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LES SEIGNEURS DE LOCMARIA EN PLOUMAGOAR |
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LES COETGOURHEDEN, SEIGNEURS DE LOCMARIA.
Cette terre DE LOCMARIA dont le détenteur avait seul droit de juridiction dans la paroisse de Ploumagoar formait un fief déjà important au commencement du 14ème siècle. Son château, ceint de murs et de fossés, était, à cette époque, habité par ROLLAND DE COETGOURHEDEN dont les armes étaient de gueules à la croix engreslée d'argent, avec la devise : In cruce spes et munimen. Ce seigneur dit Ogée, fut un des plus braves chevaliers de son temps ; son courage et ses vertus lui valureut l'estime de Charles de Blois, qui le fit son sénéchal universel en Bretagne, vers l'an 1346.
Son fils OLIVIER DE COETGOURHEDEN comparaît dans une monstre d'armes commandée par Even Charruel en 1356. Il était alors monté sur « un cheval fauve estelé raye noire » [Note : Dom Morice, Preuves, 8ème 1er col. 1503] et reçut en même temps une paye de 40 livres pour ses gaiges. Au mois de Juin 1371, faisait partie de la compagnie de Bertrand Duguesclin qui occupait alors la ville de Bourges ; il se trouvait avec la même compagnie à Caen le 1er Octobre de cette même année.
JEAN PHILIPPE DE COETGOURHEDEN est mentionné dans une transaction datée du dernier jour d'Avril 1360. Il appert de cet acte passé devant la cour de Morlaix que Eon, fils aîné et principal héritier de Monsour Eon de Koitkaès reconnaît que Jahan Phélipes de Coitgourheden avait retrait et approprié et tenait le manoir du Mur, en la paroisse de Plouigneau, ainsi que les autres biens que M. Eon possédait dans les paroisses de Ploérin (Plounérin) et Ploégonier (Plougonver) [Note : Archives de Locmaria].
PHILIPPE II DE COETGOURHEDEN, son fils, chevalier, ratifia à Guingamp le 30 Avril 1381 avec un grand nombre de gentilshommes des environs de cette ville, le traité passé à Guérande,le 15 Janvier précédent, entre Charles VI, roi de France et le duc Jean IV. Il était au nombre des mandataires choisis par Olivier de Clisson, agissant tant pour lui que pour le comte de Penthièvre, son gendre, pour défendre les droits de ces derniers dans le compromis qui devait être passé avec le duc de Bretagne relativement à quelques différents survenus entre eux et soumis à l'arbitrage du duc de Bourgogne [Note : Chronique Briochine]. Conseiller intime de Jéhan de Blois, Philippe de Coëtgourheden le représenta au traité d'Aucfer passé le 19 Octobre 1395 et reçut également de lui le pouvoir de prendre à son nom possession des château et terres de Châteaulin sur Tref (Pontrieux) que le duc de Bretagne avait donnés en gage de l'exécution dudit traité [Note : D. M. Preuves, Tome 1er col. 656-657].
La terre de Locmaria était en 1417 aux mains de PHILIPPE III DE COETGOURHEDEN, dit le Jeune, chevalier et fils du précédent. Il recevait le 28 Octobre de cette année, de Rolland de Coëtgourheden son cousin germain, une décharge de tous les biens composant la succession du père de ce dernier et situés dans les paroisses de Ploumagoar, Plouagat et Châtelaudren. Ce titre, presque illisible ne stipule aucune somme pour prix de cette décharge. Il est conçu en ces termes :
« Je, Rolland de Qoetgourheden, fais assavoir à tous
que combien que en aucun temps je eusse que Monsieur mon père ot autreffois
en la paroesse de Ploemagoer en la ville de Guingamp et ès mettes d'icelle à
Ploagat-Chastelaudren que à la ville de Chastelaudren. Je ne veulx mie que
ce ....... pour possession, sinon des pièces qui me sont livrés selond le contenu ès
lettres faictes entre Phélipes de Quoetgourbeden mon nepvou comme procureur ayant pour
Monsieur mon frère, Messire Phélipes de Quoetgourheden, son père, et veulx que
ledit Messire Phélipes mon frère, et Phélipes son fils [Note : Titres de
Locmaria. — Ces deux Philippes, ainsi que leurs aïeul et bisaïeul
ci-dessus, ont fait penser à quelques généalogistes que le nom primitif de la
famille des Coëtgourheden aurait été Philippe. Nous croyons que c'est une
erreur. Philippe ou mieux Phélipes comme on le lit dans la majeure partie des
pièces était un prénom tel que Olivier, Rolland etc. On sait qu'autrefois le
prénom des aînes se transmettait pendant plusieurs générations notamment à
partir du 13ème siècle. Cependant il existe une famille Philippe qui porte
des armes identiques à celle des Coetgourheden. L'inventaire des titres
de Guingamp (archives départementales) signale, — 1° une sentence de la cour de
cette prévôté entre le procureur de ladite cour et Philippe de Coëtgourheden, le
jeune, représenté par son cousin Rolland de Coëtgourheden, laquelle le maintient
dans les droits de justice et de suite de moulin, qu'il prétendait avoir sur
quelques particuliers, demeurant en l'enclave de la prévôté. — 2°. Une lettre du
duc Jehan en date du 11 Janvier 1435, qui confirme cette sentence] par eulx et leurs
députés ..... icelles choses et sans avoir esgard à cueillette ne levée que je en
eusse fait tant en privé nom .... quelconque aultre personne, ne que
pourrait l'en dire que je eusse été saissi et le certifie .... Passé de ma main,
le vingt huitième jour d'Octobre l'an mil quatre cent et dix-sept (signé)
de Quoetgourheden ita est ».
