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Jean-Toussaint HAMERY, prêtre guillotiné à Vannes
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.

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298. — Jean-Toussaint HAMERY, fils de Julien et de Jeanne Piesrel, naquit à la rue Saint-Gurval, en Guer, alors du diocèse de Saint-Malo, le 23 novembre 1759. On lui administra le saint baptême le même jour. Il reçut la tonsure le 20 septembre 1777 à Saint-Méen et les mineurs le 19 septembre 1778. Il devint sous-diacre le 9 juin 1781 et diacre le 25 mai 1782. Enfin il fut ordonné prêtre au mois de septembre de l’année suivante. Après son sacerdoce, il demeura plusieurs années prêtre auxiliaire dans sa paroisse natale ; puis, quelque peu avant la Révolution, il obtint la chapellenie du Bois-du-Gué en Saint-Servant, près de Josselin, où l’on relève sa première signature le 27 février 1789 et la dernière le 31 juillet 1792.

299. — Le recteur de la paroisse, Noël Gauthier, vieillard morose et d'esprit janséniste, tomba dans le schisme et s’assermenta. Au contraire, ses collaborateurs, son vicaire Olivier et le chapelain Hamery, s’élevèrent contre son erreur avec une très grande force. Ils sauvèrent ainsi la foi de la population, mais devinrent un objet de haine passionnée pour les Administrateurs du district voisin de Josselin. M. Hamery, en particulier, fut inculpé, les 7 et 10 juin 1791, d’avoir, le 22 mai précédent, donné connaissance à différent particuliers d’un bref du Pape et d’avoir blâmé un acquéreur de biens ecclésiastiques. A la suite d’une enquête, dans laquelle déposèrent plusieurs témoins le 7 juillet de cette année, le chapelain du Bois-du-Gué comparut le 9 septembre 1791 devant un juge du district de Josselin. Ses réponses ne manquèrent pas de prudence ; il nia une partie des faits qu’on lui imputait et rectifia le reste de son mieux, de façon à éviter une condamnation qu’il prévoyait imminente. L’amnistie votée par l’Assemblée Constituante le 21 septembre de cette année vint heureusement à temps le sortir d’embarras.

300. — L’année suivante, à la suite de l’arrêté du Directoire du Morbihan du 26 juin, autorisant les districts à faire emprisonner les personnes qui faisaient de l'obstruction à la Constitution civile, M. Hamery fut interné le 7 août 1792 dans les cachots de la citadelle de Port-Louis, où l’on jetait alors pêle-mêle ceux des prêtres « fanatiques » de ce département que l’on pouvait saisir. Ce fut en vain que la municipalité de sa commune adressa aux administrateurs du Morbihan une pétition, dans laquelle, après avoir déclaré « qu'il s'était toujours comporté en bon et honnête citoyen », elle réclamait son élargissement. Déjà Hamery, à son vif chagrin, se voyait déporté en vertu de la loi du 26 août 1792. Sans doute, il eût préféré Jersey à l’Espagne, ainsi qu’il le fit savoir le 8 septembre suivant à un délégué du district d’Hennebont, mais il eût surtout désiré ne pas quitter sa patrie ; aussi écrivit-il le 9 septembre une supplique au procureur général du Morbihan où l’on peut lire ces lignes : « On nous accuse tous en général d'avoir soulevé le peuple et d'avoir prêché contre la Constitution : je suis innocent de tout cela... j’ai toujours été soumis aux lois de l’Etat, j'y ai toujours obéi et je suis dans l’intention de le faire jusqu’au dernier moment ». Ces protestations sentaient la peur. Hamery, en effet, terrorisé par la pensée de l’exil, s’imagina pouvoir l’éviter en prêtant un serment restrictif et conditionnel. Il fit donc savoir le 15 septembre son intention à la municipalité de Port-Louis de prêter le serment dit de Liberté-Egalité, qui, vu sa qualité de non-fonctionnaire public, s’appliquait à son cas.

