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L'EGLISE ET LES CHAPELLES DE PLEUBIAN DURANT LA REVOLUTION.

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Outre l'église paroissiale, dite, en style du temps, la mère-église, Pleubihan possédait, à l'époque de la Révolution, sept chapelles qui toutes étaient pourvues d'ornements et de vases sacrés pour la célébration du saint sacrifice. Ces chapelles étaient : 1° chapelle conventuelle du prieuré Saint-Georges ; 2° la chapelle succursale de Kerborz desservie par un curé ou vicaire résident, celui-ci placé sous la contrôle du recteur-prieur et le tout patronage de la mère abbesse ; 3° Saint-Aubin de Kerborz ; 4° Brestan ; 5° Saint-Autoine ; 6° Rochjadou ; 7° Saint-Laurent. Aujourd'hui Kerborz est église paroissiale et commune ; Rochjadou et Saint-Laurent sont démolis ; Brestan et Saint-Antoine existent, appartiennent à des familles et ne sont plus affectés au culte ; Saint-Aubin a été réédifié per les soins des propriétaires, MM. Le Calves.Montréer. Nous donnons, à titre de document, le récolement des effets spécialement appropriés à ces édifices, récolement dressé par la municipalité « le tridi, trois ventôse de l'an II de la République une et indivisible ». Le sept pluviôse an II la commune avait ordonné la destruction des signes et emblémes féodaux dans l’église-mère et les chapelles. Toutes les cloches furent descendues, à l'exception du timbre de l'horloge servant à la mère-église. Ces cloches furent envoyées à Lézardrieux et ensuite à la fonderie de Brest pour la fabrication des canons.

1° Effets dépendant de la mère-église.

a. — Dans la sacristie.

« Une grande armoire à quatre battants fermante à cinq clefs et clavure de fer, ladite armoire renfermant un coffre-fort fermant à trois clefs et clavure, un pelit pridieu, une espèce de lit de table, une armoire servant à ramasser les ornements à plusieurs services et neuf tirroires, une bancelle, une chaise de bois à bras, un porte-manteau à plusieurs services ».

b. — Dans l’église.

« Deux armoires et quatre confessionneaux, autre mauvaise armoire avec un banc dessous, six chappers de différentes couleurs au trois quarts usées, quinze chasubles avec leurs étolles, manipules, de différentes couleurs, tant bonne que mauvaise, huit tuniques aussi de différentes qualités tant bonnes que mauvaises, quinze corporeaux et vingt purificatoires, neuf devant d'autels et deux bannieres ».

2° Effets de la chapelle de Brestan.

« Deux chasubles complet pour dire la messe, deux aubes, six nappes d'autel, deux corporeaux, quatre purificatoires et six essuye-mains et un devant d'autel ; dans la sacristie, une petite armoire et deux autres petites bois de sapin ».

3° Effets de la chapelle de Saint-Laurent.

« Un chasuble complet, une aube, trois nappes d'autel, un corporal, un purificatoire et un essuye-mains ; — dans l’église, un banc ».

4° Effets de la chapelle de Saint-Antoine.

« Trois chasubles complets, une aube, six nappes d'autel, trois amicts, un corporal, six essuye-mains, quatre purificatoires ; — et dans la sacristie, une armoire fermante à clefs, et une table, et un mauvais rochet ».

5° — Effets de la chapelle de Rochjadou.

« Un ornement à toutes couleurs avec son voile, manipule, étole, bource avec deux corporaux, un amit et un cordon, autre ornement avec son étole, manipule, voille, une bourre contenant trois corporaux, deux purificatoires, une couverture d'étole, deux amicts une aube, trois nappes d'autel, trois couvertures d'autel, un devant d’autel rouge fond blanc avec une franche de faux-galon ».

6° — Effets de la succursale de Kerbors.