Philippe de Coëtgourheden paraît avoir
habité son fief de 1421 à 1430 ; il fit pendant ce laps de temps plusieurs
échanges et acquisitions qui l'augmentèrent d'une manière importante [Note :
Notamment l'acquisition d'une pièce de terre ès appartenances de la Ville-Neuve, sur Trieu,
« pour et en espoir et entente que ledit de Coëlgourheden a de faire et édifier
en icelle pièce de terre un moulin bladère ou foulère sur ladite rivière ».
(Titres de Locmaria)] ; on le
trouve parmi les nobles de l'évêché de Tréguier qui firent le serment de
fidélité au duc Jean V au mois d'Octobre 1437.
Nous ne possédons aucun renseignement sur PHILIPPE V DE COETGOURHEDEN, son fils.
JEHAN DE COETGOURHEDEN, époux d'Aloîse d'Avaugour, transigea le 4 Janvier 1466 avec le sieur de l'Isle relativement à quelques domaines, situés près de Locmaria. Il rendit, le 7 Décembre 1469 un compte de tutelle à Allain de Kerliviou de la paroisse de Bourbriac. Sa veuve eut avec sa fille unique, Jéhanne de Coëtgourheden, quelques démêlés au sujet de son douaire et soutint à cet effet, devant la juridiction de Guingamp, un procès qui se termina par un accord passé entre les parties le 4 Juin 1483.
JEANNE DE COETGOURHEDEN avait épousé, vers 1460 Guillaume du Parc dont elle était veuve en 1484, et la terre de Locmaria passa dans cette dernière famille qui la conserva pendant plus de 250 ans. La maison du Parc doit son nom à une terre située dans la paroisse de Brelidy, canton de Pontrieux ; comme elle a été de tout temps comptée au nombre des plus anciennes et des plus distinguées de Bretagne, nous croyons devoir résumer en quelques mots sa généalogie.
FAMILLE DU PARC-LOCMARIA.
Presque tous les seigneurs de ce nom [Note : Les armes des du Parc étaient d'argent, à trois jumelles de gueules ayant anciennement pour support, du coté droit, un lion et pour devise de ce coté : Tout est beau ; à gauche l'écu était supporté par un aigle au naturel, portant un écu sur l'estomac, et pour devise de ce côté : Vaincre ou mourir. Au dessus du casque qui couvrait l'écu, il y avait en cimier un coq au naturel, chantant, et tourné du côté du lion] ont suivi la profession des armes et leur terre était composée d'un château et d'une châtellenie. Dom Morice, dans sa généalogie des comtes de Penthièvre signale comme l'auteur de la tige des seigneurs du Parc, Guillaume d'Avaugour troisième fils de Henry III, comte de Goëllo. Nous croyons qu'il y a lieu de douter de cette assertion qui, si elle eût été exacte, eût fait descendre directement les Du Parc des anciens ducs de Bretagne ; et nous prendrons la preuve du contraire, non-seulement dans divers auteurs, mais dans Dom Morice lui-même, car il fait connaître des seigneurs du nom de du Parc dans ses pièces justificatives, antérieures à la naissance de Guillaume d'Avaugour, qui mourut vers le milieu du 14ème siècle. La filiation suivie des du Parc remonte d'une manière certaine au commencement du 13ème siècle, et s'établit ainsi :
ALAIN seigneur DU PARC, Ier du nom, se croisa en 1248 et vivait encore en 1270, ainsi que Agnès de Coetmen, son épouse.
ALAIN II DU PARC, leur fils marié à Judith de Beaumanoir, comparaît comme témoin dans un accord passé, au mois de Mars 1288 entre le vicomte de Rohan et Hervé de Léon [Note : D. M. Preuves, col. 1087]. De leur mariage naquit :
THOMAS Du PARC qui épousa Macée de Mauny. Il fit partie de la suite d'Arthur II, duc de Bretagne et eut pour héritier :
ALAIN III DU PARC mentionné dans toutes les histoires de notre province et particulièrement dans les rôles de la chambre des Comptes de Paris, aux années 1350, 1360 et 1371 ; le dernier de ces actes est ainsi conçu : « Sachent tuit que je Alain du Parc escuyer confesse avoir reçu de Estienne Braque, trésorier des guerres du Roy, notre sire, la somme de LII francs d'or et demi en prest sur les gaiges de moy et de six autres escuyers de ma compagnie, desservis et à desservir èz présentes guerres du Roy, en la compaignie et soubz le gouvernement de M. le connestable de France. A Pontorson soulz mon scel, le XVIII may l'an MCCCLXXI ». Dans d'autres pièces, Alain III est qualifié de chevalier. Il fut un des 52 seigneurs qui suivirent dans toutes ses expéditions le connétable du Guesclin mentionné dans la quittance que nous venons de transcrire ; il avait épousé Pleizour de Blossac.
Tout porte à croire, mais on n'en a pas la preuve, que Thomas du Parc eut encore pour fils :
MAURICE DU PARC, qui fut au nombre des 21 écuyers choisis par le sire de Beaumanoir pour son combat de 30 Bretons contre 30 Anglais, le 27 Mars 1351 Il avait succédé à Rolland de Coëtgourheden dans la charge de chambellan du duc Charles de Blois, et il soutint vaillamment malgré quelques défaites le parti de son suzerain. Dont Lobineau publie une pièce [Note : Preuves, col. 499] de laquelle il résulte que Maurice du Parc étant capitaine de Quimper et garde de Cornouaille, avait prêté dix mille écus d'or à son maître, et quelque temps après lui avait généreusement fait remise de la moitié de cette somme, pour l'aider à payer sa rançon, alors qu'il était emmené prisonnicr en Angleterre. Mais Charles de retour en Bretagne, le remboursa peu à peu, et dans les ordres qu'il donnait à ses receveurs pour le paiement de sa créance, il se plaisait à rendre justice au dévouement et à la fidélité de Maurice du Parc. Celui-ci ne démentit pas l'affection qu'il portait à Charles de Blois lors de l'enquête qui fut faite pour sa canonisation et dans laquelle il comparut comme témoin. Son fief, situé dans !a paroisse de Rosnohen, évêché de Cornouaille, portait aussi le nom de du Parc.
