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Lutte contre l'armée Anglo-Saxonne de CERDIC

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Sommaire

I. Débarquement de nouvelles hordes saxonnes sous les ordres de Cerdic (en 495), et sous ceux de Porta ou Port (en 501). 

II. Bataille de Natley et mort de Natan-Léod, chef suprême des Bretons (508). 

III. Débarquement de nouvelles hordes saxonnes aux ordres de Stuf et de Wihtgar (514) ; — grande victoire de Cerdic à Charford, et fondation du royaume de Wessex (519).

IV. Résistance bretonne sous la direction d'Arthur ; bataille de Basas (520-525) ; — Ghérent, chef breton de la Domnonée ; bataille de Longport. 

V. Bataille de Chardsley (527) ; — défaite des Saxons dans le pays de Gwent (vers 527) ; — conquête de l'île de Wight par Cerdic (530). 

VI. Fondation du royaume d'Essex (vers 530) ; — bandes anglo-saxonnes dans les pays de Mercie et d'Estanglie.

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Bretagne : lutte des bretons insulaires contre les anglo-saxons

I. Débarquement de nouvelles hordes saxonnes sous les ordres de Cerdic (en 495), et sous ceux de Porta ou Port (en 501). 

En effet, en 495, une flotte saxonne conduite par deux chefs des plus vaillants, Cerdic et Cynric, vint aborder sur la côte méridionale de l'île de Bretagne, en un lieu qui prit de ce fait le nom de Cerdices-Ora, c'est-à-dire Rivage de Cerdic, et que les antiquaires placent, les uns à Caldshot, anciennement Caldshore, dans la baie de Southampton (Hampshire), les autres à Charmouth, dans le sud-ouest du Dorsetshire, non loin de la frontière du comté de Devon. La première de ces deux situations est incontestablement la meilleure.

A peine débarqués, ces Saxons virent s'avancer contre eux une grosse troupe de Bretons. Rangés devant leurs navires en bataillon carré, présentant de tous côtés un front hérissé de piques et de glaives, ils attendirent. Les Bretons se jetèrent sur eux avec cette fougue inconsidérée, qui plus d'une fois déjà leur avait été funeste ; mais ils ne purent entamer cette muraille de fer. Alors ils feignirent de fuir, espérant voir les Saxons se débander à leur poursuite ; ceux-ci restèrent immobiles. Les Bretons revinrent à la charge et continuèrent ainsi le combat jusqu'au soir, mais sans pouvoir réussir à briser ce terrible bloc vivant, qui se contentait de les repousser avec cette intrépidité flegmatique, dont les Anglais de nos jours ont gardé la tradition. Le soir, les Bretons se retirèrent définitivement, et Cerdic demeura maître de la plage (Chron. Sax., A. 495 ; — H. de Hunt., lib. II, dans M.H.B., p. 710). Mais ce fut à peu près tout, et il guerroya plusieurs années sans, pour ainsi dire, gagner du terrain.

Cependant six ans plus tard (en l'an 501), il lui vint des auxiliaires. C'était une nouvelle flotte saxonne, commandée par Port et ses deux fils, Biéda et Mégla. Le lieu de leur débarquement est aujourd'hui une ville fort connue, Porsmouth, qui a conservé le nom de ce chef. Les habitants du pays s'émurent à cette nouvelle et marchèrent contre les pirates. Mais ces Bretons ne formaient point une troupe régulière, ce n'était qu'une foule indisciplinée qui attaqua sans précaution, sans ordre, et que son impétueuse audace ne put sauver du massacre. Le roi de la province était en tête : brave, jeune, et de race illustre, voyant qu'il ne pouvait vaincre, il se dévoua et périt. Et Port put faire sa jonction avec les bandes de Cerdic (Chron. Sax., A. 501 ; — H. de Hunt., lib. II, dans M.H.B., p. 711). 

 

Bretagne : lutte des bretons insulaires contre les anglo-saxons

II. Bataille de Natley et mort de Natan-Léod, chef suprême des Bretons (508). 

On ne voit pas toutefois que ces deux armées, qui ensemble présentaient assurément une grande force, aient rien fait pendant longtemps de remarquable. C'est quelles se trouvaient tenues en échec par la bravoure et le génie du chef de la ligue bretonne, Natan-Léod. Nous ne savons à peu près rien, pourtant, des victoires de ce grand prince, parce que les plus anciens chroniqueurs, Saxons d'origine, ne nous ont guère fait connaître que les succès de leurs compatriotes, en y ajoutant tout au plus les batailles douteuses, dont ceux-ci pouvaient encore s'attribuer l'honneur. Néanmoins, ce qu'ils nous disent de la chute et de la mort de Natan-Léod suffit à nous révéler la grandeur de son rôle. 