« Dans la sacristie, deux armoires à quatre battans, quatre chappes de différentes couleurs, deux vieux banc clos, une armoire à trois battants, une autre à un battant confessionnal, six ornements complets et de différentes couleurs, cinq aubes et quatre amicts, quatre corporaux et cinq nappes d'autel, quinze essuye-mains, un devant d'autel, trois cordons, une couverture d’autel et deux bannières ».

7° — Effets de la chapelle de Saint-Aubin en Kerbors.

« Un ornement complet, une aube et un amit, trois nappes d’autel, quatre purificatoires, deux essuyes-mains, une armoire à deux battants et un vieux coffre ».

8° — Effets et ornements de la chapelle de Saint-Georges.

« Deux missel, un vieux et un nouveaux. Deux aubes, deux cordons et deux amits, trois corporeaux et trois purificatoires, deux palles et une bource, plus un palle, une bourse, deux purificatoires et un corporal, trois nappes et un essuye-mains, trois devant d'autel, deux chandelliers de cuivre, une couverture d'autel, un callice et pattaine et boëtte, trois chasubles, deux pour le commun des jour et un noir, trois étolles, trois manipulle et trois voilles de battises avec une mauvaise serviette ».

« L'inventaire des effets de la vieille chapelle prieurale fut arrêté l’an 1792, ce jour trois mars, suivant l’assignation pronale du sieur Jean Le Béau, curé constitutionnel ».

Ainsi, au moment du schisme, tous les prêtres pouvaient avoir sous la main, soit dans l'égliae, soit dans les chapelles le strict nécessaire pour célébrer la messe. Je tenais à le constater. L'inventaire, dressé par des gens incompétents et pour obéir aux ordres du dictrict, est évidemment incomplet. Aujourd'hui, hélas ! on peut écrire sur l'emplacement de ces sanctuaires désolés, sur le frontispice de nos chapelles ruinée, ces paroles du prophète Isaïe : « Le temple de notre sanctification et de notre gloire, où nos pères avaient chanté vos louanges, a été réduit en cendres ; et tous nos bâtiments les plus somptueux ne sont maintenant que des ruines » (Isaïe, chap. LXIV, vers II).

Nous avons vu l’intrus Jean Le Béau persécuter les prêtre fidèles, interdire l'église et les chapelles à missires Pierre Le Luyer, Francois Lageat, Yves Le Guen, Jean-Marie du Réchou, Joseph Le Quellec, Pierre-Marie le Mérer de Kerbol, Charles Roverc'h, etc, ainsi qu'à François Berthou après sa courageuse rétractation.

Les bons prêtres laissaient bien Le Béau pontifier dans son « église-mère » les jours de dimanches et plus tard de décades, aux fêtes de l’Etre Suprême et de la Raison. Ils allaient clandestinement, au péril de la vie, célébrer le vrai culte divin dans les chapelles rurales, ce qui leur valait une dénonciation, une « remontrance », de la part du faux-frère et une interdiction nouvelle formulée par la municipalité.

La ville épiscopale de Tréguer renferma toujours dans son sein bon nombre de prêtres insermentés qui rayonnaient dans les campagnes, célébraient dans les chapelles isolées et même à bord des navires, en pleine mer, en plein minuit et rien de plus poétique s'il n'y avait eu péril en la demeure. Ceci me rappelle la volée du bois vert infligée par un pauvre vicaire de campagne à un évêque parjure — Vous ne prêtez pas le serment ? Et comment ferez-vous donc pour vivre ? — Et vous, évêque, comment ferez-vous pour mourir ? — Parmi ces ecclésiastiques citons une figure intéressante, originale, joignant à l'entêtement du Breton la ruse du Gascon : dom Olivier L'Hermite.

