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LES ORDRES MILITAIRES OU DE CHEVALERIE

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La plupart des ordres de chevalerie furent en même temps religieux et militaires. Les membres s'engageaient par des voeux, se soumettaient à des règles d'abstinence et d'obéissance qui leur étaient imposées. Cette double organisation leur donna une force d'action peu commune et une importance remarquable. 

"Nulle part la chevalerie ne se montre plus digne d'admiration que dans son institution militaire religieuse. Là elle accepte le sacrifice de toutes les affections, le renoncement à la gloire du guerrier comme au repos du moine, et charge du double fardeau de ces deux existences le même individu, en le vouant tour à tour aux périls du champ de bataille et au soulagement de la souffrance. Les autres chevaliers allaient en quête d'aventures pour leur dame et l'honneur, ceux-ci pour secourir l'indigence et le malheur. Le grand maître des hospitaliers se faisait une gloire du titre de "gardien des pauvres du Christ". Celui de l'ordre de Saint-Lazare, devait toujours être un lépreux. Les chevaliers appelaient les pauvres "nos maîtres". Effets admirables de la religion, qui, dans des siècles où toute la puissance dérivait du glaive, savait humilier la valeur et lui faire oublier cet orgueil qu'on en croit inséparable".  (César Cantu, "Histoire Universelle").

C'est à la naissance du christianisme qu'il faut reporter l'époque de la fondation de ces ordres. Une grande partie des ordres de chevalerie sont éteints, en raison même des circonstances qui déterminèrent leur création et qui ont cessé d'exister. D'autres, au contraire, sont arrivés jusqu'à nous, dépouillés seulement des formes qui n'étaient plus en harmonie avec les moeurs, les usages et les coutumes de notre société. Tels sont les ordres de Calatrava, de Malte, .... 

 

Voir Histoire de France et de Bretagne : ordres de chevalerie,chevalerie,ordres militaires,ordres religieux "Liste et Dictionnaire Historique des Ordres de Chevalerie" (cliquer)

 

Ordre saint Jean de Jérusalem

Chevaliers de Rhodes, Chevaliers de saint Jean d'Acre

Dès le milieu du XIème siècle, des marchands d'Amalfi avaient obtenu du calife d'Egypte l'autorisation de bâtir à Jérusalem un hôpital, qu'ils placèrent sous l'invocation de saint Jean, et où étaient reçus et hébergés les pauvres pèlerins qui venaient visiter la Terre-Sainte. Godefroi de Bouillon et ses successeurs encouragèrent cette charitable institution, et firent, à la maison de Saint-Jean, des donations considérables. Pierre Gérard, originaire de l'île de Martigues en Provence, proposa aux frères qui desservaient cet hôpital de renoncer au siècle, de revêtir un habit régulier, et de former un ordre monastique, non cloîtré, dont tous les membres prendraient le titre d'Hospitaliers. Le pape Pascal II, en nommant Gérard administrateur de l'hôpital confirma le nouvel institut, prit les Hospitaliers sous sa protection, et leur accorda divers privilèges.

Les règles de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem ne prescrivaient pas seulement aux religieux qui en faisaient partie les trois vœux de chasteté, de pauvreté et d'obéissance. Ces religieux devaient, en outre, joindre l'exercice des armes à la pratique des devoirs de l'hospitalité, afin de défendre le royaume de Jérusalem contre les entreprises des infidèles. L'occasion s'offrit bientôt à eux de sortir d'un rôle purement charitable et de devenir hommes de guerre.

Chassés de Jérusalem par Saladin victorieux, qui en avait repris possession (le 19 octobre 1191), les Hospitaliers furent les derniers à quitter la Terre-Sainte, et transportèrent leur hôpital à Margat, après avoir racheté aux Sarrasins plus de mille croisés captifs. Ils y restèrent jusqu'à la fin du siége d'Acre par les chrétiens, siége mémorable, auquel ils avaient pris une part active et glorieuse, et ils allèrent alors s'établir dans la ville reconquise, en adoptant le nom de Chevaliers de Saint-Jean d'Acre. Expulsés encore une fois de leur nouvelle résidence par les infidèles, les Hospitaliers demandèrent au roi de Chypre la permission de se fixer en ses Etats et de reconstituer la maison centrale de leur ordre dans la ville de Limisso, où ils se rendirent par groupes isolés, à mesure que quelques-uns d'entre eux pouvaient se soustraire aux poursuites des flottes musulmanes. C'était un spectacle vraiment touchant de les voir, au sortir de leurs vaisseaux, épuisés par les fatigues de la guerre, couverts de blessures, ne pouvant surtout se consoler d'avoir survécu à la perte de la Palestine.

Le grand maître des chevaliers de Saint-Jean d'Acre, Jean de Villiers, convoqua en Chypre un chapitre général, pour délibérer sur le parti qu'il convenait d'adopter à la suite des derniers désastres de la croisade, et pour prévenir l'extinction complète de l'ordre, qui avait été décimé dans la guerre contre les infidèles. Les Hospitaliers de toutes les nations répondirent à l'appel de Jean de Villiers. Jamais assemblée n'avait été si nombreuses depuis la fondation de l'ordre. Les chevaliers présents, entraînés par la parole éloquente du grand-maître, jurèrent de verser leur sang pour recouvrer la possession du Saint-Sépulcre.

En dépit des sages mesures conseillées par Jean de Villiers, les Hospitaliers n'étaient plus en sûreté à Limisso. Ils avaient à se garder de deux ennemis également redoutables : les Sarrasins, qui menaçaient sans cesse l'organisation navale et militaire des chevaliers, et le roi de Chypre, qui semblait avoir l'intention de ruiner l'ordre, auquel il venait d'imposer une capitulation onéreuse. Aussi Villaret, le nouveau grand-maître, proposa-t-il, à ses frères d'armes de se retirer dans l'île de Rhodes, de s'y retrancher, et d'y attendre en toute sécurité le moment propice de rentrer en Palestine. Malheureusement, les forces de l'ordre de Saint-Jean n'étaient pas suffisantes pour tenter une si audacieuse entreprise, et le grand-maître invita les chrétiens d'Occident à entreprendre une nouvelle croisade, en tenant le dessein de son expédition secret. Les croisés accoururent en grand nombre, au port de Brindes, en Italie, où le rendez-vous général devait avoir lieu. Le grand maître se contenta de choisir les plus nobles et les mieux armés, avec lesquels il s'embarqua pour l'île de Rhodes. Il réussit à y débarquer sans obstacle sa petite armée, ses vivres, ses machines de guerre, et il commença le siége de la capitale, qui était bien fortifiée et bien pourvue de défenseurs. Ce siége dura quatre ans, au bout desquels la ville fut prise d'assaut. Les autres forteresses du pays subirent le même sort, et l'île se soumit tout entière à la domination des Hospitaliers (en 1310). Ils devaient, pendant plus de deux siècles, avoir à la défendre contre les attaques, sans cesse renouvelées, des infidèles.

