon Romilly : 80 hommes.
Tour de Coigny : 18 hommes.
Tour de Plesguen (Cadran) : 23 hommes.
Tour Mélusine : 120 hommes.
Tour Raoul : 600 hommes. [Note : Il faut se rappeler que les tours Raoul et Surienne avaient été considérablement agrandies].
Tour Surienne : 600 hommes.
Tour des Gobelins : 40 hommes.
TOTAL : 3.145 hommes

L'usage était d'accorder 8 pieds carrés de superficie par hommes ; par humanité, on leur réserva 10 pieds carrés (105 dmq).

On décida de conserver la tour de Coigny comme magasin ; et le pavillon de Romilly fut laissé à la disposition du chirurgien.

Les pavillons Schombert et Richelieu, pour d'autres usages, furent encore réservés ; mais comme on prévoyait 200 hommes à l'hôpital [Note : Un hôpital avait été installé au couvent des Récollets, au faubourg Roger], le chiffre des prisonniers aurait pu néanmoins atteindre 3.000.

D'autre part, des salles de discipline et des cachots de punition, capables de contenir 40 à 50 prisonniers, étaient aménagés dans les tours de l'avancée.

En réalité, le nombre des prisonniers ne dépassa jamais sept à huit cents ; c'étaient des Anglais. Ils restèrent peu de temps au château. Dès 1780, par suite d'échange de prisonniers entre les puissances belligérantes, il n'y en avait plus.

Et, l'année suivante, le château servait de caserne à des artilleurs ; l'école du canon se faisait dans les prairies entre Rillé et la Pinterie.

Le dépôt d'artillerie ne resta que trois ans au château ; il fut remplacé par une garnison d'infanterie, puis par de la cavalerie. En 1784, il semble qu'il n'y avait plus de troupes au château.

Après la Révolution, on songea, comme précédemment, à interner des prisonniers de guerre au château de Fougères.

En 1813, un contingent de 500 Autrichiens fut dirigé sur Fougères ; on devait les loger au château. M. de Pommereul s'y opposa. On lui donna satisfaction (Lettre du Ministre de la Guerre. 29 octobre 1813). Les Autrichiens furent enfermés au couvent des Urbanistes (Abbé BADICHE, Mère Sainte-Marie-de-la-Croix, p. 19) ; et le château fut rayé de l'état des bâtiments susceptibles de recevoir des prisonniers de guerre, pour ce motif que cette propriété était habitée par Mme de Pommereul, et que seuls devaient être employés à cet usage les édifices non habités (Lettre du Ministre de l'Intérieur - 19 mars 1814).

Cependant, en 1829, au cours des divisions intestines qui ensanglantèrent le Portugal, des réfugiés portugais, sans doute partisans de dona Maria, furent logés au château de Fougères [Note : Hébergement de 285 réfugiés (constitutionnels) portugais à partir des premiers jours de mai 1829. Exilés principalement à Plymouth, 650 officiers, sous-officiers et soldats sur quatre navires firent route, début janvier, pour rejoindre les Açores, mais repoussés par des bâtiments de guerre anglais, ils choisirent le port de Brest, fin janvier 1829. Le gouvernement français, qui leur allouait des secours (ils étaient logés en tant que troupe pour des raisons d'économie, et les officiers recevaient 3fr/jr et les sous-officiers et soldats 1f.), décida de les diviser en trois dépôts : un à Laval, un à Mayenne et un à Fougères. A Laval, les soldats et sous-officiers logeaient dans une caserne non utilisée, tandis que les officiers louaient en ville chez l'habitant. Il en était sûrement de même à Fougères (P. Vicente)].

En 1832, ce fut le tour de Polonais réfugiés en France, après la victoire du général russe Paskiewitch.

Enfin, au cours de la Grande Guerre (1914-1918), nous avons vu, au château, des officiers allemands, au nombre d'une centaine ; puis, des officiers bulgares. Un Allemand tenta de s'évader ; il tomba, se cassa une jambe, et demanda tout penaud à réintégrer sa prison, qui n'était pas bien dure, quoique les réclamations allemandes fussent nombreuses.

Les officiers bulgares qui succédèrent aux Allemands étaient détenus sur parole et pouvaient circuler en ville, vêtus en civils. On prétend qu'ils avaient refusé de se battre contre la Russie. Ils n'étaient qu'une vingtaine au château.

VIII- Prisonniers de la Révolution.

Pendant la Révolution, malgré des protestations, le château servit à tous usages.

Le Tribunal révolutionnaire tint ses séances dans les bâtiments de l'avancée ; les grandes salles du vieux logis furent utilisées pour des réunions populaires ; des troupes, à diverses reprises, furent casernées dans la vieille forteresse ; on y logea même des particuliers menacés par les chouans ; mais surtout, elle servit de prison.

Le 12 juin 1792, la tour Raoul était choisie comme maison de correction. — En mars 1793, après la révolte de la Saint-Joseph, de nombreux prisonniers furent entassés dans toutes les tours.

En 1794, des femmes étaient détenues à l'étage supérieur de la tour du Hallay, les autres salles étaient utilisées comme cachots pour les hommes. La tour de la Haye-Saint-Hilaire servait à tenir au secret les prisonniers lors des interrogatoires, parce qu'elle communiquait avec les locaux occupés par les juges.

En août 1793, le geôlier fut installé au premier étage de la tour de Coëtlogon.

Le 3 novembre 1793, la grande armée vendéenne, entrée dans la ville de Fougères, délivra 300 royalistes détenus au château [Note : Aussitôt après 400 soldats républicains fuyant devant les Vendéens se réfugièrent au château. Les Vendéens les traitèrent en prisonniers. Le 5 novembre 1793, ils fusillèrent au château le maire de la ville, M. Lesueur. Quelques autres exécutions très peu nombreuses y furent faites].

Mais d'autres vinrent bientôt les y remplacer : les perquisitions et les délations amenèrent tant d'arrestations qu'en mars 1794, le château et la maison d'arrêt de la ville (la tour des Noës, rue Pinterie) devenant insuffisants, les églises furent converties en prison.

