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LES GRANDS AMIRAUX FRANCAIS

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GRANDS AMIRAUX FRANÇAIS AYANT COMMANDÉ EN CHEF DEVANT L’ENNEMI.

 

I. — D'ESTRÉES.

Jean, duc d'Estrées, naquit en 1624, à Estrées, en Artois. Il entra d'abord dans l'armée de terre et arriva rapidement aux grades supérieurs ; il servit successivement sous Condé et sous Turenne, et, en 1649, nommé maréchal-de-camp, il participa aux guerres de la Fronde. En 1655, il était nommé lieutenant-général ; c'est alors qu'il abandonna l'armée pour la flotte. En 1669, il fut élevé à la dignité de vice-amiral du Ponant, et trois ans plus tard (1672), lors de la guerre de Hollande, il fut nommé commandant en chef de l'escadre française destinée à rallier la flotte anglaise sous les ordres du duc d'York. Le vice-amiral d'Estrées assista au trois batailles de Solebay (1672), de Walcheren et du Texel (1673), mais commandant toujours en sous-ordre.

En 1676, il fut nommé commandant en chef de l'expédition projetée contre les colonies hollandaises de l'Amérique. Il partit de Brest, à la tête de 7 vaisseaux et 3 frégates, et, deux mois après son départ, il mouillait devant Cayenne, débarquait ses compagnies d'infanterie, et s'emparait de la ville. De là, il fit voile vers l'île de Tabago qu'il trouva défendue par une forte escadre hollandaise aux ordres du vice-amiral Binken. Néanmoins, d'Estrées s'engagea dans la rade de l'île et le combat eut lieu immédiatement. Cet engagement fut très meurtrier et aussi désastreux pour les Hollandais que pour les Français ; les premiers y perdirent 8 vaisseaux ; de notre côté, nous eûmes plusieurs vaisseaux brûlés. Après cet insuccès, le vice-amiral d'Estrées revint en France, pour repartir de nouveau pour Tabago, qu'il prit cette fois (12 décembre 1677).

En 1681, il fut créé maréchal de France. D'Estrées mourut à Paris, le 19 mai 1707.

II. — DUQUESNE.

Abraham Duquesne naquit dans les environs de Dieppe vers 1610. Il entra très jeune dans la marine et s'éleva de simple pilotin au grade de capitaine, dans la marine marchande. En 1636, il prit du service dans la marine de l'Etat et reçut le commandement du Neptune, brick de 8 canons. En 1639, monté sur le vaisseau le Grand-Saint-Jean, il assista au combat de Saint-Oigne et fut blessé au menton pendant l'action. Quelques années après, ne trouvant pas le moyen de se rendre utile à sa patrie, il servit dans la marine suédoise avec le titre de major général, et où il se distingua.

En 1647, il fut nommé chef d'escadre par le gouvernement français. En 1650, étant à la tête d'une division de plusieurs vaisseaux de ligne, il rencontra une escadre anglaise qui voulut le forcer de baisser pavillon devant les couleurs britanniques, mais Duquesne s'y refusa avec hauteur, et un combat s'ensuivit où tout l'avantage fut pour les Français. L'année suivante (1651), il se maria avec Gabrielle de Bernières, et acheta la seigneurie de Mores, en Bretagne.

Mazarin étant mort en 1661, Colbert, son successeur, qui avait une haute estime pour Duquesne, lui donna le commandement en sous-ordre d'une importante flotte commandée par le vice-amiral de Nuchèze. A la bataille de Solebay (1672), Duquesne commandait la division du centre de l'escadre française, et en 1674, il recevait le commandement en chef de l'escadre de la Méditerranée. Le 8 janvier 1676, s'engageait la fameuse de Stromboli, où Duquesne sut triompher du plus grand marin de l'époque : Ruyter. Le 22 avril de la même année, Duquesne remporta une nouvelle victoire à Agosta, victoire qui coûta la vie à Ruyter Le 28 mai, à la bataille de Palerme, il ne commanda qu'en sous-ordre, le lieutenant-général de Vivonne s'étant emparé du commandement en chef de la flotte française. En récompense des éminents services qu'il avait rendus dans cette campagne de Sicile, Duquesne fut promu lieutenant-général des armées navales : il y avait longtemps qu'il méritait cette faveur.

Les brigandages des pirates d'Alger devenant de plus en plus insupportables, Louis XIV donna à Duquesne le commandement d'une flotte de 11 vaisseaux de ligne, 5 galiotes, 2 brûlots et 15 galères, avec ordre de bombarder le port et la ville (13 juillet 1682). Deux ans plus tard, il dut faire subir le même sort à la ville de Gênes, qui avait injurié le roi de France, et il s'acquitta avec succès de sa mission. Lors de la révocation de l'édit de Nantes, l'illustre marin, quoique huguenot, fut un des seuls qui furent exceptés du bannissement. Enfin, le 1er février 1688, l'année de la révolution d'Angleterre, il mourait d'une attaque d'apoplexie, à l'âge de 78 ans.
On considère Duquesne, avec raison, comme le plus grand homme de mer que la France ait produit jusqu'à ce jour.