301. — Ce serment avait été rendu obligatoire les 14-15-18 août et 3 septembre 1792. Sa teneur soulève encore aujourd'hui beaucoup de discussions et sa licéité ne fut jamais admise par la majorité du clergé fidèle en Bretagne. Ailleurs, cependant, de bons prêtres, voire même de bons évêques, le jurèrent, prétendant, en le prêtant, vouloir ne donner à leurs paroles que leur signification naturelle et exclure tout sens religieux. Parmi ceux qui agirent ainsi à cette époque et ne se rétractèrent point, figurent des personnages mis à mort pour la Foi et proposés à ce titre pour la béatification.

Malheureusement pour lui, ce n’est pas la formule officielle de ce serment que prêta M. Hamery. Au texte prescrit par la loi, le Directoire du département du Morbihan prit sur lui d’en substituer un autre spécial à son territoire et que devaient souscrire les ecclésiastiques pour éviter l’exil. En voici les termes : « Je jure de maintenir de tout mon pouvoir la Liberté et l’Egalité, de vivre comme citoyen soumis aux décrets des représentants de la Nation et d'en recommander l’obéissance dans les fonctions que je remplirai en qualité d’ecclésiastique ». — Sans doute, auparavant, Hamery protesta oralement « qu'il prétendait exclure de son serment tout ce qui pouvait attaquer le dogme » ; car, par trois fois, au cours des interrogatoires qu’il subit en 1795 et 1796, il ne manqua pas d’assurer qu'il n’avait voulu prêter qu’un serment restrictif et conditionnel et de telles protestations à cette époque ne pouvaient que lui porter un sérieux préjudice. Cependant on ne peut méconnaître que sa protestation ne fut pas enregistrée et qu’il signa son serment.

302. — N’oublions pas toutefois que saint Pierre a bien renié Notre-Seigneur trois fois, ce qui ne l’empêcha pas de confesser généreusement sa foi ensuite. Rendu à la liberté aussitôt après ce serment regrettable, M. Hamery s’en retourna à Saint-Servant près de Josselin, la conscience bourrelée d’inquiétudes sur la licéité de son acte ; inquiétudes que les reproches de ses confrères demeurés inébranlables dans l’orthodoxie eurent tôt fait de transformer en amers remords. Aussi, n’y tenant plus, dès le 7 octobre 1792, trois semaines après sa prestation de serment, le chapelain du Bois-du-Gué adressa-t-il aux administrateurs du district de Josselin ainsi qu'aux municipalités de Port-Louis et de Saint-Servant une lettre de rétractation très explicite, dans laquelle « il demande pardon à Dieu de son acte et le conjure de lui accorder la grâce de vivre et de mourir dans la Foi catholique, apostolique et romaine ».

303. — Spécialement recherché par les autorités révolutionnaires après sa rétractation, M. Hamery ne voulut cependant pas demander un refuge à l’étranger, bien que les lois qui visaient le clergé réfractaire lui tissent une obligation stricte de s’expatrier, et cela sous les peines les plus sévères. Tout au contraire, pour se punir de sa faiblesse passagère, il se condamne à demeurer dans le pays pour y accomplir, au péril de ses jours, du ministère dans les conditions les plus difficiles. Lui-même, dans un interrogatoire, déclare avoir vécu les années 1793 et 1794 dans les communes de Saint-Servant, Guégon et Guer, passant de l'une dans l’autre quand il était trop vivement pourchassé. Il paraît avoir résidé à Saint-Servant durant l’essai de pacification religieuse d’avril-août 1795. Il venait de Trégranteur lors de son arrestation le 10 octobre suivant.

