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L'ANCIENNE PRISON DE LANNION

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Procès-verbal des réparations à faire à la prison de Lannion, après visite des lieux le 13/07/1697, consécutive à plusieurs évasions.

Prison de Lannion

« Ce jour traizième juillet mil six cens nonante sept, nous sénéchal et premier magistrat civil et criminel de Tréguier au siège de Lannion, Scavoir faisons que nous estant rendu aux prisons de cette ville en exécution d’ordonance de nous rendue ce jour a requeste du sieur de Lezormel, substitut de Monsieur le procureur général du roy sur sa remontrance que les prisons de nostredit siège manquent considérablement de réparations, on prend pretexte sur ce pied de pretendre que les évasions qui arrivent frequement des prisonniers sont causés par le mauvais estat desdittes prisons, lesquelles ne sont pas en deffence pour lesquelles causes nous aurions réservé cedit jour d’y descendre et de reporter nostre procès-verbal pour y pourvoir, personnes de ce capables appellés à ces causes sur les deux heures de l’après midy, nous estans rendus aux prisons en compagnie dudit sieur substitut, asisté de nostre adjoint soubsignant, et de M Pierre Corlay, maitre menuisier, de Charles Jegat et de Jan Trimintin couvreurs, et de François Le Guern maitre macon, lesquels ont presté le serment de dire vérité, ainsy que Mathieu Barazer, dit Touchard, cerurier.

Procédant a l’examen et visite desdittes prisons, après avoir fait faire ouverture par M Jaques Gelard, consierge et en sa presence, ayant dessendu dans la cave au dessous de l’entrée et guichet desdittes prisons par une petite ouverture estant dans la chambre du guichetier joignant la muraille qui donne sur la rue du costé de l’entrée des prisons parce que nous n’avons peu entrer dans ladite cave par la porte attendu qu’on a esté obligé de l’encombrer de terre et de pierre pour la tenir fermér attendu qu’il n’y a ny cleff ny cerure, et y ayant descendu en ladite cave avec les susdits expers nous avons veu et trouvé qu’il ne manque rien au massonage, mais à l’égard du double et plancher au dessus qu’il y menque pour le rendre parfait et en deffence, au raport dudit Corlay menuisier, six demy poutres de sept à huit pieds de longueur et qu’il faut restablir tout le plancher de neuf attendu que celuy qui y est est pourry et que d’ailleurs les planches n’ayans qu’un pouce d’épaisseur ne serait pas assez forte, fussent elles neuves en sorte qu’il faut que celles qui seront mises soit d’un pouce et demy d’épaisseur, que de plus la grille de fer qui ferme un soupirail dans la neuve cave donnant d’un costé de la rue de la rive ne vaut du tout rien estant extrémement vieille et le fer en estant rongé en sorte qu’il faut plasser une grille neufve, qu’il menque comme dit est une forte serure et une cleff à la porte encombrée qui sert d’entrée à ladite cave. D’ou ayant remonté par le moyen d’une échelle dans l’entrée au guichet de la prison, avons remarqué et trouvé suivant le raport dudit Corlay que la ballustrade de bois qui sépare le guichet de la cour de la prison et qui sert de deffense principalle n’est pas assez forte, les barres estante trop éloignées les unes des autres et que pour la mettre en bonne et seure deffence, il est necessaire d’y adjouter six barres de dix pieds de longueur et de quatre pouces d’épaisseur, en sorte que les barres qui composent ladite ballustrade ne soit éloignée les unes des autres que de trois pouces et qu’on en puisse passer le bras, que de plus il faut garnir ladite ballustyrade d’une lame de fer du moins de cinq pieds de hauteur au long de chaque barre par dehors pour que les prisoniers ne les puissent faire, ce qui a esté souvent fait et qui a donné lieu à plusieurs évasions.

Ayant ensuite passé dans la basse-fosse dont l’escalier repond à l’escalier ou degré de ladite prison, avons trouvé qu’il menque à la porte de ladite basse-fosse un demy barre de bois de mesme longueur que ladite porte, qu’a la fenestre ou soupirail qui donne sur la rue de la Rive, il manque quatre barres de fer droit, et trois de travers.

Ayant de là monté à la grande chambre qui est au dessus des basses-fosses, trouvons premièrement qu’il menque deux barres de fer de ..... [illisible] et une petite fenestre qui donne sur la cour de la prison, que dans la mesme chambre il menque huit pieds de massonage tant au travers de la cheminée que soubs une demye poutre de neuf pieds et demy de longueur, laquelle demye poutre manque et doit estre placée de neuf pour soutenir le plancher de la chambre au-dessus en l’endroit de ladite petite fenestre donnant sur la cour de la prison et avons remarqué ....  [illisible] demye poutre qui estoit autrefois.