Il est très-probable que c'est ce même Maurice du Parc qui commandait avec Alain de Beaumont, en 1372 l'aile gauche de l'armée de du Gueselin, qui guerroyait en Poitou, pour le roi de France. Avec cette troupe, Maurice prit une éclatante revanche sur les Anglais et les tailla en pièces.
Les enfants de Alain III du Parc, furent :
ROBIN Sgr DU PARC, époux de Jeanne de Plœuc, et Pierre ou Perrot du Parc. Ces deux frères comparaissent fréquemment dans les monstres d'armes d'Olivier de Clisson qu'ils suivirent dans toutes ses entreprises ; ils étaient présents à la revue que ce grand capitaine fit à Montrelais le 1. Novembre 1579 [Note : Lobineau fait encore mention sous l'année 1405, d'un Henry du Parc, qui fut premier chambellan du duc Jean V, pour le servir, dit-il, avec quatre chevaux de livrée. – Il fut témoin au traité de mariage d'Isabeau de Bretagne, fille ainée du duc, avec Louis, duc d'Anjou fils aîné et héritier de Louis II, roi de Jérusalem. Nous n'avons pu retrouver la filiation de cet Henry du Parc]. Robin du Parc eut deux enfants Jean qui suit et Marie qui épousa le seigneur de Combré.
JEAN I DU PARC épousa Isabeau de Langourla de laquelle il n'eut qu'un fils.
GUILLAUME DU PARC qui continua la postérité de cette Maison. Vers 1460, il avait épousé, ainsi que nous l'avons vu plus haut Jéhanne de Coëtgourheden, fille unique de Jéhan, laquelle lui apporta en mariage la terre de Locmaria. Devenue veuve après dix ans de mariage, Jéhanne tint un grand état de maison, augmenta son fief et défendit, avec un certain courage et même avec succès les priviléges seigneuriaux auxquels elle avait droit. Nous trouvons aux archives de Locmaria un dossier contenant des détails très-curieux au sujet de prérogatives qu'elle prétendait avoir, pour elle et ses successeurs, dans l'église Notre-Dame de Guingamp. Nous en extrayons les principales pièces, qu'on lira ci-après, transcrites littéralement, dans la pensée qu'elles sont inédites. Au point de vue de l'histoire de cette église, elles offrent un intérêt véritable en déterminant, d'une manière précise, l'époque de la construction de sa remarquable abside.
JEHAN II DU PARC comparaît, à la place de sa mère dans les pièces que nous venons de mentionner. Il prit de bonne heure le métier des armes,et servit avec distinction le duc François II, lequel lui fit don en 1487, des biens confisqués sur un nommé Chauzon, qui avait favorisé les ennemis du duc, et lui délivra des lettres par lesquelles il lui accordait un « tiers pot pour ses seigneuries du Parc de Locmaria, de Guernaf, de Kerbisien et autres où il était en possession d'avoir justice patibulaire à deux pots » seulement » [Note : Titres de Penthièvre]. Il reçut encore de ce prince, pour ses bons services, une pension qui fut continuée par la duchesse Anne, sa fille ; et le maréchal de Rieux, tuteur de cette dernière, l'admit au nombre des archers, servant sous son commandement. A cette époque, dit Lobineau, si l'honneur était en grande recommandation à la noblesse, la science ne l'était pas de même. Les plus grands hommes ne savaient pas écrire ; quelques-uns même ne savaient pas lire, et d'autres, ayant honte que l'on signât pour cux, se faisaient faire des estampilles pour imprimer leur nom où il était nécessaire qu'il parût ; tel était, en 1517, Jean du Parc, seigneur de Locmaria. Il avait épousé Marguerite de Kerimerech, et eut de ce mariage :
JACQUES DU PARC qui rendit hommage, le 29 Mars 1541, au duc de Penthièvre, en qualité de tuteur de François, Jéhan, Péronnelle, Françoise, Julienne, Catherine et Jéhanne du Parc, ses sept enfants issus de son mariage avec Péronnelle de Leverzault, pour les biens qui leur étaient advenus de la succession de leur mère [Note : C'est par erreur que La Chenaye-des-Bois donne pour épouse à Jean II du Parc, Péronnelle de Leverzault qui, au contraire, était sa bru. Le même auteur ne fait aucune mention de Jacques du Parc]. Plusieurs actes de cette époque donnent lieu de penser que ce seigneur jouissait d'une grande influence dans sa paroisse et même au dehors. En 1546, les habitants de Ploumagoar ayant été, ainsi que les tenanciers et vassaux de l'abbaye de Sainte-Croix, sommés, par Guyon de Rosmar, lieutenant du capitaine de Guingamp, de satisfaire au devoir de Guet,auquel ils étaient obligés, disait-il, à cause de la terre, ville et château de Guingamp ; le général de la paroisse se réunit le 19 Décembre de cette année pour délibérer à ce sujet, et pria Jacques du Parc, sieur de Locmaria, et Jean le Cozic, abbé de Sainte-Croix, de se réunir à lui. Une partie de l'assemblée parut, tout d'abord, disposée à acquiescer à la réquisition qui avait été faite ; mais les nommés Pierre le Roux et Jean Guillozon ayant pris la parole dans l'intérêt des paroissiens absents, déclarèrent qu'ils ne se soumettraient pas à cette obligation dont ils n'avaient jamais été passibles, ni au paiement des sommes qu'on pourrait réclamer d'eux pour ne s'y être pas soumis, ils entraînèrent l'assemblée qui, se rangeant à leur avis, répondit par un refus formel à la réclamation du commandant du château [Note : Titres de Penthièvre - Guingamp].
