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ARMOIRIES DE LA COMMUNAUTÉ ET DES CORPORATIONS DE LA VILLE DE HÉDÉ

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Le Nobiliaire de Pol de Courcy qui donne, avec les armes des familles de la noblesse bretonne, celles des villes de la Province, n'en mentionne aucune pour Hédé. Il ne s'en trouve non plus, à ma connaissance, dans aucun autre armorial. Quelle est la cause de ce silence ? Hédé n'avait-elle donc pas d'armoiries ?

Ville de Hédé (Bretagne).

Certes, si l'on ne raisonnait qu'au point de vue du peu d'étendue de son territoire, du petit nombre de ses habitants qui, à la fin du XVIIIème siècle, ne représentaient que 800 communiants, de son commerce nul, on pourrait ne pas s'en étonner, mais Hédé pouvait présenter d'autres titres, et, en considérant ce qu'elle avait été autrefois, je ne pouvais m'arrêter à cette supposition.

Hédé, dès son origine, avait tenu un rang important parmi les places fortes de la province. Son château était regardé comme un des meilleurs. Dans les chartes assez nombreuses données aux habitants par les Ducs, Hédé est toujours qualifiée Ville. Depuis un temps immémorial elle était le siège d'une Sénéchaussée, puisque nous trouvons dès la fin du XIIIème siècle (1268) le nom d'un de ses sénéchaux. A cette même époque, une duchesse de Bretagne en venait habiter le château et y passait ses derniers jours. La Sénéchaussée ducale, puis royale, dont la juridiction s'étendait sur un grand nombre de paroisses, avait toujours vu, jusqu'au XVIIIème siècle, ses Offices de Sénéchal et de Procureur du Roi occupés par des gens de noblesse.

Hédé avait l'honneur de compter parmi les quarante villes qui seules possédaient le privilège d'envoyer des députés aux Etats de Bretagne et de participer à l'administration des affaires de la Province ; lors de l'institution de l'Intendance, Hédé devint le siège d'une Subdélégation.

Hédé, enfin, avait une existence municipale constatée par des lettres patentes de Jean V (1404) et de ses successeurs ; par un arrêt du Conseil d'Etat de 1681 qui en refert de plus anciens, au sujet du règlement des dettes et charges de la Communauté ; par des lettres de continuation d'octrois accordées en 1641, etc. Elle était considérée comme ville franche dès le commencement du XVIème siècle (Montres de Saint-Symphorien de 1513) ; elle avait des Maires en titre d'office et électifs, une milice bourgeoise ancienne et bien organisée, une compagnie d'archers du Papegault, etc.

Dans ces conditions Hédé avait donc autant de droits, sinon plus, à posséder des armoiries que bien d'autres dont l'organisation municipale n'était dirigée que par le Général de la paroisse, qui dépendaient, non de la Couronne, mais d'un seigneur quelconque à la juridiction duquel elles étaient soumises et dont, la plupart du temps, elles empruntaient les armes, et il est bien difficile d'admettre que, seule parmi toutes celles qui envoyaient des représentants aux Assemblées générales de la Province, elle n'eût point son blason comme les autres.

Nous allons voir que ce doute était légitime.

En parcourant les registres des délibérations de la Communauté de ville qui restent encore aux archives de la mairie, et qui remontent à 1739, je suis arrivé à constater l'existence de armoiries de Hédé.

Le 25 février 1748, la Communauté décide de donner à son Héraut une bandoullière « armoyée aux armes de la ville ».

En 1755, Jean Boutier, héraut nouvellement nommé donne reçu à Jean Macé, son prédécesseur, de la casaque et de la bandoullière que celui-ci lui remet et qui sont remplacées en 1786 parce que « les anciennes sont usées, malpropres et peu décentes ». Une bandoullière fut aussi achetée pour le Tambour de ville [Note : Le Tambour recevait deux bandoullières : l’une en cuir pour le service ordinaire ; l’autre, pour les jours de fête, en étoffe brodée, non des armes de de la ville, mais d’un semis de fleurs de lys et d’hermines].

Le travail devait en être très riche et très soigné, car le Miseur fut autorisé à payer, pour ces trois pièces, au sieur de l'Epine, brodeur à Rennes, la somme de 374 livres.