Sous le magistère de Joubert ou Jacques de Milly, grand-prieur d'Auvergne, les Chevaliers de Rhodes (les Hospitaliers avaient pris et conservé ce nom, en mémoire d'une victoire si glorieuse pour l'ordre de Saint-Jean) repoussèrent une première fois les Turcs Ottomans (en 1455).

Cependant, tout danger n'était pas conjuré pour l'ordre de Rhodes. Une rupture semblait imminente avec le sultan d'Egypte, adversaire non moins formidable que Mahomet II, sultan de Constantinople, et les chevaliers étaient encore obligés de tenir tête aux Vénitiens, qui, ayant opéré une descente dans l'île, y avaient commis plus de cruautés et de ravages que les Sarrasins et les Turcs. Le grand-maître Raimond Zacosta, successeur de Jacques de Milly, profita d'un moment de trêve pour élever un nouveau fort, destiné à défendre la ville et le port de Rhodes. Cette forteresse inexpugnable, construite sur des rochers avancés dans la mer, reçut le nom de Saint-Nicolas, à cause d'une chapelle consacrée à ce saint, qui se trouvait enfermée dans son enceinte.

Comme les corsaires turcs faisaient des descentes continuelles dans les îles de la religion, nonobstant la cessation des hostilités, le grand-maître envoya sur les côtes de Turquie les galères de l'ordre, qui usèrent du droit de représailles. Mahomet II en conçut un tel ressentiment, qu'il jura de chasser de leur île les chevaliers de Rhodes. Il confia la conduite de l'expédition à Misach Paléologue, renégat grec de la maison impériale, lequel, parvenu au grade de grand vizir, engageait depuis longtemps le grand-seigneur à s'emparer de l'île de Rhodes. Cent soixante vaisseaux de guerre et une armée de cent mille hommes arrivèrent devant Rhodes, le 23 mai 1480. La flotte turque essayait, par des décharges incessantes d'artillerie, de favoriser le débarquement des troupes, tandis que les chevaliers, protégés par les canons de la ville et des forts, s'avançaient dans la mer l'épée à la main, ayant de l'eau jusqu'à la ceinture, et allaient au-devant des barques chargées d'assaillants.

Les infidèles parvinrent enfin à prendre terre, et se retranchèrent sur le mont Saint-Etienne. Après que les chevaliers eurent été vainement sommés de se rendre, un ingénieur allemand, qui avait accompagné Paléologue et qui présidait aux opérations du siége, lui conseilla de concentrer d'abord ses efforts sur la tour Saint-Nicolas, dont la prise le rendrait certainement maître de la place. Plus de trois cents coups de canon abattirent le pan de la muraille qui faisait face à la ville, et les Turcs s'élancèrent à l'assaut. Pierre d'Aubusson, grand-prieur d'Auvergne, récemment élu grand-maître, debout sur la brèche, donna aux chevaliers l'exemple du courage : "C'est ici leur dit-il, le poste d'honneur qui appartient à votre grand-maître".

Exaspéré d'une résistance si énergique, le vizir résolut de se défaire de Pierre d'Aubusson par le fer ou par le poison. Mais un ingénieur, qui s'était chargé de cette odieuse commission, fut découvert et mis en pièces par le peuple de Rhodes, au moment même où on le conduisait au supplice.

Misach Paléologue proposa d'ouvrir une conférence, où l'on traiterait de la capitulation. Le grand-maître y consentit, afin d'avoir le temps d'élever de nouveaux retranchements pour remplacer ceux que le siége avait détruits, et l'entrevue eut lieu sur le bord du fossé, entre un des principaux officiers de l'armée turque et le châtelain de Rhodes. L'envoyé du vizir représenta qu'en l'extrémité à laquelle la ville se trouvait réduite, avec ses murailles rasées, ses tours abattues, ses fossés comblés, il suffirait pour s'en rendre maître, d'un assaut de deux heures. En conséquence, il exhorta les chevaliers à prévenir, par une composition honorable, le massacre général des habitants. D'Aubusson, caché à peu de distance, avait entendu les paroles artificieuses de l'officier turc. Par son ordre, le châtelain de Rhodes répondit au vizir que ses espions l'avaient mal renseigné : que derrière les fossés il y avait des retranchements dont la prise lui coûterait bien du monde, que la ville était défendue par des chrétiens, animés tous de la même ardeur, résignés à sacrifier leur vie au triomphe de la religion, et que l'ordre des chevaliers de Rhodes n'engagerait aucune négociation amiable, si le traité devait porter atteinte à son honneur et aux intérêts de la foi.

L'orgueilleux vizir, irrité de cette noble réponse, jura de passer au fil de l'épée tous les chevaliers : il fit même aiguiser un grand nombre de pieux pour empaler les habitants, et, tandis que le feu de son artillerie redoublait d'intensité, il donna le signal de l'assaut. Les Turcs, qui avaient planté leurs drapeaux sur les remparts, en furent chassés par les assiégés, à la tête desquels combattait le grand-maître : cinq fois blessé, couvert de sang, Pierre d'Aubusson refuse de quitter le théâtre du combat, qu'il soutient par son exemple. Ce sublime héroïsme électrise les chevaliers, qui fondent sur les Turcs avec l'énergie du désespoir, et les mettent en déroute complète. Mais ce n'était point une victoire définitive, qui pût assurer aux chevaliers de Rhodes la tranquille possession de l'île, et les tenir désormais à l'abri de l'agression des Turcs. Depuis la mort de Mahomet II, ils eurent entre les mains un précieux otage qui n'était autre que Zizim, frère du sultan Bajazet, et son redoutable compétiteur à l'empire des Turcs.