Détail qui serait incroyable si plusieurs documents officiels ne le relataient, pendant 15 jours, du 26 avril au 10 mai 1794, tous les hommes de plusieurs communes des environs furent incarcérés à Fougères par mesure de sûreté.

En juin 1794, on dut rationner les prisonniers qui ne reçurent plus qu'une livre de pain [Note : La ration réglementaire était de une livre et demie ; et la solde, de 18 deniers par jour (1 sou 1/2), était retenue presque tout entière par le geôlier pour le trempage de la soupe], composé des 2/3 de seigle et de 1/3 de sarrasin. Ceux qui étaient cultivateurs furent contraints de faire venir du pain de chez eux.

Etant donné le grand nombre de prisonniers, l'Administration jugea qu'il y aurait économie à installer au château un boulanger travaillant exclusivement pour eux.

L'état sanitaire des malheureux détenus était si mauvais qu'on craignit en mai 1794 de voir se répandre en ville la fièvre putride qui régnait au château. Un médecin fut désigné ; une infirmerie fut installée dans la tour Raoul, en deux dortoirs de 16 lits chacun.

Le geôlier touchait deux sous par jour et par personne confiée à sa garde, à condition qu'il fournît de la paille. Ce paiement était à la charge des prisonniers, les riches payant pour les pauvres.

Le concierge percevait, en outre, dix sous à l'entrée et dix sous à la sortie de chaque prisonnier ; on l'autorisait à fournir des lits aux conditions suivantes : un lit pour une seule personne, cinq sous par nuit ; un lit pour deux personnes, trois sous pour chacune ; un lit pour trois, deux sous quatre deniers par personne et par nuit.

La chute de Robespierre (juillet 1794) amena une détente provisoire : le 25 août 1794, il ne restait plus au château que 23 détenus. Au 1er juillet 1795, « les bâtiments du château de Fougères, qui servaient ci-devant de maison de détention, servent maintenant de caserne pour les troupes... » (Délibération du 13 messidor an III).

Au début de septembre 1795, l'adjudant général Quantin, commandant des forces de l'arrondissement, voulut se loger au château : ce ne fut pas possible, l'Administration du District y ayant installé des « patriotes » des faubourgs pour les « soustraire au fer assassin des chouans ».

Le 11 vendémiaire an IV (3 octobre 1795), l'Administration loua à des particuliers divers appartements et jardins au château, à charge de laisser passage aux factionnaires, car cela n'empêchait pas qu'on y casernât des troupes : on en signale encore en mars 1796.

M. le Bouteiller, dans sa « Révolution au Pays de Fougères » (feuilleton 105), nous apprend que le 19 avril 1796, cinq prêtres étaient détenus au château, où un sixième ne tarda pas à les rejoindre. Sous l'influence de la pacification de 1795, on se montrait moins inhumain : les amis de ces ecclésiastiques pouvaient les approcher et même partager leurs repas. Le 2 mai 1796, ce fut interdit ; et le 16 du même mois, ordre fut donné de transférer ces prêtres à Rennes « sous l'escorte qui doit accompagner le premier courrier ».

Pendant l'an VI (1797-1798), le Tribunal de police correctionnelle tint ses séances dans une des salles de l'avancée.

On recommence à enfermer des prisonniers au château.

Un procès-verbal d'évasion de quatre chouans, dans la nuit du 1er au 2 octobre 1799 donne des détails édifiants sur l'insuffisance du service d'hygiène et sur la regrettable promiscuité qui régnait dans les prisons révolutionnaires.

A cette date, des hommes et des femmes étaient enfermés ensemble dans une des salles de la tour Mélusine. A l'étage qui communique avec le rempart sud avait été pratiqué, dans le plancher, un « petit guichet », selon les termes du procès-verbal, pour, continue délicatement le rédacteur, « servir aux personnes enfermées dans cette chambre, de moyen de déposer leurs excréments dans l'appartement au-dessous ».

Notons que cet appartement « au-dessous », c'est le rez-de-chaussée de la tour, et non pas le cachot.

Faut-il ajouter que c'est par ce « guichet », de neuf pouces de côté, que quatre chouans enfermés dans la tour ne craignirent pas de passer pour s'évader, en se laissant glisser le long de leurs draps.

Parvenus à l'étage « au-dessous » qui, comme on devine, devait être peu propre, ils purent gagner l'escalier ; et ils quittèrent la tour par une très étroite fenêtre (8 pouces 1/2 de largeur) qui se trouve à hauteur du premier étage dans un petit couloir ménagé au nord dans l'épaisseur de la muraille.

Utilisant ensuite les escaliers dressés sur l'esplanade du donjon contre le mur de clôture, près de la tour des Gobelins, ils atteignirent facilement le sommet de ce mur d'où, toujours au moyen des draps, ils se laissèrent glisser au dehors, après quoi ils disparurent, au grand dam du sous-officier de garde.

Ce n'étaient pas, du reste, les premiers détenus qui réussissaient à s'évader du château.

En juin 1793, on fut obligé de murer une porte donnant accès de la tour de la Trémoille à un jardinet établi sur le rempart voisin, les soldats casernés au château trouvant le moyen d'aller par là à la maraude, et les prisonniers l'utilisant pour s'évader.

En avril 1794, la garde fut doublée, et le geôlier mis en état d'arrestation pour avoir laissé fuir des prisonniers « par une fenêtre mal construite et non grillée en fer », écrivirent, pour l'excuser, ses amis du « Comité de Surveillance ».

Une tradition veut que des chouans se soient évadés du château par une ouverture si étroite que l'un d'eux (c'est peut-être un des quatre dont nous avons parlé) y ait laissé ses oreilles, et que, par surcroît de malchance, le pauvre malheureux se soit cassé une jambe en tombant sur le rocher.

Plus énergique que le prisonnier allemand dont il a été question, le chouan aurait eu le courage de se traîner jusqu'à un pont, sous lequel il se serait caché en attendant le secours de ses amis.

Comme on le voit, l'histoire du château pendant la Révolution est des plus lamentables.