Ce refus fut d'un mauvais exemple pour les autres habitants de la prévôté, dont une grande partie refusa de se soumettre aux diverses redevances imposées depuis un temps immémorial.
Pendant neuf ans les services de la place et des fortifications eurent beaucoup à souffrir des tiraillements qui furent la suite de cet état de choses ; enfin ie 29 Novembre 1555, intervint un accord entre Jean de Brosse comte de Penthièvre, et les nobles, bourgeois et habitants de Guingamp à la tête desquels nous trouvons Jacques du Parc. Dans cette transaction, les susdits habitants « en reconnaissance de supériorité et pour tout tribut et redevance de leur franchises priviléges, exemptions et libertés, comme ils ont fait au passé, lui continueront annuellement la somme de sept-vingt livres monnoye qui ont accoutumé de prendre et lever des deniers de ladite ville et faubourg ». Cette fois ils ne refusent plus de faire dans l'intérieur de la ville et du château le service ordinaire de la garnison, sous le commandement des officiers commis par le Duc et ils consentent à payer ce devoir « comme de coutume » [Note : D. Morice, Preuves, t. 3 col. 1148].
Par ce traité signé au couvent des Cordeliers de Guingamp, le comte de Penthièvre maintient à chacun les prééminences d'église qu'il peut posséder, se réservant toutefois, pour lui seul, le choix de ces églises, ne faisant exception que pour le seigneur de Locmaria « lequel jouira comme de coutume, en l'église paroissiale de Ploumagoar, faisant insculper au-dessus de ses armoiries celles dudit seigneur comte, et même une liste en ceinture des armes dudit seigneur, au-dessus de celles dudit seigneur de Locmaria ».
Le 25 Novembre 1555 les principaux justiciables de la prévôté de Guingamp ratifièrent cette espèce de charte en l'église de N.-Dame.
Les paroissiens de Ploumagoar furent appelés le même jour à ratifier en ce qui les concernait, le traité du 21 Novembre. Le procès-verbal de cette acceptation se trouvait aux archives de Penthièvre 41ème boîte ; mais il a été égaré ; heureusement que quelques copies en avaient été faites nous transcrivons celle qui a été publiée par M. de Kermoalquin.
« Tous présents et advenir sceavoir faisons que requérant Jehan Gouriou gouverneur des bourgeois, manans et habitants de Guygamp, nous estre transporté ce jour de la ville de Guygamp jusques à l'église paroissiale de Ploumagoar, en laquelle en l'endroit du prosne de la grande messe célébrée ce jour de dimanche en ladite église, en congrégation du peuple, en présence desdits paroissiens assemblés pour ouir le divin service, ci-après nommés, sceavoir : noble homme Jacques du Parc sieur dudit lieu de Locmaria ; Olivier Berthelot, Rolland Le Guennec, Jacques et Charles Le Faucheur, Allain Montfort, Jéhan Monfort, Robert Bezien, Yvon Le Berre, Henry Le Chante, Allain Le Cogniac, Yvon Le Mesle, dom Jéhan Le Marec, Hervé Lancien, Hervé Le Marec, Jouan et Louis Le Poas, Yvon Prigent, Yvon Le Coq, Clément Le Toullec, dom Jéhan Riou, Guillaume Ollivier, Rolland Josse, Jehan Le Coq, Robert Josse, Jéhan Le Bonhom, et Jéhan Le Guen, Mary, époux d'Isabelle Le Marec, et plusieurs autres paroissiens tenans et ayant terres, rentes et héritages en la prévôté de Guygamp. Nous notaires soubsignants avons remontré et fait entendre auxdits paroissiens, l'effet et contenu entre les nobles habitans des ville et prévôté de Guygamp et très-haut et puissant seigneur Jéhan de Bretagne, duc d'Estampes, comte de Penthièvre, etc., etc., d'une part, et noble et puissant Jacques du Parc, seigneur le Locmaria-Guernaf, escuyer ; Arthur de Rosmar, sieur de Runangoff ; Rolland Hamonnou, sieur de Kerarniou, et les manans et habitants de ladite ville de Guygamp, sellon que plus loin est dit par icelui transac, daté du 21 novembre dernier, et que meurement ils ont conceu et entendu le contenu en yceluy Ont y ceulx dénommés paroissiens et plusieurs autres y estant la plus saine et maire voix loué. ratifié et eu agréable tout le contenu audit accord sur datté, promettant, promettent et s'obligent ycelui rapport en tout que contient leur interrest tenir en thermes et accomplir, et jamais en contrevenir sur l'obligation et hippothèque de tous et chacun leurs biens, meubles et héritages, présents et futteurs par leurs serments et gréé juré par la cour de Guygamp en main, forme de contrat de soumission, prorogation. Y juré par serments de renonciation à tous dellais de stipullations diffuges et autrement. Et consenty, voullu et accordé en l'église paroissiale d'icelle paroisse de Ploumagoar, en l'endroit de prosne de la grande messe dominicale, ce jour de dimanche ditte et célébrée en laditte église, le 23 novembre 1555.
Ainsy signé : J. DE LA HAYE et J. PASQUIOU ».