A partir de cette époque, la Ville multiplie les reproductions de ses armoiries. Le 11 septembre 1786, elle paie au sieur Ollivault, graveur à Rennes, 30 livres pour deux cachets aux armes de la ville ; l'un pour être remis au Maire, l'autre, pour être déposé aux archives en cas de perte du premier.

L'année suivante, le 17 avril, elle demande l'autorisation de « faire enclaver dans les murs de la fontaine qu'elle fait construire deux écussons en pierre aux armes de la ville » et quelques jours après, le 10 juin, elle prie l'Intendant de Bretagne, M. Bertrand de Molleville, de l'autoriser à mettre ses armes sur la fontaine « conjointement à celles de la ville ». Le marché pour la sculpture sur pierres de ces armoiries fut conclu pour le prix de 150 livres.

Enfin la même année, le 16 décembre, la Ville demande qu'on lui permette « de faire la dépense de deux écussons aux armes de la Communauté, en toile et passés à l'huile », puis le 20 juillet 1788, comme elle juge qu'ils « ne seraient point d'assez grande durée, de les faire peindre sur tôle appliquée sur bois avec un cintre en moulure, pour être placés, l'un sur la porte de l'Hôtel-de-Ville, l'autre sur la porte du Maire ».

Il est donc certain que Hédé avait des armoiries, puisqu'elle les faisait peindre, sculpter et graver. Mais nous ne sommes pas plus avancés, car ces peintures, sculptures ou gravures n'existent plus. Les écussons de la fontaine ne semblent jamais avoir été mis en place ; ils ont été vraisemblablement brisés et peut-être en retrouvera-t-on un jour les débris dans quelque muraille. Des autres non plus, il ne reste de traces ; les descendants de ceux qui auraient pu les voir les ont oubliés, et tout souvenir en disparut lorsque la Révolution vint enlever à la petite ville, avec sa situation particulière et ses privilèges, toute son importance, tant au point de vue administratif que politique, pour en faire un simple petit chef-lieu de canton. Dans le monde officiel on n'était pas plus savant que nous à ce sujet.

Lors du voyage que fit en Bretagne au mois d'août 1858 l'empereur Napoléon III, les organisateurs du banquet qui fut offert aux maires et aux différentes autorités dans la salle des Pas-perdus du Palais de justice de Rennes avaient eu l'idée, pour ajouter à la décoration de cette salle déjà si grandiose par elle-même, d'établir tout autour une litre composée des écussons de toutes les villes de Bretagne. Hédé ne pouvait manquer d'y figurer. Aussi, l'avant-veille de la fête, voyait-on son nom inscrit au-dessous d'un écusson party de France et Bretagne ; le lendemain l'écusson était changé et portait : de gueules aux fleurs de lys sans nombre, c'est-à-dire les armes de la famille de Chateaubriant remplaçant les armes de la ville de Brest, mais pas du tout celles de Hédé.