C'est à Natley (anciennement Natanleag) qu'il livra sa dernière bataille ; or Natley se trouve situé sur la baie de Southampton , non loin de Calsdhore et de Portsmouth, c'est-à-dire des deux points de débarquement de Port et de Cerdic, à peu de distance aussi de la frontière de Sussex : par où l'on voit que Natan-Léod était venu à bout de rejeter les bandes unies de Cerdic et de Port sur les deux royaumes saxons déjà fondés, et se trouvait en position de menacer ces royaumes mêmes. Aussi les Saxons de Kent et de Sussex s'allièrent-ils à Cerdic pour le combattre ; et pour le vaincre il fallut l'effort commun de tous les ennemis de la Bretagne. 

L'armée saxonne combinée était sous la conduite de Cerdic. Il donna le commandement de l'aile gauche à son fils Cynric, prit pour lui celui de l'aile droite qui était la plus forte, et la bataille commença. Natan-Léod remarqua sans peine la supériorité du corps de Cerdic sur celui de Cynric, et dirigea aussitôt contre le premier le fort de son attaque, pensant, s'il en venait à bout, avoir aisément raison du reste. Ce calcul, tout à la fois habile et vaillant, ne réussit que trop. L'aile de Cerdic fut taillée en pièces, mise en pleine déroute. Mais par malheur les Bretons se débandèrent à la poursuite des fuyards. Cynric le vit, se précipita sur eux avec le reste de l'armée saxonne, les atteignit en désordre et en fit un grand massacre. Cinq mille Bretons restèrent sur le champ de bataille, leur roi en tête  (Chron. Sax., A. 508 ; — H. de Hunt., ibid). 

Cette grande défaite des Bretons et surtout la mort de Natan-Léod (en l'an 508) livrèrent encore une fois la Bretagne sans défense à la férocité des Saxons, qui la pillèrent, saccagèrent, incendièrent, épouvantèrent, comme ils l'avaient déjà fait trop souvent, hélas ! depuis soixante ans (Note : « Anno 511, Saxones qui inhabitant Britanniam... convenerunt in unum ….. Perlustrantes itaque quasque provincias, cum neminem sibi resistere cognovissent,  totam fere insulam a mari usque ad mare devastare cœperunt ». Mathieu de Westminster. Flores Historici). 

 

Bretagne : lutte des bretons insulaires contre les anglo-saxons

III. Débarquement de nouvelles hordes saxonnes aux ordres de Stuf et de Wihtgar (514) ; — grande victoire de Cerdic à Charford, et fondation du royaume de Wessex (519).

Cerdic appela auprès de lui, pour partager cette aubaine, les membres de sa famille restés sur le continent. Deux de ses neveux, Stuf et Whitgar, lui amenèrent de nouvelles hordes et vinrent, en 514, débarquer, comme leur oncle vingt ans plus tôt, à Cerdices-Ora. Les Bretons avaient déjà repris courage et recommencé la guerre. Ils accoururent aussitôt combattre ces nouveaux venus. Ils semblent même s'être efforcés d'éviter leurs fautes passées et de discipliner cette fougue héroïque mais insensée, plus fatale pour eux que le fer saxon. Du moins un ancien auteur assure qu'ils formèrent leurs troupes en très-bel ordre et suivant les meilleures règles de l'art militaire. « Une partie de l'armée bretonne, — ajoute-t-il, traduisant sans aucun doute quelque vieux chant bardique — une partie de l'armée bretonne s'avançait par les hauteurs, une autre par les vallées. Et comme ils marchaient ainsi avec adresse et prudence, le soleil levant parut ; ses rayons vinrent frapper les boucliers dorés des Bretons, les collines en resplendirent, et tout l'air environnant brilla d'une lumière plus vive. Les Saxons à cette vue tremblèrent, et s'avancèrent au combat la crainte au coeur. Mais quand ces deux armées intrépides en furent venues à se briser l'une contre l'autre, la vaillance des Bretons s'évanouit soudain par la volonté de Dieu qui les avait condamnés, et leurs ennemis obtinrent une victoire éclatante » (H. de Hunt ; - Chron. Sax., A. 514). 

