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LE CORPS POLITIQUE DE LA MARTYRE

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Le corps politique ou « général » était chargé des intérêts temporels d'une paroisse. Nous allons voir comment ce Conseil remplissait son rôle à La Martyre, par l'intermédiaire des deux marguilliers ou trésoriers. Quelques faits d'abord nous feront connaître sa mentalité.

 

HISTOIRE D'UNE CHAIRE A PRÊCHER 

(Archives du Finistère et de La Martyre).

Une nouvelle chaire à prêcher fut installée dans l'église en 1713. Mais il parait qu'elle n'avait pas été construite dans de bonnes conditions de solidité. C'est, du moins, le défaut que mettait en avant le curé, dans le différend que nous allons exposer. En réalité, il semble, plutôt, qu'il la trouvait trop ordinaire et voulait une autre plus artistique.

Un jour, on vit la chaire démontée. « On donna ordre aux fabriques de la faire redresser, raccommoder, ce qu'ils ont fait faire. Et que cela leur fut délibéré verbalement dans la sacristie, en présence de M. le Curé de laquelle trêve, lequel ne contredit rien alors ; mais comme lequel sieur curé ne veut point monter dans laquelle chaire pour faire ses instructions et prônes, faute, dit-il, que l'on ne posé la nouvelle chaire en sa place, ce que lesquels fabriques ne contestent point de faire ; mais ils déclarent aux dits corps politique et général qu'ils aient à s'assembler ce jour pour délibérer sur ce que dessus, faute de quoi ils déclarent laisser le tout à leurs périls, risques et fortunes » (Délibération du 2 Novembre 1738).

Le curé s'obstine à ne pas monter en chaire.

En 1739, le Père Gardien des Récollets de Landerneau, ayant reçu mandement de Mgr. l'Evêque de Léon pour prêcher à La Martyre, le curé ne voulut pas le laisser non plus monter en chaire, disant qu'il y avait danger pour la vie. Les paroissiens, qui prétendaient la chaire suffisamment solide, y avaient fait monter, pour l'essayer, le P. Gardien et son compagnon, qui y firent, comme s'exprime un mémoire des tréviens à ce sujet, « les démonstrations et mouvements que font d'ordinaire les prédicateurs, ce qui montre qu'on y pouvait prêcher, sans se casser les membres ».

Les tréviens mandèrent, ensuite, deux menuisiers, qui constatèrent la solidité de la chaire ; mais les prêtres ne voulaient pas se laisser convaincre, et, comme le Révérend Père Récollet se disposait, un jour, à prêcher de l'autel, deux notaires royaux, conformément à des délibérations prises, vinrent, séance tenante, lui notifier qu'il ne sera pas payé de ses prédications « s'il ne les fait pas dans le lieu ordinaire destiné pour cela dans toute la chrétienté ». Le Père répondit qu'il avait ordre de ses supérieurs de ne pas monter en chaire.

Dans un mémoire que les tréviens adressent à l'Evêque après cet incident, ils insistent en ces termes sur les inconvénients qu'il y avait à prêcher de l'autel : « ce qui fait que le sexe féminin (pour mieux entendre) prenait le pas au devant du sexe masculin et que les deux sexes se jetaient en foule dans le devant et le haut de l'église ».

L'évêque vint lui-même, accompagné d'un vicaire général, se rendre compte de l'objet en litige. La décision épiscopale fut favorable au curé. Les fabriciens se soumirent, mais non de bon gré, comme il ressort de la remontrance et de la délibération suivantes :