304. — Ce jour-là, en compagnie d'une vieille paysanne, il se rendait à Ploërmel pour affaires, lorsque, non loin du bourg de Taupont, le lieutenant Merselle, commandant un détachement du 3ème bataillon d'Ille-et-Vilaine, lui demanda son passeport, reconnut qu’il était prêtre, ce que M. Hamery ne tenta pas de dissimuler, et le conduisit au district de Ploërmel, sous prétexte que les pièces dont il était muni, n’avaient plus de valeur, parce que trop anciennes.

305. — Laissé provisoirement en liberté sous caution d’un compatriote, l’abbé comparut devant les administrateurs du district de Ploërmel. De ses réponses, on doit retenir qu’il nia toutes relations avec les royalistes et qu’à la question obligatoire concernant les serments qu’il avait prêtés, il fit savoir que « depuis le serment qu’il fit avec restrictions (sic), voilà trois ans, il n’en avait prêté aucun autre, et même que, depuis la loi du 20 fructidor an III (laquelle ordonnait l’arrestation de tous les prêtres qui n’avaient pas fait dans son intégrité la promesse du 11 prairial précédent concernant la soumission aux lois de la République), il avait cessé à Saint-Servant toute fonction ecclésiastique ».

Quelques jours plus tard, M. Hamery produisit même une attestation de la municipalité de Saint-Servant datée du 14 octobre 1795, d’après laquelle celui-ci se serait présenté à la maison commune de cette localité, le 21 septembre précédent, et lui aurait déclaré en substance « que la loi du 20 fructidor lui interdisant l’exercice du culte (comme n’ayant pas fait dans son intégrité la promesse du 11 prairial), mais le laissant libre de vivre à Saint-Servant, il se propose d’y vivre en paisible citoyen, sans rien faire et dire qui puisse troubler la paix et la concorde ».

Malheureusement Monnerais, secrétaire de la municipalité de Saint-Servant, tout en ne niant pas l’authenticité des signatures, vint déclarer sous le sceau du secret que c’était M. Hamery le rédacteur de cet acte. Il ajouta même que ce prêtre avait encore célébré la messe au Bois-du-Gué, postérieurement au 21 septembre. En conséquence, le malheureux ecclésiastique fut définitivement constitué en état d’arrestation et envoyé à Vannes. Une lettre des administrateurs du district de Ploërmel l’accompagnait, le dépeignant sous les traits les plus noirs, mais « sans pouvoir, ajoutent ses signataires, apporter aucune preuve matérielle de leurs accusations et se déclarant incapables de s'en procurer », ce qui ôte à nos yeux toute valeur à leurs propos ; étant habitué par nos études à voir les autorités jacobines charger sans preuve, comme sans vergogne, les prêtres réfractaires de toutes sortes de méfaits.

306. — C'est à Vannes que M. Hamery, signalé le 15 février 1796 comme ecclésiastique réfractaire à la loi par les administrateurs du Morbihan, fut cité par Lucas-Bourguerel fils, l’accusateur public, à comparaître devant lui. Il répéta devant ce magistrat ce qu’on vient d’exposer plus haut. Il fit aussi état de sa déclaration du 21 septembre 1795 devant la municipalité de Saint-Servant et de l’attestation qu’on lui en avait délivrée. Enfin, il n’oublia pas de dire que, s’il avait prêté à Port-Louis « le serment de fidélité à son pays », c’était avec la restriction que « ses lois ne viennent point attaquer le dogme ». Il prit garde par ailleurs de faire connaître les noms des personnes qui lui avaient donné asile et fut reconduit en prison. Ses jours étaient désormais comptés. On tenait son serment de Liberté-Egalité pour nul et quant à lui on ne le considérait que comme un prêtre réfractaire, banni par les lois de son pays, mais demeuré en France pour « fanatiser » les campagnes.

Le 15 mars 1796, un officier de santé vint l’examiner et rendit compte qu’aucune infirmité n’avait pu l’empêcher de prendre la route de l’exil. Dès le lendemain, Lucas-Bourguerel invita le tribunal criminel du Morbihan à juger le prêtre proscrit, « prévenu, dit-il, de ne pas avoir fait les serments et soumissions ordonnés aux ministres du culte catholique ».