Les bandes de Stuf et de Wihtgar, tout comme celles de Port, vinrent grossir aussitôt l'armée de Cerdic, qui se vit dès lors à la tête de forces énormes et en état d'accomplir sur les Bretons des conquêtes plus sérieuses que par le passé [« Et adquisierunt duces prœdicti (Stuf et Wihtgar) regiones non paucas, et per eos fortitudo Cerdici terribilis facta est, pertransiitque terram in fortitudine gravi ». H. de Hunt., ibid].Toutefois avant d'asseoir sa domination d'une manière assez solide pour mériter le titre de roi, il lui fallut encore guerroyer pendant cinq années entières. 

Au bout de ce temps, une grande bataille fut livrée sur les bords de la petite rivière d'Avon, tout près du point où elle passe aujourd'hui du Wiltshire dans le Hampshire. L'armée de Cerdic était très-nombreuse ; mais les Bretons avaient là l'élite de leurs guerriers. La mêlée fut des plus rudes. Le combat dura toute la journée. Vers le soir le nombre l'emporta, la victoire se déclara pour Cerdic, et il y eut un grand carnage de Bretons. La nuit toutefois y mit fin et sauva une bonne partie de leur armée. Mais à dater de ce moment les précédentes conquêtes de Cerdic furent assurées ; le royaume de West-Sex, c'est-à-dire des Saxons de l'Ouest, fut fondé, et ce chef en fut le premier souverain. Le théâtre de cette bataille mémorable, sur la rive droite de l'Avon, s'appelle aujourd'hui Charford, contraction de Cerdices-Ford, ou Gué de Cerdic, nom donné à cette place en souvenir du vainqueur de 519 (Chron. Sax., A. 519 – H. de Hunt., ibid). 

 

Bretagne : lutte des bretons insulaires contre les anglo-saxons

IV. Résistance bretonne sous la direction d'Arthur ; bataille de Basas (520-525) ; — Ghérent, chef breton de la Domnonée ; bataille de Longport. 

Jusqu'ici, remarquons-le, l'invasion saxonne partie de la pointe sud-est de l'île de Bretagne, s'était constamment dirigée vers l'ouest en suivant la côte méridionale. Telle avait été successivement la direction d'Hengist, d'Ella, et enfin celle de Cerdic. Ce dernier, après sa grande victoire de Charford, ne put donc faire autrement que de suivre l'impulsion donnée, et de tendre à développer sa conquête en s'avançant de plus en plus vers cette pointe occidentale de l'île comprise entre la mer britannique et le golfe de la Saverne. Mais il n'y réussit pas selon son attente. Les tribus bretonnes de cette région, tant de fois déjà ravagées par les courses terribles des Saxons, avaient compris que le péril devenait plus sérieux que jamais, et formé entre elles une ligue compacte, dont le chef suprême était un de leurs petits rois, qui se trouva un héros. Ce roi n'est autre, en effet, que le fameux Arthur, dont nous ne parlerons ici qu'en passant, mais pour y revenir bientôt avec détail. On dit, entre autres, qu'Arthur battit les Saxons en un lieu appelé Basas, qui doit répondre à la petite ville actuelle de Basing ou Basingstoke, dans le Hampshire, au nord-ouest de Charford (Nennius Hist. Brit. $ 56 édit. St., LXIV G. et P. Voir dans l'édition de Stevenson, p. 48, note 7). Si cette situation était certaine, Arthur aurait eu la gloire, non-seulement de contenir Cerdic, mais encore de le refouler vers l'est. 

Il est sûr du moins qu'il l'empêcha de faire aucun progrès sérieux à l'ouest de l'Avon, et qu'il fut énergiquement secondé dans cette tâche ardue par tous les petits rois bretons du sud de la Saverne, entre lesquels les bardes du VIème siècle distinguent particulièrement le vaillant Ghérent, fils d'Erbin, chef d'une des tribus domnonéennes [Note : Les Domnonéens (Dumnonii, Damnonii) formaient, dés l'époque romaine, une vaste peuplade bretonne, mentionnée par Solin et par Ptolémée, occupant le territoire des comtés actuels de Cornwall, de Devon, et partie de celui de Somerset]. « Quand Ghérent naquit — dit l'un, les portes du ciel s'ouvrirent ; le Christ accorda ce qu'on lui demandait : temps heureux, gloire à la Bretagne ! — Que chacun célèbre le rouge Ghérent, le chef d'armée, l'ennemi des Saxons, l'ami des Saints ! » (Liwarch-Hen, Chant de mort de Ghèrent, dans M. de la Villemarqué, Bardes bretons du VIème siècle, p. 4-5). 

