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Le sieur de Coroarch

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La Ligue ou Sainte Ligue ou Sainte Union est un mouvement religieux et politique qui regroupe les catholiques français de 1576 à 1594, lors des guerres de Religion.

La population entière de Bretagne va combattre pour sa foi et pour le Duc de Mercoeur contre le Roi. Des brigands tels le sieur de La Fontenelle, vont ravager le pays. En province les derniers chefs de la Ligue se soumettent en 1598.

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Bretagne : Histoire des guerres de la Ligue

Infortunes du sieur de Coroarch.

Je ne veux ici oublier une chose assez notable qui se passa en ce temps sous le nom de guerre, quoique ce fit plutôt une querelle et haine particulière. 

Nous avons dit ci-devant que, l'an 1594, la plupart de la noblesse de Cornouaille, dont il y avait grand nombre réfugiée en la ville de Quimper, et ébranlée par l'exemple du sieur de Lézonnet, capitaine de Concarneau, qui avait tout de nouveau changé de parti, pensant mieux faire ses orges au parti du roi qu'à celui du duc de Mercoeur, ladite noblesse tourna jacquette, et ayant manqué de se rendre maître de Quimper par l'occupation de la tour Bihan qui commande à l'une des portes, ce qu'elle s'efforça de faire, n'osant plus demeurer dans la ville, crainte qu'on n'eût fait de plus près recherche de ses actions, se retire le lendemain à la file, les uns à leurs maisons, les autres à la campagne du sieur de Kerservant, au château du Pont, qu'ils fortifièrent au mieux qu'ils purent, et se tinrent là, attendant la venue du maréchal d'Aumont qu'ils savaient bien devoir descendre de Morlaix avec son armée. Pendant qu'ils y furent, et quelques mois après que ledit maréchal entra en la ville, fut faite une entreprise sur ledit château du Pont qu'ils s'efforcèrent d'exécuter la huitaine du sacre 1595, non par ceux de divers partis, car tout le quartier était en l'obéissance du roi, mais par une mortelle haine que le sieur de Coroarch, nommé Rolland du Guermeur, portait au sieur de Kerservant, gouverneur dudit château, pour quelques tours lui faits. Et n'ayant pas les reins assez forts pour s'en venger ouvertement, eut recours aux ruses et embûches ; mais afin d'entendre la source de cette histoire, il nous convient de prendre la chose dans son principe. 

La cause donc de ce maltalent de Coroarch contre Kerservant était que, les années précédentes, l'un et l'autre étant avec leurs femmes et familles, réfugiés à Quimper à cause de la guerre, s'entrehantaient familièrement au commencement. Or Coroarch était marié à une héritière de Roscanou en Gouëzec, qui n'avait pas plus de quinze à seize ans, laquelle avait été sauvée par un grand hasard du sac de Roscanou de parmi les flammes et plus de dix mille fourches de fer, en 1590, lorsque sa mère et grand nombre de noblesse de l'un et de l'autre sexe y furent brûlés et tués par les paysans, comme nous avons dit ci-devant ; et cette demoiselle, ainsi jeune et en un âge d'être séduite, s'amouracha dudit Kerservant, si bien que la trop grande fréquentation, la privauté trop familière de l'un à l'autre, donnèrent occasion à plusieurs d'en mal parler, et spécialement à son mari d'en avoir une sinistre opinion et véhémente jalousie, joint que ses amis et parents lui en battaient souvent les oreilles, le priant d'y pourvoir pour son honneur, qui néanmoins lui était difficile d'y remédier, d'autant que le sieur de Kerservant, fort riche, était toujours bien suivi ; ce que n'avait pas Coroarch, simple gentilhomme. 

Néanmoins cette passion chatouilleuse de jalousie lui entra si avant dans le coeur qu'il se résolut, quoi qu'il en pût arriver, de se venger sur celui qu'il estimait son rival, non publiquement, car il n'était pas assez fort, mais par quelque secrète entreprise. Or le sieur de Kerservant avait la coutume de venir les après-soupers passer le temps au logis de Coroarch, en la rue du Frout, qui conduit à la porte des Regaires, et faisait bien souvent y tenir  le bal. Une nuit entre autres, l'amoureux y étant allé bien accompagné, Coroarch sort bien secrètement avec une bonne arquebuse bien chargée, et en un coin bien caché, la nuit étant bien obscure, attendant la sortie de Kerservant, lequel ne tarda guère qu'il ne sortît, devancé de forces flambeaux que portaient les laquais, et sitôt qu'il fut sur la rue, Coroarch tire son coup, pensant emporter son ennemi ; mais il ne lui donna que dans les habits, sans aucunement le blesser, qui était bien loin de son intention, qui était de le tuer tout à fait. 

Le sieur de Kerservant, étonné de ce coup, et tous ceux qui étaient avec lui, et ne sachant d'où il pouvait venir, que par présomption, ne laissa dans la suite de prendre garde à lui, et n'alla point si librement la nuit hors de son logis, et remit ses visites au jour. 

Cependant Coroarch s'évada par le bénéfice des ténèbres et ne put être remarqué. On ne fit point de recherches de cela, aussi n'y avait-il pas grand moyen de faire preuve par témoins, ce qui ne put s'exécuter. Lors fut différé à une autre occasion plus opportune. 