D’ou ayant monté au dessus de la chapelle et ayant visité les fenestres avons encore remarqué que les grilles de fer qui y sont très vieilles, rongées et usées de manière qu’il les faut tous deux retablir de neuf, et qu’a celle qui est du costé de la chapelle il faut cinq barres de fer long de trois pieds et demy de hauteur, de trois barres de fer de hauteur d’une mesme longueur, et a l’autre qui est la plus petite au bas de la chambre, qu’il y faut quatre barres de fer de trois pieds et deux pouces de longueur, et trois barres de travers de deux pieds et deux pouces de longueur, et qu’enfin le plancher de ladite chambre … [illisible] en sorte que pour le rétablir de neuff il faut vingt planches de sept pieds de long.

Ayant de la passé dans le grenier qui est au dessus de la grande chambre avons pareillement trouvé que la plus part des planches qui forme le plancher sont pourris et que les autres se peuvent lever facilement, ce qui surtout a à nostre cognoissance et suivant nos procès verbaux causé ou donné pretexte à plusieurs évasions, de manière que les prisons ne peuvent estre seures sans que le plancher soit absolument retabli de bonne et forte planche de chesne de huit pieds ou environ de longueur et sans qu’encore on raproche les soliveaux à cinq ou six pouces seulement de distance les uns des autres en sorte qu’il en faudra adjouter huit ou dix.

Et passant ensuite dans le grenier qui est au dessus de la chapelle, trouvons qu’il faut une douzaine et demye de planches de sept à huit pieds de longueur, pour en fortifier le plancher qui est en fort mauvais ordre.

Que de plus les couvertures de toute la prison sont en très mauvais estat de reparation, lesquelles reparations, lesdits couvreurs expers prisons nous ont dit ne pouvoir se faire à moins de cent livres en fournissant les pierres volants, clous, lattes, thuiles, chaux et autres matériaux.

Et qu’enfin pour mettre lesdites prisons en estat de deffence, qu’il faut faire une porte forte et épaisse au haut du degré pour empecher aux prisoniers l’entrée des greniers, de laquelle porte la quarée doit estre de quatre pieds de largeur et de six pieds de hauteur et garny de deux bonnes etoupettes et dix pattes fiche de fer et d’une forte cleff et claveure.

De tout quoy nous avons raporté et rédigé nostre présent procè-verbal en présence dudit sieur substitut et suivant le raport desdits expers aussi presens et ordoné que ledit sieur substitut fera incessament ses diligences pour pourvoir ausdites reparations et qu’a cette fin il en donnera advis à Monseigneur le premier président et à Monsieur le procureur général de cette province ; conclud ausdites prisons lesdits jour et an que dessus, soubs nos signes et celuy de nostre adjoint, dudit Jegat et pour les autres affirmans ne scavoir signer ont prié de faire pour eux scavoir pour ledit Corlay - Charles Jean, pour ledit Jan Trimintin - Jaques Le Coat, pour ledit Francois Leguern - M. Noel Quartier et pour ledit Mathieu Le Barazer - M. Yves Le Bras ; Signé Vincent-Augustin Carluer, Pierre de Lezormel substitut adjoint du procureur du roy, Yvon Le Bras, Jaques Le Coat, Charles Jegat, Noel Quartier, Charles Jan. [signé] Le Gualès greffe ». (Archives Nationales, G 180).

 

Prison de Lannion

Prison de Lannion

 

QUELQUES FAITS CONCERNANT LA PRISON DE LANNION.

- Au XVème siècle : « Ces actes font voir que ledit Rolland de Lannion estoit fils aisné audit Jean de Lannion, chevalier, comparoit et se rend caution de Rolland, Yvon et Olivier, ses enfans, qui estoient accusés d’avoir entouré les portes de la prison de Lannion » (Bibliothèque Nationale : Dossiers bleus 382, famille de Lannion, f 8).

- Le 17.09.1614 : « Condempnation obtenue par les prêtres du Bally en la prevosté de Lannyon le 17 septembre 1614, signé J. Le Tabardec. Par laquelle Ellye de VALLOIS, Sr du Halleguen de Guingamp, a esté condemné à leur payer quatre livres monnoie l’an de rente dessuz la maison qu’apartient à feu Guillaume LE BIHAN, joingnant la prison de ville d’un costé et de l’aultre costé sur la maison du Sr de CHANGER. Cotté S6 » (Cahier d’histoire de Lannion n ° 6).