IX- Aliénations du Château.

La baronnie de Fougères, avec la seigneurie de Quimperlé, avait été, le 21 août 1755, selon l'arrêt du Conseil royal du 27 novembre 1753, « engagée », après adjudication, au duc de Penthièvre, petit-fils de Louis XIV, et gouverneur de Bretagne.

L' « engagement » consistait en un abandon, à titre d'usufruit, même héréditaire, mais toujours révocable, des biens de la Couronne, en échange et garantie de prêts consentis par les engagistes.

Il ne semble pas que le château de Fougères, dont l'aliénation avait pourtant été envisagée par le Gouvernement, dans le premier tiers du XVIIIème siècle (Archivives départementales), ait été compris dans l'engagement au duc de Penthièvre.

Aux termes de l'acte, l'engagiste ne devait jouir des revenus de la baronnie que dans la mesure où les Fermiers du Domaine avaient coutume d'en jouir eux-mêmes (Archives municipales).

Or, le château et ses dépendances avaient toujours été distraits des Fermes du Domaine (Archives municipales), leur produit étant affecté aux « appointements » du Gouverneur, situation qui persista après l'engagement [Note : Les dépendances du château comprenaient, outre le château lui-même, l'étang, les prairies et le rocher de la Couarde ; les Quatre moulins ; la porte Notre-Dame ; les fossés et corps de garde de toute l'enceinte de la ville ; le Parc (31 journaux de terre situés entre le Nançon, Rillé et le chemin qui du Gué-Landry monte vers Rillé ; 20 journaux étaient en bois taillis, 4 en terres labourables, 4 en prairies, 3 en carrières). Les dépendances comprenaient encore : la Butte du parc (6 journaux de terre, dont 4 étaient enclos, s'avançant jusqu'au Gué-Landry, entre le Nançon et la rue actuelle du Cimetière) ; une prairie de 25 journaux, appelée la Prée-au-Duc, située près de la Sermandière, en Lécousse, dont les foins, chose bizarre, devaient être charroyés par les paroissiens de Beaucé ; enfin, le droit de pêche exclusif dans le Nançon depuis le Gué-Landry jusqu'au château (Archives Municipales). Les dépendances seules, au dire du Directoire du département (Délibération du 27 avril 1792), auraient pu se vendre 100.000 livres].

Les Gouverneurs, du reste, n'habitaient plus qu'exceptionnellement le château, se contentant d'en toucher le revenu. On connaît un bail consenti par l'un d'eux, M. de Coigny, en 1767, pour neuf ans, au prix de 2.500 livres par an, avec 360 livres de pot-de-vin, le locataire se trouvant, en outre, chargé d'une rente de 110 livres due à l'abbaye de Rillé, et d'une autre rente de 150 livres due au prieur du château [Note : Une indemnité de 600 livres fut accordée au fermier par le Gouvernement lorsque l'Etat disposa du château pour y loger des troupes ou des prisonniers]. — Dans ce bail, qui fut continué pour une autre période de neuf ans, aux mêmes conditions, M. de Coigny se réservait le droit de loger au château en cas de besoin. Il habitait ordinairement Paris.

Par Lettres patentes du roi, rendues le 4 août 1784, après arrêt du Conseil du 20 juillet de la même année, le château de Fougères fut « afféagé » à M. de Pommereul, cet officier d'artillerie que nous avons vu en 1778 réparer le château.

L'« afféagement » était une aliénation de propriété dont le paiement s'effectuait par versements périodiques, constants et perpétuels : moyennant certaines charges supplémentaires, comme le paiement des rentes dues à l'abbaye de Rillé et au prieur de la chapelle du château ; l'entretien, dans de certaines limites, des bâtiments ; l'obligation de mettre le château, en cas de besoin, à la disposition temporaire du roi, M. de Pommereul devenait propriétaire du château de Fougères et de ses dépendances.

Le prix consistait en une rente perpétuelle de 240 boisseaux d'avoine, payable en argent, la valeur du boisseau étant déterminée, d'après les mercuriales du marché de Fougères, par périodes trentenaires.

Pour la première période, le prix fut établi à 50 sols le boisseau.

De plus, M. de Pommereul devait indemniser M. de Caud, « ci devant commandant » des troupes casernées au château, des dépenses qu'il avait dû faire pour se loger.

Il faut remarquer que dans l'acte d'afféagement le Duc de Penthièvre, engagiste de la baronnie, n'intervient nullement, alors qu'on le voit, par ailleurs, afféager souvent lui-même l'autres parties du domaine royal engagé, ce qui confirme l'impression que le château de Fougères n'était pas compris dans l'engagement de 1755.

Par contre, M. de Coigny qui, en 1784, était encore titulaire du Gouvernement de Fougères, fut appelé à donner son consentement, lequel fut accordé à la condition que les rentes de l'afféagement lui fussent versées à lui-même, tant qu'il serait Gouverneur.

Comme cela mettait M. de Coigny en perte sérieuse, puisqu'au lieu des 2.500 livres qu'il recevait de son fermier, il ne devait plus recevoir de M. de Pommereul que 600 livres seulement (valeur des 240 boisseaux d'avoine à 50 sols le boisseau), un arrangement particulier, que nous ne connaissons pas, dut intervenir entre eux.

L'afféagement du château consenti à M. de Pommereul ne fut pas vu d'un bon oeil par les Fougerais : on reprocha à l'afféagiste d'avoir intrigué pour obtenir l'autorisation d'exécuter au château, en 1778, pour 80 à 100.000 livres de réparations, avec l'arrière-pensée présumée (suspicion toute gratuite) de se le faire attribuer ensuite.

La concession de 1784 avait été accordée à la suite d'une requête de la même année tendant à faire croire qu'elle était une marque de patriotisme et de désintéressement de la part du demandeur. Or, moyennant un débours annuel de 860 livres. M. de Pommereul recevait, au dire des membres de l'Administration du District, 5.828 livres (affermage des moulins, prairies, bâtiments, etc.), d'où, chaque année, bénéfice de près de 5.000 livres.