Missire Olivier L'HERMITE naquit à Guimaëc, évêché de Tréguer, en 1757. Quand éclata la Révolution, il est vicaire dans sa paroisse natale. Pressé de faire le serment, il refuse courageusement. Il fait ses adieux aux bons paroissiens de Guimaëc en une complainte bretonne où la vraie foi est vengée, la religion du peuple éclairée sur le fait du serment et des assermentée. Maître Olivier ne quitte pas la terre bretonne. Avec missires Geffroy, Le Jan, Le Corre, Jégou, Roger et Mallédant, il évangélise le paye de Ploubezre et la presqu'île de Tréguer. Chacun de ces hardis champion de la foi catholique prend un nom de guerre. Devant les citoyens, L'Hermite est le médecin, le vétérinaire et l'apothicaire ; Mallédant, le meunier ; Le Jan, le notaire ; Jégou, le boucher ; Le Corre, Fanchon le cuisinier. Les initiés tenaient ce discours devant les profanes, les suspects, les bleus : — « Dis donc au meunier que j'ai un boissau de froment à faire moudre ». Missire Mallédant répondait le plus tranquillement du monde. — « Très bien, viens me voir à mon moulin mercredi prochain et n'oublie pas d'apporter ton sac. — Prie donc le boucher de venir sur la fin de la semaine abattre le bœuf et saigner les porcs. Et que Fanchon, le cordon bleu du quartier, l’accompagne pour apprêter la boudinerie. — Ma femme est mal, Lucas le médecin (rien de l'acolyte de Gresset) lui serait très utile par ses consultations et ses remèdes, — J’ai un bail à ferme à passer avec mon propriétaire. Il me faut absolument l'office du notaire ».

Inutile de dire que le meunier Mallédant, le boucher Jégou, le cuisinier Le Corre, le médecin L’Hermite, le notaire Le Jan avaient compris, étaient fidèles au rendez-vous et les enfents étaient baptisés, les malades administrés, les époux mariés, les pécheurs confessés, et les âmes étaient sauvées par ce pieux et adroit stratagème. Cependant, au début de son périlleux ministère, M. L’Hermite est pris et incarcéré à la prison de Morlaix. Il reussit à s'évader et se cache, pendant la Terreur, à Tréguer (Tréguir), Cavan, Tonquédec, Plouaret, Pleubihan (Pleubian). Au mois de juillet 1799, le courageux prêtre, caché à Tréguer, allait visiter son ami M. Lannier, lequel demeurait à Plouguel (Plouguiel), chez ses parents. Deux gardes-côtes s'emparent de M. L'Hermite qui tôt après est emmené sous escorte à la maison d'arrêt de Saint-Brieuc. D’aucuns pensent que le tribunal révolutionnaire de cette ville le condamna à mort, mais le fait n'est pas certain. En octobre 1799, le généreux confesseur de la foi est délivré, avec les autre prisonniers, par les chouans dont les chefs étaient Garnier de Kerigant, Robinault de Saint-Régeant, Mercier, Le Nepvou de Carfort, etc.

Si j'ai tant insisté sur le rôle de missire Olivier L'Hermite c'est qu'il évangélisa pour l'amour de Dieu et au péril de sa vie, le paroisse de Pleubihan. Nous trouvons des indices de cette assertion dans les registres de la commune, et alors qu'il y avait quelque mérite à s'exposer. Le document suivant témoigne que les Pleubihannais connaissaient dom Olivier, et que celui-ci n'était pas à son coup d'essai, à son premier exploit de ce genre dans la paroisse Saint-Georges. L'insistance avec laquelle les autorités constituées réclament la fermeture des chapelles prouve aussi que leurs volontés étaient souvent enfreintes par de hardie compères.

« Ce primidi, onze messidor l’an trois de la République française une et indivisible, nous maire, officiers municipaux et membres du conseil général de la commune de Pleubihan assemblée au lieu ordinaire des séances de la municipalité. Présent le citoyen procureur de la municipalité.

Lesquels délibérant sur la pétition présentée ce jour par le citoyen Jean Nouel de cette commune, sans datte, laquelle a été retirée du bureau par son épouse, laquelle pétition tendante à obtenir l'agrément de la municipalité à ce que citoyen Lermite, prêtre à Tréguier, eut célébré une messe en la chapelle du Rosier dit de Rochjadou, située en cette commune, pour le repos de l’ame de deffuant autre Jean Nouel, son père, et par lui recommandée dans ses derniers soupirs.