- Vers 1660/65 : « … Et nous estans fait représenter par le greffier les liasses des procédures criminelles faites audit siège de Tréguier, depuis l’année mils ix cens soixante, nous aurions reconnus que les [deux] seuls crimes qui son demeurés impunis depuis ledit temps, sont un vol commis par le nommé Yves Le sain, lequel ayant esté emprisonné ès prisons de Tréguier, en a esté transféré dans les prisons royales de Lannyon d’ou il a depuis esté eslargy ; et ayans enquis les officiers de la justice de nous dire s’ils ne sauraient point en vertu de quoi et comment, nous ont dit n’en avoir aucune connaissance, cela n’estant plus de leur fait .... » ( Bibliothèque Nationale, les 500 de Colbert, n° 291, f° 80 et 81).

- (1675-1676). – Frais de justice des présidiaux et autres cours lors de la Révolte des Bonnets rouges : Fraiz de justice du domaine de Lannion. « A François Le Moign, geollier des prisons de la ville de Lantreguier audit Lannion, la somme de 262 livres 10 sols luy payée des débourcés pour le giste et geôlage des nommés Gonéri Le Gac, Yves Martin, Jacques Botcazou, Jan Perin et François Loincticq du temps qu'ils ont esté mis et détenus auxdites prisons par les archers du sieur grand prévost pour cause de séditions et muti­neryes populaires et y retenus depuis le 23 septembre 1675 jusques au 15 mars 1676 ausquelz il a fourny le pain du Roy ». « Messieurs les juges royaux de Tréguier, au siège de Lannion. Supplie humblement maistre Jan Auffret à présent geollier des prisons royales dudit Lannion. Disant qu'il luy auroit esté cy devant décerné exécutoire de la somme de 275 livres pour la nourriture des nommés Michel Guyon, Bertrand Jallaud, Pierre 0llivier, Jean Roger, Yves Losseer et Jan Lollifaut jusque au dernier décembre, lesquels sont détenus encore esdites prisons accusez de révoltes ».

- Au début de 1713, Catherine Citée, originaire de Ploubezre accouche aux prisons de Lannion, d’un enfant bâtard. Une ordonnance de la juridiction royale demande aux habitants de la paroisse [de Ploubezre], de se charger du nouveau-né. La réaction des notables est directe : ils refusent. Et pour se justifier, ils déclarent que la jeune femme n’habite plus à Ploubezre (Kermoal : les notables de Ploubezre, p. 173).

- « Ce jour trentième juillet mil sept cent quarante cinq, je soussigné ay béni la chapelle de la prison de cette ville, après en avoir obtenu la permission de monseigneur l'Evêque comte de Tréguier » [signé] Hervé Nouvel, recteur de Lannion (Archives Municipales de Lannion ; registre des baptêmes 1745, f° 18).

- « ... A Lannion, en 1769, personne ne veut plus être geôlier, et les juges sont forcés d’en nommer un d’office ..... » (Lorédan : La grande misère et les voleurs au XVIIIème siècle, p. 77).

- « La prison de Lannion se trouve au centre de la ville. Elle est fort mal-saine, et il n’en dépend ni cour, ni préau. Elle était destinée, sous l’ancien régime, je veux dire avant la première Révolution, à détenir les prévenus du ressort de la sénéchaussée de Lannion. Elle n’avait été construite que pour trente prisonniers, tout au plus ; cinq chambres, l’appartement du concierge et deux souterrains voûtés ; voilà tout ce qui la compose ; mais toutes ces pièces sont beaucoup trop petites ; elles manquent d’air, aussi sont-elles inhabitables, et ne reçoivent-elles le jour, que par une petite fenêtre grillée, à la hauteur de deux mètres. Cette prison est assez sûre, mais elle est surtout encombrée par les condamnés qui viennent à passer. Il n’y faudrait que vingt lits. La prison est resserrée de tous côtés par des rues étroites, et elle se trouve par là privée de la circulation de l’air ; or, le terrain ne permet pas de l’agrandir. Elle exige d’ailleurs de grandes dépenses d’entretien .... » (Habasque).

- « On emprunte les prisons du roi qui elles-mêmes laissent fort à désirer sous le rapport de l’installation, ou bien celles d’une juridiction voisines ; 23 seigneuries empruntent les prisons de Lesneven, 21 celles de Lannion .... » (Corre et Aubry : Documentation de criminologie rétrospective, p. 50).

(extraits tirés en partie de l'ouvrage " Cahier d'Histoire de Lannion ", n° 11, de l'association généalogique CHEF D'ARMOR). 

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