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L'EGLISE SAINT-SULPICE DE FOUGERES décorée d’Hermines Bretonnes

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Une Eglise décorée d’Hermines Bretonnes.

La très belle église Saint-Sulpice, en la ville de Fougères, remarquable par tant de détails splendides ou anciens, l’est encore par l’ornementation abondante et luxueuse d’hermines bretonnes dont elle a été revêtue, à l’extérieur et à l’intérieur, par les architectes et les sculpteurs.

Pour mieux nous en faire une idée, parcourons, successivement, les Chapelles où nous la rencontrerons, indiquons les dates de leur construction, et décrivons les écussons que nous y verrons.

Voici d’abord le Transept Nord, autrement dit « la Grande Chapelle Notre-Dame », construit vers 1400. A l’extérieur, à la voussure du grand vitrail, nous voyons uu petit écusson, et, plus haut, un écu plus grand, inscrit dans un octilobe, aux pointes palmées, et encerclé d’une cordelière, le tout sculpté sous une arcature en accolade, que couronne une galerie aveugle de huit minuscules arcatures trilobées : délicieux petit motif architectural ! Les deux écussons sont illisibles ; mais on devine, sur le premier, une hermine, sur le second, trois hermines gravées en creux.

Plus bas, vers l’ouest, et à la suite, s’éleva, vers 1406, la Chapelle due à la générosité de Maître Colin Paël et qui garda son nom.

La voussure de la fenêtre est sculptée, en relief, d’un petit écusson à une seule hermine à cinq queues.

La chapelle suivante occupe la place de l’ancien chapitreau de Notre-Dame des Marais.

Enfin, la Chapelle Saint-Domyn fut construite, en 1530, à la suite des trois autres, à l’extrémité occidentale du bas-côté. La clef de voûte proprement dite, en pierre, de cette dernière chapelle, datant, comme elle, des environs de 1530, est ornée d’un écu de Bretagne à cinq hermines (3-2), sans couronne et entouré d’une simple torsade.

Ces quatres chapelles furent réunies, pour former le bas-côté, au nord de l’église, par la démolition vers 1480, 1503, 1530, des trois murs qui les séparaient.

Entre temps, le fond du transept de 1400 avait été orné, vers 1492, d’un immense rétable, en granit, sans doute unique en son genre et inégalable en beauté.

Au sommet de la niche centrale, où se tient, debout, une Vierge de pierre, de la même époque, on voit un écu de Bretagne, en bannière, chargé de onze mouchetures d’hermines (4-3-4), sommé d’une couronne ducale, ceint d’une cordelière et supporté par deux anges.

Au côté de l’épitre, une petite crédence de pierre se creuse sous un dais aux arcatures flamboyantes, surmonté d’un ange à genoux, lequel tient en mains l’écu mi-parti France et Bretagne, avec cette particularité que le parti Bretagne n’est orné que d’une moucheture et d’une demi-moucheture, imitant la disposition du parti France.

Les deux écus ci-dessus sont coloriés et le furent dès l’origine.

Une clef de voûte de bois, immense, richement découpée et ornée, sur huit faces, de crochets délicatement fouillés, pend de la croisée des ogives diagonales. A sa partie inférieure, se déploie, comme un vaste cachet, un écu de Bretagne, à cinq mouchetures (3-2), couronné, cerclé d’une cordelière et porté, à ses quatre coins, par quatre anges, deux debout en haut, deux assis en bas. Une restauration, qui semble moderne, a changé l’hermine en contre-hermine, en peignant le fond noir (de sable) et les hermines d’argent.

Du Nord, passons au Sud.

La Chapelle Saint-Philippe et Saint-Jacques, dite aussi des Tanneurs, avec son admirable rétable de granit, qu’ornent les instruments de la Passion et cent fantaisies sculpturales, est contemporaine de la grande chapelle Notre-Dame. Mais son rétable, sculpté en plein mur, est aussi ancien qu’elle et date du début du XVème siècle.

La grande fenêtre de cette chapelle est bien surmontée, à l’extérieur, d’un écu illisible, où l’on croit deviner, combien vaguement, trois hermines !

Mais, sous la grande arcature, en accolade, du rétable, on voit un écu de Bretagne orné de cinq mouchetures d’hermines (3-2), encerclé d’un sexilobe en accolades, élégamment agencé, découpé, et accolé de rinceaux.