20 Novembre 1740. « Exposent .... qu'à la visite faite par Monseigneur l'évêque de Léon et son grand vicaire le 8 Juillet dernier, il leur fut verbalement ordonné de faire construire et placer dans les trois mois une nouvelle chaire à prêcher, au lieu et place de celle qui est à présent en place, quoique en état de servir de longues années encore, ainsi qu'il est justifié par le procès-verbal d'Hamon Grau et Yves Dincuff, maîtres menuisiers, du 15 Mai dernier, notariés par maître Le Duff et Debiez, notaires de la principauté de Léon à Landerneau, et autres actes, et la vue oculaire ; que ladite ordonnance ne fut lors rédigée par écrit, mais qu'il leur fut promis qu'on l'aurait fait et donné un extrait ; qu'il est vrai que le sieur curé fit lecture d'une ordonnance à ce sujet, le premier dimanche du mois d'Août dernier, mais ayant prié le dit sieur curé de la leur communiquer, il en fit refus. Sur quoi le dit Derrien, l'un des remontrants avec François Pouliquen, Gabriel André, Yves Martin et François Le Guen, habitants de ladite trêve furent sitôt à Léon pour devoir s'en éclaircir avec mon dit Seigneur évêque, et n'y trouvèrent que monsieur l'abbé Kermorvan son grand vicaire, qui ignorait cette ordonnance être mise par écrit, mais promit de leur écrire sous peu à ce sujet, ce que n'ayant pas fait encore... l'on peut d'autant, moins les blâmer qu'ils ont fait leur possible pour avoir cette ordonnance, et qu'ils sont d'ailleurs occupés à faire faire autres décorations et embellissements, en ladite église, qui ne sont encore finis, ils sont prêts de faire construire une nouvele chaire ainsi qu'il a été verbalement ordonné incessamment ».

Le curé l'emportait, mais paiera chèrement sa victoire. Pour obtenir sa chaire, il devra passer sous des fourches caudines : « Nous dits délibérants aux périls risques et fortunes... sommes unanimement d'avis et avons délibéré que pour obéir aux ordres de Monseigneur de Léon et son grand vicaire qui ne tendent qu'à plus belle décoration de la dite église, nourrir et maintenir la paix entre nous, le sieur recteur de la paroisse et le curé de la dite trève, encore que la chaire qui est à présent en place soit bonne et en état de servir encore de longues années, que les dits fabriques remontrants fassent le plus tôt que faire se pourra et sans retardement de leur part construire et placer une autre nouvelle chaire au lieu et place de l'existante et ce à ces conditions expresses qu'en attendant qu'elle fût faite, parachevée et placée, que le dit curé fasse son prône prêche et fasse prêcher les stationnaires et autres et annoncer en l'ancienne chaire comme étant en état de servir pour l'utilité, rudition et instruction du public, … lesquelles conditions seront acceptées des dits sieurs recteur et curé et sera la présente délibération d'eux souscrite et signée, faute de quoi nulle et de nul effet, et comme non faite, de manière qu'elle ne pourrait nuire ni préjudicier à leurs droits et prétentions qu'ils réservent en cas de non acceptation de la part des dits recteur et curé, très expressément de la forme qu'ils étaient en droit..... De plus, nous délibérants nous faisons très expressément défense au sieur curé de céder la clef de la chambre du corps de garde par lui occupé pendant le cours de la grande foire, sans exprès consentement des dits fabriques en charge ou de leurs successeurs en la dite charge... ».

La signature de J. Pouliquen, curé de La Martyre, est au bas de la délibération.

 

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QUERELLE AU SUJET DE LA PROCESSION DES RELIQUES 

(Archives de La Martyre et archives départementales).

A la même époque, il y avait un autre conflit entre le corps politique et le curé de La Martyre. Le 29 Juin 1738, les marguilliers se plaignent ainsi à l'évêque de leur curé : « Remontrent les marguilliers de La Martyre que depuis le mois de Décembre 1737, ils avaient obtenu des reliques de Rome, qu'ils avaient postulées par plusieurs suppliques faites à Notre Saint Père le Pape  ; votre Grandeur les a reconnues, ainsi que les bulles qui les accompagnent, et permis les fidèles les vénérer et assister aux processions qui sont faites le second dimanche de Mai et le jour de jeudi de la grande foire, au mois de Juillet, auxquelles ces saintes reliques seront portées à la dévotion des fidèles. Or, les suppliants, le général et les peuples des paroisses circonvoisines, qui s'attendaient à voir célébrer cette solennité le dimanche 11 Mai, s'étaient assemblés en grand nombre à cette intention, mais ils furent frustés de cette espérance par le refus obstiné et capricieux du sieur Jacques Pouliquen, de laisser porter les reliques par les personnes désignées et destinées à ce ».