En 1522, le sultan Soliman II dit le Magnifique, qui avait trouvé dans les archives de son père un compte-rendu exact de l'île de Rhodes, résolut d'y porter la guerre, sous prétexte de punir les chevaliers des pertes qu'ils faisaient éprouver chaque jour à la marine turque, et de paralyser leurs efforts en faveur de la Terre Sainte. Secrètement instruit de l'insuffisance des forces matérielles de l'île, par la perfidie d'André Amaral, chancelier de l'ordre et grand-prieur de Castille, qui ne pouvait pardonner aux chevaliers de lui avoir préféré le grand-maître Philippe de Villiers de l'Ile-Adam, le sultan entreprit ce siége fatal, où la ruse et la trahison furent ses plus puissants auxiliaires. En vain, il rassemble une flotte de quatre cents voiles, une armée de cent cinquante mille hommes et soixante milles pionniers. En vain, il foudroie les remparts du feu de ses batteries, creuse des tranchées et des mines sans relâche, harcèle les assiégés par des attaques incessantes. L'insuccès de ses armes eût certainement lassé sa persévérance, et il se serait décidé à lever le siége, si le traître Amaral ne lui avait pas fait savoir secrètement le mauvais état de la place de la garnison. Les Turcs donnèrent enfin, le 30 novembre, un assaut qu'on supposait devoir être le dernier. Ils pénétrèrent jusque dans les retranchements, et le combat n'en fut que plus terrible. Avertis du danger par le tocsin, le grand-maître, les chevaliers et les habitants accourent de tous côtés et se précipitent sur les ennemis, qui se croyaient déjà vainqueurs et qui sont contraints de battre en retraite. Chagrin et découragé à la suite d'un tel échec, Soliman II prit le parti d'offrir aux chevaliers de Rhodes une capitulation. Il lança, dans la ville, plusieurs lettres qui exhortaient les habitants à se soumettre, et les menaçaient de la dernière rigueur s'ils continuaient une résistance inutile. Villiers de l'Ile-Adam répondit d'abord que les chevaliers de Saint-Jean ne traitaient jamais que l'épée à la main avec les infidèles. Mais il dut céder aux instances impératives des principaux habitants, qui se montraient déterminés à prendre, malgré lui, les mesures urgentes pour sauver la vie et l'honneur de leurs femmes et de leurs enfants. Le sultan ayant arborer une enseigne de paix, le grand-maître en planta une, de son côté, sur le rempart, et demanda trois jours de trêve afin de régler la capitulation. Mais Soliman, craignant que des secours n'arrivassent aux assiégés, rejeta ces propositions, et ordonna que l'assaut fût donné encore une fois. Les chevaliers, réduits à une poignée d'hommes, n'ayant d'autre abri que la barbacane du bastion d'Espagne, obligèrent encore l'ennemi à se retirer. Le lendemain une attaque plus vive de la part des Turcs rejeta dans la ville les défenseurs du bastion, écrasés par le nombre, et les habitants épouvantés vinrent conjurer le grand-maître de reprendre les négociations. Achmet, ministre de Soliman, qui savait avec quelle impatience son maître souhaitait la fin de la guerre, obtint enfin la reddition de Rhodes à des conditions si honorables et si avantageuses, qu'elles témoignaient hautement de l'estime que les vaincus inspiraient aux vainqueurs.

Les chevaliers quittèrent l'île, au nombre de quatre mille, sous la conduite du grand-maître Villiers de l'Ile-Adam. Après avoir erré à Candie et en Sicile, ils se fixèrent enfin dans l'île de Malte, que leur céda Charles-Quint, et qui devint définitivement la résidence de l'ordre (en 1530).

Trente cinq ans plus tard, à la fin du règne de Soliman II, les Turcs recommencèrent leur attaque, sous prétexte de tirer vengeance de la prise d'un galion des sultanes, chargé de marchandises d'une grande valeur. Mustapha, bacha de Bude, vaillant capitaine, général de l'armée ottomane, débarqua dans l'île le 18 mai 1565. Après quelques escarmouches, les Turcs attaquèrent avec violence le fort Saint-Elme et s'en emparèrent, malgré l'héroïque défense des chevaliers de Malte (tel était le nouveau titre des membres de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem), défense qui dura vingt quatre jours et coûta la vie à quatre mille Turcs, entre autres aux fameux corsaire Dragut, vice soudan de Tripoli. Le fort de Saint-Michel et le bourg, battus en brèche par les canons de siége, furent réduits en poudre. Malte, qui avait perdu deux mille de ses défenseurs, ne résistait plus que grâce au courage invincible du grand-maître Jean de la Valette et d'un petit nombre de chevaliers, tous résolus à mourir jusqu'au dernier pour la religion. Heureusement don Garcia de Tolède, vice roi de Sicile, vint leur porter secours avec soixante galères. Pendant les quatre mois que le siége avait duré, l'armée turque tira soixante dix huit mille coups de canon, perdit quinze mille soldats et huit mille matelots. De son côté, l'ordre des chevaliers de Rhodes avait à pleurer la mort de plus de trois mille combattants. Le grand-maître décréta que chaque année, la veille de Notre-Dame de Septembre, on réciterait des prières publiques dans toutes les églises de l'ordre, afin de remercier Dieu du secours inespéré qui avait délivré les assiégés, et que le jour précédent on célébrerait un service commémoratif en l'honneur de ceux qui étaient tombés pour la défense de la Foi.

Depuis lors, la ville et l'île, où resta le siége de l'ordre, ne furent plus inquiétés par les Turcs, et le grand-maître Jean de la Valette fit bâtir la ville neuve de Malte, appelée de son nom cité Valette.  

 

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Ordre de Malte

Les membres de l'ordre de Malte étaient partagés en trois classes : les Chevaliers, les Chapelains et les Frères servants. La première classe comprenait ceux que leur grande naissance et le rang qu'ils avaient occupé précédemment dans les armées destinaient au service militaire. On rangeait dans la seconde classe les prêtres et les chapelains, qui devaient remplir les fonctions ordinaires de l'état ecclésiastique et servir d'aumôniers pendant la guerre. En dernier lieu venaient les frères servants, qui n'étaient ni nobles ni ecclésiastiques. Il suffisait pour être admis dans cette troisième classe, de prouver seulement qu'on était né de parents honorables, qui n'avaient jamais exercé des travaux manuels. On distingua dans la suite les frères servants par une cotte d'armes d'une autre couleur que celle des chevaliers. Quant aux aspirants, ils étaient appelés Douats ou Demi-Croix. L'ordre de Saint-Jean de Jérusalem n'existait plus que de nom dans les statuts de l'ordre de Malte, quoique les chevaliers de ce nouvel ordre fussent reconnus, à leur réception, comme "serviteurs des pauvres et des malades". Il y eut encore longtemps, en Espagne, des dames Hospitalières de Saint-Jean de Jérusalem, qui se consacraient au service des hôpitaux et des œuvres de charité. La noblesse accourait des différentes contrées de l'Europe, pour faire partie de l'ordre de Malte, qui avait définitivement remplacé l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, et qui fut divisé en huit langues ou nations, chacune sous la direction d'un chef suprême, nommé grand-prieur, savoir : Provence, Auvergne, France, Italie, Aragon, Allemagne, Castille et Angleterre. Le chef de chacune des langues portait le titre de Pilier ou Bailli cenventuel. Chaque langue était divisée en une multitude de commanderies, équivalant à des bénéfices ecclésiastiques, mais ne dépendant que de son grand-prieur.

L'habit régulier de l'ordre consistait, pour toutes les langues, en une robe noire avec un manteau à pointe de même couleur. Les chevaliers étaient obligés de porter, du côté gauche, une croix de toile blanche à huit pointes, en signe des béatitudes qu'ils devraient toujours avoir en eux, et qui, suivant un document manuscrit conservé à la Bibliothèque de l'Arsenal, étaient : "1- avoir le contentement spirituel, 2- vivre sans malice, 3- pleurer ses péchés, 4- s'humilier aux injures, 5- aimer la justice, 6- être miséricordieux, 7- être sincère et net de cœur, 8- endurer persécution". Plus tard, par suite du relâchement qui s'était introduit dans la règle, les chevaliers ont porté une croix à huit pointes, d'or, émaillée de blancs, suspendue sur l'estomac à un ruban noir.