La municipalité et le conseil soussigné, d'après avoir ouï le procureur de la commune, lequel déclare n'avoir moyen empêchant à ce que le citoyen Lermite ait à faire l'office divin en cette commune, pourvu toutes fois qu'il exerce son culte dans la mère église, lieu destiné à cet effet, et non ailleurs, que les chapelles appertenante à la nation, la municipalité ne pouvoit en disposer sans une autorisation des autorités supérieures, que d'ailleurs elles peuvent être vendues ou sur le point de l’être, qu’au surplus il mettoit sous les yeux de la municipalité la lettre du comité de sureté générale du 4 germinal et celle de l'administration du directoire du district de Pontrieux du 8 floréal aussi dernier relativement de la pétition du sieur Nouel. 1° la 1ère offre aux yeux que les prêtres non conformistes doivent constamment rester toutes fois sous la surveillance des communes qu'ils habitent, qu'il faut éclairer toutes leurs actions, et empêcher qu'abusant de la crédulité des esprits foibles, ils ne les induisent en erreur et n'altèrent en eux le respect dus aux lois et l’attachement que le République a droit d'attendre de tous bons citoyens. 2° celle du directoire du district nous cite pour exemple les malheurs de la Vendée, ceux du Morbihan et ceux d’une partie des Côte-du-Nord, que ces tristes exemples doivent servir à nous prémunir contre les prêtres non conformistes et réfractaires aux lois, qui pour servir leur orgueil et leur intérêt veullent partout allumer la guerre civile ; par conséquent les plus cruels ennemis du peuple ! Le peuple bon et sage, il faut constamment lui faire entendre le langage de la loi et de raison ; rien ne le trouble dans ces cérémonies religieuses ; mais du moins que son prêtre soit l'ami de la République et fractionne avec les bans républicains, et qu’il prêche la paix, l'union, l’amour et l'obéissance aux lois, éloignant tout parti contraire. En conséquence, citoyens, je requiers au nom de la loi, qu'il soit de suite ordonné aux citoyens chargés des chefs des chapelles situées sur ce territoire, les tiennent fermées tous les jours de la semaine, et qu'il leur soit deffendu de laisser exercer aucun culte dans les dites chapelles par des prêtres hors de cette commune, surtout non conformistes, sous quelque prétexte que ce soit, que ceux qui seront dans l'intention soit de célébrer la messe ou autrement le face en la mère église et non ailleurs comme étant le lieu désigné pour le service du culte.
Guillaume COSTIOU, pr. de la commune »
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A ce réquisitoire le conseil répond par une délibération conforme :

« Vu la pétition du citoyen Jean Nouël, les conclusions du procureur de la commune ci-dessus et les lettres y refférées, la municipalité arrête :

1° qu'il sera de suite ordonné aux citoyens de cette commune chargée des clefs, des fermetures des chapelles situées sur le territoire de cette municipalité et les tenir fermées tous les jours de la semaine ; 2° deffenses faites aux mêmes citoyens de laisser, sous quelque prétexte ou dénommination, faire ou célébrer aucun exercice de cultes dans les dites chapelles par des prêtres hors de notre commune, surtout non conformistes, sous leur responsabilité personnelle et sous peine d'être punis et poursuivis comme malveillants et turbateurs du repos public ; 3° arrêtons que tous prêtres non conformistes n’exerceront aucun culte dans notre commune ailleurs que dans la mère église, sous le surveillance de la municipalité, sauf avis contraire à la municipalité de prendre vers les dits prêtres leurs agents et recéleurs, tels voyes de droit qu’il sera vu appartenir.

Délibéré en la maison commune dudit Pleubian, les jour, mois et an que devant.