Nous avions bien pensé tout d'abord à chercher dans l'Armorial général de D'Hozier, mais nous ne nous étions point arrêté à cette idée, car nous savions que M. Pol de Courcy l'avait consulté, puisqu'il le mentionne à chaque page de son Nobiliaire, et comme il ne nous donne rien pour Hédé, nous avions cru qu'il n'y avait rien trouvé. D'autre part, nous pouvions croire que les organisateurs de la fête de Rennes avaient dû puiser aussi à cette source et comme ils n'avaient point été plus heureux, ainsi que nous venons de le voir, cela ne faisait que nous confirmer dans notre opinion. Cependant comme l'édit de 1696 ordonnait d'une façon formelle à tous ceux qui possédaient des armoiries, aussi bien les villes que les familles nobles, de les faire enregistrer, l'Armorial de D'Hozier était notre dernière ressource et il pouvait se faire, à la rigueur, que M. P. de Courcy et les Rennais l'eussent insuffisamment feuilleté ou n'y eussent point cherché Hédé. C'est en réalité ce qui était arrivé, et M. Tempier, notre bienveillant archiviste des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), m'ayant communiqué « l'Indicateur des armoiries des villes…. communautés, corporations, etc., dans l'Armorial général de D'Hozier, par M. Ulysse Robert, » j'ai reconnu que Hédé s'y trouvait, en effet, tom. I, page 752, et que ses armes portaient : d'azur à trois fleurs de lys d'or. Les fleurs de lys attribuées deux fois à Hédé dans la litre de la salle des Pas-perdus de Rennes se rapportaient donc dans une certaine mesure à celles de l'Armorial général. Toutefois ces armoiries ne laissèrent pas que de m'étonner. Certes les fleurs de lys ne sont pas rares en blasons, il y en a de tout métal, comme de presque tous les émaux, et on les rencontre en nombre variable, depuis une seule jusqu'au semé. Mais pourtant il n'était pas donné à tout le monde de placer ces pièces « les plus honorables de toutes celles qui se voient dans les armoiries françaises ? » nous disent les vieux maîtres du blason, dans son écu ; souvent elles étaient la récompense accordée par le roi pour une action remarquable ou pour un service rendu. Quant à l'écu de France, il n'appartenait qu'à la famille royale. « Les trois fleurs de lys sont tellement les armoiries du Royaume affectées au Roi seul, que les concessions qu'on en a faites n'ont jamais été des armes pleines en un écusson. Le Roi seul les peut porter pleines comme seul Souverain, et cela est si constant qu'avant S. Louis qui fixa les fleurs de lys pour tous les Princes du sang royal avec différentes brisures, tous les Princes du sang de France ne portaient auparavant que les armoiries de leurs apanages » [Note : La nouvelle méthode raisonnée du blason, par le P. Menestrier]. Si un certain nombre de villes brisaient leurs armoiries d'un chef de France lorsqu'elles faisaient partie du domaine royal, ou qu'elles en avaient obtenu la faveur, nous n'en connaissons que cinq dont trois en Bretagne, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en eût pas d'autres : Brest, port et ville aussi français que breton, Versailles, la cité du Grand Roi, Evreux, Chateaubriant et Concarneau qui eussent le droit de s'en parer ; encore sont-elles pour la première, party avec celles de Bretagne, pour la seconde, différenciée par un chef d'argent chargé de deux têtes de coq adossées, brisées pour la troisième d'une bande componée d'argent et de gueules, et pour Chateaubriant d'un bâton de gueules raccourci et péri en bande ; Concarneau scellait ses actes en 1669, d'un écu de France plein, de chaque côté une hache de gueules en pal soutenu d'une hermine, mais en 1696, elle quitte les fleurs de lys pour prendre : d'argent à trois haches de gueules en pal : 2 et 1. Comment Hédé aurait-elle eu, seule, le privilège de blasonner les armes pleines de France et sans aucune brisure.

Il faut se rappeler que l'Edit de 1696 était, avant tout, un acte financier, un de ces édits bursaux comme Louis XIV en fit tant pour essayer de rétablir les finances ruinées par les guerres et les magnificences de son règne. S'il était facultatif aux Bourgeois de se faire donner des armes par D'Hozier, il n'en était pas de même pour les familles nobles, les Communautés de villes, de métiers, pour lesquelles l'enregistrement était forcé suivant un tarif fixé, et si ces familles ou ces Communautés, se trouvant déjà assez chargées d'impôts, ne jugeaient pas nécessaires d'en payer de nouveaux pour des armoiries qu'elles possédaient depuis longtemps et ne se présentaient pas dans le délai prescrit, D'Hozier, qui touchait par chaque acte une prime particulière, tant pour augmenter la recette du Trésor que dans son intérêt personnel, ne se faisait pas faute de leur en enregistrer d'office, qu'il composait à sa guise.

Nous pourrions en citer de nombreux exemples. Sans parler des familles à qui il impose des armes qui ne sont pas les leurs et ne nous occupant que de villes, nous voyons entre autres, qu'à Montdidier dont les armes anciennes étaient : D'azur à la tour d'argent ajourée et maconnée de sable, surmontée d'un donjon de même, le tout accosté de trois fleurs de lys d'or à dextre, de trois fleurs de lys de même à senestre et d'une septième fleur de lys coupée mi-partie en pointe et en tête de l’écu, il donne : D'or au sautoir de sinople chargé en cœur d'une merlette d'argent ; à Doullens, c'est : D'azur semé de fleurs de lys d'or à l'écu d'argent chargé d'une croix de gueules, qu'il remplace par : D'argent à une feuille de houx d'azur [Note : Rapport sur les armoiries de … Montdidier et Doullens, par M. A. Dutilleux (Mém. de la Soc. des Antiquaires de Picardie, T. XIX)].

