Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

CAHIER DE DOLÉANCES D'IFFENDIC EN 1789

  Retour page d'accueil       Retour Ville d'Iffendic 

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Subdélégation de Montfort. — Dép. d'Ille-et-Vilaine, arr. et canton de Montfort.
POPULATION.
— En 1793, 4.158 hab. (Arch. Nat., D IVbis 51) ou 4.019 hab. (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série L).
CAPITATION (pour Iffendic et Bléruais, sa trêve). — Total en 1770, 3.354 l. 3 s. 3 d., se décomposant ainsi : capitation, 2.190 l. ; 21 d. p. l. de la capitation, 191 l. 12 s. 6 d. ; milice, 292 l. 9 d. ; casernement 535 l. 10 s. (Ibid., C 3981). — En 1778, 946 articles, dont 418 inférieurs à 3 l. (Ibid., C 3982).
VINGTIÈME ( pour la seule paroisse d’Iffendic). — En 1787, 6.500 l.
FOUAGES (avec Bléruais). — 87 feux 3/4 1/16. — Fouages extraordinaires, 1.653 l. 19 s. 6 d.

OGÉE. — A 12 lieues 1/2 au S. de Saint-Malo ; à 5 lieues 1/2 de Rennes ; à 1 lieue 1/2 de Montfort. — 4.000 communiants, y compris la trève de Bléruais. — Ce territoire est un pays couvert, où l'on trouve des terres fertiles en grains et pâturages, quelques cantons en landes et plusieurs bois taillis, dont le plus considérable est celui de Trémelin, qui peut avoir trois à quatre lieues de circonférence.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblée électorale, le 2 avril 1789, au lieu ordinaire des délibérations, sous la présidence de François-Victor-Fulgence Tiengou de Tréfériou (voir la note 1 qui suit), avocat au Parlement, sénéchal de la juridiction de la Châsse (voir la note 2 qui suit), et de Joseph-Louis-Jan Maudet (voir la note 3 qui suit), procureur fiscal de la même juridiction. — Comparants : Joseph Aubry, ancien trésorier ; Charles Pellerin, Joseph Sanson, Jan Duval, Pierre Dardaine, Bertrand Hobé, Jean Deffains, Michel Tricault, Louis Levesque, anciens trésoriers ; Me Jean Robert, greffier ; Julien Odye ; Jan Odye ; Jan Pierre ; Pierre Ramel ; Mathurin Gacel ; Joseph Lhuissier ; Joseph Rosty ; Pierre Robert ; Jan Vauquenu ; Joseph Demay ; Mathurin Chollet ; François Morand ; Pierre Orain ; Charles Petitpas ; Pierre Vauquenu ; Jan Denieul ; Jan Orain ; François Boscher ; Pierre Orain ; Pierre Demay ; Joseph Trouvé ; François Levillain ; Marc Nogues ; Jan Berhaut ; Pierre Robert ; Jan Orain ; Joseph Lemoine ; J. Bernard ; François Raffray ; Mat. Gaulé (?) ; Jo. Horbier (?). — Députés : Jan Robert ; Francois Raffray.

Note 1 : Tiengou de Tréfériou a pris part, le 1er avril, à l'assemblée électorale de Montauban.

Note 2 : Sur la seigneurie de la Châsse, voy. GUILLOTIN DE CORSON, Grandes seigneuries de Haute-Bretagne, 1ère série, pp. 135-139. Le propriétaire de cette seigneurie était, en 1789, Joseph d’Andigné, ancien évêque de Chalon-sur-Saône, qui l’avait héritée, en 1782, de son frère, ancien conseiller au Parlement de Bretagne, et qui habitait ordinairement Paris.

