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Piriac-sur-Mer sous l’ancien Régime

LA BARONNIE DE CAMPZILLON

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La Baronnie de Campzillon comprenait les paroisses de Mesquer, St-Molf, Piriac, Batz et Guérande. Sa situation était remarquable à cause du développement de ses côtes. Elle comprenait 2 trajets, celui du Croisic et celui de Mesquer. (Traict vient du mot breton treh, passage d'eau) et de nombreux promontoires, dont la pointe du Castelli et celle du Croisic.

Les Romains ont laissé sur ce territoire des traces de leur passage. César a livré sa bataille navale [Note : Le lieu Portus Brivates est situé par Kerviler à Saint-Nazaire, où l'on trouve le Brivet, et par Jullian dans le golfe du Morbihan] contre les Venètes en 58 avant J.-C. dans le trajet du Croisic, d'après Léon Maître. On retrouve des levées de terre élevées par les Venètes : les grands Fossés près d'Arbourg, commune d'Herbignac et enfin des fonderies, des Forges et des ateliers de potiers, établis par les Romains ont laissé des traces depuis Grannona (Guérande) jusqu'à Piriac (Pen Kariacum). M. Léon Maître, ancien archiviste du département, a trouvé à Brandu, près La Turballe, un ancien creuset romain qu'une femme du pays prenait pour le bénitier d'une église disparue. Dans ce creuset, les Romains fabriquaient du bronze en alliant l'étain de Piriac au cuivre de la Govelle ou à celui apporté par mer d'Espagne. Une voie romaine desservait ces établissements industriels, (elle suivait sensiblement la direction de la route de Guérande à Piriac en passant par Lauvergnac) ainsi que des villas, que de riches gallo-romains avaient construites sur la côte. On a retrouvé à Clis les fondations de « l'Aula Cliva » un palais de Clis et l'Aula Quiriaca située à la place de Kerjean, d'après M. Maître. C'est là qu'habitèrent le comte breton Waroch, au VIème siècle et l'évêque de Guérande, Ghislard, fondateur de la collégiale Saint-Aubin et l'adversaire de l'évêque Actard, son compétiteur pour le siège de Nantes, au IXème siècle, à l'époque de Nominoé. Ces deux palais sont mentionnés dans une poésie de Saint Fortunat, l'aumônier de Sainte Radégonde. Le nom de Castelli donné à la pointe de Piriac, est une preuve de l'importance du pays, sous la domination romaine, — au point de vue militaire.

SEIGNEURS DE CAMPZILLON.

M. Guillotin de Corson, dans son livre « Les grandes seigneuries de Haute-Bretagne » donne l'histoire de La Baronnie de Campzillon. Elle fut détachée de la baronnie de la Roche-Bernard en 1424. Guy XIII, comte de Laval, avait donné ce territoire en dot à sa fille Jeanne de Laval, à l'occasion de son mariage avec Louis de Bourbon-Vendôme.

Elle tenait son nom da Château de Campzillon, siège de la baronnie et situé dans la paroisse de Mesquer, construit en 1569 par Pierre de Tournemine à la place d'une citadelle détruite en 1540. En 1590, ce siège fut transféré à Piriac au château de Kerjean [Note : Le château de Kerjean, frappé par la foudre et détérioré, fut démoli sous la Restauration. Il n'en reste que des mures de clôture, un porche, et un souterrain], après sa destruction par les troupes espagnoles venues secourir le duc de Mercœur, le porte-drapeau de la Sainte Ligue en Bretagne.

La maison de Vendôme occupa la Seigneurie de 1424 à 1514, soit près d'un siècle, et a été représentée par quatre de ses membres.

Louis de Bourbon, époux de Jeanne de Laval, décédé en 1468.

Jean de Bourbon, son fils, époux d'Elisabeth de Beauveau (1468).

François de Bourbon, époux de Marie de Luxembourg, décédé le 14 octobre 1495.