Et plus près de nous, dans notre Bretagne, ne le voyons nous pas enregistrer pour Dol : D'or à trois lozanges d'azur, chargés chacun d'une billette d'argent surchargée d'une moucheture de sable, lorsque les armes de la ville sont : D'argent à huit mouchetures d'hermines, 3. 2. 3. ; et pour Landerneau : D'azur au vaisseau équipé d'or portant à ses trois mâts un pavillon, aux armes de Rohan à senestre, de Bretagne au grand mât et de Léon à dextre, au lieu de l'écartelé de Léon et de Rohan indiqué par Guy Le Borgne.

Il dut en être certainement ainsi de Hédé, obligée de payer malgré elle pour ces armes de fantaisie, le tarif imposé aux Communautés n'ayant point de Cour souveraine, c'est-à-dire 50 livres. Mais alors, s'il en est ainsi, nous ne sommes pas beaucoup plus avancés qu'au début. Nous savons par les délibérations de la Communauté de ville que Hédé avait des armoiries, mais si nous n'admettons pas celles que nous présente D'Hozier, faut-il donc renoncer à connaître les véritables ?

Non ; ce que nous ne savions pas autrefois, nous le connaissons aujourd'hui.

Des deux cachets qu'avait fait graver en 1786, la Communauté de Ville, tandis que celui qui était déposé aux archives avait disparu, soit dans l'incendie allumé par les soldats du général Cefer qui détruisit la Mairie en 1793, soit plus tard, pendant l'administration de M. Gersin, maire de l'an X à 1815, qui, « par sa négligence, insouciance ou mauvaise volonté, avait laissé disparaître de l'Hôtel de Ville un grand nombre de meubles, ustensiles, registres de lois et papiers qui ne purent se retrouver, » l'autre était resté dans la famille d'un ancien maire, prédécesseur de M. Gersin, où j'ai eu la bonne fortune de le découvrir.

Ce cachet est ovale. Au milieu sont gravées les armes de Hédé au-dessous desquelles on lit : VILLE DE HÉDÉ.

L'écusson, de forme carrée, très allongé, aux angles du bas très peu arrondis, peut se blasonner ainsi : D'argent au chevron de sinople accompagné de trois hermines de sable 2 et 1, au chef de Bretagne. Il a pour supports deux hermines au naturel, la tête tournée en arrière et colletées d’un manteau ou écharpe d'hermine flottant.

Il est timbré d'une couronne comtale.

Il n'y a plus d'erreur et ce sont bien là les anciennes et véritables armes de Hédé.

Les villes prenaient souvent des armes parlantes : une tour ou un château représentait une ville forte ; un navire, un port; un objet quelconque rappelait par un jeu de mot le nom de la cité. Si Hédé n'a point de tours dans son écu, on peut dire cependant que ses armes sont parlantes, car, par leur composition, elles semblent être un résumé de son histoire et vouloir nous montrer le rôle que remplit la petite ville alors que son château, comme une sentinelle vigilante, se dressait entre le littoral et la capitale de la Bretagne.

Tout d'abord, elles sont essentiellement bretonnes. Les hermines de son chef nous indiquent que, comme Rennes, Saint-Servan, Redon, Nantes, etc., Hédé faisait partie du domaine ducal, mais les trois hermines qui ornent son champ peuvent dire davantage. N'ont-elles pas été placées là pour marquer que la terre de Hédé servait d'apanage aux héritiers des souverains et qu'elle eut successivement pour seigneurs des membres de la famille ducale depuis Béatrix de Bretagne, fille d'Arthur II, mariée avant 1312 à Guy de Montmorency-Laval, jusqu'à Edouard, bâtard de Gilles de Bretagne, puis Antoine et après lui François, son frère, tige des seigneurs d'Avaugour, comte de Vertus, qui la possédait encore en 1519, tous deux fils naturels du dernier duc, François II, et d'Antoinette de Meignelais.