En plus des insinuations téméraires ou fausses, il y avait en ceci quelques exagérations. Les travaux de M. de Pommereul, loin d'atteindre 100.000 livres, ne semblent avoir atteint que 82.143 livres 16 sols 3 deniers (note de M. de Pommereul, archives de M. Déan de Luigné-Saint-Martin) ; et sur cette somme, 18.641 livres 13 sols 8 deniers avaient servi à établir, au couvent des Récollets, un hôpital capable de recevoir 200 malades. — L'estimation du revenu est peut-être également majorée.

Au début de la Révolution, la Municipalité et le District de Fougères firent l'impossible pour obtenir l'annulation de l'afféagement.

La Municipalité se proposait de transférer au château la maison d'arrêt de la ville et d'installer les marchés à bestiaux dans les « douves en grande partie comblées du château ».

De son côté, l'Administration du District, en quête d'un lieu de réunion, aurait désiré y tenir ses séances (procès-verbal du 6 juillet 1790).

Des pétitions furent envoyées à l'Assemblée nationale et au Comité des Domaines, le 20 septembre 1790, par la Municipalité ; le 21 avril 1791 et le 14 avril 1792 par le District.

De son côté le Département, par délibération prise le 27 avril 1792, à la suite d'une demande d'avis du Comité des Domaines, conclut à son tour à la nullité de l'afféagement.

On peut s'étonner que ces démarches multipliées contre un acte qui, à la vérité, ne paraît pas avoir été très régulier, n'aient pas abouti.

M. de Pommereul était alors à Naples où, après avoir rempli, depuis le 14 juillet 1787, une mission du Gouvernement français, il avait pris, le 1er février 1792, du service près du roi des Deux-Siciles.

Profitant de cette absence qui dura jusqu'à la fin de 1795, l'Administration fit inscrire, en 1792, M. de Pommereul sur la liste des émigrés, espérant par là reprendre possession du château, devenu ainsi « bien national ».

Mais Mme de Pommereul, restée en France, défendait opiniâtrement les droits de son mari, et protestait énergiquement chaque fois que l'Administration disposait du château.

Elle produisit des certificats et réussit à obtenir du Directoire exécutif un arrêté en date du 1er prairial an IV (20 mai 1796) qui rayait définitivement le nom de son mari de la liste de proscription, et le 10 septembre 1796, le Département dut ordonner la levée du séquestre mis sur ses biens, château compris.

Mais restait exécutoire la clause de l'afféagement qui mettait le château à la disposition de l'Etat en cas de besoin. Mme de Pommereul, dans une pétition du 19 février 1797, demanda à l'Administration municipale (Administration municipale du canton de Fougères) d'examiner si les circonstances exigeaient toujours l'occupation du château, et notamment des bâtiments de l'avancée.

L'Administration soumit le cas au Département, en mentionnant que le Tribunal correctionnel était installé dans ces bâtiments. Et, en même temps (5 avril 1797), elle invita les Députés d'Ille-et-Vilaine à hâter la décision de l'Assemblée nationale au sujet de la validité de l'afféagement, cette question étant toujours pendante.

Sans vouloir rien préjuger sur le fond de l'affaire, le Département ordonna, le 20 avril 1797, la remise à Mme de Pommereul de tous les locaux du château, y compris ceux de l'avancée, à l'exception cependant de ceux qu'occupaient les troupes, prescrivant ainsi le déguerpissement du Tribunal ; cependant, de son côté, il insistait pour que l'Assemblée nationale tranchât rapidement la question de fond.

Les documents du dossier conservé à la Bibliothèque municipale n'indiquent pas quand et comment fut tranchée cette question ; mais on sait que la décision fut favorable aux intérêts de M. de Pommereul, ce qui peut surprendre [Note : La révocation des aliénations des biens de la Couronne, ainsi que l'observe l'arrêté préfectoral du 14 mars 1802, résultait déjà de l'article 24 du décret de l'Assemblée nationale du 22 novembre 1790 sanctionné le 1er décembre suivant ; et de l'article premier du décret du 10 frimaire an II. On ne peut que s'étonner que ces décrets n'aient pas été utilisés contre M. de Pommereul].

Vint la loi du 14 ventôse an VII (4 mars 1799), relative aux domaines aliénés par l'ancien Gouvernement. Elle obligeait les bénéficiaires à une déclaration des biens à eux concédés et au paiement en numéraire du quart de leur valeur.

M. de Pommereul, s'étant conformé à ces prescriptions, fut déclaré le 27 nivôse an X (17 janvier 1802), par arrêté préfectoral, propriétaire incommutable du château et de ses dépendances, moyennant le paiement de 5.260 francs, quart de l'estimation qui en avait été faite, le 25 brumaire (16 novembre 1801), par MM. Beillard, Baron et Lebrun, experts désignés, conformément à la loi du 14 ventôse an VII.

Enfin, le 23 ventôse an X (14 mars 1802), un autre arrêté préfectoral, s'appuyant sur les articles 3 et 21 de la même loi du 14 ventôse an VII, déclara périmée la réserve jadis insérée par le roi dans l'acte d'afféagement, relativement au droit de reprise de possession temporaire du château en cas de besoin.

En 1800, nous voyons, installée au château, dans les bâtiments de l'avancée, une brigade de gendarmerie à pied ; un loyer de 450 francs fut payé à M. de Pommereul.

Le château fut ensuite habité par la famille de Pommereul.

Puis, il fut loué à un teinturier, et peut-être à d'autres personnes.

Nous l'avons vu, récemment encore, servant de logement à un chef d'escadron, commandant la garnison de Fougères, ce qui lui donna la courte apparence d'un retour à sa gloire militaire d'antan.

Enfin, en 1892, la ville de Fougères acheta de la famille de Pommereul, pour 80.000 francs, dont l'Etat fournit la moitié, le château et ses dépendances, qui se bornaient alors à la Porte Notre-Dame et aux Quatre-Moulins.