Jacques du Parc profita de cette occasion pour régler à nouveau ce qui concernait l'exercice de sa juridiction, et il avait, dès la veille, 22 novembre, passé un compromis avec le comte de Penthièvre, par lequel le seigneur de Locmaria fut maintenu dans tous ses droits, d'avoir haute justice et autres privilèges et prééminences, à la charge de fournir audit seigneur comte, « ou à son cappitaine ou procureur dudit seigneur au chasteau de ladite ville de Guingamp, unge esprevier guarny de longiers et sonnettes de millan, chascun jour et an de la Magdeleine au mois de Juillet » [Note : Titres de Penthièvres. En 1770 le receveur de Guingamp percevait encore à l'échéance de chaque année, sur la terre de Locmaria, la somme de 20 livres représentant la rente d'un épervier garni de courroies et de grelots].
FRANCOIS DU PARC, chevalier, seigneur de Locmaria et de Leverzault hérita de Jacques du Parc ; il habitait son fief, en l'année 1562. Par son mariage avec Claudine de Boiseon, dame de Guerrand cette belle terre qui donne son nom à la paroisse de Plouagat-Guerrand, dans laquelle elle est située passa dans la maison du Parc. Cinq enfants naquirent de ce mariage, Claude qui suit, François, Maurice, Jeanne et Gabrielle.
CLAUDE DU PARC seigneur de Locmaria et du Guerrand, épousa : 1° en août 1575, Jeanne deS. Amadour, dont il n'eut point d'enfants. Il se maria en 2ème noces à Julienne du Dresnay et de cette union naquit Louis du Parc ci-après ; enfin il épousa en 3ème noces Marie de Kerguesay qui donna naissance à Claude II du Parc, sieur de Brélidy, époux de Jeanne de Lescouet et à une fille nommée Noelle.
Le duc et la duchesse de Mercœur ayant fait procéder, en 1583 à la réformation de leur duché, Claude du Parc fut appelé comme tous les gentilshommes de cette circonscription, tenant fief et arrière-fief à rendre hommage et à produire aveu à cause de leurs terres. Nous donnons copie de l'acte d'hommage rendu par le seigneur de Locmaria. Outre quelques détails intéressants, cette pièce dont l'original se trouve aux archives départementales, offre un témoignage assez curieux des précautions prises par l'avouant pour détailler, réserver et définir avec une grande complaisance tous les droits qui peuvent lui appartenir sans se faire faute d'éplucher, en quelque sorte, les prérogatives de son suzerain et ne les laissant consigner qu'avec un certain regret.
« Aux homages de très haut, très puissant et illustre prince et princesse Philippe Emmanuel de Loraine et dame Marye de Luxembourg sa compaigne, duc et duchesse de Mercœur et de Penthièvre, pair de France, prince du Saint-Empire, etc.
S'est présenté en personne noble et puissant Claude sieur du Parc, chevalier de l'ordre du Roy,
commissaire des guerres pour sa majesté en l'évêché de Tréguier seigneur de
Locmaria, du Parc, Guernaff, Brellidy, Leverzault etc., lequel a cogneu et cognoist
tenir prochement et ligement de mondit seigneur le Duc, à cause de madame la
duchesse soubz la seigneurie, chastelainye et provosté noble de Guingamp à
debvoir de foi, homage et chambelenage [Note : C'était un droit qui
consistait en une somme d'argent toujours modique, laquelle était due en certain
cas, au seigneur par le nouveau vassal] sans debvoir de ventes ny
rachats [Note : Droit de mutation et de succession, dus au seigneur à la
mort du vassal, par le nouveau possesseur. Ce dernier droit était
ordinairement égal à une année de revenu du fief vacant ; mais souvent on
transigeait avec le seigneur pour une somme déterminée], dont lesdictes terres sont exemptes et quittes en ladicte
provosté noble ; sceavoir : le lieu et manoir noble de Locmaria, ses jardins,
parcs, pourpris vergers, bois de haulte futaye saulzayes rabines coulombiers,
deux moulins et leurs étangs garaines, emplacements d'aultres étangs et moulins
issues, landes frostes et non frostes, fief et juridiction, haulte, basse et
moyenne justice et patibulaire [Note : On lit dans le journal d'un
bourgeois de Guingamp N..... fut pendu et brûlé au patibulaire de
l.ocmaria, le 5 Janvier 1628. A l'une des extrémités du village de Locmaria se
trouve encore aujourd'hui un pilier en maçonnerie dont on a fait une espèce de
croix et qui a dû, autrefois, faire partie de ce patibulaire] à trois postz, trois métairyes nobles,
appelées Tozportz Ploumagon et Cozfvry, fief de ramaye par exprès, sûreté sur
plusieurs héritages en la paroisse de Ploumagoar, manoir noble de Runenvensit,
terres et convenant en dépendances,
rentes, chef rentes, convenans, prééminences d'église comme fondateur et patron
des églises parochiales de Ploumagoar, Saint-Néganton (Agathon) Saint Julien
Sainte Marguerite en Plouisy, Rocheffort Saint Maudez, avec ses anffeuz élevez
labbes es sépultures et armoiries tant en bosse que en trois vitres, en l'église
Notre Dame dudit Guingamp du costé de l'Espitre et en l'église de
Sainte-Croix,et généralement tout ce que ledit sieur de Locmaria tient en la
paroisse de Ploumagoar et Saint Néganton autrement que les héritages et fiefs
tenus sous le comte de Goëlou, et le fief de Sainte-Croix. Et sans comprendre au
présent brevet les maisons et rentes appartenant audit sieur de Locmaria en la
ville et faubourgs dudit Guingamp, pour le regard desquels la foi et serment
d'homage sont deubs par un procureur du corps politique de ladite ville et
faubourgs, sans être tenus à aucun devoir ny fournir aveu, fors un deus d'un
seul chambellenage deu par ledit corps politique avec une hermine d'argent ; en
quoi il se deffroi pour ce regard suilvant les priviléges patrimoniaulx de
ladite provosté. Plus, confesse et recognoist ledit sieur de Locmaria tenir et
qu'il tient prochement et ligement sous mondit seigneur le Duc à cause de sa
chatellenye de Guingamp, les terres et seigneuries de Brellidy, de Leverzault
et de Kergorre, avec leurs pourpris, clostures, bois, coulombiers,
garaines, issues, landes, pustures, moulins, estangs, fiefs, juridictions avec
haulte, basse et moyenne justice en chacune desdites terres de Brellidy et
Leverzault justices et patibulaires avec aussi prééminences d'église et droit de
fondation et patronage estant ès églises de Brellidy, Plouec et autres
prééminences ès chapelles desdites paroisses, rentes, chef-rentes, convenans, fief
et obéissance à tous debvoir seigneuriaux, diligences, droits, despens des
herences et aultres, à cause d'icelles seigneuries de Brellidy et Leverzault.