« Jean Pengréac'h et Alain Guéguen son gendre avaient fait leur offrande de 13 livres 5 sols pour reconnaissance du bonheur dont ils espéraient jouir en portant ces reliques. Le curé refusa de les laisser porter ; on lui fit sommation par huissier, il resta insensible et se saisit lui-même des clefs de l'armoire de la sacristie où étaient les dites reliques, scandale d'autant plus grand que c'est le curé lui-même qui a publié ces processions et invité à faire des offrandes pour avoir l'avantage de porter ces saintes reliques... On craint que pour la foire de Juillet il ne fasse le même refus. Ainsi la fréquentation de l'église de La Martyre, où la dévotion attirait un grand nombre de peuples, se diminuera, les frais et les prières que les tréviens ont fait pour se procurer les dites reliques deviendraient inutiles... Vous plaise en conséquence ordonner, Monseigneur, que le jeudi de la foire et le second dimanche de Mai, chaque année, les reliques soient portées autour du bourg par deux laïques pieux et vêtus selon l'usage pratiqué dans tout le diocèse ».

La dernière phrase de cette supplique nous donne peut-être la raison de l'opposition du curé, car, en dehors des prescriptions liturgiques qui recommandent de faire porter solennellement les reliques par des clercs, le curé trouvait sans doute peu convenable l'accoutrement des porteurs, qui consistait à revêtir le surplis sur l'habit laïque et à se coiffer d'une sorte de bonnet de coton, usage qui a subsisté dans plusieurs paroisses plus d'un siècle après.

A la mort de M. Pouliquen, les fabriciens vécurent en meilleure intelligence avec son successeur. J. Kerbiriou. Ils ne négligeaient rien, du reste, pour se le rendre favorable, comme nous le verrons. Ne pouvant, malgré tout, obtenir du curé qu'il présidât une procession où l'on porterait les reliques, ils s'adressèrent à un jeune prêtre de la trêve, leur obligé, et prirent la délibération suivante : « Nous soussignés composant le corps politique de la trêve de La Martyre, en la paroisse de Ploudiry, prions humblement vénérable et discret messire Guillaume Salaün, prêtre de la dite trêve de La Martyre, de porter l'étole du consentement d'autre vénérable et discret messire Jean Kerbiriou, prêtre sieur curé du dit La Martyre, en procession dimanche prochain que l'on comptera le neuvième du présent mois et an, avec les reliques de dit La Martyre, conformément avec la permission vénérable que nous avons reçue de monsieur l'abbé de Kermorvan, grand vicaire de Léon, selon la déclaration d'Yves Le Goavec, l'un des fabriques en charge, et le tout sans le refus du sieur curé de la dite trêve dont nous promettons de porter tous acquit et indemnité au dit sieur Salaün, même en cas d'interdiction de la part des messieurs ses supérieurs nous promettons de le dédommager, la dite supplication faite tant en vue de la dévotion du peuple pour icelles reliques que pour le profit de la dite église, et le tout selon les usages pratiqués dans tout le diocèse, même dans toutes les trêves de la dite paroisse de Ploudiry. Fait et délibéré dans la sacristie de la dite La Martyre, ce jour septième Mai, l'an mil sept cent quarante cinq ».

M. de l'Abbaye, prieur commendataire, recteur de Ploudiry, intervenant pour rappeler une défense, Jean Rohel et Yves Goavec font assembler le corps politique : « Remontrons au corps politique et au général la difficulté que nous avons au sujet de la procession de nos reliques, causée par le sieur recteur de Ploudiry disant qu'il y a une sentence formelle portée en cours de visite pour ne pas les porter par les laïques et selon les louables usages de toutes les trêves de la même paroisse, et ne l'ayant reçue, et n'ayant pas été notifiée par le dit sieur recteur nous donnons avis au corps politique et au général de décider à ce sujet ».