Peut-être même, ces mouchetures remonteraient-elles plus haut encore et auraient-elles été données par le duc Jean Le Roux, après que celui-ci les eut placées lui-même dans les armes de Bretagne pour y remplacer l'échiqueté de son père, Pierre de Dreux, en souvenir du séjour de la duchesse Blanche de Champagne, sa femme, dans son château de Hédé qui la vit mourir, le 11 août 1283, quelques années après son retour de la dernière Croisade où la vaillante femme avait voulu accompagner son mari à la délivrance du tombeau du Christ, et dont elle n'était revenue avec lui qu'après la fin si malheureuse de saint Louis à Carthage. Après les hermines, le chevron de sinople. « En blason d'armoiries, des vertus le synople signifie Force et est marque d'honneur…. » (Le blason des armoiries, par Hiérosme de Bara, Paris, 1628) « Le Chevron est l'une des pièces honorables .... Formé de deux chevrons assemblés par le haut sans néantmoins aucune division. … descendans du chef aux parties dextre et senestre, le sieur de la Colombière dit que c'est le symbole de protection et de conservation, parce qu'il soustient le couvert qui conserve les plus grands Bastiments et le deffend des injures de l'air, et qu'il est aussi pris pour le Hiérogliphe de la confiance et de la fermeté. D'autres disent qu'il représente les esperons du Cavalier » [Note : La vraye et parfaite science des armoiries ou L’Indice armorial, de feu maistre Louuan Geliot, advocat au Parlement de Bourgongne, augmente par Pierre Palliot. Paris, 1674].

N'avions-nous pas raison de dire que ces armoiries étaient véritablement des armes parlantes, et ne nous peignent-elles pas d'une façon saisissante ce que fut Hédé à l'époque de l'indépendance. Les hermines qui en sont la partie essentielle et qui figurent jusque dans les supports, marquent bien la fidélité de la ville à ses ducs, fidélité qui ne s'est jamais démentie et que ceux-ci reconnaissent à toute occasion, ainsi que nous en voyons la preuve dans les nombreuses lettres patentes d'exemptions accordées à ses habitants dès le temps de Jean IV et de Jeanne de Navarre, sa femme, et qui se sont continuées jusque sous les rois de France, leurs successeurs. Le chevron de sinople n'est-il pas là pour rappeler le rôle si important « de protection et de conservation » de la forteresse sur le pays environnant. Le château si fort, en effet, qu'on le comparait à celui de Dinan et d'une utilité si grande, que le souverain n'en confiait la garde qu'à des Capitaines d'une valeur éprouvée et choisis parmi les plus dévoués, Olivier de Maillechat, Guyon Turpin, les d'Espinay, Pierre de la Marzelière, Noël de Tixue, etc., ne fut point indigne de la confiance qu'on avait dans la force de ses murailles et ne faillit point à la tâche qui lui incombait, car on le retrouve mêlé à toutes les guerres que dut subir la Bretagne depuis l'année 1155, où l'on en entend parler pour la première fois, jusqu'à l'époque de sa destruction en 1598.

Quant à la couronne qui surmonte l'écusson, nous savons que l'emploi actuel de la couronne murale par les villes est d'origine récente et ne date que du décret de Napoléon du 19 mars 1809 sur le rétablissement des titres nobiliaires, et qu'elles timbraient leurs armoiries d'une couronne de duc, de marquis, de comte ou de baron, selon qu'elles étaient le siège d'un duché, d'un marquisat, d'un comté ou d'une baronnie.

Pourquoi donc Hédé, dont la seigneurie n'avait jamais été érigée en comté, prenait-elle la même couronne que Rennes, chef-lieu d'un comté qui datait des premiers temps de la Bretagne, et que Dol, comté dont l'évêque était seigneur ?