307. — C'est le 21 mars 1796 (1er germinal an IV, dans le jargon des Jacobins) que comparut le prêtre Hamery devant la juridiction chargée de le condamner. On pourvut avec difficulté le prévenu d’un avocat d’office, personnage bien inutile du reste ; puis l’accusé déclara n’avoir jamais prêté le serment schismatique à la Constitution, n’avoir jamais exercé de fonctions rétribuées par l’Etat, et n’avoir prêté le serment de Liberté-Egalité qu'après y avoir joint (verbalement) une restriction essentielle : « Pourvu que ce serment n'eût en rien attaqué le dogme ». Il nia de même n’avoir jamais cherché autre chose que la paix et la tranquillité, ainsi que l’avait attesté la municipalité de Saint-Servant.

Enfin, après avoir fait remarquer à juste titre qu’il n’était pas de ceux auxquels la loi imposait d’adhérer à la schismatique Constitution civile par un serment, pour la non-prestation duquel on allait le guillotiner, il fit savoir à ses juges que s’il avait rétracté son serment de Liberté-Egalité, et s’il s’était caché ensuite, « c’est qu’on ne suivait pas les conditions (verbales) qu’il avait mises » au dit serment. Pour finir, le président releva la contradiction qu’il constatait entre l’attestation de la municipalité de Saint-Servant, suivant laquelle l’accusé s'engageait à la date du 21 septembre 1795 à ne plus exercer de fonctions cultuelles en public, et une réponse de celui-ci, faisant connaître qu’il ne les avait cessées que le 2 octobre suivant ; observation à laquelle M. Hamery répondit en se réclamant de « la liberté ».

Le temps de rédiger sa délibération et le tribunal de Vannes rendit sa sentence. C’était la mort dans les 24 heures, sans appel ni recours au tribunal de cassation. Les motifs invoqués sont essentiellement d'ordre religieux : le prêtre Hamery a rétracté son serment, et quoique cela, se trouvant de ce fait sujet à la déportation comme prêtre réfractaire, il n'a pas quitté la France. Ce sont toujours les articles de la loi des 29-30 vendémiaire an II, remis en vigueur par la loi du 3 brumaire an IV, qui jouent dans la circonstance.

308. — M. Hamery expia le lendemain 22 mars 1796, à 3 heures de l'après-midi, sur la place de l’Hôtel-de-Ville de Vannes, alors dénommée place de la Liberté, sa qualité de prêtre catholique romain. Son acte de décès figure sur les registres de l’état civil de Vannes.

Si, dans un instant de dépression physique et morale, il avait eu la faiblesse de signer une formule de serment regrettable, il l’avait depuis longtemps courageusement rétractée et il ne la rappelait jamais sans mentionner la restriction verbale dont il avait cru l’atténuer.

Deux autres prêtres, MM. Le Verger (voir Lanouée) et Le Bècre (voir Locminé-Moustoir-Ac), vus par ailleurs, périrent en même temps que lui sur l’échafaud, ce qui ne permet aucun doute sur la façon dont ils se préparèrent ensemble à verser leur sang pour la Foi. Le nom de M. Hamery n’est pas éteint dans la paroisse de Guer. Il est toujours honorablement porté. On garde à la chapelle du Bois-du-Gué divers ornements et un calice en étain que l’on croit lui avoir appartenus.

BIBLIOGRAPHIE. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne, op. cit. (1845), II, p. 223. — R. P. Le Falher, Les Prêtres du Morbihan victimes de la Révolution, op. cit. (1921), p. 184-200. Une partie seulement des documents officiels concernant M. Hamery figure dans ce recueil.

(Sources : Arch. départ. du Morbihan, L 257, 301, 1153 ; LZ 103, 459).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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