Le corps politique, exaspéré comme les fabriques, décide de faire une nouvelle tentative auprès du curé :

« Nous habitants composant le corps politique et Louis Derrien représentant le général donnons toutes procurations par délibération au sieur Kerbiriou prêtre et notre curé que nous avons reçu et que nous autorisons encore, avec l'agrément des supérieurs dont il dépend, et peut dépendre pour cette qualité et le reconnaissant tous comme tel comme ci-devant, nous lui donnons une procuration particulière au sujet d'une affaire qui regarde non seulement les habitants, mais même le profit de l'église. A ce sujet nous promettons sous nos signes et celui du général de le deffrayer en tout et pour tout en cas d'inquiétude ».

Une délibération du 30 Mai 1746, nous apprend l'issue de ce conflit qui, parait-il, n'était pas le seul qui subsistait entre le clergé et les représentants des tréviens.

« Nous habitants composant le corps politique de N.-D. de La Martyre, désirant sincèrement la paix et le bon ordre sur tous les objets qui divisent notre trêve, sur l'avis à nous donné par Monseigneur l'Ilustrissime et Révérendissime évêque comte de. Léon, dans sa visite à La Martyre où il plut à sa Grandeur de descendre à l'issue de sa visite à Ploudiry, accompagné de Monseigneur de Kermorvan, évêque de Tréguier, lors son grand vicaire, et de monsieur l'abbé Prigent théologal et chanoine de Saint-Pol-de-Léon, son vénérable promoteur, avons nommé de notre part en présence de sa Grandeur pour arbitres vénérable et discret messire B. Coadic recteur de Guimiliau et autre vénérable et discret messire F. Daniel recteur du Tréhou, et notre recteur a nommé monsieur Penaros avocat au parlement, le tout accepté de part et d'autre et agréé et autorisé de notre dit Seigneur. En conséquence nous sommes ensemble dans notre dite sacristie de La Martyre, lieu ordinaire de nos délibérations et nous avons convenu et convenons que les dits arbitres s'assemblent le mardi après la Pentecôte pour décider sur nos contestations, leur donnons plein pouvoir et autorité et nous nous engageons à souscrire à leurs décisions ».

 

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ABUS.

Le corps politique et les marguilliers n'étaient pas si soucieux qu'ils voulaient le faire croire des intérêts de l'église. Ils puisaient trop facilement dans la caisse qui leur était confiée. Le 26 Mai 1736, le sieur Joseph du Parc Le Roy, procureur fiscal de la juridiction de la principauté de Léon, dénonçait plusieurs abris dans l'administration des biens de La Martyre.

« Les revenus, dit-il, en sont considérables et rapportent près de 2.000 livres en biens fonds, sans parler de près de 800 livres que l'on tire des boutiques et autres logements pendant la foire, et les offrandes qui y tombent pendant le cours de l'année ; or, les marguilliers se rendent réciproquement leurs comptes, à l'examen desquels, à la vérité, le général assiste ; mais comme dans ce général il se rencontre plusieurs gens qui aspirent à devenir marguilliers, ils y passent bien des choses en décharge, ce qu'ils ne feraient pas s'ils n'envisageaient qu'on agira de même à leur égard, et s'ils avaient l'attention d'y appeler M. le recteur ». C'est ainsi, ajoute le procureur fiscal que « contre toutes les défenses de l'évêque ils prennent 50 à 70 livres pour la confection des comptes, qui devraient se rédiger gratuitement, et qu'ils achètent une barrique de vin, pendant la foire, des deniers de la fabrique, qu'ils consomment entre eux et les délibérants contre défense à eux faite par l'évêque » (Archives du Finistère, G 244).

En conséquence, le 26 Juin 1736 (Archives de La Martyre) « une ordonnance judicielle de la principauté de Léon, sur la remontrance de M. du Parc Le Roy, procureur fiscal, fait défense aux marguilliers de La Martyre de rendre aucun compte de leur régie et administration, et au corps politique de le recevoir et examiner qu'en présence de M. le Recteur et du dit procureur fiscal ».

Le 23 Juillet 1736, « une consulte de trois avocats de Lesneven décide que suivant la disposition des arrêts, le recteur et le procureur fiscal doivent veiller à la conservation des emplois et des dépenses des fabriques ; que la rédaction des comptes doit être réglée à une pistole environ, suivant le travail ; que la consommation de la barrique de vin à la foire est un dérèglement d'où s'ensuivent des débauches et des excès ».