III. — VIVONNE.

Louis- Victor de Rochechouart, duc de Mortemart et de Vivonne, naquit le 15 août 1636. Il était le frère de Madame de Montespan.

Entré d'abord dans l'armée de terre, il fit plusieurs campagnes sous les ordres de Turenne, et fut nommé maréchal-de-camp en 1663. En 1668, ayant pris du service dans la marine, il fut envoyé a Alger, et en 1669, après l'expédition de Candie, à laquelle il avait pris part comme commandant des galères du roi, il fut nommé lieutenant-général des galères.

En 1675, nommé en même temps vice-roi de Sicile et commandant en chef de l'escadre de la Méditerranée, il partit de Toulon pour aller prendre possession de ses nouvelles fonctions ; chemin faisant, il rencontra une flotte espagnole qui voulut lui barrer le passage ; mais il la força à la retraite et entra sans encombre dans Messine, sa résidence. Quelques mois plus tard, il recevait son bâton de maréchal de France.

Le 28 mai 1676, c'est lui qui commandait la flotte française devant Palerme, et il remporta dans cette journée une victoire éclatante sur les Hollando-Espagnols, grâce surtout à l'habileté de son lieutenant, Duquesne. Sa conduite dans Messine ayant soulevé des murmures de révolte parmi le peuple, il demanda son rappel et revint en France en 1678. Vivonne mourut le 15 septembre 1688, la même année que Duquesne.

IV. — CHATEAU-RENAULT.

François Louis Rousselet, marquis de Château-Renault, naquit en 1637. Il servit d'abord dans l'armée de terre et assista, sous les ordres de Turenne, à la bataille des Dunes et au siège de Dunkerque. Puis il entra dans la marine comme enseigne de vaisseau, et en 1671, il était promu capitaine de vaisseau. En 1673, nommé chef d'escadre, il fut chargé de convoyer avec 5 vaisseaux une flottille marchande et rencontra, à la hauteur du cap Lizard, une flotte de commerce hollandaise, escortée par 8 vaisseaux de guerre ; malgré son infériorité, il n'hésita pas à attaquer les ennemis qui s'enfuirent après quelques heures de lutte, laissant le brave Château-Renault maître du champ de bataille. En 1677, on lui donna le commandement d'une division destinée à s'opposer au passage d'une escadre hollando-espagnole conduite par le vice-amiral Evertzen, marin de grande réputation. Les deux escadres se rencontrèrent près du détroit de Gibraltar, et l'amiral français prit ses dispositions avec tant d'habileté, qu'il écrasa la flotte alliée.

En 1689, le chef d'escadre de Château-Renault, fut élevé à la dignité de lieutenant-général des armées navales, et le 9 mai de même année, il était mis à la tête d'une flotte de 24 vaisseaux de ligne, 2 frégates et 6 brûlots, destinée à assurer les droits de Jacques II au trône d'Angleterre et à transporter un corps d'armée français en Irlande. L'armée navale mouilla deux jours après son départ dans la baie de Bantry, et Château-Renault s'occupa de débarquer ses troupes de terre. C'est alors que la flotte anglaise, commandée par l'amiral Herbert, vint l'attaquer. Le chef de la flotte française donna encore, dans cette circonstance, la preuve de son génie et de son habileté, et sans la jalousie de ses 2 chefs d'escadre : Gabaret et Forant, il eût complètement anéanti la marine britannique.

En 1690, à la bataille de Béveziers, Château-Renault commandait l'avant-garde française et contribua puissamment à la victoire. En 1693, il aida encore Tourville à capturer et à détruire l'immense flotte marchande anglo-hollandaise, à Lagos, et fut, pour cette raison, nommé grand-croix de l'ordre royal de Saint-Louis.

Philippe V, roi d'Espagne, et petit-fils du roi de France, ayant besoin d'un marin habile et énergique pour commander sa flotte, demanda à Louis XIV de lui prêter un officier général de son armée navale, et Château-Renault fut choisi : Philippe V ne pouvait mieux tomber. En 1701, le nouvel amiral espagnol reçut du gouvernement français la charge de vice-amiral laissée vacante par la mort de Tourville, et l'année suivante, il était nommé au commandement d'une flotte franco-espagnole chargée de convoyer une importante flottille de galions rapportant des lingots d'or du nouveau monde. Arrivé sur les côtes d'Espagne, il apprit que les Anglais et les Hollandais avaient envoyé à sa poursuite une nombreuse armée navale, comprenant 50 vaisseaux de ligne, et il dut se réfugier précipitamment dans la rade de Vigo. Les ennemis y pénétrèrent à leur tour, et Château-Renault, à la tête de ses 18 vaisseaux, soutint pendant plusieurs heures un combat inégal dans lequel le nombre finit par l'emporter. L'amiral français, craignant de voir tomber entre les mains des Anglais les riches galions chargés d'or, hissa le signal d'incendier tous ces bâtiments. La journée de Vigo était une défaite évidemment pour les Franco-Espagnols, mais tout autre que Château-Renault aurait perdu la tête dans la mêlée et aurait laissé les ennemis s'emparer d'une immense somme d'argent ; lui, du moins, s'il n'avait pu sauver ses galions, avait empêché les Anglais d'en profiter.