Ledit sieur de Locmaria confesse être homme, vassal lige subjet à tous debvoirs
seigueuriaux de mondit seigneur le Duc et lui en offre les foy, homage, serment de
fidélité et dit les avoir recueilli des successions de ses prédécesseurs. Pour
tenir de brevet, ledit sieur de Locmaria a signé le présent, le vingt et
deuxième juin mil cinq cent quatre-vingt et trois. Signé Claude du
Parc ».
Le 6 Octobre suivant Claude du Parc fit un nouvel aveu dans
lequel il réénumère tous les droits ci-dessus, ajoutant que, pour son fief de
Locmaria il a le droit de contraindre les hommes et domaniers, sujets au fief de
suivre ses moulins et plaids devant sa cour qui s'exerce en l'auditoire de
Guingamp, par juge, procureur, greffier, notaires et sergents,
avec droit de sceau et de confiscation ; - tous tenanciers, déclaret-il, sont tenus,
comme habitants de la prévôté de Guingamp, au devoir de foy homage et
chambellenage ; mais sont exempts des droits de vente et de rachat.
Il ajoute aussi aux églises et chapelles dans lesquelles il a droit de prééminences, la chapelle de N.-D. de la Chandeleur.
LOUIS DU PARC hérita, en 1605 de son père, mais sous bénéfice d'inventaire. Pendant une partie de sa minorité, Marie de Kerguezay, sa belle-mère, habita Locmaria dont la jouissance lui avait été concédée par la cour ducale de Guingamp, moyennant un fermage aunuel de 3200 livres.
Seigneur de Locmaria et du Guerrand, capitaine de l'arrière ban de la noblesse de l'évêché de Tréguier, lieutenant de la compagnie des gendarmes du duc de Rieux chevalier de l'ordre du Roi, gentilhomme ordinaire de sa chambre, Louis du Parc avait épousé, en 1606, Françoise de Keradenec, fille unique de Pierre de Goëtedrez, laquelle apporta en mariage la terre de ce nom [Note : Elle mourut à Rennes, de la contagion qui régnait en cette ville, le dimanche 18 Juillet 1627]. Il fut gouverneur de la ville et château de Guingamp, en 1621 et années suivantes, et assistait en cette qualité au service qui fut célébre pour la défunte duchesse de Mercoeur, en l'église Notre-Dame, le 1er Octobre 1623. Son décès arriva en cette ville, le 26 Février 1626 ; il fut inhumé le 28 dans l'église Notre-Dame, et, le 12 Mai suivant son coeur fut porté dans l'église de Ploumagoar et placé dans l'enfeu de sa famille.
VINCENT DU PARC marquis de Locmaria et du Guerrand, seigneur du Ponthou, de Portameur, châtelain de Coëtedrez, Brélidy Leversault Bodister et Plougannou ; vicomte de Gurunhuel et du Trobodec ; baron de Guerlesquin de Beffon et de Sainl-Michel-eu-Grève ; maréchal des camps et armées du Roi, conseiller d'état, avait épousé Claude de Nevet, fille de Jean, baron de Nevet. Lonis XIII voulant récompenser ses services, érigea le Guerrand en marquisat, par lettres patentes données au mois de Mai 1637, avec faculté d'annexer plusieurs terres à son marquisat. Vincent du Parc avait été enseigne dans la compagnie des gendarmes du cardinal de Richelieu ; il partit en cette qualité, dit le journal manuscrit d'Yves le Trividic, bourgeois de Guingamp, le 21 mars 1632, à la tête d'un détachement de cette troupe, toute composée de gentilshommes et qui, paraît-il, était alors en garnison à Guingamp, pour se rendre à Paris et rejoindre le corps d'armée que réunissait en cette ville le premier ministre. Il assista au siège de la Rochelle et prit part aux guerres d'Allemagne qui eurent lieu à cette époque.
Les Etats de Bretagne s'étant assemblés à Fougères au mois d'Octobre 1653, l'ordre de la noblesse élut pour son président le marquis de Locmaria, en l'absence du duc de la Trémouille ; il remplit cette fonction dans la séance tenue le 28 de ce mois. Quelques jours après, il fit partie de la commission nommée pour dresser le cahier de remontrances et reçut une indemnité de 14,000 livres pour frais de déplacement.
Un acte du 25 Novembre 1658 qualifie Vincent du Parc de baron de Coëtfrec ; nous n'avons pu savoir comment cette importante châtellenie, qu'il possédait en effet, était passée entre ses mains. Il paraît, du reste, avoir fait son domicile habituel du château du Guerrand ; en 1628, il loua, pour sept ans, la seigneurie de Locmaria, en se réservant, toutefois un logement dans le château et la jouissance des étangs et des bois taillis [Note : L'hôtel où résiliait la famille de Locmaria à Guingamp, et qui était situé rue Notre-Dame, près la porte de Rennes, s'écroula fortuitement le 13 Février 1635].