La clef de voûte elle-même est ornée d’un écusson sans couronne, qu’entoure une double torsade très légère, et qui porte six mouchetures d’hermines (3-3), ressemblant parfaitement à de petites fourrures bordées de poils multiples, desquelles émergent la tête et les deux pattes supérieures de l’animal.

Le Clocher, qui termine ce bas-côté sud, a été construit de 1470 à 1490. La chambre des sonneurs, au premier étage, est ajourée de quatre grandes fenêtres, dont deux s’ouvrant vers le Nord et vers l’Est, sur les toits de l’Eglise, sont peu ornées. Les deux autres, vers le Sud et vers l’Ouest, ont toutes deux, à leurs claveaux, un petit écu à trois hermines.

La façade principale de l’Eglise, comme la chapelle Saint-Domyn, est de 1530. A son sommet, sous une triple arcature flamboyante, et entouré d’un sexilobe palmé simple et élégant, est sculpté un petit écu orné de trois hermines.

Enfin, parmi les grotesques assez échevelés, tantôt pieux et tantôt indécents, qui meublent les angles rentrants des contreforts extérieurs des murs du nouveau chœur, commencés en 1546, on remarque, vers le Nord, un personnage tenant un écu France et Bretagne, exactement disposé comme celui que tient l’ange de la crédence de l’autel Notre-Dame.

Toutes ces hermines ont cinq queues.

En résumé, l’Eglise Saint-Sulpice est ornée des armes de Bretagne : douze fois seules ; deux fois unies aux armes de France.

***

Jusqu’ici, nous n’avons fait que décrire ; mais expliquer est plus difficile.

Pourquoi l’Eglise Saint-Sulpice, située aux confins de la Bretagne, à la porte du Maine, de la Normandie et de la France, se distingue-t-elle par ce caractère vraiment breton ?

N’est-ce pas, précisément, parce que Fougères fut, dès 990, sous le Baron Main, le chef-lieu d’une Baronnie frontière, forte de cinquante paroisses ; parce que son château fut bâti au XIème siècle, au temps de la dynastie bretonne des Geoffroi Ier, Alain III, Conan II, Hoël et Alain Fergent, temps des incursions de Guillaume le Conquérant en Bretagne (1065 et 1086), pour défendre le territoire breton contre les empiétements des nations voisines la Normandie et la France ; parce que les constructeurs de notre église tinrent à exprimer, sur la pierre, leur nationalité indépendante et en reproduire le symbole ?

Ne fut-ce pas, d’ailleurs, la même pensée, qui, en 1472, à la veille de la dernière guerre pour l’indépendance bretonne, contre la France, inspira la décoration des seize hermines des mâchicoulis de la tour, qui porte, aujourd’hui, le nom de la Trémoille, à la Porte Saint-Sulpice ?

De plus, la décoration d’hermines de l’Eglise Saint-Sulpice ne peut-elle pas être considérée comme l'Intersigne, l’empreinte seigneuriale des Barons, qui, aux jours divers de sa construction, la tenaient, sinon sur leur tutelle, du moins sous leur protection ?

Les constructions de 1400 (chapelle Notre-Dame et chapelle des Tanneurs), celles de 1406 (chapelle Paël), situées au Nord, datent du gouvernement, à Fougères, de la Famille d’Alençon (1328-1429), et ces descendants de Charles d’Alençon, frère de Philippe VI de Valois, roi de France, ne me semblent pas avoir des sentiments particulièrement accusés de patriotes bretons.

Cependant, en 1366, Pierre d’Alençon lève un impôt d’un écu d’or, sur chaque feu de sa baronnie, pour payer les dettes de guerre du Duc Jean IV ; ayant fait loyalement hommage au Duc, lors du traité de Guérande (12 avril 1365), il soutint celui-ci, son suzerain, contre le Roi de France, son cousin.

Alors que la Bretagne, par haine de l’Angleterre, était entraînée vers les idées françaises, Fougères, au contraire, s’était rapprochée du Duc, qui y mit garnison, malgré le Baron ; mais Duguesclin, connétable de France, s’en empara, en 1373.