Le corps politique et les marguilliers semblent d'abord contrariés par ces ordonnances. Le 1er Septembre 1737, ils s'assemblent pour « délibérer sur le parti à prendre en cette fâcheuse conjoncture qui paraît visiblement avoir été suscitée par M. le recteur de la paroisse qui a tellement indisposé MM. les juges de Landerneau contre leur général et fabriques que jusques à présent ils n'ont pas voulu les écouter dans leurs dires et raisons ».

Finalement, ils ne tiennent aucun compte de ces arrêtés.

Comme ils ne veulent pas s'y soumettre, le recteur et le procureur fiscal refusent, de leur côté, de venir ouvrir les archives. Ce n'est qu'après plusieurs sommations que, le 16 Mai 1738, Geffroy de Roc'hglas, procureur fiscal, et de l'Abbaye, prieur commendataire, recteur de Ploudiry, se présentent avec leurs clefs.

Ils ne renonceront jamais à leur barrique de vin. Ils la justifieront tous les ans par un long exposé. Voici leur délibération du 22 Juin 1738 : « Sommes d'avis que lesquels fabriques prennent une barrique de vin au nom de la Fabrice pour suppléer aux frais de toutes les affaires qui se font tous les ans, et qu'il faut faire absolument pour l'entretien de laquelle foire, parce que nous sommes à l'expérience et à l'épreuve de l'un et de l'autre, et qu'il coûte beaucoup moins de prendre une barrique de vin que d'aller le prendre à l'auberge, où il coûterait beaucoup davantage, premièrement par rapport aux charrois des perches dont il faut cette année avoir deux charretées, et pour les faire prendre il coûterait considérablement à la fabrique, attendu qu'il faut avoir huit bonnes bêtes à chaque charrette et cinq hommes pour conduire chaque charrette et pour abattre lesquels bois et les prendre en l'endroit le plus praticable de les charger, outre le charroi des planches autant qu'il en faudra pour l'entretien de laquelle foire, outre qu'il faut un homme pour tirer les planches des magasins avant laquelle foire et les conserver pendant la foire, entretenir et nourrir un homme pendant laquelle foire pour être présent à la récepte des offrandes qui tombent dans ladite église pendant l'octave, et un homme pour recevoir les offrandes qui se donnent au bas de l'église auprès des reliques. Et à l'égard de quatre ouvriers qu'il faut avoir pour louer les boutiques pour laquelle foire et aider les fabriques de faire des réceptes pour les seconder dans leurs besoins lesquels sommes d'avis qu'ils seront payés à raison de quinze sols par jour pendant la quinzaine, et n'auront ni à boire ni à manger pendant le dit temps, que le lundi des charrois de perches et le jeudi à l'issue de laquelle grande foire et à celui qui tirera les bois et planches des magasins aura aussi dix sols par jour pendant la quinzaine. Et sommes pareillement d'avis que lesquels fabriques donneront à dîner à messieurs les prêtres, à tous ceux qui se trouveront et assisteront à la procession le jour du jeudi à la clôture de laquelle foire à la manière accoutumée, si bon leur semble de s'y trouver en la maison de Pégase ».

Il ressort de cette délibération et de celles qu'on lit, tous les ans, à pareille époque, que la barrique de vin devait être consommée en grande partie, sinon entièrement, en un seul jour, le jour des charrois. C'était, pour le corps politique, une façon de reconnaître les services de charretiers bénévoles, sans s'oublier soi-même. Il y recourait en d'autres circonstances. Ainsi, en Juin 1757, on achète une barrique de vin pour un simple charroi d'ardoises de la montagne.

De temps à autre, il fallait rappeler les marguilliers à l'ordre. Le 19 Avril 1761, il fut fait lecture d'un arrêt de la Cour datant du 21 Août 1760.