Le candidat, qui voulait faire profession sous l'habit régulier de Saint-Jean de Jérusalem, se présentait devant le grand autel, un cierge à la main et couvert d'une longue robe sans ceinture, pour indiquer qu'il était libre. Le chevalier assesseur lui remettait alors une épée dorée, en lui disant : "Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit", pour lui enseigner que son devoir lui commandait de dévouer sa vie à la défense de la religion. On lui passait ensuite une ceinture autour des reins, pour marquer qu'il était désormais lié aux vœux de l'ordre. Le profès brandissait l'épée au-dessus de sa tête, en signe de défi porté aux infidèles, et la remettait dans le fourreau, après l'avoir passée sous son bras comme pour la nettoyer, donnant par là à entendre qu'il se conserverait pur de toute souillure. Le chevalier, chargé de le recevoir, lui posait la main sur l'épaule, l'exhortait à servir les pauvres de Jésus-Christ, à accomplir les œuvres de miséricorde et à se consacrer au service de la foi. Le récipiendaire ayant adhéré à ces exhortations, on lui mettait des éperons dorés, pour marquer qu'il devait voler partout où l'honneur l'appellerait, et fouler aux pieds les richesses du monde. Ensuite on lui présentait un cierge allumé, qu'il tenait à la main, pendant qu'on célébrait la messe et qu'on prononçait un sermon, où l'orateur passait en revue les règles et les devoirs imposés à chaque chevalier. Après quoi, on lui demandait s'il avait des dettes, s'il était marié et fiancé, ou s'il n'était pas attaché à un ordre religieux, enfin s'il souhaitait sincèrement appartenir à l'ordre de Saint-Jean. Après avoir répondu à ces questions d'une manière satisfaisante, il était reçu et mené au grand autel. Là, il prononçait ses vœux sur le missel, et on le déclarait aussitôt investi des privilèges accordés à l'ordre par la cour de Rome. On lui rappelait qu'il devait réciter, chaque jour, cinquante Pater et cinquante Ave, l'office de la Vierge, celui des morts et plusieurs Pater, pour le repos de l'âme des chevaliers trépassés.

Pendant qu'on le revêtait du costume des chevaliers, on l'instruisait encore de ses devoirs. En passant les manches, on lui remettait en mémoire l'obéissance qu'il devait à ses chefs. En plaçant la croix blanche du côté du cœur, on lui disait qu'il devait toujours être prêt à donner son sang pour Jésus-Christ qui, par sa mort, a racheté les hommes. Tout était symbole dans les insignes extérieurs de l'ordre de Malte : le manteau noir à pointe, orné du capuce pointu, qui ne se portait que les jours solennels, figurait l'habit de poil de chameau, dont était vêtu saint Jean-Baptiste, le patron de l'ordre. Les cordons, qui attachaient ce manteau autour du cou et qui tombaient sur les épaules, étaient destinés à rappeler la Passion que le Seigneur avait soufferte avec tant de douceur et de résignation. Le manteau de poil de chameau n'était en usage que dans les cérémonies, car les membres de l'ordre portaient à la guerre une cotte d'armes rouge, avec la croix à huit pointes.

 

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Ordre des Templiers ou Chevaliers du Temple

Vingt ans environ après le premier établissement des Hospitaliers, Hugues de Payens et Geoffroy de Saint-Aldemar, ayant entrepris le voyage d'outremer avec neuf gentilshommes, tous d'origine française, avaient obtenu du patriarche Guarimond et de Baudouin II, roi de Jérusalem, l'autorisation de former une association, dont le but était d'agir, de concert avec les Hospitaliers, contre les infidèles, de protéger les pèlerins et de garder le temple de Salomon. Baudouin leur donna une maison dans l'enclos du temple, ce qui leur fit attribuer le nom de Templiers ou Chevaliers du Temple. Ils menèrent d'abord une vie simple et régulière, se contentant de l'humble titre de pauvres soldats de Jésus-Christ. Leur charité et leur dévouement leur acquirent la bienveillance des rois de Jérusalem et des chrétiens d'Orient, qui leur firent de fréquentes et nombreuses donations.

Durant les neuf premières années, de 1118 à 1127, les Templiers n'admirent aucun étranger dans leur communauté. Mais cependant, leur nombre s'étant accru peu à peu, bientôt ils demandèrent au Saint-Siége de vouloir bien confirmer leur institut. Au concile de Troyes (en 1228), Hugues de Payens, assisté de cinq de ses compagnons, présenta les lettres que les frères de la milice du Temple avaient reçues du pape et du patriarche de Jérusalem, avec le titre de leur érection. Le cardinal Matthieu, évêque d'Albe, qui présidait le concile en qualité de légat du pape, leur accorda la confirmation authentique de l'ordre, et une règle spéciale fut écrite pour eux sous la direction de saint Bernard.

Les Templiers devaient entendre la messe trois fois par semaine et communier trois fois l'an. Ils portaient l'habit blanc, symbole de la pureté, et le pape Eugène III y ajouta une croix rouge, pour rappeler le vœu qu'ils faisaient d'être toujours prêts à répandre leur sang pour la défense de la religion chrétienne. Leur règle était d'une grande austérité : elle leur imposait l'exil perpétuel et la guerre sainte jusqu'à la mort. Ils devaient toujours accepter le combat, fût-ce d'un contre trois, ne jamais demander quartier, et ne jamais donner de rançon. Quelque pénible que pût être l'observance d'une pareille règle, ils ne pouvaient s'y dérober, en passant dans un ordre moins rigide.

Les infidèles n'eurent point d'ennemis plus redoutables que ces pauvres soldats de Jésus-Christ, dont on a dit qu'ils avaient la douceur des agneaux et la patience des ermites, et qu'ils montraient à la guerre le courage des héros, la force des lions. Leur étendard, appelé Baucéant, était mi-parti de noir et de blanc avec ces mots : "Non nobis, Domine, non nobis, sed nomini tuo da gloriam" (Ne donne pas à nous, Seigneur, ne donne pas à nous la gloire, mais à ton nom).