Aucun reproche ne lui fut adressé sur l'issue de cette malheureuse affaire, lorsqu'il revint à la cour ; au contraire, on déclara qu'il avait bien mérité de la patrie et il fut nommé maréchal de France, le 14 janvier 1703. C'est assez dire en quelle estime le tenaient Louis XIV et son ministre, Pontchartrain. L'année suivante, il reçut la charge de gouverneur de la Bretagne qu'il conserva jusqu'à sa mort, arrivée en 1716.

Le nom de Château-Renault est malheureusement trop ignoré aujourd'hui ; il fut l'un des plus heureux et des plus habiles marins de son époque ; avec Tourville, c'est certainement lui qui vient immédiatement après le grand Duquesne comme stratégiste, et nous ne pouvons terminer là cette rapide biographie sans rapporter un fragment du portrait que traça de lui Saint-Simon : « Château-Renault, a-t-il écrit, fut le plus heureux des. hommes de mer de son temps, où il gagna des combats et des batailles, et où il exécuta force entreprises difficiles, et fit beaucoup de belles actions …. C'était un petit homme goussant et blondasse qui paraissait hébété et qui ne trompait guère. On ne comprenait pas à le voir qu'il eût pu jamais être bon à rien. Il n'y avait pas moyen de lui parler, encore moins de l'écouter, hors quelques récits d'actions de mer. D'ailleurs bonhomme et honnête homme ».

V. — TOURVILLE.

Anne-Hilarion de Cotentin, chevalier de Tourville, naquit à Paris, le 22 mai 1642. A 19 ans, il entra dans la Marine, fit ses premières armes sur la frégate la Vigilante, et se distingua tout particulièrement dans un combat que ce bâtiment soutint contre des pirates algériens. En 1666, Tourville rentrait en France où Louis XIV lui décerna le grade de capitaine de vaisseau.

En 1672, à la bataille de Solebay, ainsi qu'aux batailles de Walcheren et du Texel (1673), il commandait un vaisseau ; en 1675, il était promu chef d'escadre et, lors de la campagne de Sicile, il assista aux trois engagements qui furent livrés contre les flottes hollandaise et espagnole.

Nommé lieutenant-général des armées navales le 1er janvier 1682, Tourville assista, sous les ordres de Duquesne, aux bombardements d'Alger et de Gênes. En 1689, il fut nommé vice-amiral du Levant. En 1690, à la bataille de Béveziers ou Beachy-Head, il était commandant en chef des forces navales françaises ; sa flotte se composait de 72 vaisseaux de ligne, 18 brûlots et 5 frégates. Il disposa son armée avec une telle habileté que les vaisseaux anglais et hollandais furent pour la plupart écrasés ou obligés de se rendre.

A la bataille de la Hague (1692), Tourville, à la tête de 45 vaisseaux seulement, lutta avec succès, pendant une journée entière, contre une flotte de 97 vaisseaux anglais et hollandais. Cet engagement avait donc été tout à notre honneur ; mais à quelques jours de là, la marine française subit un grand désastre à la Hougue, où 12 vaisseaux qui s'y étaient réfugiés furent incendiés par les ennemis.

Pour récompenser l'illustre vice-amiral de l'héroïsme qu'il avait montré dans cette campagne, on le nomma maréchal de France le 28 mars 1693, et peu de temps après, on le mettait à la tête d'une nombreuse flotte destinée à arrêter un convoi marchand anglo-hollandais à destination de Smyrne. Les Français rencontrèrent cette flottille près de Lagos, sur les côtes de Portugal et l'attaquèrent immédiatement ; Tourville prit ainsi sa revanche de la funeste affaire de la Hougue, en capturant ou brûlant une centaine de navires de commerce ennemis.

Après la paix de Ryswick (1697), l'amiral de Tourville rentra dans la vie privée. Il mourut à Paris le 28 mai 1701, à l'âge de 59 ans.

VI. — COMTE DE TOULOUSE.

Louis-Alexandre de Bourbon, comte de Toulouse, fils de Louis XIV et de Mme de Montespan, naquit à Versailles, le 16 juin 1678. En 1682, à l'âge de 5 ans, on lui conféra la dignité de grand-amiral. Après s'être distingué, comme maréchal de camp et lieutenant-général, dans l'armée de terre, il fut, en 1704, nommé au commandement en chef de la flotte de Brest.

Parti de ce port pour aller secourir Gibraltar, il rallia l'armée navale de Toulon et peu après rencontrait une flotte anglaise aux ordres de l'amiral Rooke. Il fut assez heureux pour remporter, sinon la victoire, du moins l'avantage sur un marin justement réputé.

Il quitta ensuite le service et rentra dans la vie privée. Il mourut dans les environs de Rambouillet en 1737.

VII. — DE COURT.

La Bruyère de Court naquit en 1665 environ et entra dans la marine en 1684. Nommé successivement garde-marine, enseigne de vaisseau (1686), il était lieutenant de vaisseau à la bataille de Béveziers (1689). En 1693, étant toujours dans ce grade, il reçut le commandement d'un vaisseau et prit part à l'affaire du cap Saint-Vincent ; en 1695, il fut nommé capitaine de vaisseau et fit partie de l'escadre aux ordres de Jean-Bart. Il fut promu chef d'escadre en 1715 et lieutenant-général des armées navales en 1725. En 1744, c'est lui qui commandait en chef la flotte franco-espagnole, à la bataille de Toulon. En 1750, il fut élevé à la dignité de vice-amiral. Deux ans plus tard, il mourait dans sa 87ème année.