On appelle ainsi un pittoresque moulin situé à l'entrée du château, et aussi vieux que lui. Dans les vieilles chartes, il est désigné sous le nom de « Moulin de la tranchée ». Il fournissait sans doute la farine à la garnison. Le pain était cuit dans le « four de la duchesse Anne » de la tour des Gobelins dont le souvenir s'était conservé parmi les vieilles gens du pays, et dont on a retrouvé les traces. — Un four « banal » se trouvait également dans une maison qu'a remplacé le logement actuel du meunier des Quatre-Moulins.

Chateau de Fougeres (Bretagne).

X-Les Légendes.

Comme tous les châteaux moyenâgeux qui se respectent, le château de Fougères a ses légendes de souterrains, d'oubliettes, de faux monnayeurs, de fées, etc...

Nous avons déjà mentionné la fée Mélusine [Note : Ce nom de Mélusine venait, dit-on, de mère Lusine, mère des Lusignan. Cette fée bien connue dans les légendes des Poitevins et les romans de chevalerie, était tous les samedis changée en serpent pour avoir donné la mort à son père. Son mari l'ayant un jour aperçue dans sa métamorphose, l'enferma dans un souterrain de sn château de Lusignan, où elle est depuis emprisonnée et où elle vit encore]. De vagues traditions, de serpents enfermés dans la tour Mélusine, pourraient se rapporter à cette fée.

Disons un mot des autres légendes.

Lorsqu'on démolit la tour de Coëtlogon qui menaçait ruine, au début du XIXème siècle, on trouva, à droite en entrant, un fourneau et des débris de métal qui donnèrent naissance, c'était fatal, à une légende de faux monnayeurs, sans autres preuves ni indications.

Rien même ne fait penser qu'il ait été fabriqué des monnaies en ce lieu.
On sait qu'il a été frappé à Fougères, au moyen âge, non de la fausse, mais de la saine monnaie, dont on a retrouvé quelques exemplaires marqués de la lettre F, et dont on connaît un fabricant au XVème siècle (Pierre Morel, seigneur de la Villegontier).
Il est probable que l'atelier monétaire de Fougères était plus spacieux et mieux aménagé que le petit réduit découvert dans les ruines de la tour de Coëtlogon. Il est possible que ce petit atelier n'ait été utilisé que pour de menues réparations à exécuter au château ou à l'armement et à l'équipement.

Des souterrains, dit-on, reliaient le château de Fougères aux « Celliers de Landéan » [Note : Salle souterraine du XIIème siècle, assez curieuse, située dans la forêt, non loin de Landéan, à 7 kilomètres de Fougères], et au château de Saint-Aubin-du-Cormier, lequel est distant de 22 kilomètres.

Inutile, je pense, de souligner l'absurdité de pareils racontars, dont la vraisemblance même se heurte à une impossibilité matérielle des plus manifestes.

Faut-il dire que des esprits imaginatifs ont voulu voir l'entrée de ces prétendus souterrains dans les infractuosités du roc dans lequel a été creusé le puits du château ; et qu'il a fallu, pour convaincre un ancien gardien de la fausseté de la légende qu'il répandait, descendre en sa présence dans ce puits avec une échelle de corde.

Dans notre pays de dure pierre de granit, de schiste ou de grès, creuser des souterrains de sept ou de vingt-deux kilomètres ne serait pas petite affaire.

A la vérité, des textes du XVIIIème siècle signalent des souterrains au château de Fougères ; mais l'un d'eux n'est autre que la galerie intérieure de la courtine qui réunit les tours de Coëtlogon et de Coigny : en un sens, cette galerie, qui est à plusieurs mètres au-dessus du sol de l'avancée, est bien réellement souterraine, puisqu'on l'a recouverte de terre.

C'est en un sens analogue qu'un autre souterrain est indiqué, dans un document, aux alentours de la vieille chapelle.

Quant à la légende des oubliettes, en voici l'origine :

A une époque récente, vers le milieu du XIXème siècle, des enfants, en jouant au rez-de-chaussée de la tour Mélusine, découvrirent l'existence du cachot ménagé dans la base de cette tour. Il était alors rempli de décombres. En déblayant, on trouva quelques pièces de monnaie d'un intérêt médiocre, des boulets de canon en pierre, un tronçon de canon, et des ossements.

L'opinion publique s'émut, en raison, dit M. Maupillé, des légendes romantiques concernant les « oubliettes », et surtout, ajoute-t-il, en raison des souvenirs conservés des victimes de la Terreur.

Mais cette émotion ne tarda pas à se calmer lorsqu'on eut constaté qu'aucun de ces ossements n'avait appartenu à un corps humain : c'étaient des débris des repas des oiseaux de proie qui pénétraient dans ce cachot par une toute petite fenêtre.

Malgré cela, la légende persista dans quelques cerveaux crédules.

Dans ce cachot, auquel on ne peut accéder que par une trappe, et qui n'est éclairé que par une petite ouverture vers l'ouest, il y a une niche creusée dans la muraille, et un siège de latrines : c'était une prison aussi sévère que sûre, mais qui ne fut jamais destinée à y « oublier » personne.

L'horreur d'une mort affreuse et clandestine a exercé sur les imaginations romantiques une étrange fascination : on a cru voir des « oubliettes » partout, non seulement dans des cachots du genre de celui de la tour Mélusine, mais encore dans des réduits de toutes sortes destinés à des usages dont le souvenir s'est parfois perdu.

Aucune légende n'est plus répandue, ni plus tenace, bien qu'aucune ne soit plus invraisemblable que celle de ces prétendues « oubliettes », sorte de tombeaux intentionnellement édifiés pour pouvoir y abandonner cruellement de malheureux vivants.

Si pourtant l'on réfléchit aux nombreux moyens faciles, économiques, rapides, secrets, atroces même si l'on veut, de donner la mort, on ne s'explique pas pourquoi les seigneurs du moyen âge auraient eu l'idée macabre de construire à grands frais de tels charniers.