Charles de Bourbon vend Campzillon, vers 1514, à François de Tournemine, ambassadeur de France en Hongrie, sieur de la Guerche, de la Hunaudaye. Cette famille illustre occupa la baronnie pendant plus de 2 siècles, 1514-1732. Cette maison est représentée par 7 membres :

François, ambassadeur de Hongrie (1514-1529).

Raoul de Tournemine, son frère (1529-1540).

René de Tournemine (1540-1547) vend à son frère, Pierre, la seigneurerie, en 1547.

Pierre de Tournemine (1547-1580), épouse en premières noces Renée de Rieux, fille du seigneur d'Asserac, le propriétaire du château de Ranroué, (le lot du roi en breton), et en secondes noces, Marie de Kermarec, mariage béni par un pasteur protestant.

François de Tournemine (1580-1624), époux 1° de Catherine du Verger, 2° Odette Goulard.

René de Tournemine (1624 ? ?), époux de Renée Peschart, dame de la Botheleraye.

Jean-Joseph de Tournemine (mort en 1711), époux de Marie de Coëtlogen.

Louis-Ignace de Tournemine (1712-1732), époux de Louise-Gabrielle, fille du seigneur de Pignelay.

Cette famille de Tournemine fut connue dans le pays par un attachement au protestantisme.

Le 4 août 1732, Louis-Ignace vendit la baronnie pour 185.000 livres, à Louis de Jacquelot, vicomte de la Motte, conseiller au Parlement de Bretagne, époux de Marguerite Jouhance de Coetarez.

Louis de Jacquelot (1732-1741).

Louis-René de Jacquelot (1741-1772), époux de Marie-Anne de Chomart.

Sa fille, Jeanne-Louise-Rose de Jacquelot, épouse le 25 juillet 1774, François-Claude de Kermarec de Traurout, conseiller au Parlement de Bretagne. Marie-Jeanne meurt en 1789. De ce mariage, naquirent deux fils, Louis et Joseph de Kermarec de Traurout, et une fille, Adèle.

Adèle de Kermarec de Traurout épouse Jean-Joseph de Chomard de Kerdavy. Successivement, son fils Gustave et sa fille Caroline deviennent propriétaires.

Caroline n'étant pas mariée, son héritière, Adèle-Marie de Chomard, épouse M de la Chevasnerie. Le propriétaire actuel (en 1932) de Kerjean est M. de la Chevasnerie, fils d'Adèle-Marie de Chomard, époux de Mademoiselle Le Maignan de l'Ecorce.

DROITS FÉODAUX DE CAMPZILLON.

Droits de préeminence dans les églises et chapelles de la Baronnie. Haute, moyenne et basse justice avec auditoire, prison, 6 potences ou fourches patibulaires, droit de tenir audience à l'auditoire de Guérande, à l'issue des causes de celui-ci.

Droits de déshérence, de successions de bâtards, de lots, de rachats et de ventes. Droits de tenir 4 foires par an et marché chaque semaine, le vendredi. Droits de police. Bans de vendanges, de fanage de foin. Droit de poids et mesures. Droit de Bris de la Turballe à Mesquer. Perception de un denier sur la vente de chaque bateau, et d'une obole sur chaque pipe de vins (la pipe vaut trois barriques) chargée dans le port de Piriac. Droit de préemption du poisson au 1/3 du prix. Droit de 1 denier par muid de sel, récolté à Guérande, Batz et Mesquer. Chaque pêcheur de marsouin est tenu de donner au seigneur le nombril, l'échine et le côté de tous les marsouins pris.

Ces droits féodaux ont été tirés du grand Terrier, aux archives de Nantes ; mais une tradition orale sérieuse [Note : Je tiens ces détails de M. Alphonse de Chateaubriant] nous dit qu'à certaines époques de l'année on présentait au seigneur un œuf, placé sur un haut mulon de foin traîné par deux bœufs, dans une charrette, ou bien un poulet rôti dans une cage. Le seigneur regardait le poulet, mais il n'en avait que l'odeur. C'était le signal de grandes réjouissances dans le pays.