Suivant la constitution de saint Bernard, l'ordre du Temple se composait de Milites ou chevaliers destinés à commander, de frères servants, désignés sous le nom d'Armigeri, hommes d'armes, et de Clientes ou Clients, serviteurs chargés de vaquer aux soins domestiques. Les vœux des Templiers étaient à peu près semblables à ceux de Saint-Jean de Jérusalem. Ils juraient de vivre dans la chasteté, la pauvreté et l'obéissance. Quelques-uns obtinrent la permission de se marier, mais sous la condition de donner à l'ordre une portion de leurs biens après leur mort, et de ne plus porter l'habit blanc. La marque distinctive des Templiers était, suivant les uns, une croix patriarche rouge, potencée, selon d'autres, une croix à huit pointes, également rouge et brodée d'or. Comme ils faisaient tous publiquement profession d'extrême pauvreté, il leur était défendu de se servir de meubles précieux, d'ustensiles d'or ou d'argent, de porter à la guerre des housses de velours, des casaques armoriées, des écharpes de soie et d'autres habillements superflus. Ils ne devaient avoir qu'une cotte d'armes de laine blanche.

Il n'y avait guère plus de cinquante ans que l'ordre du Temple était établi, lorsque les chevaliers tinrent à Jérusalem leur premier chapitre général, où se réunirent trois cents gentilshommes et autant de frères servants, dont la plupart étaient Français. Ils élurent un grand-maître, Gérard de Rederfort, et cette élection les détacha de la juridiction du patriarche de Jérusalem. Le grand-maître transporta le siége de l'ordre de Saint-Jean-d'Acre, et il eut plus d'une fois l'occasion, à la tête de ses chevaliers, de signaler sa valeur contre les forces du sultan Saladin, qui voulut reprendre cette ville peu de temps après et qui fut obligé d'abandonner son entreprise.

Les biens des Templiers s'augmentèrent, en peu de temps, d'une façon si prodigieuse, par suite d'aumônes, de donations et de legs testamentaires, que quelques historiens les ont estimés à cent douze millions de revenu. D'autres se contentent de dire que l'ordre possédait des richesses immenses dans la chrétienté, avec neuf mille maisons. En 1129, ils avaient déjà des établissements dans les Pays-Bas. Six ans plus tard, le roi de Navarre et d'Aragon, Alphonse Ier, avait institué l'ordre héritier de ses Etats, mais les chevaliers eurent bien de la peine à occuper quelques villes d'Aragon. Ils se trouvaient alors maîtres de dix sept places fortes dans le royaume de Valence. Ils furent dépositaires, dans leur maison de Londres, de la majeure partie des richesses de la commune d'Angleterre, et le roi Philippe Auguste, au moment de partir pour la Terre Sainte, leur confia aussi ses trésors et ses archives.

Les Templiers étaient de véritables hommes de guerre, et l'histoire des croisades est remplie de leurs faits d'armes. Il est peu de chevaliers qui aient acquis autant de gloire dans toutes les expéditions d'outremer. Quoique inférieurs en nombre dans leurs combats contre les infidèles, qui les redoutaient plus que les croisés, ils remportèrent presque toujours l'avantage : la défense de Gaza, la bataille de Tibériade, la prise de Damiette, la croisade d'Egypte, sont des témoins éclatants de leur intrépidité et de leur vaillance.

L'ordre du Temple avait atteint l'apogée de sa fortune, de sa prospérité et de sa renommée : il ne pouvait plus que déchoir. Regorgeant de richesses, comblés de privilèges qui les rendaient presque souverains, car ils ne pouvaient avoir d'autres juges que la pape ou eux-mêmes, les Templiers finirent par se corrompre dans ce luxe et dans l'oisiveté. Ils oublièrent le but de leur fondation, dédaignèrent de s'astreindre à leur règle et n'obéirent plus qu'à l'amour du gain et à la soif du plaisir. Leur cupidité, leur orgueil, n'eurent bientôt plus de bornes. Ils prétendirent s'élever au-dessus des têtes couronnées, ils usurpèrent et pillèrent indifféremment les terres des infidèles et des chrétiens.

Jaloux des Hospitaliers, ils molestent un gentilhomme, vassal de l'ordre de Saint-Jean, et le chassent d'un château que celui-ci possédait auprès de leur résidence de Margat. De là entre les deux ordres une vive querelle qui s'envenime et se change en une sorte de lutte permanente. Le pape se voit dans la nécessité d'écrire aux grands-maîtres des deux ordres, afin de les exhorter à rétablir entre eux l'union et la paix, à oublier leurs rancunes, si dangereuses pour la chrétienté, si funestes pour les intérêts de la Terre Sainte. Un accord apparent fait cesser les hostilités ouvertes, mais les Templiers n'avaient pas renoncé à leur haine et ils négligent aucune occasion de la faire sentir aux chevaliers de Saint-Jean. Au reste, ils ne se souciaient guère alors de soutenir la sainte cause que leur ordre avait mission de défendre. Ils signent un traité d'alliance avec le Vieux de la Montagne, chef de la secte des Assassins ou Ismaéliens, les plus implacables ennemis de la croix, et le laissent, moyennant un tribut, se fortifier dans le Liban. Ils guerroient contre le roi de Chypre et le prince d'Antioche, ravagent la Thrace et la Grèce, où les seigneurs chrétiens avaient fondé des principautés, des marquisats et des baronnies, prennent d'assaut la ville d'Athènes et massacrent Robert de Brienne, qui en était duc.

En effet, la conscience de leur force, de leur richesse et de leur pouvoir avait inspiré aux Templiers une indomptable audace. On leur reprochait surtout leur orgueil, qui était proverbial. Leur foi et leurs mœurs étaient suspectes, et, dès l'année 1273, le pape Grégoire X avait pensé à fondre leur ordre dans celui des Hospitaliers. Au commencement du siècle suivant, le roi de France Philippe le Bel reçut les dénonciations les plus graves sur les désordres affreux dont le bruit s'était déjà accrédité, et il en conféra avec le pape Clément V, qui jugea d'abord les faits reprochés aux Templiers tout à fait invraisemblables. Mais le grand-maître ayant insisté pour que l'on examinât l'affaire régulièrement, le pontife demanda au roi un mémoire sur ce qu'il en savait.