On sait, au contraire, que des gibets ou fourches patibulaires étaient élevés ostensiblement, comme marque du droit de Haute Justice, même dans des seigneuries relativement peu importantes où ils ne servirent guère ni longtemps, la Justice royale s'étant réservé de bonne heure le droit de procéder aux exécutions.

Le gibet du seigneur de Fougères était placé sur une colline à l'ouest du château, non loin de Bliche, dans un champ qui a conservé le nom de « champ de la Justice ».

XI- Les vicissitudes du vieux château.

Le château de Fougères a eu bien des vicissitudes.

Après les heurts de la guerre, il a reçu les affronts des démolisseurs et éprouvé l'amertume de l'abandon.

Puis, il fut quelque peu défiguré par de prétendus « travaux d'embellissement » exécutés par les Gouverneurs en certaines parties, alors que d'autres parties étaient vouées à la ruine, faute d'un entretien devenu trop onéreux.

Sa transformation en prison militaire eut au moins l'avantage d'assurer sa consolidation.

Il courut bientôt un risque sérieux : devenu le maître de cette immense propriété, M. de Pommereul, si l'on en croit un plan de « restauration » conservé au Musée municipal, résolut de le transformer en habitation de plaisance, ce qui l'eût rendu méconnaissable et lui eût enlevé ses caractéristiques militaires et historiques. Heureusement, ce projet ne fut pas réalisé.

Un danger plus grand encore le menaça : un spéculateur imagina, vers 1890, de détruire complètement le château pour en vendre les matériaux et le terrain. Mais des personnes de goût, parmi lesquelles M. A. Durand, président du Syndicat d'Initiatives, intervinrent utilement.

C'est alors que la Ville en fit l'acquisition.

L'Administration des Beaux-Arts entreprit en 1892 la restauration du monument, moyennant l'appui financier de la Ville, devenue propriétaire, et du Département. L'Etat fournit la plus grosse part des dépenses.

Ce vieux château, l'un des plus considérables qui subsistent, qui a subi tant d'assauts et dont les murs portent l'empreinte de tant de guerres, méritait d'être conservé.

Il présente, nous l'avons vu, des types d'architecture militaire, parfois presque intacts, depuis le XIIème siècle, jusqu'à la fin du XVème. Il a conservé en grande partie son caractère militaire. On chercherait vainement ailleurs un monument de cette importance et une pareille collection de constructions de toutes les époques, si bien conservées et rassemblées en un seul lieu.

Quoique très puissante, la vieille forteresse, au cours des âges, a subi de nombreux échecs : c'est le sort de toute tactique défensive, de céder à la longue à une offensive bien menée ; aucune place n'est imprenable.

Pour avoir été vaincue à diverses reprises, malgré la vaillance de ses défenseurs, notre citadelle ne fut donc aucunement déshonorée : elle ne fit que subir une destinée inéluctable, triste, mais glorieuse quand même.

Pour les Fougerais, elle évoque le souvenir des temps lointains où la place de Fougères était considérée comme la clef de la Bretagne. Ce château a, de plus, le mérite de conserver la mémoire de celui qu'on peut considérer comme son fondateur, puisqu'il le reconstruisit de toutes pièces, le célèbre et glorieux baron Raoul II de Fougères, le héros dont à juste titre peuvent s'enorgueillir non seulement les Fougerais, mais tous ceux qui ont le souci de l'indépendance nationale.

XII- Les Fouilles.

Depuis 1924, les fouilles opérées au château par le Syndicat d'Initiatives, ont fourni des données nouvelles, et ouvert le champ à de nombreuses hypothèses :

Angle Sud-Est de la seconde enceinte : Tant avant le désastre de 1166 qu'après les restaurations de Raoul II ou de ses fils, et jusqu'à l'époque de la construction du grand logis (vers 1400 environ), l'angle sud-est de la seconde enceinte aurait compris une cour fermée, limitée vers l'ouest par le chevet de la chapelle Notre-Dame, vers le levant et vers le sud par des bâtiments, que l'on serait très tenté de considérer comme les plus anciens logements prioraux.

Cheminée du XIème siècle : On a retrouvé, à la base de la courtine qui devint le pignon nord de la tour du Cadran, une curieuse cheminée du XIème siècle, de plan semi-circulaire. Sa façade, construite en granits rougeâtres, forme un arceau taillé en plein cintre, encadré d'un arceau semblable et accompagné de deux plus petits arceaux décoratifs soutenus par des demi-colonnettes rongées par le temps. Ce foyer avait dû disparaître dans le sol dès les environs de 1200. Il devait garnir une salle basse d'ordre secondaire ; aussi est-il assez remarquable que les fondateurs de la forteresse lui aient réservé pareille ornementation ; ceci donnerait à penser que le château primitif, dévasté en 1166, aurait été d'une architecture beaucoup plus soignée qu'on n'aurait pu le supposer [Note : Le fond des petits arceaux latéraux paraîtrait avoir été revêtu d'un enduit peint à fresque dans un ton rougeâtre rappelant celui des granits qui composent cette cheminée].

L'Eglise Notre-Dame ou chapelle seigneuriale : Le désastre de 1166 ne paraîtrait pas avoir anéanti les murailles de cet édifice religieux.

A l'époque de la reconstruction du château (vers 1200 environ), cette chapelle, dont le choeur devait s'orienter vers le levant, aurait été restaurée plutôt que reconstruite à neuf, et augmentée d'un bas côté méridional, au moyen d'une double arcade ogivale, dont les deux arceaux ruinés ont été retrouvés soutenus par une colonne monocylindrique romane, débris très probablement remployé du château primitif [Note : Une colonne presque en tous points semblable (surtout pour le chapiteau) existe à Montain, au cellier de l'Abbaye Blanche, attribué vers 1120 à Dom Vital, premier Abbé de Savigny. On sait quels rapports étroits unissaient les barons de Fougères à cette importante abbaye de Savigny].

Les fouilles n'ont guère retrouvé que les ruines des murailles méridionale et occidentale de la grande nef, murailles reconnaissables en particulier à leur épaisseur très massive (140 ou 150) ; c'était là le bas de l'église et la partie la moins ornée. Au flanc septentrional de la chapelle restaurée devaient se trouver des annexes et dépendances, comprenant, en partie, un premier étage desservi par un perron extérieur.