VIII. — LA GALISSONNIÈRE.

Roland-Michel Barrin, marquis de la Galissonnière, naquit à Rochefort, le 11 novembre 1693. Il entra dans la marine en 1710, et en 1738, il était nommé capitaine de vaisseau. En 1745, il fut nommé gouverneur du Canada et réussit par son habile administration à assurer la tranquillité à l'intérieur de la colonie et à repousser les Anglais. Aussi, à son retour en France, en 1749, il fut promu au grade de chef d'escadre. Nommé lieutenant général en 1756, il fut mis à la tête d'une escadre chargée de protéger le débarquement à Minorque d'un corps d'armée français commandé par le duc de Richelieu. Pendant le débarquement, on aperçut une escadre anglaise, sous les ordres de l'amiral Byng, qui forçait de voiles pour venir s'opposer à la descente des Français. La Galissonnière prit ses dispositions pour attaquer Byng, et après une lutte de quatre heures, ce dernier, vaincu, s'enfuyait en désordre. Le marquis de la Galissonnière ne survécut pas longtemps à sa victoire ; il mourait quelque temps après à Nemours, le 26 octobre 1756.

IX. — D'ORVILLIERS.

Louis Guillouet, comte d'Orvilliers, naquit en 1708, à Moulins. Il entra dans la Marine comme garde de pavillon en 1728. En 1741, il fut nommé enseigne de vaisseau et passa capitaine de vaisseau en 1754. En 1756, à la bataille de Minorque, il commandait la frégate la Nymphe.

En 1764, il était promu chef d'escadre, et en 1776, il était élevé à la dignité de lieutenant-général des armées navales. Au commencement de la guerre de l'indépendance des Etats-Unis, le comte d'Orvilliers fut choisi comme commandant en chef de la flotte française de Brest ; cette flotte rencontra celle de l'amiral anglais Keppel, non loin de l'île d'Ouessant, et la bataille s'engagea immédiatement. D'Orvilliers eût pu anéantir l'armée navale britannique sans l'inexpérience du duc de Chartres, qui commandait l'arrière-garde.

En 1779, il fut encore mis à la tête d'une flotte française qui devait rallier la flotte espagnole aux ordres de l'amiral don Luis de Cordova, pour attaquer de concert l'armée de l'amiral Hardy ; mais cette campagne n'aboutit à aucun résultat important, suite d'une épidémie de scorbut qui s'était déclarée à bord des vaisseaux de la flotte alliée, L'amiral d'Orvilliers mourut en 1792.

X. — D'ESTAING.

Charles Hector, comte d'Estaing, naquit en 1729. Il entra d'abord dans l'armée de terre, et devint successivement colonel et brigadier. En 1763, il prit du service dans la marine et fut nommé lieutenant-général des armées navales la même année. Quelques années plus tard, il était élevé à la dignité de vice-amiral, et recevait le commandement d'une flotte de 12 vaisseaux et 4 frégates, chargés d'aller porter des secours en hommes et en munitions aux Etats-Unis qui luttaient pour leur indépendance.

Le vice-amiral d'Estaing croisa successivement devant les côtes d'Amérique et dans la mer des Antilles ; les chefs d'escadre de Grasse et de Lamotte-Picquet lui ayant apporté des renforts, il se vit à la tête d'une flotte de 24 vaisseaux de ligne et de plusieurs frégates. Le 30 juin 1779, il tenta un coup de main sur l'île de Grenade et prit la ville d'assaut. Deux jours après, il aperçut une flotte anglaise de 21 vaisseaux, sous les ordres de l'amiral Byron, qui venait secourir l'île. D'Estaing engagea immédiatement la bataille et fut victorieux. Il retourna alors sur les côtes d'Amérique, et mit le siège devant Savannah qui était occupée par les Anglais, mais il ne réussit pas à s'emparer de la ville et revint en France.

Le comte d'Estaing fut nommé amiral de France le 1er janvier 1792. Lors des troubles de 1793, il fut arrêté comme noble et suspect et jeté en prison. Condamné à mort par le tribunal révolutionnaire, l'amiral d'Estaing fut exécuté le 28 avril 1794.

XI. — DE GUICHEN.

Luc Urbain du Bouexic, comte de Guichen, naquit à Fougères, en Bretagne, le 21 juin 1712. Il entra dans la marine à l'âge 16 ans, et devint successivement garde-marine (1730), enseigne de vaisseau (1735) et lieutenant de vaisseau (1746). Dans ce grade, il commanda les frégates la Galathée, la Sirène et dirigea en second le vaisseau l'Opiniâtre. En 1756, il fut fait capitaine de vaisseau. Promu au grade de chef d'escadre en 1778, il assista, comme chef d'une division française, à la bataille d'Ouessant, livrée par le comte d'Orvilliers à l'amiral anglais Keppel ; et, lorsque le lieutenant général du Chaffault eut été mis hors de combat, ce fut lui qui le remplaça comme commandant particulier de l'avant-garde française.