M. DE TRAUROUT.

Ce fut le dernier seigneur de Campzillon. Il n'émigra pas mais malgré cela, il eut ses biens mis sous séquestre. Il en obtint cependant la main-levée. Il eut deux fils soldats, l'un dans les armées de la République, l'autre dans l'armée de Vendée. Il se maria le 25 juillet 1774, à Vannes, dans la chapelle des Ursulines, avec Mlle de Jacquelot. Il était originaire de la paroisse de Brens. Nous trouvons un nota-bene du curé Ignace Guillaume, qui a donné sa permission pour que le mariage ait lieu à Vannes et non à Piriac, comme de droit : « Il faut faciliter la population et par conséquent les mariages, qui sont le nerf et le rajeunissement et la perpétuité du genre humain. Mlle Jacquelot était pensionnaire au couvent des Ursulines, elle avait de la dévotion avant d'être mariée, je l'ai permis bien volontiers ».

M. de Traurout fut élu maire le 10 février 1790. Nous avons retrouvé le texte de son premier discours comme maire, dans le registre des délibérations du général de la paroisse de Piriac. Le voici intégralement, c'est un document précieux pour la commune de Piriac :

« Messieurs, sensible, autant qu'on peut l'être, à la marque de confiance que vous me témoignez aujourd'hui, en me nommant pour occuper la première place de votre Municipalité, dignité à laquelle je n'aspirais pas, il suffit, Messieurs, que je la tienne de votre cœur seul, ce qui me flatte en ce moment, et que vous me trouviez propre à contribuer en quelque chose à votre bonheur, pour que mon dévouement pour tout ce qui vous concerne me décide à l'accepter. Espérant que les fonctions et les devoirs que cette place va m'imposer ne me fourniront que les moyens de nous voir se resserrer de plus en plus dans les liens de la concorde, qui nous ont tous, jusqu'ici, si étroitement et si heureusement unis, que je pourrai vous convaincre du zèle le plus pur qui, comme d'ordinaire, m'animera dans tous nos travaux, de l'amitié la plus tendre que mes sentiments pour vous tous ne doivent pas rendre aujourd'hui équivoque, et enfin, Messieurs, d'être peut-être assez heureux pour, dans une courte carrière, donner au monde et à mes successeurs, l'exemple de cette affabilité si nécessaire à l'homme qui se dévoue au public, en me rendant accessible et ayant toujours l'oreille attentive, pour entendre avec patience les plaintes de tous et peser enfin au juste dans la même balance les erreurs du fort comme du faible, les intérêts du riche comme du pauvre ».

EGLISE.

La première pierre de l'église actuelle, placée sous le vocable de Saint-Pierre-aux-Liens, a été posée le 8 juin 1766 par le curé Ignace Guillaume. Les fondations furent à la même place que l'ancienne, tombée en ruines par suite de sa vétusté. Il existe un procès-verbal de délabrement de la vieille église et un plan de la nouvelle en 1757. La vieille église avait un très haut clocher qui servait d'amer aux marins, comme celui du château. Nous avons le nom de deux chapelles de cette église, la chapelle St-Jean, servant d'enfeu aux seigneurs, et la chapelle du Rosaire.

Les curés de Piriac résignaient leurs fonctions en Cour de Rome [Note : Je n'ai pu trouver un cas analogue, malgré mes recherches. On se demande l'intérêt que pouvait avoir Rome à être informée d'un fait si peu important]. C'est très curieux. Une pièce de 1712 s'exprime ainsi : « Résignation de la cure de Piriac faite par le sieur Landays au sieur Jégo, son vicaire, le 6 Juin, et envoyée à Nantes à M. Brûlé qui en chargea la poste pour Rome, le 11 du mois, fut reçue à la Daterie de Rome le 28 dudit mois de Juin ».