Joseph Le Pommellec, maire. — Guillaume Le Quellec, officier municipal. — Jean Rabé, officier municipal. — Ollivier Le Quellec, officier municipal. — Yves Corlouër, notable. — Claude Quémarec, notable. — Joseph Le Guével. — Yves Guillou, notable. — Jean Le Saux, officier municipal. — Pierre Moreau, notable. — Yves Le Guével, notable ».

En 1803, missire Olivier L’Hermite fut nommé par l'autorié diocésaine recteur de l'importante paroisse de Louargat où il mourut en 1816 à l'âge de 59 ans. Il eût pu opter pour le département du Finistère et l'évêché de Quimper, il préféra vivre et mourir dans son cher diocèse de Tréguer qu’il avait édifié en des temps difficiles. La silhouette de ce bon serviteur de Dieu, de l'Eglise et des âmes nous repose de la répugnte figure de Jean Le Béau.

 

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La chapelle de BRESTAN, située au bord de la mer, isolée des agglomérations semble être pendant la Révolution l'asile préféré des prêtres insermentés. Les délibérations du corps municipal portent à chaque page sur cet objet : les prêtres non conformistes célébrent la messe dans les chapelles et laissent absolument seul le curé contitutionnel JEAN LE BÉAU. Vite le citoyen curé fait une remontrance à la municipalité et celle-ci aussitôt défend aux gouverneurs des chapelles de livrer les clefs de ces édifices, de fournir les ornements nécessaires au culte divin, de réunir les fidèles à ces assemblées contre-révolutionnaires. Rien n'y fait. Les réfractaires s’obstinent, les gouverneurs de chapelles sont du complot les catholiques accourent en foule. Des hommes courageux entreprennent de régler le situetion en extorquant l’autorisation du département et du district.

Guillaume Paranthoën, le dernier sénéchal du prieuré, fait signer aux notables habitants une pétition demandant l'usage de la chapelle de Brestan pour la célébration du culte catholique. Il appuie sa demande sur une délibération en date du 13 février 1792 par laquelle la municipalité pleubihannaise autorisait le culte dans les chapelles de Brestan et de Saint-Cyr. Paranthoën est assez heureux pour retirer des mains du citoyen Morvan, chef de bureau au district de Pontrieux, la pétition revêtue des visas du département et du district, mais ne réussit pas à tromper la vigilance des officiers municipaux de Pleubihan. Le registre des délibérations s'occupe beaucoup de cette épineuse affaire dont la gravité paraît à cette époque à la hauteur d’un coup d'État. Je donne seulement le procès-verbal de quelques séances.

« Ce octidi vingt-huit thermidor, l’an trois de la République française une et indivisible, nous, maire, officiers municipaux et membres du conseil général de le commune de Pleubian assemblés au lieu ordinaire des séances de la municipalité.

Présent le citoyen Guillaume Costiou, procureur de la commune, lequel dit :

Citoyens je voie avec douleur les funestes manœuvres tramées dans cette commune qui jusqu'à présent s'est comportée de la manière la plus satisfaisante et avec l'applaudissement des autorités constituées, qu'au contraire aujourd’hui elle s'avilie, redevient dans le néant, sur de prétendus différents cultes réclamés. Je ne connoie, ni vous citoyens ne connoissez aussi de culte particulier autre que celui que nos pères nous ont enseigné : vu la pétition présentée par Antoine Legall, Paranthoën, Pierre Barat, Yves 0llivier et François Doné et autres à l'administration du département des Côtes-du-Nord, — renvoyée le vingt-un de ce mois à celle du district, est donc maladroitement donné, mais puisque enfin des citoyens malveillans ou du moins trompés par un langage perfide veulent se séparer de nous, quoique profesant la même religion qu'eux, quelle distinction pourriez-vous donc y établir.

Je dit que deux sects dans une même commune est absolument nuisible à la société, amis du repos et de la tranquillité public, que c'est la dénunion la plus grande et la plus perfide à l’état puisque la différence ne consiste, que d'un prêtre qui s’est toujours montré amis des lois, que l'autre qui les a toujours abhorrés, et malgré la plus grande surveillance il y commeteroit les abus les plus énorme ; nous en avons la preuve que sous le masque de la religion, la Vendée, le Morbihan et partie des Côtes-du-Nord ont éprouvé les malheurs les plus horribles et leurs destructions entierre.