En 1779, il commandait une des escadres de la flotte combinée franco-espagnole, placée sous le commandement suprême du comte d'Orvilliers. Nommé lieutenant-général des armées navales en 1780, il reçut le commandement d'une flotte qui allait ravitailler les Antilles. A la hauteur de la Dominique (Petites-Antilles), l'amiral de Guichen aperçut une flotte anglaise forte de 21 vaisseaux et commandée par l'amiral Rodney. Après de longues manœuvres de part et d'autre, le comte de Guichen réussit à se placer au vent de la ligne ennemie, et c'est cette habile disposition qui lui valut le léger avantage qu'il remporta sur le savant Rodney.

Le 8 décembre 1781, le comte de Guichen, qui était revenu en France, quitta de nouveau le continent pour se mettre à la tête d'une escadre chargée de convoyer une flotte de transports. Partie de Brest, cette armée fut aperçue quelques jours après aux environs d'Ouessant par une division anglaise de 13 vaisseaux, aux ordres du contre-amiral Kempenfeldt. Les Anglais donnèrent la chasse aux bâtiments de transport qui, par une négligence incroyable, étaient placés au vent des vaisseaux de guerre et s'en emparèrent. Guichen dut alors revenir à Brest pour rendre compte de sa conduite.

Malgré cette défaite, on le nomma au commandement d'une flotte destinée à rallier une escadre espagnole aux ordres de don Luis de Cordova. Cette armée combinée, qui devait bombarder Gibraltar, n'arriva à aucun résultat satisfaisant, par suite de la mésintelligence qui éclata entre les alliés.

Le lieutenant-général de Guichen mourut à Morlaix le 13 janvier 1790.

XII. — DE GRASSE.

François-Joseph-Paul, comte de Grasse, marquis de Tilly, naquit à Valette (Provence) en 1723. Il entra fort jeune dans la marine, et en 1747, il assistait comme enseigne de vaisseau au combat livré près du cap-Finisterre (Espagne) par le marquis de la Jonquière aux Anglais. Il fut pris et emmené en captivité en Angleterre. Revenu en France, il fut nommé successivement lieutenant de vaisseau (1754) et capitaine de vaisseau (1762). Il commanda le vaisseau l'Héroïne, dans l'escadre du comte du Chaffault. Promu chef d'escadre en 1778, il commanda une des divisions de la flotte française à la bataille d'Ouessant. Il assista également aux batailles de la Grenade (1779) et de la Dominique (1780) livrées aux Anglais par les amiraux d'Estaing et de Guichen.

En 1781, de Grasse était élevé au grade de lieutenant-général et recevait le commandement d'une flotte chargée de secourir les Américains. Il fit d'abord voile sur Saint-Domingue pour y prendre 3.000 hommes de troupes, et de là se dirigea vers la baie de Chesapeake où ne tarda pas à le rejoindre la flotte anglaise dirigée par le contre-amiral Graves. La bataille s'engagea et se termina tout à l'avantage des Français.

Le 17 décembre 1781, le comte de Grasse revint dans la mer des Antilles et s'empara des îles Saint-Christophe et Montserrat. Le 12 avril 1782, étant à la hauteur de la Dominique, il aperçut la flotte anglaise commandée par l'amiral Rodney, et prit aussitôt ses dispositions pour la bataille, mais ses vaisseaux, qui étaient fort en désordre, ne purent exécuter les ordres qu'il signalait, et 5 vaisseaux français, dont le vaisseau amiral, isolés du reste de l'armée, furent entourés de toutes parts. Tous les cinq, ils combattirent avec un acharnement incroyable contre les 15 adversaires qui les foudroyaient par un feu terrible ; mais bientôt 4 d'entre eux, dont les munitions étaient épuisées, et dont plus de la moitié de l'équipage avait péri, durent se rendre. La Ville de Paris portant l'amiral français, seule luttait toujours ; enfin, pressé de tous côtés, et désespérant d'être secouru, le comte de Grasse dut se rendre à son tour et fut emmené en Angleterre. Revenu en France, il mourut à Paris, le 11 janvier 1788.

XIII. — SUFFREN.

Pierre-André, bailli de Suffren, naquit le 17 juillet 1729. Il entra dans la marine à l'âge de 15 ans, et fut nommé garde-marine un an après. Nommé enseigne de vaisseau, il assista au combat du cap Finisterre (Espagne), qui fut livré aux Anglais par le chef d'escadre de l'Estanduère (août 1747), et fut fait prisonnier dans cette malheureuse affaire. En 1756, il fut nommé lieutenant de vaisseau et embarqua à bord de l'escadre du marquis de la Galissonnière. En 1759, il faisait partie de l'escadre de l'amiral La Cluë et fut encore fait prisonnier par les Anglais. A son retour en 1763, il fut nommé au commandement de la corvette le Caméléon, et deux ans plus tard, il était promu capitaine de frégate. En 1772, il fut nommé capitaine de vaisseau et reçut le commandement de la frégate la Mignonne, puis il commanda les vaisseaux l'Alcmène et le Fantasque et suivit le vice-amiral d'Estaing dans sa campagne des Antilles : il se distingua d'une façon toute particulière et ses conseils furent souvent fort utiles au comte d'Estaing qui avait pour lui une haute estime.