Il est vrai que le deuxième traité de Guérande (4 avril 1381), signé entre le Roi Charles VI et le Duc Jean IV, a maintenu Fougères sous la suzeraineté du Duc ; il est vrai que Pierre d’Alençon a marié son fils Jean à Marie de Bretagne, fille ainée de Jean IV. Mais le gendre du Duc, Jean Ier d’Alençon (1401-1415), reste favorable à la France et, meurt à Azincourt, dans les rangs de l’armée française.

Rien ne semble donc indiquer la participation de la Famille d’Alençon à l’ornementation bretonne de notre église, sinon, peut-être, la Suzeraineté de la Bretagne sur la Baronnie, qui fut toujours maintenue et reconnue, et la volonté des Fougerais de rester Bretons.

Ne peut-on pas supposer aussi que l’ornementation des constructions de 1400 et de 1406, faite au trait, ne fut achevée qu’après 1429, comme cela arrive fréquemment ?

Il en est autrement des constructions postérieures, alors que la Maison de Bretagne est rentrée en possession de la Baronnie de Fougères (1429), et que la Maison de France lui a légitimement succédé, tant par les deux mariages d’Anne de Bretagne avec Charles VIII et Louis XII (1491 et 1499), que par l’union de la Bretagne à la couronne française sous François Ier (4 août 1532).

Le clocher construit de 1470 à 1490, a été commencé sous François II, Duc de Bretagne et Baron de Fougères (1458-1488) ; il a été achevé et l’autel Notre-Dame (1492-1495) a été édifié, soit sous son règne, soit sous celui d’Anne sa fille et ceci explique les écus de Bretagne de la niche et de la clef de voûte. Anne de Bretagne ayant épousé le Roi Charles VIII, le 6 décembre 1491, ce fait donne la raison d’être de l’écu parti de France et de Bretagne de la crédence, sculpté postérieurement à ce mariage.

La chapelle Saint-Domyn et la façade occidentale (1530) furent édifiées sous le Dauphin de France François, fils aîné de François Ier et de Claude de France (elle-même fille de Louis XII et de Anne de Bretagne). Il fut sacré Duc de Bretagne, à la Cathédrale de Rennes, sous le nom de François III et fut Baron de Fougères de 1529. à sa mort en 1536.

L’écusson des contreforts du nouveau chœur est postérieur à 1546. La Baronnie de Fougères et le Duché de Bretagne étaient tenus, alors, par le second fils du Roi François Ier, Henri, Dauphin de France de 1536 à 1547, puis roi, sous le nom de Henri II (1547-1559).

Peut-être pourrions-nous être surpris de voir, sur cet écu, les armes de Bretagne en parti avec les armes de France ; mais, pourquoi le fils de Claude de France n’aurait-il pas voulu garder ainsi le souvenir de celle de qui il tenait cette baronnie de Fougères, dont l’église Saint-Sulpice était le joyau ?

Et ceci est d’autant plus plausible qu’à la même date (1551), alors que le peintre-verrier fougerais Pierre Symon ornait de vitraux les fenêtres de l’Hôtel de Ville de Fougères, il y plaçait « de l’autre côté et vis-à-vis » la « crouezée du devant » ... « ung écusson des armes de France et de Bretagne couronné » (adjudication du 2 avril).

Ce qu’on faisait, à l’hôtel de Ville, en l’honneur de Henri II, Roi de France et Baron de Fougères, pourquoi ne l’aurait-on pas fait à l’église Saint-Sulpice ?

Il était intéressant de signaler, parmi les beautés artistiques de l’église Saint-Sulpice, le caractère très breton de sa décoration sculpturale.

Enfin, près de l’Eglise Saint-Sulpice que nous avons décrite plus haut, au Nord et dans l’ancien cimetière, on voit une haute croix de granit, simple et élégante. Au croisillon, sont gravées en creux et rangées verticalement, trois coquilles de pèlerins, de grandeurs inégales, rangées verticalement la plus grande en bas : les coquilles d’argent des armes de l’abbaye montoise sur le sable des grèves. Ces trois croix ne furent-elles pas l’hommage de pèlerins dévots au glorieux Archange, dont l’Abbaye se dresse tout près, au péril de la mer, baignée par le Couasnon, grossi du Nançon et de la Minette, les rivières fougeraise et coglaise ?

(Joseph Mathurin). 

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