Différentes pièces donnent l'inventaire du trésor de l'église à différentes époques. Il y avait entre autres le « joyau », une pièce d'orfèvrerie avec reliques, que l'on faisait circuler au domicile des habitants, sur leur demande et moyennant une aumône.

Le presbytère était dans la maison de Pontville, actuellement (en 1932) domicile du maire, M. Vignioboul ; il s'est effondré, le 14 mars 1711, et le recteur, Pierre Landays, fut légèrement blessé. Le recteur donna deux cents livres pour les réparations. Un impôt sur les biens de la paroisse fuit autorisé par le Parlement de Bretagne.

RECTEURS DE SAINT-PIERRE.

XVème siècle. — De Rohan Sevestre, 1495.

XVIème siècle. — (1545-1587). Charlot de Francheville, (1560-1573) d'une famille originaire d'Ecosse, Ribler.

XVIIème siècle. — (1607-1682) Guillaume Georges, Olivier Braud, Guillaume Audren, Bertrand, Rado, Marc Spadine, J. Davy, René Dupont, Raoul Esnaud, Bernard, Guy Bouvier, Gabriel Edenin.

XVIIIème siècle. — (1682-1803). Pierre Landays, Pierre Jégo (1712-1728), Ignace Guillaume (1729-1779), docteur en Théologie, ancien précepteur du duc de Penthièvre ; Charles Guillaume, neveu du précédent (1779-1790) ; G. G. Goubaud (1790) ; Christophe Glais (1795-1803), curé constitutionnel, mourut réconcilié avec l'Eglise, légua la cure actuelle qui était le bénéfice de Saint-René.

XIXème siècle. — (1803-1930). Sohier, Courjeon François, Aubert Pierre, Huet Joseph-Marie, Cormerais, Guilbaud, Bernard, Sérot (1878-1889) ; Guichaud (1889-1919) ; Menoret (1919-1930) ; Coyau (1930......).

De tous les curés de l'ancien régime, celui qui a laissé le plus de traces est le curé Ignace Guillaume (1729-1779). 50 ans dans un pays, c'est un bail. C'était un homme observateur et plein de verve, un Juvenal de village, Nous détachons quelques. extraits de ses notes relevés dans les registres paroissiaux :

CONFIRMATION AU 17 MAI 1737.

Visite de Mgr de Sansay. Ignace Guillaume va le chercher au Croisic.

« Il a donné la confirmation si désirée, depuis 22 ans qu'on n'avait pas vu l'évêque. J'ai bien voulu par politesse donner le pas dans la marche au grand vicaire, car je ne lui devais pas, et il en convint avec moi, Monsieur de Nantes avait aussi le Prévôt du petit chapitre de Guérande et 2 chanoines. Je ne voulus pas souffrir qu'ils portassent des surplis dans mon église. Il leur fallait paraître dans la procession en habit noir, malgré les supplications de l'Evêque. Je fus intraitable sur ce fait de peur que ces petits messieurs, qui ont la fatuité de se dire les protecteurs de l'Eglise de Piriac n'en eussent tiré avantage ».

On voit qu'Ignace Guillaume tenait à ses prérogatives et qu'il était de tempérament atrabilaire.

MISSION DU 21 MAI 1741.

Mission prêchée par le R. P. François Xavier du Plessis, jésuite natif de Québec.

« Homme vraiment apostolique et fameux par une infinité de missions qui ont eu un prodigieux succès en Flandre, en Allemagne, en Lorraine et dans plusieurs provinces de France avec les pères de Gènes et de Lan-Jégu, jésuites au collège de Vannes, La mission dura un mois. On y venait de 8 lieues à la ronde. Notre église ne pouvait contenir la 5ème partie des fidèles. Le R. P. du Plessis a été contraint de prêcher et de faire ses conférences au Lenu, à la croix du Château, au Calvaire. On a érigé une croix des plus magnifigues sur les ruines de l'ancien Calvaire, près du cimetière ; elle est ornée de haut en bas de cœurs dorés que chacun à l'envie a donnés et fait attacher à la Croix.