En 1781, il reçut, avec le titre de chef de division, le commandement de 5 vaisseaux qui devaient transporter des troupes au cap de Bonne-Espérance. De là, Suffren devait aller rallier la division du capitaine de vaisseau d'Orves, commandant en chef des forces françaises dans la mer des Indes. Le 16 avril, il livra un premier combat avantageux pour lui dans la baie de la Praya (île Saint-Jacques). Le 25 octobre, il arrivait en vue de l'île de France, et le capitaine de vaisseau d'Orves étant mort, il le remplaça à la tête de la division navale ; du reste, il était promu chef d'escadre quelque temps après (12 janvier 1782).

Arrivé dans l'Inde, Suffren ne perdit pas de temps et se mit à poursuivre immédiatement l'escadre anglaise. Il la rencontra une première fois devant Madras, et le combat qui eut lieu (17 février 1782) fut tout à l'avantage des Français. Un second engagement qui se livra près de Trinquemalé (12 avril 1782), puis un troisième, à la hauteur de Négapatam (6 juillet 1782), furent encore des succès pour nous. Un quatrième combat que se livrèrent l'amiral Suffren et l'amiral anglais Hughes resta, cette fois, indécis (3 septembre 1782). Enfin, dans une cinquième rencontre (bataille de Goudelour ; 20 juin 1783), entre les escadres française et anglaise, la victoire, longtemps disputée, finit par appartenir aux Français. Un mois après ce dernier combat, la paix était signée. Le brave Suffren, durant toute cette campagne, avait non seulement eu à lutter contre les difficultés de toutes sortes que lui suscitaient les Anglais, mais encore contre la jalousie et le mauvais vouloir de ses capitaines. En outre, ses vaisseaux délabrés par plus de 18 mois de campagne et ne trouvant nul abri pour se réparer, pouvaient à peine tenir la mer. Tous ces obstacles réunis ne l'empêchèrent pourtant pas de triompher. Aussi sa conduite héroïque reçut-elle sa récompense ; il avait été nommé successivement Bailli de l'ordre de Malte, puis lieutenant-général des armées navales (5 mars 1783). A son retour en France, il fut élevé à la dignité de vice-amiral et décoré d'un grand nombre d'ordres royaux. Les Etats de Provence lui décernèrent une médaille d'honneur à son effigie, et les Etats-Généraux de Hollande lui envoyèrent également une médaille en or.
Le bailli de Suffren mourut à Paris le 8 décembre 1788. On prétend qu'il fut tué en duel.

XIV. — VILLARET DE JOYEUSE.

Louis Thomas Villaret de Joyeuse naquit à Auch en 1750. Il entra de bonne heure dans la marine, et, en 1773, il était lieutenant de vaisseau. En 1778, nommé capitaine de brûlot, il commanda successivement dans l'escadre de Suffren le brûlot le Pulvérisateur et les frégates la Bellone et la Naïade. Cette dernière, attaquée un jour par un vaisseau anglais de 74 canons, dut se rendre après une magnifique défense de 5 heures.

En 1791, Villaret fut nommé capitaine de vaisseau, et 3 ans plus tard, il était promu contre-amiral. On lui confia alors le commandement d'une flotte qui devait aller au-devant d'un important convoi de bâtiments marchands pour faciliter son entrée à Brest. Le 23 mai 1794, il aperçut une flotte anglaise de 26 vaisseaux de ligne sous les ordres de l'amiral Howe ; bien qu'il n'eût que 25 vaisseaux, il ordonna immédiatement le branle-bas de combat ; mais le combat n'eut pas lieu ce jour-là. Le 29 mai, les deux armées se mirent de nouveau en ligne et la lutte devint bientôt très vive, mais un épais brouillard vint séparer les adversaires et chaque navire s'occupa alors à réparer ses avaries. Le premier juin, les deux flottes, se retrouvèrent, pour la troisième fois, en présence. Cette fois, l'action fut décisive ; malheureusement pour nous, les Anglais coupèrent en deux la ligne de bataille française et, laissant de côté la première moitié des vaisseaux français qui étaient placés sous le vent et ne pouvaient par conséquent rien faire, ils se précipitèrent sur l'autre moitié. Le vaisseau la Montagne, magnifique trois ponts de 124 canons, monté par l'amiral Villaret de Joyeuse, fut entouré par 6 antagonistes et soutint une lutte effroyable qui se termina à l'avantage des Français. Mais pendant ce temps-là, 7 autres vaisseaux, qui, eux aussi, avaient héroïquement lutté contre les Anglais, succombaient sous les coups de leurs assaillants : 6 d'entre eux se rendirent, un seul (le Vengeur) coula plutôt que de se rendre. Durant la bataille, le convoi français était entré sain et sauf à Brest ; aussi, la Convention décréta que la flotte française avait bien mérité de la patrie, et éleva le contre-amiral Villaret de Joyeuse au grade de vice-amiral (27 septembre 1794).