Vincent du Parc et sa femme fondèrent, vers 1666, la confrérie du Rosaire dans l'église de Plouagat-Guerrand, et affectèrent à cette fondation, qui fut approuvée par Balthazar, évêque de Tréguier, le 27 Juillet 1673, deux quartiers de froment de rente.
LOUIS FRANCOIS DU PARC, fils aîné de Vincent, marquis de Locmaria, hérita de toutes les terres et baronnies de son père, chevalier des ordres et lieutenant général des armées du Roi, commandant dans les trois évêchés [Note : Tréguier, Léon et Cornouaille]. Il mourut le 14 Octobre 1709, connu, dit La Chesnaye, pour avoir été toujours honorable dans sa dépense, pour son assiduité et son application au service, pour son désintéressement, et enfin pour sa valeur et la prudence qu'il a fait paraître dans toutes les occasions de guerre où il s'est montré. Cette flatteuse appréciation du célèbre généalogiste est quelque peu contredite par le savant éditeur des Chant populaire de la Bretagne, M. Hersart de la Villemarqué. « Possesseur de bonne heure du marquisat de son père, dit-il, riche, violent et livré à lui-même, le jeune Louis était la terreur de la paroisse et désolait sa mère, dont les larmes et les prières ne pouvaient rien sur lui. On dit que lorsqu'il sortait, la bonne dame courait elle-même sonner la cloche du château pour donner l'alarme au canton ».
« C'était, chaque jour de nouvelles violences de la part de son fils, et des récriminations nouvelles du côté des habitants du pays ; les choses en vinrent à ce point qu'elle se vit obligée de lui faire quitter la Bretagne ».
La complainte qui suit fait connaître en quelle circonstance [Note : Nous transcrivons en entier la traduction française de ce Guerz ; on ne peut manquer de lire avec plaisir cette composition dont la simplicité ne laisse pas que d'offrir un intérêt extrêmement dramatique].
I.
– Bon jour et joie en cette maison où est Annaïk par ici ?
– Elle est
couchée et dort d'un doux sommeil prenez garde ne faites pas de bruit !
Elle repose doucement prenez garde ne l'éveillez pas !
- Aussitôt le clerc de
Garlan, monta l'escalier. Monta et lentement l'escalier, et vint s'assoir sur le
banc du lit de la jeune fille.
– Lève-toi, Annaïk Kalvez, que nous allions
ensemble à i'aire neuve !
– A l'aire neuve je n'irai point, car il y a là un
méchant homme ;
Le plus méchant gentilhomme du monde, qui me poursuit
partout.
– Quand ils seraient là cent, ils ne te feraient aucun mal ;
Quand ils y
seraient cent, nous irons à l'aire neuve !
Nous irons à l'aire neuve et nous
danserons tous comme eux.
– Elle a mis sa petite robe de laine et elle a
suivi son ami.
II.
Le marquis de Guerrand demandait à l'hôtellier,
ce jour-là :
- Hôtellier, hôtellier, dites-moi, n'avez-vous pas vu le clerc ?
- Seigneur marquis, excusez-moi, je ne sais qui vous demandez.
– Vous
excuser, oh ! certes non ! je demande le clerc de Garlan !
– Il est allé là-bas,
passer la journée, jeune fille gentille au bras ;
Ils sont allés là-bas à
l'aire neuve, joyeux et beau couple ma foi !
Il a à son chapeau une plume de
paon et une chaîne au cou ;
Et au cou, une chaîne, qui retombe sur sa
poitrine.
Elle porte un petit, corset brodé, avec un velours orné d'argent ;
Elle porte un petit corset de noces , ils sont fiancés, je crois.
III.
Le marquis de Guerrand, hors de lui, sauta vite sur son cheval rouge ;
Sur son cheval il sauta vite et se rendit à l'aire neuve.
– Clerc, mets
bas ton pourpoint, que nous nous disputions ces gages [Note : Les aires neuves
sont toujours l'occasion de luttes, suivies de prix décernés aux vainqueurs]
Clerc mets bas
ton pourpoint que nous nous donnions un croc en-jambe ou deux.
- Sauf votre
grâce marquis, je n'en ferai rien, car vous êtes gentihomme et moi je ne le suis
point ;
Car vous êtes le fils de Madame de Guerrand, et moi le fils d'un
paysan.
– Quoique le fils d'un paysan tu as le choix des jolies filles.
– Seigneur marquis excusez-moi ce n'est pas moi qui l'ai choisie ;
Marquis
de Guerrand, excusez-moi, c'est Dieu qui me l'a donnée.
Annaïk
Kalvez tremblait en les entendant parler ainsi.
- Tais-toi, mon ami ; allons-nous-en
; celui-ci nous fera peine et chagrin.
- Auparavant, Clerc,
dis-moi, sais-tu jouer de l'épée ?
- Jamais je
n'ai porté d'épée ; jouer du bâton, je ne dis pas.
- Et en jouerais-tu avec
moi ? Tu es, dit-on, un terrible homme
- Seigneur gentilhomme mon bâton ne
vaut pas votre épée longue et nue ;
Seigneur gentilhomme, je n'en ferai
rien, car vous saliriez votre épée.
– Si je salis mon épée, je la laverai
dans ton sang ?
– Anuaïk voyant couler le sang de son doux Clerc,
Annaik,
en grand émoi sauta, aux cheveux du marquis,
Sauta aux cheveux du
marquis et le traîna autour de l'aire neuve.
- Fuis loin d'ici, traitre de
marquis ; tu as tué mon pauvre Clerc !