M. de Jacquelot, conseiller au Parlement, a généreusement contribué aux ornements de la Croix, dont il a donné l'arbre le plus droit, le plus net, le plus fort qu'on ait su trouver à 20 lieues dans les forêts. — Indulgence de 40 jours les vendredis, dimanches et fêtes ».

Si Ignace Guillaume trouvait bon qu'on vint de 8 lieues pour suivre la mission de Piriac, il était d'un avis opposé quand ses paroissiens s'en allaient suivre les missions dans les paroisses voisines. Nous le citons à nouveau. Les lecteurs pourront savourer ce style mordant :

« 6 Avril 1779. 4 noyés ; femme Lequimener, de Toulan, 57 ans; Jacques Mabo, 20 ans ; Renée Mabo, 27 ans; Marguerite Le Tréhour, 57 ans, allant de Kercabelec à Penestin.

Remarque importante pour la Postérité : Les 4 victimes infortunées de leur dévotion très mal entendue, n'ont pas été les seules. Outre ces 4 paroissiennes, il y en eut 5 de Mesquer. Cette triste catastrophe est arrivée pour avoir deserté leur paroisse le saint jour de Pâques pour courir à l'envie à une mission qui s'ouvrait à Pénestin. A Dieu ne plaise, que j'improuve ces travaux apostoliques. Je veux même croire que ces messieurs du diocèse de la Rochelle et appelés Mulotins, désoeuvrés dans leur résidence, et qui courent toute l'année dans celui de Nantes pour y offrir les échantillons de leur zèle, sont autant de Xaviers et Vincent de Paul... mais il faut convenir que leurs missions, qui se succèdent les unes aux autres, attirent par leur nouveauté, les paroisses voisines, dont les habitants sont par là détournés de leurs travaux et offices paroissiaux les plus essentiels. Ce qui choque surtout, c'est la présence de ces messieurs sur notre territoire. Ces pieux Mulotins cherchent et embrassent les missions de toutes mains. Ils en avaient fait une, qui a duré 6 semaines à Herbignac ; à celle-là, assez pompeuse, a succédé celle de Pénestin, et celle-ci ne sera pas finie qu'ils se sont fait arrher pour la paroisse d'Asserac et l'on y court encore. Toutes ces paroisses se touchent. Ces pieux spectacles s'avilissent par l'accoutumance ; il en devrait être comme les jeux séculaires des Romains. Notre digne évêque est malheureusement absent ; il aurait été dans sa ville épiscopale, qu'il n'aurait pas souffert ces missions redoublées et que ces laborieux évangélistes, qui meurent de faim à Saint-Laurent-sur-Sèvres et qui viennent en ce pays au nombre de 8 à 9, dévastent nos paroisses et au fond, que gagnent-ils avec leur zèle ; ils tonnent, ils remuent, ils effraient par leurs machines spirituelles, ils tournent les têtes ; convertissent-ils ? Nous savons sur cela à quoi nous en tenir ».

MŒURS LOCALES.

« 14 décembre 1742. — David Chedotal et Guillemette Nicole sa femme, morts dans l'ivresse, trouvés dans leur cellier, où ils étaient depuis plusieurs jours sans sortir, la porte fermée, le pichet à la main, la barrique écoulée, le fausset nageant dans le vin. Quel sort ! J'ai enterré ces gens non sans horreur, mais il faut bien le faire, parce qu'ils étaient chrétiens. Je sais cependant quelqu'un de mes confrères, qui a refusé d'enterrer des gens morts dans l'ivresse pour imprimer de la terreur dans ce malheureux pays, où le peuple y est si livré et en cela il a été plus heureux que sage, n'ayant pas été recherché. Ne nous commettons jamais avec la justice séculière, qui, dans pareil cas, a beau champ et perdrait un curé et 100.000 évêques ».

L'ABBÉ GLAIS.