En 1795, le nouveau vice-amiral reçut le commandement d'une escadre composée de 9 vaisseaux, 9 frégates et trois corvettes. Il partit de Brest le 11 juin et, le 22, il rencontrait, à la hauteur de l'île de Groix, une escadre anglaise de 14 vaisseaux, commandée par l'amiral Bridport ; Villaret chercha à former sa ligne de bataille, mais le mauvais vouloir ou l'incapacité de ses capitaines rendit ses efforts inutiles : 3 vaisseaux français durent se rendre.

En 1796, Villaret de Joyeuse fut nommé, par le département du Morbihan, député au Conseil des Cinq-Cents. En 1802, ayant repris du service dans la marine, il fut nommé capitaine-général de la Martinique et de Sainte-Lucie. Attaqué en 1809 par des forces anglaises très nombreuses, il dut capituler après une défense fort honorable et revint en France. En 1811, il fut nommé gouverneur-général de Venise. Il mourut l'année suivante. L'amiral Villaret de Joyeuse était grand'croix de la Légion d'honneur. Son nom est gravé sur l'Arc de Triomphe.

XV. — BRUEYS.

François-Paul, comte Brueys d'Aigallieri, naquit à Uzès (Gard), le 11 février 1753. Il entra dans la marine en 1766, à l'âge de 13 ans, et en 1768, il était nommé garde-marine, Enseigne de vaisseau en 1777, il était lieutenant de vaisseau lors de la guerre de l'indépendance des Etats-Unis, et fit partie de la flotte aux ordres du comte de Grasse. Capitaine de vaisseau en 1772, il fut d'abord destitué comme noble, puis réintégré en 1795. En 1796, il était promu contre-amiral et reçut le commandement d'une escadre de 5 vaisseaux et de quelques frégates, avec ordre de croiser dans la Méditerranée. En 1798, il fut nommé au grade de vice-amiral, à l'âge de 45 ans, et fut choisi comme commandant en chef de la flotte qui devait transporter Napoléon Ier et ses troupes en Egypte. Cette flotte se composait de 13 vaisseaux et 4 frégates, plus un grand nombre de bâtiments de transport. Brueys jeta l'ancre dans la rade d'Aboukir et garda son mouillage. Sur ces entrefaites, Nelson, qui était parti à la recherche de l'escadre française, pénétra à son tour dans la rade, et le combat s'engagea immédiatement. Ce combat fut un vrai désastre pour la marine française ; des 17 bâtiments dont se composait notre flotte, c'est à peine si 4 parvinrent à sortir sains et saufs de cette rade funeste. Le vice-amiral Brueys avait été mortellement blessé dès les premiers instants de la bataille ; une heure après, son vaisseau l'Orient, trois-ponts de 124 canons, commandé par le capitaine de vaisseau Casabianca, sautait avec un fracas épouvantable, couvrant de débris flambants les autres vaisseaux, et entraînant dans l’abîme ses 1.000 hommes d'équipage.

Brueys est le premier et, jusqu'à présent, le seul des commandants en chef d'armée navale française qui ait péri à son bord, pendant le combat.

XVI. — VILLENEUVE.

Pierre-Charles-Jean-Baptiste-Sylvestre Villeneuve, naquit à Valensoles (Basses-Alpes), le 31 décembre 1763. Entré jeune dans la marine, il fut nommé garde-marine en 1782. En 1793, il était capitaine de vaisseau, et fut promu chef de division trois ans plus tard, en 1796. Nommé contre-amiral, il commanda en cette qualité l'arrière-garde française à la bataille d'Aboukir (1798), et resta tranquillement à l'ancre au lieu de venir secourir son amiral en chef.

En 1804, il fut nommé vice-amiral et prit le commandement d'une escadre de 11 vaisseaux, 7 frégates et 2 bricks. Il rallia ensuite l'escadre espagnole aux ordres de l'amiral Gravina et fit route vers les Antilles ; arrivé à la Martinique, il mit le siège devant Port-Royal et s'en empara. Après ce succès, Villeneuve reçut l'ordre de revenir en Europe, et le 22 juillet 1805, il rencontra, à la hauteur de l'île d'Ouessant, une escadre anglaise, forte de 15 vaisseaux, et commandée par l'amiral Calder. Le combat s'engagea, mais fut de courte durée à cause d'une brume intense qui empêchait les combattants de s'apercevoir. Villeneuve gouverna ensuite au sud, et alla s'enfermer dans le port de Cadix pour échapper à la flotte de l'amiral Cornwalis envoyée à sa poursuite. Le 17 septembre, l'amiral français, d'après les instructions formelles qu'il avait reçues de l'Empereur, sortait de ce port, à destination de Naples. Le 21 octobre, il rencontra la flotte anglaise de Nelson, près du cap Trafalgar, et la bataille fut dès lors inévitable. Les Anglais avaient 27 vaisseaux de ligne ; les Français et les Espagnols, 33. Nelson divisa sa flotte en deux colonnes qui prirent la flotte alliée entre deux feux, comme à Aboukir ; cette bataille de Trafalgar fut un désastre pour la France ; 18 vaisseaux alliés durent se rendre après une défense très honorable, d'ailleurs ; un vaisseau français, l'Achille, commandant Deniéport, s'était fait sauter plutôt que d'amener ses couleurs. Le vaisseau le Bucentaure, sur lequel flottait le pavillon de commandement de l'amiral Villeneuve, dut se rendre également après une lutte acharnée. Néanmoins, les Anglais avaient payé cher leur victoire par la mort de Nelson. L'amiral espagnol Gravina fut aussi mortellement blessé pendant l'action. Quant à Villeneuve, emmené d'abord prisonnier en Angleterre, il demanda son rappel en France pour justifier sa conduite ; il débarqua à Morlaix et prit la route de Paris. Arrivé à Rennes et désespérant de se relever aux yeux de Napoléon Ier, il se perça la poitrine de six coups de couteau. Ainsi, les trois amiraux qui avaient commandé en chef à Trafalgar moururent à peu de jours d'intervalle, l'un après l'autre.