Philippe le Bel voulut procéder lui-même et fit arrêter au même jour tous les Templiers dans ses Etats : à Paris, le grand-maître Jacques de Molai qui revenait de Chypre, fut au nombre des prisonniers. Sur cent quarante chevaliers interrogés à Paris, tous, à l'exception de trois, avouèrent que, dans une initiation secrète, les nouveaux chevaliers devaient renier Jésus-Christ et cracher sur la croix, que de plus des pratiques immorales étaient en usage parmi eux. Il y eut aussi plusieurs qui avouèrent des actes d'idolâtrie. Un érudit contemporain, de Wilcke, ministre protestant d'Allemagne, a résumé les travaux de ses deux coreligionnaires : Moldenhawer, qui découvrit, dans la Bibliothèque nationale de Paris, les actes originaux de l'interrogatoire, et Munter, qui trouva, dans la bibliothèque du Vatican, les actes originaux de la procédure faite en Angleterre. Voici le résumé de Wilcke : "Pour ce qui est de renier le Christ et de cracher sur la croix, ces deux faits sont avoués par tous les témoins, à peu d'exceptions près". Malgré l'éclat des aveux, le pape Clément V avait réclamé avec fermeté contre le procédé de Philippe le Bel, représentant à ce prince que les Templiers formaient un corps religieux et dépendaient immédiatement du saint-siége, que par conséquent le roi avait eu tort de se constituer leur juge, et qu'il ne pouvait porter la main ni sur leurs biens ni sur leurs personnes. Philippe le Bel, non sans murmures, reconnut le droit du saint-siége, et le pape interrogea lui-même soixante douze Templiers, dont les aveux confirmèrent les premières dépositions reçues à Paris. L'enquête fut ordonnée en Angleterre, en Italie, en Espagne, en Allemagne. Il n'y eut point partout uniformité dans les réponses aux interrogatoires. Les aveux sur les impiétés et les immortalités furent cependant en très grand nombre, sauf en Espagne : les Templiers aragonais, ayant pris les armes, se mirent en défense dans leurs forteresses, ils furent vaincus par le roi Jacques II et mis aux fers comme rebelles ; en Castille, les Templiers arrêtés et cités devant un tribunal ecclésiastique furent déclarés innocents.

Le pape, après avoir constaté la réalité de graves désordres parmi les Templiers, d'après l'enquête générale et les aveux qu'il avait reçus lui-même, persévéra à se réserver le jugement définitif sur l'ordre. Mais il donna pouvoir à tous les évêques du monde chrétien d'instruire directement la cause des Templiers de leurs diocèses, d'absoudre les innocents et de condamner les coupables, selon la rigueur des lois. Le concile provincial de Paris livra au bras séculier ceux qui furent déclarés relaps et contumaces : cinquante neuf furent brûlés à Paris, derrière l'abbaye Saint-Antoine. Un autre concile provincial, tenu à Senlis, remit de même neuf Templiers relaps au juge séculier, qui leur fit subir aussi la peine du feu. On assure qu'au moment du supplice, ces malheureux rétractèrent leurs aveux, en protestant de leur innocence. Dès que les commissaires du pape apprirent ces exécutions, ils suspendirent leur procédure, déclarant que la terreur jetée dans les esprits par ces supplices ne laissait pas aux accusés assez de tranquillité d'esprit pour ce défendre. De plus, les commissaires du pape engagèrent le concile de Paris à agir avec moins de promptitude.

Quand les nouvelles informations recueillies de toutes parts furent suffisantes, le pape Clément V, qui avait convoqué le concile de Viennes pour y terminer cette affaire importante, prononça, le 22 mars 1312, plutôt l'abolition que la condamnation de l'ordre des Templiers, réservant leurs personnes et leurs biens à sa disposition et à celle de l'Eglise. En Espagne et en Portugal, ces biens furent appliqués à soutenir les défenseurs des chrétiens contre les entreprises incessantes des Sarrasins et des Maures. Mais la majeure partie des biens Templiers, particulièrement pour la France, furent transférés aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, qui, en se portant généreusement au secours de la Terre Sainte, continuaient l'oeuvre pour laquelle les Templiers avaient reçu tant et de si riches donations.

Les graves abus et les crimes même qui avaient motivé la suppression de l'ordre n'avaient point heureusement tout envahi. La plupart des Templiers furent mis en liberté et beaucoup en profitèrent pour entrer dans l'ordre de Saint-Jean, en conservant leurs dignités. C'est ainsi, comme le fait remarquer Wilcke, qu'Albert de Blacas, prieur d'Aix, obtint la commanderie de Saint-Maurice, comme prieur des Hospitaliers, et que Frédéric, grand-prieur de la basse Allemagne, garda le même titre dans l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. 

Le pape s'était spécialement réservé le jugement de la cause du grand-maître Jacques de Molai, du visiteur de France et des commandeurs de Guyenne et de Normandie. Des cardinaux légats, plusieurs évêques français et des docteurs de l'Université de Paris, formèrent le tribunal qui devait prononcer au nom du souverain pontife. Après avoir constaté que ces quatre éminents chevaliers avaient réitéré leurs aveux devant une nouvelle commission, le tribunal, convaincu de leur culpabilité, fit dresser un échafaud devant le parvis de Notre-Dame, et, le lundi 18 mars 1314, les chevaliers furent publiquement condamnés à une prison perpétuelle. Mais alors le grand-maître et l'un de ses chevaliers rétractèrent leurs aveux et s'écrièrent qu'ils étaient innocents. Les cardinaux, surpris de cette rétractation, remirent les prisonniers entre les mains du prévôt de Paris, avec ordre de les représenter le lendemain, afin que le tribunal pût délibérer sur ce nouvel incident. Mais Philippe le Bel, apprenant ce qui se passait, réunit précipitamment son conseil, et, le soir même, il fit livrer au feu le grand-maître et le second chevalier qui avaient rétracté leurs aveux réitérés. Ils subirent cet affreux supplice en protestant de leur innocence. Les deux autres chevaliers, ayant persisté à se reconnaître coupables, furent retenus en prison, mais plus tard on les mit en liberté.

 

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Autres ordres militaires ou de chevalerie

Il y eut encore, pendant le Moyen âge ou à l'époque de la Renaissance, plusieurs autres ordres de chevalerie, ayant plus ou moins le caractère religieux et militaire. Les principaux et les plus connus sont : - en Espagne, l'ordre des chevaliers de Calatrava, l'ordre des chevaliers teutoniques ; - en Allemagne, l'ordre de la Toison d'Or ; - dans les Pays-Bas, en Espagne et en Autriche, l'ordre de Saint-Maurice ; - en Savoie, l'ordre de Saint-Lazare ; - en Toscane, des chevaliers de Saint-Etienne ; - en France, les ordres de Saint-Michel et du Saint-Esprit, qui furent seulement honorifiques, quoique le premier ordre du Saint-Esprit, fondé en 1352 par Louis d'Anjou, roi de Jérusalem et de Sicile, ait eu pour objet de rétablir une institution chevaleresque et essentiellement militaire en vue d'une nouvelle croisade.