Vicaire (1779-1792) ; recteur (1792-1803 ; curé constitutionnel, se réconcilia avec l'église romaine ; il fut administré à sa mort par M. de Bruce curé de Guérande et depuis évêque de Vannes, il légua la cure actuelle, dont il avait le bénéfice sous le nom de Saint René, à la Fabrique. Nous avons de lui la pièce curieuse suivante :

« 4 février 1793. Citoyens de l'administration, la chose publique doit être notre égide. La commune de Piriac jouit d'une sécurité entière à l'égard des malveillants, aussi est-elle décidée à ne point souffrir dans son sein de ces individus. Au nom de la Municipalité de Piriac, je représente aux corps constitués, que nous refusons formellement à avoir pour chef un nommé Drouet dans la douane nationale de Piriac. Le Croisic en sera purgé, mais devons-nous en être la victime ? Nous sommes de fiers républicains ; un royaliste n'a pas de demeure parmi nous. Le citoyen Corvizard, vrai citoyen, est celui qui doit occuper le poste. La paix et la tranquillité sont maintenues sous ses ordres et c'est lui que nous voulons. — Le citoyen Glais, curé.

La municipalité dont je suis l'organe vous le certifiera, quand vous l'exigerez, — 4 février 1793, 2ème année de la République Française ».

- CHAPELLES DU PAYS. -

CHAPELLE DE SAINT-SÉBASTIEN.

Elle existe encore. C'est un charmant édifice du 16ème siècle. Elle fut fondée par la famille Le Cavaillon. Son acte de fondation, rédigé en latin, existe encore aux archives à Nantes (Archives de Piriac).

En 1720, le chapelain s'appelait Henri Lerrans, et en 1764, René Le Dantec.

CHAPELLE SAINT-FIACRE.

Il en existe encore quelques vestiges intéressants. C'est une propriété particulière, malheureusement. Il y a une trentaine d'années, on pouvait voir un portail gothique intéressant ; il a disparu, pour servir de pierres de construction. C'est dans cette chapelle que se réunissait le général de la paroisse, sous l'ancien régime, ce prédécesseur du conseil municipal, C'est là que se réunirent les habitants de Piriac au moment de la convocation des Etats Généraux en 1789 pour élire un délégué au Baillage de Guérande. C'est donc un lieu historique, qui devrait être la propriété de la commune.

CHAPELLE DU CHATEAU.

Il y avait une chapelle au château, sous le vocable de Saint-Jean, d'où le nom de Kerjean. Elle fut démolie en 1727 pour une cause inconnue et les matériaux furent donnés par le seigneur Louis Ignace de Tournemine au curé, dans le but de servir à la construction de la nouvelle église.

CHAPELLE SAINT-MICHEL.

Disparue à une époque inconnue, enlevée par la mer. Il reste des vestiges d'un cimetière au Lenn, qui en dépendait ; cimetière connu dans le pays sous le nom de cimetière des Huguenots. En construisant les fondations de plusieurs chalets au Lenn, de nombreux ossements ont été retrouvés.

CHAPELLE DE PENHOET.

Existe encore en ruines dans une ferme.

Elle fut construite par M. du Bochet, sieur de Penhoët.

Une messe devait être dite dans l'intérêt du fondateur les dimanches et fêtes, avec recommandation et prière nominale pour lui et son épouse.

Pour régler les frais de cette fondation, une rente en argent de 104 livres 10 sols avait été constituée, ainsi que les produits de 9 œillets de marais.

LA LEPROSERIE DE PORT-AU-LOUP
[Note : Port-au-Loup : il ne s'agit pas du tout ici d'un loup. C'est une corruption du mot Lovre, c'est-à-dire, en breton, lépreux. — Cf. Maître (Villes disparues de la Loire-Intérieure)].