Vous devez donc en conséquence, citoyens, sur les arrêtés de l’adminiatration du district de Pontrieux, en datte des 25 et 27 de ce mois dont vous prendrez lecture, délibérer : 1° à réclamer de l'administration du district, soit par original ou copie bien collationnée, de la pétition d'Antoine Legall, Paranthoën, Pierre Barat, Yves 0llivier, François Doné et autres, avec nominativement la signature de chaque particulier pour les reconnoître. — Que vous ayez sur le champ et sans retard à nommer une commission de votre seing pour entendre ladite déclaration des Citoyens Pierre Barat, Guillaume Le Brouster et Jean Callec fils, pour passe d’icelles, et sur leur désignation, entendre d'autres signataires, si connus ils sont, pour avoir preuve complette et connoître les auteurs et complices de cette caballe ; — 3° que pareille deffense soit faitte aux gouverneurs des chapelles situées en cette municipalité de donner ouverture d’aucunnes, et à d'autres ministres qu’à ceux résidant actuellement et habituellement en cette commune, et non à d'autres du dehors, ny fournir aucuns ornemens quelconque pour y célébrer aucun culte sans au préalable une autorisation de la municipalité sous peine de fort faiture ; d'après toutes instructions faitte être le tout délibéré ce qui sera vu appartenir et renvoyé à l'administration du district c'est à quoi je conclut et requiert le tout au nom de la loi. Guillaume Costiou, pr. de la commune.

Et quand Guillaume Costiou demandait une chose, il était servi à souhait.

Nous, maire, officiers municipaux du Conseil général susdits et sous-signés, pris lecture de la remontrance ci-dessus du procureur de la commune, vu les arrêtés du directoire du district de Pontrieux, des 25 et 27 de ce mois, le tout bien considéré.

Délibérons : 1° qu'il sera écrit de fait et par exprès à l'administration du district de Pontrieux pour réclamer, soit l'original, ou coppie bien collationnée avec dénommination des signatures de la pétition des Citoyens Antoine Legall, Paranthoën, Pierre Barat, Yves Ollivier, François Doné et autres signataires de cette commune, tendant à ce que dessus dit en la remontrance du procureur de la commune ; — 2° nommons pour commissaires à l'effet d'entendre les Citoyens Pierre Barat, Guillaume Le Brouster, et Jean Callec, fils, ou tous autres qui seront désignés par leurs dépositions, les Citoyens Guillaume Le Quellec, Jean Le Saux, Yves Le Béver, officiers municipaux, Yves Le Quellec, père, Yves Corlouër, Claude Quémarec et Jean-Baptiste André, notables, lesquels s'occuperont primidi premier fructidor prochain, huit heures du matin, à l'audition desdits Pierre Barat, Guillaume Le Brouster, et Jean Callec fils et autres signataires qui leur seront désignés, et ce jusqu'à parfait accomplissement d'une preuve complette, pour découvrir les auteurs et complices de la pétition dont est question ; — 3° que deffense est faite à tous gouverneurs de chapelles, sous l'étendue de cette municipalité, de donner entrée dans aucunes chapelles dont ils ont la disposition, ny ornements et autres effets servant aux cultes, à d'autres ministres qu'à ceux de cette commune et y résidant et non à ceux du dehors, sans au préalable un permis de la municipalité sous peine de forfaiture ; — 4° la présente sera publiée de manière à ce que personne n'en puisse prendre cause d'ignorance, pour, d'après et l'instruction faitte, être le tout renvoyé au directoire du district.

Arrête de plus ladite municipalité qu'elle en conformera en tout à la loi du onze prairial dernier en ce qui concerne les cultes.

Arrêté en la maison commune de Pleubian, les jour mois et an que devant.