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Ordre des chevaliers de Calatrava

Les chevaliers de Calatrava, à qui le fondateur dom Raymond, abbé de Cîteaux, imposa la règle de son monastère (en 1158), se signalèrent par de brillants exploits, surtout contre les Maures d'Espagne et d'Afrique. Les princes qu'ils avaient servis, dans ces guerres qu'on qualifiait de saintes comme les croisades en Orient, leur accordèrent des biens et des privilèges considérables. Les chevaliers, qui faisaient les trois voeux de pauvreté, d'obéissance et de chasteté, portaient une croix rouge fleurdelisée sur un manteau blanc, comme les Templiers. Depuis le règne de Ferdinand le Catholique et d'Isabelle, les rois d'Espagne ont toujours été les grands-maîtres de cet ordre, qui avait acquis et qui conserva longtemps beaucoup d'importance, quoiqu'il ne fût plus qu'une marque distinctive de noblesse. L'ordre d'Alcantara, qui avait eu la même origine que l'ordre de Calatrava, eut aussi les mêmes destinées et la même décadence. Il ne faut pas oublier que l'Espagne était le seul pays qui possédait un ordre militaire de dames. Placentia ayant été défendu héroïquement contre les Anglais par les femmes de la ville, en 1390, le roi de Castille Jean Ier créa en leur honneur l'ordre des dames de l'Echarpe, lequel fut réuni plus tard à l'ordre de la Bande, institué au XIVème siècle pour combattre les Maures.

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Ordre des chevaliers Teutoniques

Les chevaliers Teutoniques, dont l'ordre avait été institué en 1128, à Jérusalem, par les croisés allemands, suivaient la règle de Saint-Augustin. Ils avaient en outre, des statuts particuliers, à peu près semblables à ceux des chevaliers de Saint-Jean et du Temple, dont ils obtinrent les immunités. Leur premier grand-maître, Henri Walpot, établit sa résidence près de Saint-Jean d'Acre. L'ordre était divisé, comme celui de Saint-Jean, en chevaliers, chapelains et servants. Les membres portaient, sur un manteau blanc, du côté gauche, une croix noire un peu pattée et ornée d'argent. Pour entrer dans l'ordre, il fallait avoir atteint l'âge de quinze ans, être fort et robuste, afin de résister aux fatigues de la guerre. Les chevaliers, qui faisaient voeu de chasteté, devaient éviter les entretiens des femmes, et il ne leur était même pas permis de donner un baiser filial à leur propre mère, en la saluant. Ils n'avaient, en propre, aucun bien et ils laissaient toujours ouvertes leurs cellules, pour que l'on pût voir à toute heure ce qu'ils faisaient. Leurs armes n'étaient ni dorées ni argentées, et pendant longtemps ils vécurent dans une grande humilité. Le plus célèbre de leurs grands-maîtres, Hermann de Salza (en 1210), reçut du pape Honorius III et de l'empereur Frédéric II, qu'il avait réconcilié avec le saint-siége, de grands biens et de grands honneurs.

Les chevaliers Teutoniques ont conquis la Prusse, la Livonie, la Courlande, et, dès 1283, ils étaient maîtres de tout le pays compris entre la Vistule et de Niémen. En 1309, ils abandonnaient Venise, où le grand-maître avait établi sa résidence ordinaire, vingt ans auparavant, et choisirent Marienbourg pour capitale. L'ordre était alors au plus haut point de prospérité, et sa domination en Allemagne eut pour la Prusse les plus heureux résultats. Mais le luxe altéra bientôt la foi religieuse des chevaliers et des luttes intestines, provoquées par l'élection des grands-maîtres, avaient introduit dans l'organisation de l'ordre Teutonique de nouveaux éléments de décadence. 

Entraîné dans des guerres sans fin contre la Lithuanie et la Pologne, l'ordre, auquel la désastreuse bataille de Grümwald (en 1410) enleva sa bannière, ses trésors et ses principaux défenseurs, dut son salut à Henri de Plauen. Après la mort de cet illustre grand-maître, les chevaliers, qui par le traité de Thorn avaient recouvré leurs possessions territoriales, les perdirent successivement, en peu d'année (1422-1436). Pendant treize ans, le roi de Pologne, Casimir IV, appelé en Prusse par la population que le despotisme des chevaliers avait soulevée, ravagea le pays qu'il s'était chargé de défendre. L'ordre, chassé de Marienbourg et de Konitz, ne conserva plus que la Prusse orientale, sous la dépendance de la Pologne, et le grand-maître, dont Koenigsberg devint la résidence, était prince polonais et conseiller du royaume. Comme la Prusse était un fief de l'Eglise, le grand-maître des religieux connus sous le nom de chevaliers Teutoniques faisait serment de conserver ce fief à l'Eglise et à son ordre. Albert de Brandebourg, dernier grand-maître, était lié par ce serment, et de plus par les trois voeux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance qu'il avait prononcés en entrant dans l'ordre. Pour se débarrasser de la gène de ses serments et de ses voeux, il se fit luthérien et il partagea le domaine de ses religieux avec son oncle, le vieux Sigismond, roi de Pologne, qui lui reconnut, à ce prix, le titre de duc héréditaire de Prusse. Telle fut l'origine de la famille royale de Prusse. Après avoir acquis si facilement un domaine et un titre, Albert de Brandebourg épousa la fille du roi du Danemark. On comprend que l'ordre des chevaliers Teutoniques s'éteignit naturellement.

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Ordre des chevaliers de la Toison d'Or

L'ordre des chevaliers de la Toison d'Or ne fut institué qu'en 1449 par Philippe le Bon, duc de Bourgogne et comte de Flandres, pour engager les seigneurs de sa cour à faire, avec lui, la guerre aux Turcs, et pour attacher surtout, par des liens plus étroits, ses sujets au service de l'Etat. La croisade qui avait été le prétexte de la fondation n'eut pas lieu, mais l'ordre subsista et subsiste encore à titre de distinction héraldique.

Cet ordre, placé sous l'invocation de saint André, était à l'origine composé de vingt quatre chevaliers, d'une haute noblesse, exempts de tout reproche. Le duc de Bourgogne éleva ce nombre à trente et un. Charles Quint le porta ensuite à cinquante et un. L'élection des chevaliers se faisait dans les chapitres de l'ordre, à la pluralité des voix. Le signe distinctif est un collier d'or, émaillé de la devise du duc, qui était de doubles fusils (briquets d'acier) et de pierres à feu entrelacées, avec ces mots : Ante ferit quam micat (il frappe avant que la lumière brille). A l'extrémité du collier est suspendue la figure d'un mouton ou d'une toison d'or, avec cette autre légende : Pretium non vile laborum (prix honorable des travaux). Depuis le mariage de Philippe le Beau, fils de l'empereur Maximilien, et de Marie de Bourgogne, avec Jeanne d'Aragon (en 1496), le roi d'Espagne et l'empereur d'Autriche sont, dans leurs Etats, chefs souverains de l'ordre de la Toison d'Or.  