Les prééminences dans l'église de Hédé appartenaient, par don du roi Louis XIII, aux seigneurs de la terre de la Crozille possédée en 1786, lors de la gravure, ordonnée par la Ville, du cachet de ses armes, par la famille de la Bourdonnaye, comtes de Blossac, qui prenaient le titre de seigneurs et seigneurs juveigneurs [Note : (1756) Afféagement fait par h. et p. seigneur messire Paul-Esprit de la Bourdonnaye, chevalier, comte de Blossac…. seigneur de Hédé, Bazouges, etc. (1770) Ferme de la métairie noble de la Grande-Planche par messire Paul-Esprit de la Bourdonnaye, chevalier, comte de Blossac … seigneur juveigneur de Hédé, Bazouges, etc. (Aougstin, notaire des cours et juridictions du Plessis-aux-Chapts, Pierre-Taillée, etc.)] de Hédé. Est-ce là qu'il faudrait chercher la raison de la couronne comtale ? Je ne le pense pas. Je crois que cette couronne était beaucoup plus ancienne, qu'elle remontait à l'époque où les villes timbrèrent leurs armoiries, et qu'elle était comtale tout simplement parce que Hédé faisait partie du comté de Rennes, dont le territoire très étendu embrassait tout celui de l'ancien évêché.

En même temps que les armoiries de Hédé, D'Hozier nous en présente d'autres qui ne concernent plus la Ville elle-même, mais une partie de ses habitants, et dont il est juste de s'occuper avant de terminer.

L'édit de 1696 ne s'appliquait pas seulement aux familles nobles et aux villes ; quelque grand que pût en être le nombre, l'impôt prélevé sur elles n'aurait pas fourni assez d'argent. Le roi exigeait que les Communautés de métiers, de marchands et même des Offices de Juges, Procureurs, Notaires, etc., vinssent aussi apporter leur obole pour remplir les caisses vides du Surintendant des Finances.

Il fallut donc à ces Communautés faire enregistrer leurs armoiries si elles en avaient, ou en demander si elles n'en avaient pas.

A Hédé, les Communautés de marchands n'existaient point. La population était très restreinte ; il n'y avait aucun commerce et tous les petits marchands, au moment de l'établissement des rôles des impositions, criaient misère pour se faire déporter. Le fisc n'avait donc rien à espérer de ce côté. Mais à côté d'eux, il y avait la Cour royale avec ses juges et tous les Offices de judicature qui en ressortissaient. Ceux qui possédaient ces offices pouvaient être atteints et le furent. Ils ne pouvaient prétendre rester inconnus puisqu'ils étaient les personnages les plus importants de la ville, ni arguer de leur peu de fortune puisqu'ils étaient assez riches pour acheter leurs charges. Aussi D'Hozier ne nous les oublie point et tous les Officiers de la juridiction, depuis les juges jusqu'aux arpenteurs et huissiers, trouvèrent place dans son armorial.

Tous ces offices formaient-ils des communautés avant 1696 ? J'ai peine à le croire. D'abord les gens qui les occupaient étaient peu nombreux. Il y a à Hédé, nous dit une délibération de la Communauté de ville en 1768, sept procureurs, plusieurs avocats (environ le même nombre), trois huissiers. On ne dit rien des notaires et des arpenteurs.

Lorsque les Juges, Procureurs, etc., même après 1696, sont appelés à figurer dans les cérémonies officielles : processions, cortèges, réceptions de hauts personnages, et qu'ils se présentent en Corps, jamais le nom de Communauté n'est prononcé. Ils n'ont point pour les précéder les Hérauts, Massiers et autres personnages subalternes avec leurs armoiries brodées, obligés pour le cérémonial, et se contentent de suivre le Héraut de la Communauté de Ville dont tous à peu près faisaient partie.

D'autre part, D'Hozier donne des armoiries particulières aux Notaires et aux Procureurs quoique, presque toujours, ces offices fussent remplis à Hédé par une seule et même personne qui signait notaire et procureur.

Enfin, ni dans les archives de la Communauté de Ville, ni dans les papiers de famille des héritiers de ceux qui ont rempli ces offices, rien n'apparaît qui puisse rappeler d'une façon quelconque que, s'ils ont été érigés en communauté, ils aient eu des armoiries avant 1696 ou que leurs possesseurs aient usé de celles qui leur avaient été imposées.