Joseph Le Pommellec, maire. — Guillaume Le Quellec, officier municipal. — Jean Le Saux, officier municipal. — Jean Rabé, officier municipal. — Ollivier Le Quellec, officier municipal. — Yves Le Pivaing, notable. — Yves Le Berre, notable. — Jean Baptiste André, notable. — Yves Ollivier, officier municipal. — François Le Gratiet, notable. — Yves Le Quellec, notable. — Claude Quémarec, notable. — Yves Corlouër, notable. — Pierre Moreau, notable. — Guillaume Moreau, notable. — François Berthou, officier municipal. — Joseph Le Guével. — Charles Duréchou, notable. — Guillaume Bénec’h, officier municipal. — Yves Le Béver, officier municipal ».

La délibération suivante nous apprend le résultat et la sanction de l'enquête.

« Ce sextidi, six fructidor, l'an trois de la République française une et indivisible, et nous, maire officiers municipaux de la commune de Pleubian et membres du conseil général assemblés au lieu ordinaire des séances de la municipalité. Présent le citoyen Guillaume Costiou, procureur de la commune, laquel dit :

Citoyens, la mauvaise foy dont le Citoyen Paranthoën fils s’est servis vous est connue. L’arrêté et la lettre dont vous avez entendu lecture vous en font un sur garant, car je suis persuadé que vous n’avez point laissés échapper la force des expressions dont se servent les administrateurs signataires en vous disant qu'il avoit abusé de la confiance du citoyen Morvan, chef de bureau qui lui avoit confié la pétition dont est cas pour la remettre à la municipalité. L'abus de confiance, cittoyens, est et a toujours été un des crimes capiteaux que la justice a poursuivis avec plus de rigueur, car sans la confiance l'ordre social se trouve boulversé et presque anéanti, l'amitié n'est plus qu'un vain nom et de sa destruction naissent les haines, les discordes et tous les maux qu'entraînent après elle cette dernière ; déclarons nous les ennemis jurés en poursuivant les fauteurs et remplissons la tâche qui nous est confiée en nous rendant digne du nom de magistrats du peuple.

Le Citoyen Paranthoën ne se borne point à cette première qualité, car il cherche encore par toutes les voyes que sa mauvaise foy luy subgére à vous mettre en contradiction avec vous-même. Le 13 février 1792 (V*** S***) la municipalité prit un arrêté par lequel l'usage des Chapelles de Brestan et Saint-Cire étaient conservées pour l'utilité général de la commune avec le restriction qu'aucun prêre (hors ceux habitués et assermentés de cette commune) ne pourroient y célébrer aucuns office ; cette arrêté, citoyens, lui a paru un sur moyen de pouvoir parvenir à ces fins criminelles. On lui en a délivré un extrait le premier de ce mois et est allé au directoire pour le faire viser, tirant la conséquence qu’à cette époque là vous étiez dans les mêmes sentiments que l'auteur et quelques signataires de la pétition dont vous faites la poursuite.