Note 3 : Né à Saint-Gonlay le 31 octobre 1744, Joseph Maudet fut notaire, procureur fiscal et juge de juridictions seigneuriales ; il fut, pendant deux ans, membre du conseil du district de Montfort, président de ce conseil pendant les deux autres années, puis juge de paix du canton d’Iffendic ; il fut nommé sous-préfet de Monfort en l’an VIII et le demeura jusqu’au 8 avril 1813, époque où il fut admis à la retraite . En l’an X, il accusait un revenue personnel de 1.800 fr., outre les 1.400 fr, qui appartenaient à sa femme (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série M, dossiers individuels des sous-préfets). — Lors du pillage du château de la Châsse par une bande de paysans révoltés, le 7 février 1790, il fit tous ses efforts pour empêcher le brûlement des archives de la seigneurie, mais ce fut en vain (Ibid., série B, Présidial de Rennes, enquête du juge Rubin de la Grimaudière sur l’émeute d’Iffendic, déposition de Pierre Glochon, fermier de la métairie de la ville).

 

Cahier des doléances, plaintes et remontrances des habitants de la paroisse d'Iffendic, évêché de Saint-Malo... [Note : Les parties imprimées en italique sont empruntées au cahier de Montauban].

SIRE,
[1] Vos fidèles sujets voient avec attendrissement et avec la plus vive reconnaissance les soins paternels de Votre Majesté pour la grande famille qu'ils composent ; ils bénissent, et leur postérité bénira dans tous les temps le Monarque juste et bienfaisant qui, ayant mis son intérêt le plus cher dans le bonheur de ses peuples, veut bien les consulter eux-mêmes sur les moyens de les rendre heureux. Les réclamations et les plaintes du Tiers Etat de votre Royaume vous sont parvenues de toutes parts, vous les avez entendues avec bonté ; vous voulez que nous vous adressions nous-mêmes nos doléances et nos griefs, nous allons les déduire avec toute la franchise, la confiance et la sécurité qu'inspire à vos fidèles sujets la parole sacrée de leur bon Roi.

Sire,
[2] Il est de notre devoir, comme il est dans notre cœur, de demander que les franchises et privilèges de la province de Bretagne et les droits qui lui sont assurés par son contrat d'union avec votre couronne, droits fondés sur la parole sacrée de vos augustes aïeux et sur celle de Votre Majesté, soient maintenus dans leur intégrité ; qu'ils ne puissent être modifiés, altérés, ni changés par les Etats généraux ; que le régime intérieur de la province, ainsi que les débats et discussions de ses trois ordres, ne puissent jamais être jugés et décidés que par Votre Majesté seule, que nous reconnaissons pour unique juge [Note : Comparer cet article avec l'article 1er du cahier de Montauban].

[3] La dette nationale, qui se trouve immense, étant l'objet principal de la convocation des Etats généraux, nous prions les députés qui nous y représenteront de faire en sorte, en concertant les moyens les plus avantageux de l’éteindre, que le poinds n’en retombe pas sur leurs seuls propriétaires, tout Francais, quel qu’il soit, devant contribuer suivant ses forces à l'extinction de cette dette, et nous demandons instamment que, quand la somme que devra payer la province sera fixée et répartie par ses commissaires sur les paroisses, chacune de ces paroisses ait le droit de s'imposer elle-même pour fournir la somme à laquelle sa contribution aura été fixée, et que, dans son rôle de contribution, elle comprenne tous les habitants, de quelques qualités et condition qu'ils soient, sans aucune distinction du noble, du roturier ou de l'ecclésiastique, et que cette méthode soit la seule pratiquée pour tous impôts quelconques.

[4] Les juridictions seigneuriales sont trop multipliées dans la province ; nous demandons que toutes les moyennes et basses justices soient supprimées, qu'il ne soit conservé qu'une haute justice par trois clochers, qui ressortira au juge royal ; la conservation d'une seule haute justice par trois clochers paraît nécessaire, attendu que le justiciable des campagnes serait trop éloigné des juges royaux et que le gros bourgs resteraient sans police ; les seigneurs dont les justices seront supprimées seront indemnisés des droits de leurs greffes par celui qui en profitera et dont la justice aura été conservée (voir la note qui suit). Nous demandons que les présidiaux jugent souverainement jusqu'à dix mille livres ; que les causes légères pour endommagement de bêtes ou pour injures verbales soient jugées verbalement et sans aucuns frais par deux ou trois prud'hommes, qui seront nommés tous les ans, qui s'assembleront tous les dimanches, et le tout sans frais ni dépens pour les parties, qui seront tenues de comparaître devant eux en personne ou par quelqu'un de leurs proches, à peine d'amende après un simple avertissement [Note : Il y a de grandes analogies entre cet article et l'art. 3 du cahier de Montauban ; le passage relatif aux endommagements de bêtes est inspiré des Charges d'un bon citoyen de campagne].