Et un autre, s'adressant à Ghérent même, après sa mort : « Oui, s'écrie-t-il, tu étais un généreux prince ! Sans cesse ta renommée grandit ; tu étais une ancre de salut dans le conflit, un aigle indomptable, la sauvegarde de tes guerriers, leur soutien dans la plus grande chaleur de la bataille. Tu étais beau ; tu devançais les chevaux les plus rapides dans la carrière ; et tu avais bu sobrement le vin de la coupe » (Bardes bretons, p. 370-373). 

Ghérent périt en combattant les Saxons, en un lieu appelé Longport, aujourd'hui la petite ville de Langport sur la rivière de Parret, Somersetshire. Là fut livrée l'une des plus sanglantes batailles de cette guerre, et qui n'eut d'ailleurs, ce semble, qu'un résultat douteux. Voici ce qu'en dit le célèbre barde Liwarch-Hen, contemporain, peut être même témoin oculaire : « Devant Ghérent, fléau de l'ennemi, j'ai vu les chevaux blancs d'écume, et, après le cri de guerre, un furieux torrent de guerriers. A Longport, j'ai vu le carnage, et des cadavres en grand nombre, et des hommes rouges de sang devant l'assaut de Ghérent. — A Longport, j'ai vu les éperons d'hommes qui ne reculaient point devant la peur des lances, et qui avaient bu du vin dans des verres brillants. — A Longport, j'ai vu une épaisse vapeur,.... sur les rochers les corbeaux faisaient festin, et, sur le sourcil du général en chef, une tache rouge. — A Longport, j'ai vu un conflit tumultueux d'hommes réunis, du sang jusqu'aux deux genoux, devant l'assaut du grand fils d'Erbin. — A Longport a été tué Ghérent, le vaillant guerrier du pays boisé de la Domnonée, mais en tuant lui-même ceux-là qui le tuèrent. — A Longport furent tués à Arthur de vaillants soldats qui tranchaient avec l'acier, à Arthur le généralissime (amperoder), le conducteur des travaux de la guerre » (Bardes bretons, p. 7-11). 

On ne me reprochera pas sans doute l'étendue de cette citation ; elle peint à la fois le génie de l'époque et la nature de cette guerre. Aussi ne me ferai-je point scrupule, dans le cours de ce récit, de mettre à contribution plus d'une fois encore nos bardes du VIème siècle. 

 

Bretagne : lutte des bretons insulaires contre les anglo-saxons

V. Bataille de Chardsley (527) ; — défaite des Saxons dans le pays de Gwent (vers 527) ; — conquête de l'île de Wight par Cerdic (530). 

Rebuté par la résistance qu'il trouvait du côté de l'ouest, Cerdic se dirigea vers le nord et paraît y avoir fait des progrès rapides. En 527, nous le voyons parvenu au nord de la Tamise, à Chardsley — primitivement Cerdices-Leag, ou Champ de Cerdic, — lieu sis dans le comté actuel de Buckingham, sur la petite rivière de Tame, un peu au nord de la ligne qui marqua la frontière définitive du royaume de Wessex. Là les Bretons lui livrèrent une grande bataille, extrêmement sanglante de part et d'autre, où la victoire longtemps disputée demeura indécise, mais qui, ayant fort affaibli Cerdic, le contraignit de s'arrêter  (Chron. Sax., A 527 ; H. de Hunt. Lib. II dans M. H. B. p 712. Il écrit par erreur en ce lieu Certicesford au lieu de Certicesleag). 

Dans le même temps, ou à peu près, des bandes détachées de son armée s'efforçaient de pénétrer dans cette région reculée de l'île de Bretagne abritée par la Saverne, qui formait pour les Romains la province appelée Bretagne deuxième, et qui aujourd'hui, sous le nom de Cambrie ou pays de Galles, est précisément le dernier asile de la race bretonne en Angleterre. Le petit royaume de Gwent — répondant au Monmouthshire actuel — était par sa situation le premier exposé aux coups des envahisseurs. C'est aussi à lui qu'ils s'adressèrent, et voici, selon les chartes antiques de l'église épiscopale de Landaff, comment ils y furent reçus. 

« Pendant que le roi Idon gouvernait le pays de Gwent, les Saxons étant venus dévaster cette terre, ce prince marcha lui-même contre eux à la tête de son armée. En chemin il rencontra saint Télo, évêque de Landaff, qui demeurait alors avec ses clercs au manoir de Lanngarth ; il le conjura, lui et ses prêtres, de prier Dieu pour le succès de son expédition. Saint Télo vint donc avec le roi jusqu'à une colline qui se trouve au centre du canton de Cressinic, près la rivière de Trodi, et là, s'étant arrêté, il supplia le Tout-Puissant de secourir son peuple opprimé. Dieu exauça ses prières. Le roi Idon se couvrit de gloire, mit en fuite les Saxons, revint chargé de butin, et donna à saint Télo trois mesures de terre s sises autour de la colline où il avait prié » (Liber Landavensis, p. 116 et 361).