La maladie du poursuivant était la jalousie qui croissait de jour à autre, bien certain qu'il était trompé ; il commença à minuter un nouveau moyen de mettre ce dessein à bout, qu'il avait ci-devant résolu. Or la noblesse réfugiée en cette ville s'étant déclarée du parti du roi, en 1594, comme a été dit ci-dessus, et qu'elle se fut retirée au château du Pont avec le sieur de Kerservant, capitaine de la place, Coroarch combien que voisin, ne se voulut retirer, ni même se déclarer du parti des autres et demeura sous passe-ports neutres. 

Cependant il se pourvoie de belles armes et de trois bons chevaux, se tenant tantôt à Coroarch, allant et venant en cette ville, tantôt à Douarnenez où était La Fontenelle, jusque à l'an 1595, qu'ayant pratiqué quelque nombre d'hommes, fait entreprise sur le château du Pont, non à autre fin que son dessein réussissant, après avoir tué le sieur de Kerservant, qui était son principal but, il eût la place pour sûreté de sa personne. 

Il avait monté partie de ses gens jusque à vingt-cinq, les autres étaient à pied déguisés en habits de paysans, les uns ayant des faix de bois, les autres, autres choses dessus leurs dos, et partie aussi vides, qui se devaient couler, comme ils firent, entre ceux qui étaient chargés dedans le château. 

Le jour de l'exécution de cette entreprise fut assigné au jour du sacre, pendant que le peuple et possible une bonne partie de la garnison et le capitaine Kerservant même seraient en procession à conduire le sacre. Le jour et l'heure venus, Coroarch ne manqua pas, accompagné desdits cavaliers ; les piétons s'étaient déjà avancés devant à la file, et arrivés qu'ils furent à la porte, s'avancèrent trois ou quatre ensemble, passant tout joignant ledit sieur de Kerservant qui se promenait sur le pont du château, causant avec quelque autre de la garnison, sans prendre garde à ces prétendus paysans, et en passant l'un d'eux heurta le susdit de Kerservant assez rudement, sans y penser toutefois, lequel se détournant vers lui, dit : Qui est ce lourdaud qui me heurte ain­si ? Et prenant garde de plus près, et le voyant toujours avancer dessus le pont pour entrer dedans le château, alla après demandant : Où vas-tu ? viens-çà, pataud. L'autre, se détournant vers lui, lui tire un pistolet, pensant bien lui bailler dans la tête, mais le bonheur voulut qu'il ne fit que le blesser au côté de la gorge, assez légèrement, duquel coup ainsi favorable ledit Kerservant tomba par terre sur le pont et pensa-t-on qu'il fût mort. Le soldat, qui avait nom Jean Le Guiriec, natif de Quimper, rue de Mescloaguen, après avoir tiré son coup de pistolet, poursuit sa route à grande course, pensant se saisir de la tour du château ; mais trouvant le pont levé et ne pouvant pas retourner sur ses pas, à cause du monde qui arrivait à la file au secours, gagne la muraille où se voyant suivi de près, n'eut pas l'avis de se jeter par-dessus la courtine du château dans la douve qui était sèche, comme firent quelques autres, et se laisse couler dedans un créneau qu'il pensait assez large, où il dévala bien jusque aux épaules et non plus, et demeura ainsi pendu sans pouvoir s'aider des pieds ni des mains ; et les soldats du château y arrivant, le percèrent de plusieurs coups de hallebardes et le tuèrent. 

C'était un puissant jeune homme, sous vingt-cinq ans, hardi, fort et courageux, propre pour exécuter une telle entreprise si le bonheur lui en eût voulu. Un autre jeune homme de Quimper, nommé Christophe Fer, fut pris aussi et mené prisonnier, et était en danger de courir fortune de la vie par une mort honteuse, mais il se trouva tant d'intercesseurs de ses gens et alliés que le sieur de Kerservant, sa colère passée, le mit en liberté, moyennant deux ou trois cents écus et ayant quelques égards à sa jeunesse. 

Les cavaliers qui étaient demeurés un peu derrière, comme ils espéraient que leurs gens se fussent saisis de la place, entendant le tintamare, s'avancèrent à bride avalée, pensant bien que l'entreprise eût réussi. Venant par le chemin de Plonéour au pont, ils donnèrent de furie jusque à l'entrée de la ville ; mais ayant su que leurs gens étaient pris et défaits, se retirèrent par le même chemin qu'ils étaient venus, sans se hâter, sachant bien qu'il n'y avait pas forces suffisantes en la ville qui les osassent suivre. Le capitaine fit trancher la tête au Guiriec et mettre au bout d'une pique sur la muraille, et le tronc fut pendu. Il fit aussi en pendre quelques autres. 

Quant à Coroarch, chef de l'entreprise, il fut poursuivi en justice par Kerservant ; et, après un arrêt de prise de corps, le fit prendre et rendre en la prison de Rennes où il resta longtemps en grand frais et misère, jusque à arrêt définitif par lequel il fut atteint et convaincu de la trahison et attentat du Pont et, pour réparation, condamné à faire trois années de service au roi, à des amendes et aux dépens de sa partie. Il craignait bien une pire issue mais les grandes sollicitations et force dames lui sauvèrent la vie, contre l'attente de plusieurs. 

(M. le chanoine Moreau)  

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