Note: La juridiction de la Châsse recevait en appel les causes jugées en première instance dans les justices du Vauférier et de la Bassardaine qui s'exerçaient à Saint-Maugan, et dans celle du Pin, qui s’exercait dans l’auditoire même de la Châsse (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 1818). En outre, la seigneurie du Breil avait droit de haute justice, qu’elle excerçait dans un auditoire situé au bourg d’Iffendic (GUILLOTIN DE CORSON, Petites seigneuries de Haute-Bretagne, p. 279).

[5] Les droits de franc-fief sont ruineux pour le Tiers Etat. Ah ! Sire, pourriez-vous voir, sans être ému, une famille qui vient de perdre son père, obligée d'avancer deux années de revenu de ses biens nobles pour payer ce droit désastreux ? Et si le père ne lui a transmis que des biens nobles, la voilà ruinée pour avoir eu le malheur de perdre son chef et son soutien ; le malheur est à son comble, si les terres sont sujettes au droit de rachat ; il faut qu'elle avance le prix de deux années et que la troisième soit absorbée par le rachat ; nous demandons que cet impôt, onéreux pour le Tiers Etat seul, soit supprimé, ainsi que les fouages, et que tous les impôts qui ne portent que sur le Tiers Etat soient convertis en un impôt général qui se répartisse sur tous les ordres des citoyens sans distinction.

[6] L'impôt des contrôles présente des abus non moins désastreux ; les droits sont devenus arbitraires et les cas de contraventions innombrables ; un propriétaire achète par affection un terrain voisin du sien au delà de sa valeur ; les fermiers y gagnent, puisqu'ils ont un plus grand droit de contrôle ; mais, au décès de l'acquéreur, sa succession se partage ; des experts donnent au terrain acquis sa juste estimation, qui, dès lors, n'est plus la même que le denier vingt de l'acquisition qui en a été faite par affection ; le commis rapporte un procès-verbal de fausse déclaration ; il y a amende, et les héritiers et leurs experts seront obligés de trahir leur conscience et d'estimer un bien au-dessus de son produit réel pour procurer de plus grands droits aux fermiers des contrôles. Mille autres abus de cette espèce nous font demander qu’en conservant les contrôles, on fixe un droit léger et invariable pour tout acte quelconque, et que l'indemnité du surplus soit confondue dans l’impôt général à asseoir sur tous les citoyens de tous les ordres, et dans lequel seron convertis les impôts pour casernement, les confections des routes, les patrouilles et guet et toutes les impositions qui ne retombaient que sur le Tiers Etat ; que tous les impôts soient répartis par un seul et même rôle sur tous les citoyens des trois ordres [Note : Cet article présente de grandes analogies avec l’art. 4 du cahier de Montauban].

[7] Sire, Votre Majesté ne peut trop protéger le cultivateur, dont les travaux fertilisent les campagnes et font la richesse de votre Royaume ; on ne saurait trop veiller à ce que les grains confiés à la terre pour produire la prochaine récolte ne soient pas pillés et mangés ; il ne sert de rien au laboureur de semer s'il ne lui est pas permis d'empêcher les pigeons et autres animaux voraces de venir ravager ses champs ; cependant notre Coutume l'expose à la peine corporelle s'il a le malheur de tuer les animaux, loi barbare et contraire au droit commun ! Pour porter l'injustice et l'absurdité au comble, il ne manquait plus que d'interdire aux citoyens le droit de repousser à main armée le voleur ou l'ennemi qui vient pour forcer son asile et l'assassiner ; les pigeons, les lapins, etc., sont des voleurs d'autant plus formidables qu'ils sont privilégiés et sous la sauvegarde de la loi coutumière de Bretagne ; la plus petite maison noble a son colombier, sa garenne, et cet abus est érigé en droit par la possession suivant l’article 389 de la Coutume ; nous demandons que tous les colombiers et garennes soient supprimés et qu’il ne soit libre qu’au seigneur du clocher de chaque paroisse d’avoir un colombier, sous la condition qu’il ait au moins trois cents journaux de terre en domaines (voir note qui suit).