Il est tout à fait vraisemblable que la construction du grand logis, vers 1400, amena la disparition du choeur, de l'entrée principale (probablement latérale nord) et peut-être aussi d'un campanile. On a découvert quelques rares débris romans de ces parties disparues (taillés en granit rougeâtre).

Le visiteur aura grand peine à distinguer clairement les restes de la chapelle seigneuriale, mise à part la double arcade ogivale aujourd'hui parfaitement dégagée. Les vestiges de l'église Notre-Dame sont en effet très difficiles à démêler de quantité d'autres ruines provenant de constructions assez banales et beaucoup plus récentes, qui vinrent encombrer la partie occidentale de son emplacement, au XVIIème siècle surtout (pavillon Richelieu et autres) [Note : De nombreuses pierres de granit richement travaillées, provenant de tympans de fenêtres très ajourés, ont été conservées le long de la courtine méridionale. Leur style annonce assez bien le gothique rayonnant ; ces pierres n'auraient donc aucun rapport avec la chapelle Notre-Dame qui devait être construite dans le style roman ou dans le style dit de transition. Ces pierres semblent avoir été apportées du dehors au château, vers le XVIIème siècle, sinon depuis. Elles devaient appartenir à un édifice religieux].

Ruines d'une vaste salle basse : Immédiatement à l'ouest des restes de la chapelle seigneuriale, les fouilles ont remis à jour les ruines, profondément enfouies, d'une grande salle remontant à l'époque romane, mais retouchée depuis. L'épaisseur de ses murailles, les caractères de ses fenêtres semblent permettre de l'attribuer aux temps primitifs du château (XIème).

La cotière occidentale de cette grande salle apparaît percée en trois points d'ouvertures curieuses, dont les plus anciennes sont, non pas les fenêtres inférieures géminées ou autrefois géminées, mais les étroites ouvertures supérieures, qui forment, à l'intérieur comme à l'extérieur, de doubles ébrasements taillés en plein cintre. Les baies géminées sont pourvues de spacieuses embrasures garnies de deux bancs de pierre ; la plus voisine de la courtine, la seule qui ait conservé sa colonnette, porte des traces de vitraux et des restes d'enduit, où des filets peints à fresque figuraient les joints réguliers d'un moyen appareil.

L'imparfaite régularité de ses deux petits arceaux taillés en plein cintre donne à penser qu'il s'agirait ici du remploi hâtif (vers les environs de 1200) de matériaux provenant des mines du désastre de 1166. Vers 1200, en effet, cette grande salle basse, dont l'aspect premier aurait peut-être assez bien rappelé une sorte de vaste cellier, paraîtrait avoir été aménagée avec plus de soin et de confort pour une nouvelle destination d'ailleurs inconnue.

Ce grand bâtiment comportait, et sans doute dès l'origine, un étage desservi probablement par un perron extérieur, qui devait longer le pignon nord. Cet édifice semblerait avoir disparu, au cours de la première moitié du XVIème siècle environ.

Autres vestiges découverts : Tout près de la tour Raoul, les terrassements ont mis à jour les restes de certaines constructions inconnues. On attribuerait volontiers ces longs bâtiments étroits à l'époque approximative de 1400 ; ils n'auraient pas duré bien longtemps, puisque la construction de la tour Raoul (vers 1480) dut amener leur disparition.

Il est trop tôt pour se prononcer sur d'intéressantes découvertes faites, près du coignage nord-ouest de la grande salle basse. Cette région n'est pas encore suffisamment explorée ; mais on croirait distinguer là les soubassements d'un élégant édicule richement orné et peut-être contemporain des tours Raoul et Surienne.

Restes de la tour-donjon : Les importantes substructions de la tour-donjon, rasée en 1166 par Henri II Plantagenet roi d'Angleterre, ont été dégagées sur toute leur périphérie.

Ce majestueux ouvrage paraît avoir été sensiblement circulaire (diamètre total moyen : environ 18 mètres ; diamètre intérieur : quelques 10 mètres) ; de plus, l'édifice comportait, du moins dans sa partie basse, la pointe massive d'un éperon dirigé vers l'est. Aussi la configuration générale, en plan, affecte-t-elle la forme dite « en amande ».

Vers 1173, Raoul II ne releva pas cette énorme tour-donjon rasée, et se contenta d'élever tout près de là, au même point stratégique, la tour « des Gobelins ». Il fallut rogner les flancs des substructions pour pouvoir établir des courtines septentrionale et occidentale encore basses.

A l'époque de la création de la tour « Mélusine », le sommet du rocher aurait achevé de s'encercler pour former la « 3ème enceinte », qu'on appelait « donjon ». Cet ultime refuge, tracé en forme de triangle curviligne, était défendu par les tours « Mélusine » et « des Gobelins », par le voisinage de la tourelle de « Guibé » et par trois courtines alors sans doute mâchicoulisées.

Au XVème siècle, lors de l'adjonction de l'enclos dit de « la Poterne », il fallut, pour en permettre l'accès, réduire encore très fortement la partie méridionale des vestiges de la tour-donjon.

Plus tard, après la démolition ou le démantèlement de cette 3ème enceinte en exécution d'un ordre inspiré par Richelieu en 1626, les matériaux des murs de clôtures actuels purent aussi être empruntés aux restes de l'édifice rasé en 1166.

La base d'une tour-donjon circulaire, construite en pierres, vers l'an Mil, ne constitue-t-elle pas en Bretagne et dans la région, un rare et précieux spécimen ? De plus, après neuf siècles écoulés, Fougères n'a-t-il pas retrouvé là les débris de son berceau ? (E. Pautrel).

Chateau de Fougeres (Bretagne). 

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Liste des Gouverneurs ou Capitaines, et des Lieutenants du château de Fougères, d'après M. Maupillé.

GOUVERNEURS OU CAPITAINES.

1427 - Pierre Le Porc, sr. de l'Archapt.