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Ordre des chevaliers de Saint-Maurice et de Saint-Lazare

La Savoie eut aussi un ordre de chevalerie militaire, qui s'est perpétué jusqu'à nos jours. Lorsque Amédée VIII, en faveur de qui la Savoie avait été érigée en duché (en 1416) par l'empereur Sigismond, prit la résolution de vivre dans la retraite, il voulut instituer un ordre de chevalerie séculière dont il serait le chef suprême. Il choisit pour résidence un ermitage, qu'il fit construire à Ripailles, auprès du lac de Genève, et plaça le nouvel institut sous la protection de saint Maurice, patron de la Savoie. Les premiers chevaliers, qui n'étaient d'abord que six, eurent pour marque une croix de taffetas blanc, cousue sur leur habit. Mais les ducs de Savoie, successeurs d'Amédée VIII, avaient tellement négligé cet ordre de chevalerie, qu'il allait complètement tomber et disparaître, quand le duc Emmanuel Philibert obtint, en 1572, pour le relever, une bulle de Grégoire XIII. Peu de temps après, une nouvelle bulle papale réunit les chevaliers de Saint-Lazare aux chevaliers de Saint-Maurice.

Les chevaliers prononçaient les trois voeux, comme les anciens chevaliers du Temple, juraient fidélité aux ducs de Savoie, et s'engageaient à combattre les hérétiques, qui, de Genève, menaçaient sans cesse les frontières du duché. L'ordre possédait de riches commanderies et ses principales maisons étaient à Nice et à Turin.

La marque de l'ordre des Saints-Maurice et Lazare était une croix blanche terminée en fleurons, sous laquelle se trouvait une autre croix arrondie de sinople, avec l'image des deux saints. 

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Ordre des chevaliers de Saint-Etienne

Quant aux chevaliers de Saint-Etienne, institués en 1562 par Côme de Médicis, devenu grand-duc de Toscane, ils ont joué un rôle actif, surtout dans les combats de mer, qui avaient pour théâtre la Méditerranée, et on les retrouve souvent donnant la chasse aux galères ottomanes, ou bien opérant des descentes sur les côtes des Etats barbaresques. Ils prétendaient, au milieu du XVIIème siècle, avoir délivré, depuis leur création, plus de cinq mille six cents chrétiens captifs, et de quinze mille esclaves.

Cet ordre avait, dans ses usages et cérémonies, des rapports frappants avec l'ordre de Malte. Il était divisé en chevaliers militaires et en chevaliers ecclésiastiques.

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Ordre de L'Etoile, Ordre du Navire

Il y eut, en France, plusieurs ordres de chevalerie militaire, créés par les rois, mais leur caractère honorifique les fit considérer comme des récompenses glorieuses offertes aux bons serviteurs de la monarchie plutôt que comme des engagements solennels de prendre les armes dans un but déterminé. Il ne faut pas parler de l'ordre de l'Etoile, qu'on voulait faire remonter au roi Robert et à l'année 1022, mais dont l'origine véritable date seulement du règne du roi Jean II. Les ordres militaires royaux les plus anciens sont ceux que Louis IX institua pour encourager la noblesse à faire avec lui le voyage d'outre-mer, et à prendre part aux croisades. L'ordre de la Cosse de Geneste, fondé en 1254, fut attribué plus tard aux sergents du roi, garde de cent gentilshommes chargés spécialement de protéger la personne royale contre les assassins envoyés par le Vieux de la Montagne. 

L'ordre du Navire, fondé en 1269, ne survécut guère à la seconde croisade de saint Louis, qui l'avait conféré, avant son départ, à ses principaux compagnons de voyage. 

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Ordre de Saint-Michel

Louis XI avait établi l'ordre de Saint-Michel en 1469, pour satisfaire à un voeu de son père, qui eut une dévotion particulière à ce saint, l'ange tutélaire et gardien de la France. Déjà l'image du saint était brodée en or sur la bannière du roi. Louis XI créa donc un nouvel ordre de chevalerie militaire, en l'honneur du "premier chevalier, disent les statuts, qui pour la querelle de dieu batailla contre l'ancien ennemi de l'humain lignage et le fit trébucher du Ciel". L'ordre se composait de trente six chevaliers de noms et d'armes, sans reproche, ayant pour chef le roi qui les avait nommés. Le collier de l'ordre était formé de coquilles d'or avec la figure de saint Michel terrassant le démon. Les chevaliers, outre ce collier, portaient dans les cérémonies un manteau blanc avec chaperon de velours cramoisi.

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Ordre du Saint-Esprit

L'ordre du Saint-Esprit fut le dernier ordre militaire que les rois de France aient distribué eux-mêmes, à la fin du seizième siècle, avec l'ordre de Saint-Michel. On les désignait l'un et l'autre sous le nom d'ordres du roi. Henri III, en 1579, créa cet ordre en l'honneur de Dieu, et particulièrement du Saint-Esprit, sous l'inspiration duquel il avait accompli ses "meilleures et plus heureuses actions", suivant les termes des statuts de l'ordre. Depuis son avènement au trône, il préméditait cette fondation, que lui avait conseillée, dès son enfance, la lecture des statuts du premier ordre du Saint-Esprit, institué à Naples, en 1352, par un des ancêtres, Louis d'Anjou, roi de Jérusalem et de Sicile. Ces statuts se trouvaient soigneusement recueillis dans un précieux manuscrit, dont les miniatures représentaient avec un art merveilleux toutes les cérémonies de l'ordre, manuscrit que la seigneurie de Venise avait offert en présent à Henri III, lors de son retour de Pologne. Ce prince emprunta peu de chose néanmoins aux anciens statuts qui avaient été rédigés en vue des services militaires que des chevaliers de l'ordre, au nombre de trois cents, eussent pu rendre à l'oeuvre des croisades en Palestine. Le nouvel ordre du Saint-Esprit, quoique militaire, devait être destiné surtout à réunir autour du roi, qui était le chef suprême, un corps de cent chevaliers, choisis parmi les plus éminents et les plus illustres personnages de la cour, de l'Eglise et de la noblesse. Les insignes de l'ordre étaient un collier composé de fleurs de lis d'or couronnées de flammes émaillées, aux chiffres du roi et de sa femme Louise de Lorraine, avec une croix ornée d'une colombe d'argent, emblème du Saint-Esprit. Les chevaliers paraissaient, dans les assemblées de l'ordre, vêtus de riches manteaux à collet rond, en velours bleu fleurdelisé d'or. Ces assemblées, qui eurent lieu d'abord dans l'église des Augustins, à Paris, où se faisait la réception solennelle des nouveaux membres de l'ordre, furent transportées au Louvre, où elles étaient célébrées avec une pompe extraordinaire. Les statuts enseignaient bien à tout chevalier laïque d'accourir en armes auprès du roi, dès que celui-ci se disposait à faire la guerre pour la défense de ses états et dans l'intérêt de sa couronne, mais ils ne furent jamais scrupuleusement exécutés sur ce point, et l'ordre du Saint-Esprit, tout en conservant son caractère à la fois religieux et militaire dans les cérémonies extérieures, n'eut jamais qu'un rôle d'apparat et de distinction héraldiques, quoique tous les rois se montrassent très jaloux de la nomination des chevaliers qui devaient en faire partie et qui formèrent pendant plus de trois siècles la véritable garde d'honneur de la Maison de France.

(par Paul Lacroix)

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