Note : Lors d'une l’enquête citée par ailleurs, Jean Nogues, journalier au Châtel, en Iffendic, déposa que, quand le château de la Châsse eût été envahi, le 7 février 1790, par une bande d’environ 400 paysans, habitants de Saint-Gonlay pour la plupart, l’un d’eux « porta des bourrées ou glaines dans la fuie, qu’on les alluma, que quatre ou cinq autres particuliers montèrent sur la charpente pour y mettre le feu, après avoir découvert une partie de la fuie, mais qu’ils ne purent réussir à l’y faire prendre » (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série B, fonds du Présidial de Rennes). La seigneurie du Breil possédait également son colombier (GUILLOTIN DE CORSON, Petites seigneurie de Haute- Bretagne, p. 286).

[8] Nous demandons qu'on supprime la corvée des vassaux pour les réparations des moulins ; nous payons déjà assez cher le faible avantage de faire moudre nos grains à un moulin dont les machines ne tournent pas le plus souvent pour nous. Cependant les corvées féodales ont été étendues à tel point qu'un président [Note : On avait d'abord écrit : « feu M. le président... » (nom illisible, sans doute Montluc)] fit rendre un arrêt de la Cour qui nus défendait d'avoir chez nous des moulins à bras et nous exposait à mourir de faim dans les années de sécheresse ; cet acte tyrannique ne lui fût pas échappé s'il avait voulu considérer qu'il était procureur général syndic des Etats de Bretagne ; mais voilà le malheur dont le Tiers Etat aura toujours à gémir si l'on n'y remédie ; le président était un seigneur possédant des moulins ; il était membre d'un Parlement composé de nobles qui possédaient des moulins, et l'arrêt fut rendu en point de droit (voir note qui suit).