Je dis quelques signataires, car le plus grand nombre a rétracté la sienne en observant qu'ils avoient été surpris, comme vous pouvez le voir par l'enquête dont vous avez ordonné l’instruction. Achevons donc citoyens, de poursuivre cette caballe qui ne cherche qu'à armer frère contre frère, citoyen contre citoyen ; éclairons la religion de l’administration qui sera sans doute étonnée d'apprendre que tant de personnes séduites s'unissent pour déclarer qu'elles ont signées par double cette pétition et à nommer Paranthoën père pour l'auteur, Magdeleine se fille, une ex-religieuse François Legall pour instigatrices, prouvons à l’administration qu'ils ont fait cette pétition dans un temps où l'ennemi menaçoit le district et qu’il ne garde peut-être la dite pétition ou son double que dans l’intention de s’en servir dans un pareil cas ; prouvons à l’administration que ces intentions de Paranthoën ne sont pas pures, puisque les signataires à qui il a été à portée de pouvoir communiquer son venin nous ont déclarés qu'ils ne répondroient en différentes questions qu'on pourroit leur faire qu'après la présentation de leurs signatures. Je conclut donc citoyens, à ce que vous arrêtiez qu'il est prouvé que Guilllaume Paranthoën a été saisi par confiance (qu’il l'est effectivement) de la pétition dont est cas par le citoyen Morvan l'un des chef de bureau de l'administration du district, que c'est une violation et un abus de confiance répréhensible, qu’il soit ordonnée au dit Paranthoën de rendre dans les vingt-quatre heures de la notification de votre délibéré, la pétition dont est cas, par original, les vues des administrations des directoires de département et district y portées ainsi qu’il l’a reçue dudit Morvan à deffaut de ce, être ledit Guillaume Paranthoën condamné à une amende pécuniaire au profit des pauvres de cette commune, et à une détention jusqu'à parfait restitution de ladite pétition ; qu'extrait de votre délibéré sera envoyé à l'administration du district de Pontrieux, pour qu'au pied d'icelui y avoir son assentiment et son approbation et d'après être mis en exécution, et a signé : Guillaume COSTIOU, procureur de la commune ».

Les officiers municipaux, véritables moutons de Panurge, répondent à ce discours de Costiou :

« La municipalité et conseil général assemblés, auï la lecture de la remontrance ci-dessus et de l'autre part le tout considéré délibèrent que sur la conclusion du procureur de la commune le ciroyen Guillaume Parenthoën, ayant abusé de la confiance du citoyen Morvan chef de Bureau de l'administration du district sur la remise de la pétition dont est cas, sera poursuivi pour lui en faire la reddition ; qu'en conséquence, vu le mauvaise foy et intention dudit Paranthoën, il sera condamné en une amende de quatre vingt dix livres au profit des pauvres de cette commune, et en outre à une détention jusqu'à parfaite restitution de la pétition dont est cas munie des vûs de l’administration du département et district de Pontrieux, le tout par original ; que extrait du présent délibéré sera envoyé à l’administration du district pour avoir son assentiment et son approbation, pour, d'après quoi, le présent être mis à exécution.

Arrête de plus la municipalité que sur la remontrance de la commission nommée par délibération du 29 de ce mois, pour l'instruction de la pétition dont est cas, qu’elle désire être chargée et nommer en leur place. La dite municipalité et conseil général nomme, au lieu et place des remontrants les citoyens Guillaume Bénec’h, François Berthou, Jean Rabé, officiers municipaux, Pierre Moreau, Guillaume Moreau, Yves Le Berre et Robert Gouronnec notables. Lesquels continueront l’enquête des-ja commencée en ce qui concerne la pétition dont est question, le tout en présence des citoyens, maire et procureur de cette commune.

Arrêté en la maison commune dudit Pleubian les jour, mois et an que devant.

Joseph Le Pommellec. — Pierre Moreau, notable. — Yves Corlouer, notable. — Jean-Baptiste André, notable. — Robert Gouronnec, notable. — François Le Gratiet, notable. — Charles Duréchou, notable. — Claude Quémarec, notable. — Yves Le Quellec, notable. — Claude Quémarec notable. — Yves Le Quellec, notable. — Yves Le Berre, notable. — G. Le Coail. — Guillaume Le Quellec, officier municipal. — Yves Ollivier, officier municipal. — Joseph Le Guével. —Guillaume Bénec’h, officier municipal. — Ollivier Le Quellec, officier municipal. — François Berthou, officier municipal. — Jean Rahé, officier municipal ».

Ainsi, la pétition avait pour objet d'obtenir la chapelle de Brestan « pour y faire célébrer un prétendu culte différent de celui exercé en la maîtresse église ». Par une délibération suivante, le conseil interdit le culte à Brestan et rapporte son arrêté du six fructidor an III qui punissait de l'amende et de la prison Guillaume Paranthoën, « vu que celui-ci a rétabli la pétition ».

(Yves-Marie Lucas).

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