Hôpital de Lépreux. Des comptes de cet hôpital existent aux archives de Nantes (fonds de Piriac). Il dépendait de la Commanderie de Fougaret-en-Asserac, avait été administré par les Templiers et après la chute de ces derniers, par les Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Une plage du pays est connue sous le nom de l'Agneau Malade ; c'est une transformation des mots « La Noé aux Malades », noé voulant dire pré bas. C'était la prairie, où les malades venaient se promener.

PORT.

Il y avait à Piriac un port important. La pêche du hareng et de la sardine faisait la fortune des pêcheurs. Certains bateaux armèrent pour Terre-Neuve jusqu'en 1690. Enfin, la récolte de vins était assez forte pour alimenter un fret important. Lors d'une tempête, 200 barriques de vins se trouvaient chargées sur les bateaux du port. Une estacade en bois servait de jetée. En 1786, la jetée actuelle fut construite avec les deniers fournis par les Etats de Bretagne en 1758 et en 1760. Un philantrope, M. Eudo de Kéroman, contribua de ses deniers à la construction de cette jetée, et donna l'horloge de l'église. Ses armoiries sont gravées sur une pierre de granit de la jetée. Dans une séance du 30 pluviose de l'an III, le conseil municipal demande la construction d'un épi à la tête de la jetée, pour empêcher l'envahissement des sables, construction effectuée depuis récemment. Le nom de Keroman devrait être donné à une rue de Piriac.

LA RÉFORME.

La Réforme avait pour chef dans notre pays François d'Andelot, baron de la Roche-Bernard, époux de Marie Claude de Rieux, dont la famille possédait le château de Ranroué. Le siège de cette baronnie était le château de la Bretesche.

Le Croisic et Piriac devinrent deux centres protestants importants. On trouve à Piriac la rue des Huguenots avec son temple ou maison de la Huguenoterie et un lieu dit Fort-Baron, qui rappelle la maison du ministre Baron, natif de Piriac. En 1589, une flotte espagnole débarqua à Saint-Nazaire une armée espagnole, venue pour aider Mercœur, chef de la Ligue en Bretagne ; elle se dirigea sur Hennebont, prit Piriac, incendia le château de Campzillon en 1590, ce qui obligea les seigneurs à transférer le siège de la baronnie de Campzillon à Kerjean-en-Piriac. La famille de Tournemine était un des principaux soutiens du protestantisme, ce qui explique l'incendie du château de Campzillon. Quelques soldats espagnols restèrent à Brandu et à La Turballe. Certains noms espagnols sont restés dans le pays, comme celui de Rio.

La Réforme eut des adversaires déterminés : La collégiale St-Aubin, les dominicains de St-Yves à Guérande, la Communauté de Guérande.

LA RÉVOLUTION.

En décembre 1792, les chouans occupent Piriac et menacent le maire Bachelot, le frappent, ce qui lui occasionne une paralysie. Il demande bientôt à démissionner. Le 17 mars, Jean Lolliero, ancien cocher de M. de Traurout et Jean David, son domestique, se promènent à Piriac portant la cocarde blanche, armés de fusils et de sabres, Ils venaient de Guérande et faisaient partie de la troupe qui l'assiégeait, sous les ordres de Guerif de Lanouan. Le 18, des chouans, commandés par Aguet, pillent les maisons de Piriac ; le 19, Guérande est pris par Guerif de Lanouan [Note : Guerif de Lanouan joua un rôle important dans la guerre de Vendée et commanda une division de l'armée royale]. C'est Yves Lohan fils, de Piriac, qui porte à la place la sommation de se rendre. La ville se rendit et la Royauté fut proclamée ; 8 jours après, le général Beysser, venu de la Roche-Bernard, reprit la ville ainsi que le Croisic, où il fit fusiller M. David de Drezigné, ancien maire, qui avait accepté le poste de procureur syndic du roi.

Le 25 avril, 7 chouans prennent les armes des habitants de Piriac et les déposent à la maison Rado.

VENTE DE BIENS NATIONAUX.

Clergé, Fabrique de Piriac, Presbytère : 4.800 livres ; vignes, prés, terres : 3.355 livres, soit 8.155 lives, acquis par A. Sauvrézis. — Cure de Piriac, 1 verger, une prairie, vignes : 4.754 L.