Note : Les moulins de Carray, en Iffendic, dépendaient de la seigneurie de la Roche-Trébulon, en Monterfil, qui appartenait à Georges-Louis Huchet, marquis de Cintré ; ils étaient affermés 1.200 l. par an, en vertu d'un bail passé le 4 février 1785. Le moulin du Breil, en Iffendic, qui dépendait du comté de Montfort, appartenait au même propriétaire ; il avait été affermé, par bail en date du 22 janvier 1783, à Joseph Pierre, moyennant 440 l. par an et diverses charges ; ce bail reproduisait les conditions du bail précédent, passé le 10 novembre 1774 au profit du même locataire. Après la mort de Joseph Pierre, sa veuve se remaria successivement à Pierre Marie et à Michel Jouvrot, et celui-ci fut poursuivi par son propriétaire, au mois d'avril 1792, devant le tribunal de district de Montfort, pour le payement de 419 l. 10 s. restant dues sur le loyer des sept dernières années échues ; le locataire se refusait à payer cette somme, prétendant qu'elle représentait l'indemnité à lui due, en vertu de la loi du 28 mars 1790, pour la suppression du droit de suite de moulin, mais M. Huchet de Cintré offrait seulement, à ce titre, une réduction du quart ou du cinquième sur le loyer des deux dernières années. L'avoué de l'intimé, Tiengou de Tréfériou, celui-là même qui avait présidé le 2 avril l'assemblée électorale d'Iffendic, donna dans ses conclusions, le 11 juin 1792, les détails suivants sur le moulin du Breil : « Il y avait au moins 150 moutaux pères de famille et étagers sous la banlieue du moulin du Breil, Sans doute, ces 150 moutaux ne faisaient pas moudre annuellement un nombre égal de boisseaux de grains : les uns n'en faisaient moudre que 10 à 12 boisseaux, les autres 20, 25, 40, 50, et ainsi par progression jusqu'à 100 et 120 suivant leurs facultés et état d'aisance et de labourage. Ces considérations conduisent à la nécessité de s'en tenir à un terme moyen et de l'établir. On ne craint pas d’assurer que, valeur réduite, chaque vassal pouvait apporter, l'un compensant l’autre, environ 30 boisseaux de grains à moudre au moulin, ce qui ferait, pour 150 moutaux, le nombre de 4.500 boisseaux de grains. Il faut supposer encore que, vu la fraude et les pertes ordinaires, le meunier dans l'ancien temps en perdait à peu prés le tiers, ce qui pouvait réduire la moûture à celle d'environ 3.000 boisseaux. Or, l'on ne craint pas d'assurer que, depuis le décret et la suppression des droits de contrainte contre les vassaux, le meunier a perdu plus ou un revenu plus fort que celui qu'il perdait par la fraude des vassaux ou négligence des recouvrements dans les temps de l'Ancien régime, d'où il suit évidemment qu'il ferait, par la suppression des droits de contrainte, une perte réelle de la moûture de plus de 1.500 boisseaux de grains. Or, la moûture de 1.500 boisseaux de grains ou le seizième d’iceux ferait un total d’environ 93 boisseaux de grains qui, à raison de 3 l., prix commun calcuté sur de dix années une commune, ferait 280 l. par an de perte, et c’est positivement à ce taux que l'on doit porter la réduction de fermage ou indemnité pour non-jouissance qui est due à Jouvrot et femme... C’est sur cette base et d’après de pareilles données que l’homme de loi avoué soussigné est parvenu à régler à l’amiable et par arbitrage les indemnités réclamées par plusieurs meuniers contre leurs propriétaires et notamment celle réclamée par les meuniers de la terre et dépendance de Montauban contre le sr. de Rohan, propriétaire de cette terre, et l’avoué soussigné peut assurer que ces bases ont été admises et approuvées et que la conciliation s’est faite sans difficulté avec les conseil et agent du sr de Rohan, qui se sont rendus à la justice et à l’équité de ces observations. On pourrait en prendre pour témoins les Srs Chantrel et Escolan, de Montauban, qui étaient les agent et conseil dudit sr de Rohan…. ». Le défenseur du marquis de Cintré, J.-B. Lemarchand, — celui-là même qui avait présidé le 5 avril 1789 l’assemblée de Monterfil, — répondit, le 27 juillet 1792, que le bail du moulin du Breil comprenait, en dehors du moulin lui-même, une prairie de deux bonnes hommées (évaluée à 50 l. de revenu annuel) et le droit de faire pâturer deux vaches et un cheval dans les terres de la métairie du Breil, ce qui représente 30 l. par an. Il ajouta que, le moulin du Breil étant situé à proximité d’un gros bourg où demeurent des gens qui n’y étaient pas étagers, le meunier, loin de perdre quoi que ce soit à la nouvelle législation, devrait avoir maintenant ces habitants dans sa clientèle, « s’il voulait bien faire le métier de meunier équitable ». Il observa enfin que le tribunal du district de Monfort avait toujours, en pareil cas, fixé l’indemnité au cinquième du prix du loyer. Nous n’avons pas trouvé le jugement du tribunal de Montfort ; sans doute l’affaire se termina-t-elle par un compromis amiable.

[9] Les seigneurs sont, suivant l'art. 21 de la Coutume de Bretagne, les héritiers de droit du bâtard décédé sans hoirs sous leurs fiefs ; cependant les généraux des paroisses ont été par la jurisprudence du Parlement chargés de l'obligation de nourrir les bâtards nouveau-nés et conçus dans la paroisse ; puisque les seigneurs ont le bénéfice, ils doivent supporter la charge ; nous demandons que cette charge soit imposée aux seigneurs de fiefs.