« Cet arrêt porte que les assemblées du corps politique seront indiquées huit jours avant pour la nomination des nouveaux délibérans du nombre de ceux qui ont été trésoriers ; et que les délibérans se trouveront aux assemblées à peine de 10 livres d'amende, à moins de cause légitime d'empêchement ; que les délibérations seront prises sur des registres timbrez et millésimez par les juges et que le registre sera renfermé dans le cabinet des archives ; que la nomination des marguilliers se fera tous les ans ; qu'à la rentrée des marguilliers il sera fait inventaire général des vases sacrés, reliques, argenterie et ornements, dont l'original sera déposé aux archives ; que le dit inventaire sera renouvellé tous les ans ; que les droits de la foire seront donnés à ferme tous les ans en présence des juges et du procureur fiscal ;

Fait défense au général de faire aucun emploi des deniers de la fabrique que pour l'usage auquel ils sont destinés, d'intenter ni soutenir procès que par l'avis des anciens administrateurs, ordonne que ceux qui ont des deniers à la fabrique les déposeront au coffre-fort dans un mois, qu'il sera fait inventaire des titres qui concernent la succursale en présence du juge ou procureur fiscal, des marguilliers en charge et des commissaires nommés par le général pour être le dit inventaire déposé aux archives, copie d'icelui inscrit sur le livre des délibérations et un autre délivré aux marguilliers successivement pour leur servir d'instruction touchant les droits de la fabrique.

Défense aux trésoriers de retenir les reliquats et de les employer dans leur commune, à peine aux délibérans de demeurer responsables et solidaires qu'on ne pourra retirer des archives aucune pièce que du consentement du corps politique, qu'on ne produira qu'autant que faire se pourra les titres que par copie et les originaux ne pourront l'être que dans les cas indispensables ».

 

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DIVERSES DIFFICULTÉS.

Les décimes et autres taxes. — « En 1548 un arrêt du conseil ordonne que les fabriques de La Martyre seront raiez des rolles des cotisations aux décimes ».

13 Décembre 1640 : « Une copie d'arrêt de la Cour rendu entre les administrateurs des chapelles de La Martyre et de Saint-Yves de Pencran d'une part et les gens du clergé d'autre, lequel rejette et annulle les cotisations et saisies, fait deffenses au chapitre de Léon et leurs députez de taxer et imposer à l'avenir aux décimes les provots et administrateurs des dites chapelles ».

5 Avril 1702 : « Ordonnance de MM. les députez pour le bureau du clergé de Léon sur la Remontrance de Nicolas Derrien l'un des fabriques de La Martyre laquelle aurait condamné le dit marguillier de la dite église de païer provisoirement au receveur des Décimes les taxes et impositions faites de leur église, sui­vant les lettres patentes, arrêts et règlements du conseil ».

14 Décembre 1755 : « Nous soussignés délibérants et composants le corps politique de la trêve de La Martyre, paroisse de Ploudiry, assemblés ce jour de dimanche, quatorzième du mois de Décembre de l'année 1755, suivant l'annonce prônale faite le dimanche précédent, sommes d'avis, monsieur le Curé présent, que vu la somme exorbitante à laquelle notre église est taxée pour les décimes, qu'Olivier Le Faou et Claude Trellu, marguilliers actuellement en charge, se pourvoient au bureau ecclésiastique de Léon, en la ville de Saint-Pol, pour faire décharger cette église en partie de la somme à laquelle elle est imposée, et qu'à cet effet ils se servent du ministère de monsieur Demescurum, avocat demeurant en la ville de Landerneau, que même ils le fassent descendre en cette trève., où en présence de M. Cren notre curé et en celle des dits marguilliers, après avoir pris connaissance des pièces relatives aux biens appartenant à notre église, il formera la requête tendante à la diminution de l'imposition susdite, sauf en cas de refus au bureau de Léon à prendre telles voies qu'il conviendra par l'avis de trois avocats que les dits marguilliers consulteront à cet effet ».

Comme on le voit, le corps politique n'a pas pu conserver à l'église l'exemption des décimes, quoi qu'il ait fait. Il ne pourra pas davantage conserver à la trêve toutes ses autres immunités.

En 1423, « Jehan duc de Rohan se démunit en faveur de l'église de N.-D. de La Martyre des droits d'applacements et étaux qu'il levait de tout tems sur les marchands qui venaient débiter vins et breuvages et étalaient marchandises aux foires et assemblées qui se tenaient au bourg ».