Quoiqu'il en soit, l'édit était formel et Louis XIV décidant que deux personnes du même métier formaient une corporation (Dalloz), il fallut accepter ce qu'on ne pouvait empêcher et nous voyons l'Armorial général donner pour armes au « Corps des Officiers de la juridiction et barre de Hédé » : De gueules à un sautoir cannelé d'argent, accompagné de quatre besans de même, chargés chacun d'une moucheture d'hermines. Je ne tenterai pas de chercher une explication à ces armoiries pour lesquelles il n'y en a peut-être pas. Du reste, le blason est une science trop ardue et trop complexe pour laisser pénétrer volontiers ses mystères par un profane. En outre, nous n'avons pour termes de comparaison qu'un extrait de l'Armorial général concernant les villes des Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor (par M. René de Figuères), où nous voyons les juges de Lamballe, Moncontour, Saint-Brieuc porter : D'azur à trois fleurs de lys d'or ; ceux de Guingamp : D'argent à trois chandelliers de gueules ; ceux de Dinan : D'argent à une main de justice, armes toutes différentes des nôtres.

Tout au plus pouvons-nous penser que les hermines qui chargent les besans sont là en souvenir de celles du sceau et du contre-sceau de la Cour, qui, comme ceux de toutes les juridictions ducales, étaient composés d'un semis d'hermines.

La Communauté des Procureurs de la juridiction royale portait : d'azur à un saint Nicolas d'or. Nous ne savons à quel titre l'évêque de Myre, que nous connaissions déjà comme patron des enfants, des drapiers, des épiciers, des marchands de vin et des mariniers, a encore les procureurs parmi ses clients. Cependant, dès les temps les plus anciens les Procureurs du Parlement de Paris l'avaient choisi pour leur protecteur et avaient fondé en 1342, dans la chapelle du Palais, une confrérie de Saint-Nicolas. Les Procureurs des autres Cours suivirent leur exemple et, ceux des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) en particulier, le placent tous dans leurs armes. Dinan, Lannion, Tréguier blasonnent comme Hédé ; Guingamp entoure l'écusson d'une bordure de gueules ; Quintin, d'une bordure d'or chargée de huit mouchetures d'hermines ; Moncontour le surmonte d'un chef d'argent chargé de trois mouchetures d'hermines ; enfin pour Saint-Brieuc, il est : d'argent à un saint Nicolas de carnation, vêtu pontificalement d'azur et de gueules, tenant de sa main senestre sa crosse de même et donnant sa bénédiction de sa dextre à trois enfants de carnation issants d'une cuvette de sable. Sans doute les procureurs dont la réputation, à tort ou à raison, était l'objet de controverses et qui passaient pour entretenir les procès et les faire durer plus qu'il n'était nécessaire, pour leur plus grand profit, avaient-ils voulu, en placant un saint sur leur bannière, se couvrir de la sainteté de leur patron. Il en était de même de leurs amis et associés Messieurs les Avocats dont la renommée n'était pas beaucoup meilleure, si l'on en croit l'hymne de saint Yves, l'avocat des pauvres, et qui, avant que celui-ci, dont la canonisation ne fut proclamée qu'en 1347, pût devenir leur patron, s'étaient affiliés eux-mêmes à cette confrérie de Saint-Nicolas. Bien plus, comme les Avocats avaient le pas dans les cérémonies sur les Procureurs et les Notaires ce fut le représentant de leur ordre qui devint le chef de la Confrérie des procureurs et qui portait dans les réunions ce bâton revêtu d'argent, insigne de ses fonctions, d'où lui vint le nom de Bâtonnier.

Peut-être les Procureurs de Hédé avaient-ils aussi fondé une confrérie et était-ce à eux que l'église devait le saint Nicolas qui y était honoré et qui y avait son autel.

Aux Notaires, D'Hozier donne des armes moins comunes : D'azur à un cygne d'argent ailé d'or, s'essorant sur une onde aussi d'argent et accompagné en chef de deux plumes d'or à écrire passées en sautoir.