[10] Les seigneurs de fiefs, autorisés par l'art. 77 de notre Coutume, forcent leurs vassaux de cueillir leurs rentes féodales ; souvent les frais de cette collecte emportent la valeur du bien que le vassal institué possède sous le fief. C'est un abus resté de l'ancien gouvernement féodal ; nous demandons qu'à l'exception des fiefs solidaires les seigneurs soient tenus de faire à leurs frais rentrer les rentes qui leur sont dues et qu'en contrat d'échange il leur soit défendu d'exiger aucun droit de lods et ventes suivant la disposition de la loi, à laquelle ils ont trouvé le moyen de se soustraire (1).

Note : Dans les aveux rendus à la seigneurie de la Bédoyère, à la fin de l'Ancien régime, pour le fief de la Fosse Louyère, qui s'étendait dans la paroisse d’Iffendic, les tenanciers se reconnaissent « sujets a lods et ventes, droits et devoirs de recette, qui est de six sous par chaque héritier venant à nouvelle possession, à l'office de sergentise et collecte des rentes dudit rôle et bailliage à tour et rang » (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série E, titres féodaux, fonds La Bédoyère). Les aveux rendus aux seigneurie du Breil, de Tréguil eet du Plessis-Cintré mentionnent également le devoir de sergentise (Ibid., série E, papiers de famille, fonds Huchet de Cintré).

[11] Nous demandons que le Parlement soit composé de membres dont la moitié soit prise dans l'ordre du Tiers Etat, que les charges de judicature ne soient plus vénales, mais accordées au mérite par le concours, et que la Nation soit autorisée à s'imposer elle-même pour rembourser les charges à prix d'argent ; qu'il n'y ait plus de tribunaux d'attribution et qu'il ne subsiste aucune loi qui interdise l'entrée au Tiers Etat dans toutes les charges et dignités civiles, militaires ou ecclésiastiques, qui ne seront à l'avenir accordées qu'au mérite, sans distinction de naissance [Note : Cet article présente des analogies avec l'art. 11 du cahier de Montauban.].

[12] Nous demandons que les Etats généraux, qui seuls ont le droit de consentir les impôts, aient seuls le droit d'enregistrer les lois qui les établiront, et que, pour ce qui concerne la contribution de la Bretagne, ses Etats seuls aient le droit d'enregistrer la loi qu'ils auront consentie, sans que les Parlements puissent en prendre connaissance sous quelque prétexte que ce soit, si ce n'est pour l'exécution de la loi qui aura été portée par les Etats, et ce pour ce qui concerne l'ordre civil de justice seulement.

[13] Et qu'il soit permis à la Nation bretonne assemblée d'aviser aux moyens les plus propres et les plus avantageux de donner des secours et une indemnité aux malheureuses victimes de la loi, à ces citoyens qui, accusés par la rumeur publique ou par la partie publique, sortiront innocents et jugés tels des prisons où ils auront langui (Voy. l'art. du cahier de Montauban).

[14] Que le code criminel soit réformé suivant le désir de tout bon citoyen, et qu’il n’y ait plus de distinction dans les peines par rapport à la naissance, quand il s’agira des mêmes crimes. La loi ne doit faire acception de personne ; nous demandons que jamais aucun accusé ne puisse subir la peine de mort que préalablement l’arrêt qui l’y condamne n’ait été signe et approuvé par Votre Majesté. Ce droit, si précieux au Roi des Français, est l'ancien droit que vos augustes aïeux s'étaient réservé dans les siècles les plus reculés ; plus il est cher à votre cœur paternel, Sire, plus nous le réclamons avec confiance.

[15] Enfin, pour la représentation du Tiers Etat de Bretagne aux Etats de la province en nombre égal aux députés des deux premiers ordres réunis, pour le vœu par tête dans tous les cas, pour la formation des commissions dans les mêmes principes, pour la répartition égale des impôts sans aucune distinction sur tous les citoyens, pour l'abolition des milices (voir la note qui suit), pour le même droit aux honneurs, aux places et aux dignités dans les membres des trois ordres, et pour tous les objets qui n’ont pas été énoncés au présent cahier, nous déclarons expressément adhérer aux cahiers de pétitions, demandes et doléances formées par l'ordre du Tiers depuis le 22 décembre dernier jusqu'à ce jour, et adhérer au cahier des doléances qui sera rédigé en la ville de Rennes, et joindre nos prières et réclamations à celles de l'assemblée où nos dits députés manifesteront notre désir, pour que, des sept députés à envoyer aux Etats généraux dans la sénéchaussée de Rennes, il y en ait deux élus dans les campagnes qui sont situées sous la dite sénéchaussée, ne donnant la dite instruction que comme simple avis dont l’assemblée sentira la justice.