En 1671, l'exemption sur boissons se réduit à vingt barriques : « Arrêt contradictoire du conseil d'Etat du roy pour servir de règlement entre les fermiers des impôts et billots de Bretagne et les privilégiez, lequel maintient la maison appartenant à l'église de Notre-Dame dans l'exemption et affranchissement des impôts et billots de dix pipes de vin seulement pour chacun an ».

En 1707, le droit de débiter ces vingt barriques de vin était affermé 108 livres, avec « obligation de fournir le meilleur vin qu'il aura pour la célébration de messes journellement et de fournir tous les dimanches pour deux sols de pain blanc pour être bénit ».

Les marguilliers ne trouvaient pas toujours dans les tréviens, dont ils défendaient les intérêts, tout l'appui désirable : « Le 23 Juin 1697 un acte prônal devant les notaires roiaux de Lesneven par lequel les fabriques en charge, auraient sommé les tréviens de nommer et députer d'entre eux un nombre suffisant de personnes capables pour examiner et régler leur mémoire de fourrages et autres frais et pour délibérer à l'avenir sur les affaires de l'église et du général à laquelle assemblée plusieurs s'opposèrent avec tumulte et scandale, à ce qu'on eût fait aucune députation ».

Parfois les marguilliers doivent se borner à une protestation. « 4 Avril 1745, De la part d'honorables gents Jean Rohel et Yves Goavec trésoriers en charge de la dite trêve de La Martyre a été remontré que par un abus extraordinaire dont ils ne connaissent pas la source, il se trouve que dans l'assise qui se fait sur les habitans de la paroisse de Ploudiry, les trêves en dépendantes au nombre de six, dont la dite trève de La Martyre en est une pour la capitation qui se paie annuellement au roy, les habitans de la dite trève de La Martyre sont toujours surchargés et paient au de là de leur contingente portion, puisque suivant l'usage constant établi dans l'assise de la capitation des tailles et des fouages, les tréviens de La Martyre et ceux de La Roche n'en doivent supporter qu'un tiers... Pour l'année dernière 1744, le total de la capitation n'était que de 5.552 livres, la portion supportable par les dits tréviens de La Martyre ne devait être que 1.233 livres 15 sols 4 deniers. Cependant, ils ont payé 1.455 livres ».

Procès au sujet des moulins. — Ce n'est pas seulement les intérêts de la trêve en général, que le corps politique prend en mains, mais de certains quartiers. Ainsi, le meunier de Trompérénez, Alain Le Lan, ayant voulu assujettir à son moulin, propriété de Dame de Kerdaniel de Carné, les habitants du bourg, il s'ensuivit un procès qui dura trois ans, 1741-1743. La fabrique produisit les titres et aveux relatant les privilèges de la trêve. Ces titres étaient : 1° « des lettres de Jehan vicomte et sire de Rohan et de Léon portant les privilèges et exemptions accordés aux habitans du bourg de La Martyre » datées du 9 Août 1476 et du 26 Mars 1503 ; 2° « l'aveu et déclaration de René vicomte de Rohan fournis le 14 Octobre 1549 au roy, en son domaine de Lesneven » ; 3° aveux au seigneur de Rohan, en 1600 et 1627 et à Dame Marguerite duchesse de Rohan princesse et usufruitière de Léon, mère et curatrice de Henri Chabot duc de Rohan, le 26 Mai 1673, à Louis de Rohan Chabot et de Fontenay, pair de France et prince de Léon, le 21 Septembre 1680.

Les tréviens du bourg condamnés par le tribunal de Landerneau à faire moudre leur blé au moulin de Trompérénez ou à payer un droit de « mouture des blés de 20 sols par tête », en appelèrent à la Cour royale de Lesneven. Celle-ci, par un arrêt du 12 Mars 1742, maintint les habitants du bourg dans leurs privilèges et exemptions ; les frais du procès s'élevèrent à 351 livres.