Avant d'accomplir son acte de désespoir, Villeneuve avait écrit une lettre à sa femme ; et nous ne pouvons terminer là cette biographie, sans reproduire cette épître intéressante et vraiment touchante : « Ma tendre amie, écrivait-il, comment recevras-tu ce coup, hélas ! Je pleure plus sur toi que sur moi. C'en est fait, je suis arrivé au terme où la vie est un opprobre et la mort un devoir. Seul ici, frappé d'anathème par l'Empereur, repoussé par son ministre qui fut mon ami, chargé d'une responsabilité immense dans un désastre qui m'est attribué, et auquel la fatalité m'a entraîné, je dois mourir ! Je sais que tu ne peux goûter aucune apologie de mon action. Je t'en demande pardon, mille fois pardon, mais elle est nécessaire et j'y suis entraîné par le plus violent désespoir. Vis tranquille, emprunte les consolations des doux sentiments de la religion qui t'animent ; mon espérance est que tu y trouveras un repos qui m'est refusé. Adieu, adieu, adieu, sèche les larmes de ma famille et de tous ceux auxquels je puis être cher. Je voulais finir, je ne puis ; quel bonheur que je n'aie aucun enfant pour recueillir mon horrible héritage et qui soit chargé du poids de mon nom ! Ah ! je n'étais pas né pour un pareil sort, je ne l'ai pas cherché, j'y ai été entraîné malgré moi. Adieu, adieu ! ». L'amiral Villeneuve était grand-officier de la Légion d'honneur ; son nom est gravé sur l'Arc de Triomphe.

XVII. — DE RIGNY.

Henri Gauthier de Rigny naquit à Toul (Meurthe), le 2 février 1782. Il entra dans la marine en 1796 comme novice, et fut nommé aspirant de 2ème classe en 1799 et aspirant de 1ère classe, l'année d'après. Nommé enseigne de vaisseau en 1803, il commanda (n'ayant que 21 ans) la corvette la Triomphante, puis les canonnières la Joséphine, l'Actif et l'Heureuse. Il fut ensuite débarqué à terre, prit part à plusieurs batailles de l'Empire où il se distingua, et fut nommé lieutenant de vaisseau (1809). Promu capitaine de frégate (1810), il reçut le commandement de la frégate l'Erigone avec laquelle il croisa dans les Antilles. Le 16 juillet 1816, il recevait ses épaulettes de capitaine de vaisseau et fut envoyé dans le Levant.

En 1825, ayant été nommé contre-amiral, il fut chargé de réprimer les brigandages des pirates grecs et turcs de la Méditerranée et de l'Archipel, et en 1827, lors de la guerre de l'indépendance hellénique, il fut nommé commandant en chef de l'escadre française destinée à rallier l'escadre anglaise aux ordres du vice-amiral Codrington et l'escadre russe, commandée par le contre-amiral de Heyden ; cette triple armée navale, composée de 27 bâtiments, était placée sous le commandement suprême de l'amiral anglais Codrington. 106 navires de guerre turcs et égyptiens, sous les ordres d'Ibrahim-Pacha, se trouvaient dans la baie de Navarin. Les trois amiraux résolurent d'y entrer pour chasser cette immense flotte ottomane. Le 20 octobre, se livra une des fameuses batailles de l'histoire de la Marine, et la dernière où l'on ait fait usage encore de vaisseaux à voiles. Cette journée fut l'anéantissement de la marine turque, qui perdit 68 bâtiments sur 106 qu'elle avait mis en ligne. L'amiral de Rigny avait puissamment contribué à la victoire ; aussi lorsque l'amiral Codrington vint, après la bataille, passer l'inspection de la flotte alliée, il prononça ces flatteuses paroles en s'adressant au chef de l'escadre française : « Amiral, vous avez dirigé votre escadre d'une manière qui ne pourrait être surpassée par personne ».

Promu vice-amiral, la même année, pour sa brillante conduite à Navarin, de Rigny fut quelque temps après nommé comte et préfet maritime à Toulon. Il fut nommé membre de Conseil de l'amirauté et grand-officier de la Légion d'honneur à la fin de 1830. L'année suivante, il était ministre de la marine (23 mars 1831) et garda son portefeuille jusqu'au 4 avril 1834, époque où il le céda au vice-amiral Roussin. L'amiral de Rigny mourut le 7 novembre 1835 (Jean Barrachin).

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