Note : La paroisse d’Iffendic dut, concurremment avec sa trève de Bléruais, fournir 16 jeunnes gens pour la milice durant la période 1781-1786, savoir : 2 en chacune des années 1784 et 1786, et 3 dans les autres années. En 1781, sur 181 jeunes gens participant au tirage, 160 furent exemptés au réformés ; en 1784, il y en eut 122 sur 139, et, en 1786, 125 sur 145 (Ibid., C4704).

[16] Depuis longtemps, les habitants de cette paroisse prétendent que les bénéficiers ecclésiastiques n'ont pas le droit de lever la dîme sur les lins, chanvres, désignée sous le nom de dîme verte ; cependant, les bénéficiers continuent de l’exiger, et de la prendre ; on demande que cet abus soit réforme (voir la note qui suit).

Note : Les dîmes de la paroisse appartenaient à peu près par moitié à l'évêque de Saint-Malo et au prieuré d'Iffendic, qui dépendait de l'abbaye de Marmoutier ; chaque ménage avait la franchise de dîmes pour un journal (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série H, fonds du prieuré d'Iffendic, déclarations à l'assemblée du clergé). Le prieuré était affermé par un bail général, datant de 1785, à M. Jousselin de Verrière, avocat, moyennant 2.000 l., 4 mines de seigle, mesure de Montfort, et l’acquit des charges suivantes : la moitié de la pension du recteur, la pension d'un des vicaires, 4 mines de blé pour les pauvres, une portion inférieure à la moitié dans les frais d'entretien du chœur et du chancel, les décimes, qui varièrent, durant les dernières années de l'Ancien régime, entre 300 l. et 410 l. (Ibid., série G, déclarations des biens ecclésiastiques, lettre de Maudet, homme d'affaires de l'abbaye, du 3 août 1790). Les dîmes qui appartenaient à l'évêché de Saint-Malo étaient comprises dans la ferme de la baronnie de Beignon (Ibid.,série G, évêché de Saint-Malo, baronnie de Saint-Malo de Beignon).

Il existe plusieurs mineurs pauvres qui, dans leur bas-âge, sont à la charge de parents collatéraux, souvent aussi pauvres qu'eux et qui sont obligés néanmoins de nourrir ces mineurs dans leur bas-âge ; il serait à propos de considérer les mineurs comme pauvres préférables dans la répartition des deniers de la caisse qui sera établie dans les différents diocèses pour la subsistance des pauvres, des enfants en bas-âge et dans l'indigence, les mineurs étant en effet les plus à plaindre et les plus dignes de compassion, et [Note : La fin du paragraphe a été ajoutée après coup] qu'on demandera le tiers du revenu du prieuré d'Iffendic pour cet effet (voir la note qui suit).

Note : Il se faisait, à Iffendic, deux distributions de grains aux pauvres : les quatre mines du prieuré étaient distribuées à la porte de l'église, au commencement de janvier, en présence du recteur et des trésoriers en charge ; un des seigneurs de la Châsse, M. d'Andigné, avait disposé par son testament que douze mines de grains seraient annuellement données aux pauvres, et la distribution s'en faisait une fois par semaine au château de la Châsse (Ibid., C 1293).

Tel est le cahier des doléances, plaintes et remontrances des habitants de la dite paroisse d'Iffendic, assemblés ce jour, lequel cahier a été rédigé par eux pour être chiffré par Monsieur le président et être remis aux députés qui vont être nommés, le dit jour deux avril mil sept cent quatre-vingt-neuf, sous les seings de ceux qui savent signer.

[34 signatures, dont celles des présidents Tiengou de Tréfériou et Maudet].

(H. E. Sée).

© Copyright - Tous droits réservés.