Un peu auparavant, M. de Penaros avait voulu assujettir les habitants du bourg de La Martyre à son moulin du Kan ; mais le corps politique n'eut qu'à produire des titres de privilèges pour le faire renoncer à ses prétentions, le 15 Janvier 1741.

Malfaiteurs. — Parfois, le corps politique avait à faire appel à la Justice pour chercher des malfaiteurs.

« Le deuxième feuvrier mil sept cent quarante et quatre, nous fabriques en charge de l'église de Notre-Dame de La Martyre déclarons et certifions avoir connaissance parfaite du désastre et de l'incendie arrivée à La Martyre occasionnée par quelque main malheureuse ou par quelque personne malintentionnée, et voici en peu de mots sur quoy nous fondons notre preuve apparente ou certaine pour vous donner l'évidence de ces personnes malintentionnées, vous saurez que le vingt Janvier mil sept cent quarante et quatre environ onze heures et minuit quelque personne mal intentionnée jetta deux grands tizons parmi la lande qui, estait dans la boutique du grand magazin où estaient pour ainsi dire toutes les perches et quantité de planches qui estaient nécessaires pour lever tant les boutiques que les tinettes au temps de la grande foire, et qu'au grand secours des personnes courageuses on vint à bout de remédier à la mauvaise intention que l'on avait de bruller le grand magazin au dessus duquel demeurait le sieur Kermerien notaire royal apostolique : sur l'entrefaite d'un accident si triste ne sachant à quoy attribuer un si fâcheux événement nous demeurons tranquilles après une totale extinction d'un si ardent feu qui menaçait ruine ; mais trois jours après le même magazin appartenant à l'église fut attaqué avec plus de violence que jamais au grand étonnement de tout le monde ; de là nous connûmes que ce ne pouvait être qu'une pure malice ou une vengence ouverte, car tous ceux du bourg estaient témoings que l'on trouva dans deux fenêtres du dit magazin des charbons ardents sortant du foyer avec un peu de lande sèche qui les couvrait. La première fenêtre est située au levant sur les degrez du dit sieur Kermerien et la seconde au midy à une distance de vingt pas ou environ. Sur l'entrefait augurant en quelque façon que ce ne pouvait être qu'une pure malice nous avons jugé à propos qu'estant chargés de ce bien comme appartenant à l'église qu'il estait de notre devoir d'assembler le corps politique pour en donner leur avis et décision, là dessus nous avons fait boucher les dites fenêtres conséquemment à l'avis du corps politique pour obvier à un plus grand malheur, mais non obstant nos soins et vigilence il est arrivé que le vingt et six du même mois après tous les attentats et les attaques on est venu à bout du malheureux dessein d'incendier le dit magazin. A une perte si ingrate et si considérable, nous croions et avec raison que c'est notre devoir comme véritables conservateurs du bien de l'église et fabriques en charge autorisés pour les années 1744, 1745 de vous demander une seconde délibération au sujet d'une telle perte et accident pour sçavoir si vous serez d'avis que l'on rebâ­isse le dit magazin et que nous rapportions nos plaintes aux messieurs de la justice pour obtenir des lettres monitoriales afin de découvrir les aggresseur d'un tel accident ».

1er Janvier 1753 : « Nous soussignés délibérants comportants le corps politique de la trève de La Martyre... assistés de messire François Cren curé de La Martyre, tous assemblés au lieu ordinaire des délibérations de la ditte église, ayant vu et considéré qu'après pareil vol comme celui qui a été nouvellement fait des archives de la ditte église, il n'y a plus d'assurance de laisser aux dits archives les fonds du revenu de la ditte église et ayant entendu qu'on attaque ainsi ailleurs les églises par des voies aussi extraordinaires que celles que ces malfaiteurs ont employées pour le vol de cette église, sommes d'avis qu'une partie du vol de la ditte église nous ayant été rendue par M. le recteur de Guimiliau à lui remis par des particuliers, laquelle partie du vol consiste en cent cinquante neuf bagues d'argent et argent doré, un petit crucifix d'argent, une croix aussi d'argent à usage de femmes, quelques morceaux de la croix de vermeil et environ neuf livres de monnaie en une poche … »

(abbé Kerouanton)

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