ABBAYES DE PRIÈRES. — Dominicains de Guérande, Bénéfices de St-Fiacre, de St-René, de St-Sébastien. Prieuré de Mesquer.

EMIGRÉS. — De Sécillon, d'Andigné, J. Lallement prêtre, Jégo, Quilfistre, Bavalan.

OPÉRATIONS MILITAIRES DANS LA RÉGION.
BATAILLE DE L'ILE DUMET.

30 mai 1709. — C'est une île, qui a été bien préjudiciable aux marchands. Les espagnols et les anglais venaient se cacher à l'abri de cette île et ont pris une infinité de navires marchands, depuis 22 ans. 4 bâtiments anglais étaient réfugiés dans l'île, 2 frégates françaises se présentent à 1 heure. On entend 660 coups de canon, 1 bateau anglais est coulé. Sur le soir, on ne voyait que feu dans l'île. Un bateau s'échappe. On obligea les autres à se rendre avec beaucup de pertes. Le lendemain après-midi, nos frégates firent voile sur la rivière de Nantes et envoyèrent à Paimbœuf 2 navires ennemis. Sur l'un se trouvait un capitaine français, de Bourneuf, nommé Arnaud, qui fut roué vif ; il s'était réfugié à Jersey pour cause de religion. Le pilote fut pendu à Nantes au pré de la Madeleine.

BATAILLE DE PIRIAC (1759) — ou BATAILLE DES CARDINAUX OU JOURNÉE DE MONSIEUR DE CONFLANS.

La flotte française était commandée par l'amiral de Conflans. Elle comprenait 21 vaisseaux de ligne et 5 frégates, dont : Le Formidable, le Soleil Royal, le Héros, le Juste, le Glorieux, le Robuste, le Brillant, l'Eveillé, Sphinx, Dragon, Bizarre, Inflexible. Chacun de ces vaisseaux avait 64 canons. Les 5 frégates avaient de 16 à 32 canons.

L'escadre anglaise de l'amiral Hawke comprenait 45 vaisseaux, avait une supériorité évidente. Le 20 novembre 1759, M. de Conflans était en retraite entre le Four, l'île Dumet, la pointe de Piriac et la terre.

Les Anglais prirent le Formidable, le Héros fut brûlé à la pointe du Croisic, Le Juste gagna la Loire, Le Soleil Royal s'échoua au Croisic, sur les rochers de St-Goustan. 7 vaisseaux et 4 frégates se réfugièrent dans la Villaine, à la Vieille-Roche. Deux vaisseaux furent coulés. M. de Conflans fit sauter son navire [Note : M. de Conflans était agé de 75 ans, malade, avait une flotte montée par des équipages de fortune. Il avait les plus brillants états de service. L'opinion a été très injuste envers lui en appelant le désastre des Cardinaux « la Journée de M. de Conflans ». C'est le pouvoir central qui, de Paris, influa les décisions du maréchal, (Cf. Johannès Tramond — Histoire maritime)].

AFFAIRE DE QUIBERON.

Lettre Rado, Piriac, 14 nivose, an 8.
« Le 12 du présent, il a été tiré 2 coups de canon vers la baie de Quiberon ; hier 13, on en a tiré 8 à 10 ou 12 minutes de distance. C'était d'un gros calibre et le bruit de canon me paraissait venir du côté de la baie de Sussinio, commune de Sarzeau. C'était dans cette baie, que les anglais avaient débarqué des chouans après la prise de Quiberon. Aujourd'hui, l'horizon s'étant éclairci, j'ai eu connaissance d'une division toujours à l'ancre dans la même position, et vu son long séjour dans les mêmes parages, il n'y a pas de doute qu'ils n'aient encore quelque chose à donner aux chouans ; d'ailleurs, cette division a été renforcée par une frégate de plus ».

(Henry Riondel).

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