La plupart des corporations de notaires des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) ont pour pièces principales de leur blason des Fois ou mains entrelacées. Cependant nous retrouvons les cygnes chez ceux de Lannion qui portent : D'azur à deux cygnes affrontés d'argent, accompagnés en chef d'une couronne de laurier d'or, et à Tréguier où un cygne d'hermines accompagne en chef une Foi de onttion parée d’hermines, posée en fasce abaissée.

Il est à remarquer que ces armes des notaires ont honneur à la corporation qui les a choisies. Toutes les pièces, en outre des plumes à écrire, représentant le travail matériel, ces Fois de carnation ou d'argent, emblèmes de la confiance, ces mains entrelacées soutenant la balance égale entre les parties [Note : Les notaires de Dinan portaient : D'azur à une Foi de carnation, parée de contre-hermines, mouvante des flancs, en chef abaissé et tenant des balances d'or], indiquaient combien cette profession était alors tenue en estime. Le cygne, pièce des plus honorables « auquel Pierrius compare les hommes lettrés, benings et affables desquels la sincérité n'a esté flaistrie d'aucune tasche parce qu'il est l'indice de la candeur » [Note : La vraye et parfaite science des armoiries ou l’Indice armorial, de feu maistre Louuant Géliot, advocat au Parlement de Bourgogne…. augmenté par Pierre Palliot, 1674], en est une nouvelle preuve.

La blancheur de son plumage jamais maculé, n'est-elle pas, en blason, comme celle de la fourrure de l'hermine, le symbole de la pureté et de la loyauté.

C'est que les Tabellions du vieux temps, dont les membres appartenaient souvent, surtout dans les juridictions seigneuriales, à des cadets de noblesse qui ne croyaient pas déroger, qui se succédaient de père en fils dans leurs études sombres et étroites, n'avaient point cette préoccupation d'une fortune rapide qui entraîne quelquefois si loin leurs successeurs d'aujourd'hui. Tout en cherchant dans des honoraires loyalement gagnés la juste rémunération de leurs soins et de leur travail, ils veillaient aux intérêts qui leur étaient confiés comme aux leurs propres, et étaient autant les amis fidèles et dévoués de ceux dont ils géraient les biens que leurs hommes d'affaires.

Le corps des Arpenteurs et celui des Greffiers de l'Ecritoire avaient des armes parlantes : D'azur à un compas d'or ouvert en chevron, accompagné en chef de deux plumes à écrire adossées d'argent et en pointe d'un cornet ou écritoire de même.

Les Sergents et Huissiers avaient souvent dans leurs armes des bâtons en sautoir, insignes de leurs fonctions, comme à Guingamp où ils sont : D'or accompagnés de quatre cœurs d'argent chargés chacun d'une moucheture d'hermines ; à Lannion, de sable sur fond d'or, accompagnés de deux plumes d'azur brochant en bande sur le bâton posé en barre ; à Quintin, d'or sur champ de sable, accompagnés de quatre écritoires d'argent garnies de leur cornet de même.

A Hédé, les bâtons sont remplacés par deux plumes d'or passées en sautoir sur champ d'azur et accompagnées de quatre mouchetures d'hermines d'argent.

De tout ce qui précède, il semble résulter que Hédé qui n'avait pour tous revenus que ceux de ses octrois qui lui suffisaient à peine pour faire face aux nombreuses charges dont était grevé son budget, ne jugea point nécessaire de faire une nouvelle dépense pour l'enregistrement d'armoiries dont elle était en possession depuis des siècles et que personne ne pouvait lui contester, qu'elle ne se pressa point d'obéir à l’édit, et que D'Hozier lui en fabriqua de fantaisie.

Quant aux armes des diverses Communautés de sa Cour royale, elles ont tant de rapports avec celles de ces mêmes corporations dans les autres villes des Côtes-du-Nord (Côtes-d'Armor), que je ne saurais dire si elles sont anciennes ou si elles sont le produit de l'imagination de l'armoriste.

Quoiqu'il en soit, le but que Louis XIV s'était proposé en publiant cet édit fut atteint ; le fisc veillait ; l'impôt fut perçu ; la Ville dût malgré ses répugnances verser 50 livres, et les autres Communautés chacune 25 livres, en tout 175 livres, bien faible appoint à jeter dans le vide profond du Trésor, sans espoir de le combler.

A. ANNE DUPORTAL.

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