1430 - Pierre de Dreux, sr. de Châteauneuf.

1434 - Jehan de Raguenel, vicomte de la Bellière, sire de Malestroit, qui par lettres datées du 25 février 1456, se démit en faveur de Michel de Parthenay, moyennant 200 écus neufs et douze vingt livres (240 livres) monnaie. Ce dernier était capitaine de St-Aubin et avait été remplacé dans cette charge par son gendre Georges le Bouteiller, en 1452. Il mourut en 1490.

1456 - Michel de Parthenay, qui se démit en 1457 (dom Mor., pr. III - 1711).

1467 - François de Tournemine, sr. de la Hunaudaie.

1474 - Gilles de la Clartière (Il était fils d'Amice de Tournemine) (ibid. 1715).

1478 - Bertrand du Parc.

1482 - Charles du Parc, sr. de la Motte, chambellan du duc.

1487 - le vicomte de Coëtmen, sire de Tonquédec, encore en charge en juin 1488.

1488 - Arthur de Porcon, nommé par lettres patentes de la duchesse Anne du 15 avril 1488 (cette date paraît fausse).

1491 - Pierre d'Aux, bailli de la Montagne, lieutenant de M. de la Trémoille.

1496 - Estienne de Launay (comptes de Saint-Sulpice).

1498 - Jacques Guibé, sr. du Chesnay.

1501 - François Hamon, grand amiral de Bretagne.

15..   - Vincent de Launay, sr. de la Chesnelais, mort en 1518.

1524 - René de Montejean.

1527 - Bertrand de Plesguen, sr. du Plessis au Chat.

1552 - Jehan Menard, sr. de la Menardière.

1561 - Charles de la Menardière, sr. de Montaigu.

1562 - M. de Beaucé, sr. de Montfromery.

1562 - Germain d'Anthenaise, sr. de la Tannière.

1566 - Léon de la Haie Saint-Hilaire. Lettres de provision du 12 juin 1566.

1576 - François des Nos, sr. de la Tannière.

1585 - Renaud de la Marsellière.

1587 - François Le Felle, sr. de Guébriant et de la Blanchardays.

1589 - le marquis de la Rochegiffard, sous Mercoeur.

1589 - Jean Le Majoer, sr. de la Villeserin, capitaine des gardes du duc de Mercoeur.

1590 - le marquis de la Chesnais Vaulouet, gouverneur de la ville, sous son autorité de septembre 1589 à 1590.

1591 - le marquis de Bellisle.

1593 - Marin Allard, sr. du Bignon, sous Mercoeur.

1598 - M. de Blérancourt.

1615 - Thomas de Guémadeuc, décapité à Paris, le 19 septembre 1616.

1616 - M. de Modesne.

1622 - M. de Laage.

1627 - le maréchal de Themines.

1628 - M. de Pontpignan.

1631 - le marquis du Boisblot.

1646 - Jean de Rollée, sr. du Boislouet (une autre liste place après M. du Boisblot, le marquis de Mortemart Vivonne).

1649 - le marquis Henri de Sévigné, sr. de Montmoron.

1651 - le maréchal de Schombert. Après la mort du marquis de Sévigné, il avait obtenu du roi le gouvernement du château, pour en conserver le bénéfice aux enfants du marquis ; il s'obligea d'en fournir la démission au sr. d'Aurouer, moyennant 52.000 livres.

1652 - Charles de Grimes de Gamaches, comte d'Aurouer ou d'Auroy.

1658 - le comte Christophe de la Haie Saint-Hilaire. Les frais de sa réception s'élevèrent à 105 livres (M. Le Beschu, miseur), il mourut en 1666.

1666 - le comte Bernard de Beaumont, mort en 1679.

1679 - le marquis de la Roche d'Orange.

1682 - le marquis de la Chesnelaye, mort à Mauçon, inhumé à Landivy. La communauté fit célébrer cent messes à son intention, 1694.

1695 - M. de la Berange-Lescaut, mort en 1705.

1705 - le comte de Longrus, mort en 1711.

1711 - le comte de Marnays du Dauphiné, vendit son gouvernement avec l'agrément du roi, au marquis de la Chesnelais, en 1721.

1721 - le marquis de la Chesnelais-Romilley, mort en 1765.

1767 - le duc de Coigny.

 

LIEUTENANTS.

1420 - Olivier Le Cleux.

1461 - Olivier de Tréal.

1470 - Pierre de Raguenel, sr. de la Barbotays.

1472 - Jehan du Houx.

1473 - Jehan de la Clartière, Jehan Guyheneuc.

1481 - Barnabé Giffart, mort en 1482.

1482 - Antoine du Moulin Blot.

1483 - M. de la Chesnelais.

1484 - Jehan de Romillé, sr. d'Ardenne.

1491 - Etienne de Launay, sr. de Launay.

1502 - Etienne de Channé, sr. de la Cocherie.

1525 - Thomas du Chatellier, sr. de Villavran.

1547 - Jacques-Michel le Jeune, sr. de la Tendrais.

1550 - Julien du Cartier, sr. de Lisle.

1562 - Jehan de la Belinaie.

1574 - Charles de Cervon.

1575 - Michel Le Limonnier, sr. de la Marche.

1589 - M. de Gréal.

1598 - M. de la Vrillière.

1616 - M. de la Fayolle, exempt des gardes.

1617 - M. de Launay.

1617 - M. de Léotaud.

1622 - Guillaume Le Petit, sr. de la Rivière.

1627 - Henri de Botherel, sr. de Malhère.

1645 - le marquis de Sévigné.

1662 - Guillaume Le Petit, sr. de la Rivière.

1666 - Jacques de Scelles, sr. de Criqueville.

1670 - Etienne Logerot, sr. de la Houssaye, nomme la grosse cloche de Saint-Léonard avec Me de la Villegontier, le 9 novembre 1672.

1676 - Nicolas d'Orange, sr. des Roches.

1730 - François de Bertault, sr. de Pontpierre.

1780 - Jacques-Louis-Henri, chevalier de Caud, époux de Lucile de Châteaubriant.

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