Ainsi l'Eglise s'associait énergiquement à l'oeuvre de la résistance nationale. Les guerriers combattaient avec le glaive, les prêtres avec la prière. En face d'ennemis sauvages, loin de fuir ou de se cacher, ils levaient les mains au ciel pour le salut de la nation, offrant sans peur leur poitrine au feu saxon, et prêts à tomber avec leurs frères plutôt que de vivre sans eux. D'autres faits et d'autres exemples plus éclatants confirmeront ce noble rôle de l'Eglise bretonne au milieu de cette lutte fatale ; j'ai voulu citer celui-ci, parce que — dans l'ordre des documents écrits — c'est le premier qui s'offre. 

L'échec des Saxons dans le pays de Gwent, joint aux pertes qu'ils avaient faites à Chardsley, contreignit Cerdic à s'arrêter. Il rebroussa chemin et redescendit vers le sud, où il s'occupa d'affermir ses premières conquêtes. On ne voit point d'ailleurs qu'il ait tenté de les étendre, si ce n'est qu'en 530 il s'empara de l'île de Wight, restée jusqu'à ce moment aux mains des Bretons, bien qu'elle ferme, en quelque sorte, cette baie de Southampton, où Cerdic était venu aborder en 495. Cette conquête fut le prix d'une rude bataille, très-meurtrière pour les Bretons. Cerdic donna l'île à ses deux neveux, Stuf et Wihtgar, en récompense des services qu'il en avait reçus ; et dans le lieu même où s'était livrée la bataille, le second de ces chefs fonda une ville, appelée de son nom Wihtgarabyrig, c'est-à-dire château de Wihtgar ; c'est aujourd'hui Caresbrook (Chron. Sax., A 530 ; H. de Hunt, Ibid). 

Ce fut là le dernier exploit de Cerdic, qui mourut quatre ans après, en 534 (Chron. Sax., A 534). 

 

Bretagne : lutte des bretons insulaires contre les anglo-saxons

VI. Fondation du royaume d'Essex (vers 530) ; — bandes anglo-saxonnes dans les pays de Mercie et d'Estanglie.

Cependant, environ l'an 530, un nouveau royaume saxon, mais beaucoup moins étendu et moins important que Wessex, s'était fondé au nord de celui de Kent, entre la Tamise et le Stoure. On l'appela royaume d'Est-Sex, c'est-à-dire des Saxons de l'Est, et son premier roi fut Erkenwin : son territoire répondait aux comtés actuels d'Essex et de Midlesex. On ignore d'ailleurs les événements qui amenèrent la création de ce nouveau royaume (H. de Hunt. lib. II, dans M. H. B., p. 712). 

Entre la bataille de Chardsley et la conquête de l'île de Wight, c'est-à-dire de 527 à 530, les anciens chroniqueurs placent l'arrivée de nombreuses bandes d'Angles ou Anglo-Saxons dans les contrées de la Bretagne qui formèrent plus tard les deux royaumes de Mercie et d'Estanglie (H. de Hunt. lib. II, dans M. H. B., p. 712), — celui-ci compris entre le Stoure et le golfe profond qui sépare les comtés actuels de Lincoln et de Norfolk, — celui-là, vaste région purement méditerranée, s'étendant de la Tamise à l'Humber. 

La résistance opposée par les Bretons à ces dernières hordes fut aussi longue qu'énergique ; plus d'un demi-siècle passa avant que les envahisseurs puissent accomplir la conquête de ces régions, et l'assurer définitivement par la fondation de ces deux royaumes. Celui d'Estanglie ne fut fondé que vers 575 (de 571 à 577, selon Henri de Huntingdon, M. H. B., p. 714) et celui de Mercie de 584 à 591. Mais il faut le dire tout de suite, les circonstances de cette lutte si opiniâtre sont restées presque entièrement inconnues. L'histoire éclaire encore d'une lumière sinon complète, du moins assez caractéristique, les guerres des Bretons contre les Anglo-Saxons dans le sud, l'ouest, et même, comme nous le verrons plus loin, dans le nord de la Bretagne. Mais sur tous les événements de cette lutte accomplis dans la région comprise entre l'Humber, la Tamise, la Saverne, la mer du Nord, elle est à peu de chose près complètement muette. C'est une lacune importante à signaler mais irrémédiable, dont il faut par conséquent, quoique à regret, prendre son parti.

(M. Arthur de La Borderie - 1881)  

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