IV.
– Aouaïk Kalvez s'en revenait à la maison, les yeux remplis de larmes.
- Ma bonne mère, si vous
m'aimez, vous me ferez mon lit ;
Vous me ferez mon lit bien doux car mon
pauvre cœur va bien mal.
- Vous avez trop dansé, ma fille ; c'est ce qui rend
votre cœur malade.
– Je n'ai point trop dansé, ma mère, c'est ie méchant
marquis qui l'a tué.
Le traître de marquis de Guerrand a tué mon pauvre
Clerc !
Vous direz au fossoyeur, quand il ira le prendre chez lui :
«
Ne jette point de terre dans sa fosse, car dans peu, ma fille l'y suivra ».
Puisque nous n'avons point dormi sur la même couche, nous dormirons dans le
même tombeau ;
Puisque nous n'avons point été mariés en ce monde, nous nous
marierons devant Dieu ».
Il paraît cependant que le jeune homme ne mourut pas sur le coup ; la bonne dame de Nevet, pour racheter la faute de son fils combla de biens le famille du Cloarec.
Quant au marquis il devint la jeunesse passée, aussi régulier dans ses mœurs, qu'il avait été débauché ; on montrait encore, il y a peu d'années ajoute M. de la Villemarqué, les ruines d'un hôpital, fondé par lui, pour les pauvres, près de son château. La tradition raconte que l'on voyait briller chaque soir, très-avant dans la nuit, une petite lumière à une des fenêtres de cet hôpital, et que si le voyageur surpris venait à en demander la cause, on lui répondait : « C'est le marquis de Guerrand qui veille, il prie Dieu, à genoux, de lui pardonner sa jeunesse ». [Note : La chanson suivante, recueillie par M. E. Souvestre, raconte ainsi les derniers moments et les fondations pieuses de Louis-François du Parc. « Le marquis de Guérand disait un jour à ses gens : Mes gens, allez dormir car je veux écrire une lettre pour ma femme qui est à Paris ». « Quand la lettre lui arriva elle était dans un salon, joyeuse et prenant son plaisir avec beaucoup de jeunes gens. Et en lisant la lettre, ses larmes tombaient sur le papier comme la pluie dans une rivière. Et à l'instant elle dit à son cocher : Attelez dix chevaux à mon carosse ; car je veux être, cette nuit, à Plouégat-Guérand. Et la marquise disait lorsqu'elle passait dans les villages : – Comment va le marquis ? Ils lui répondaient tous d'une voix commune : - Nous n'avons entendu rien de nouveau Madame Dieu merci. La marquise dit lorsqu'elle passait à Plouégat-Guérand – Bonjour Plégantais comment va le marquis ? – Guillaume Faucher lui répondit : Continuez, Madame, car il ne fait que vous attendre. Et quand la marquise entra au château de Guérand, elle demanda où était la chambre de son mari. On lui répondit qu'il était au-dessus de la cuisine entouré de médecins. Oh ! bien dur eût été le cœur qui ne se fut pas fondu en larmes en entrant au château de Guérand ; bien dur le cœur qui ne se fut pas troublé à voir le .mari et la femme se demander pardon. - Pardon mon ami, pardon de vous avoir quitté. - Ce n'est pas à vous à demander pardon, ma femme car je vous avais donné occasion ! Approchez-vous ma femme, car je vais faire mon testament. Le premier article de son testament est d'offrir son âme à Dieu et son corps à la terre du cimetière. – J'ai douze domestiques chez moi, un habit noir à chacun d'eux. Ils les choisiront eux-mêmes et ce sera vous qui les paierez. Je donne cent écus à Plouégat en l'honneur de saint Dégât ; j'en donne autant à Notre Dame, et je le donne du fonds du cœur, autant à Luzivili, dont j'ai été le fondateur. Des orgues neuves à Plestin, pour que l'Eglise résonne de doux sons ; cent écus à saint Michel et autant à Saint-Michel-en-Grève. – Hélas ! mon Dieu, mon mari, je ne suis pas assez riche pour tant donner ! - Approchez-vous ma femme, voici la clef de votre cabinet, je n'y ai rien touché.. La marquise était surprise quand elle rouvrit la porte de son cabinet, de voir tout l'or et tout l'argent qui était resté au Guérand. Courage ! courage ! dit-elle, mon mari ; je ferai comme vous l'avez dit. De plus, il y aura un jubilé pendant trois semaines. Et vous, mes enfants, je ferai fonder, en votre nom, un hôpital, dans le bourg de Plouégat, afin que les pauvres prient Dieu pour votre père. On mettra dans l'hôpital douze pauvres, à présent et pour toujours. Il y aura là douze pauvres et un prêtre pour les soulager ». M. E. Souvestre publie aussi, dans sa nouvelle édition de Cambry un chant breton, dont la donnée est à peu près la même que celle du chant édité par M. de la Villemarqué, avec cette différence que la scène se passe aux environs de Lamballe et que c'est Cloarec qui est vainqueur].
Louis François du Parc avait eu un frère, Joseph Gabriel, appelé le comte de Locmaria, et une sœur, Marie-Thérèse, tous les deux décédés sans alliance. De son mariage avec Marie-Renée Angélique de Larlan de Kercadio, morte le 3 mai 1 736 après s'être remariée à Henri de Lambert naquit :
JEAN-MARIE-FRANCOIS DU PARC, marquis de Locmaria et du Guerrand, lieutenant général des armées du Roi, décédé, sans alliance, à Paris, le 2 octobre 1745 à l'âge de 37 ans. Il rendit aveu le 20 décembre 1732 à Louis de Bourbon, comte de Penthièvre qui lui avait afféagé, deux ans auparavant, tous les droits de « banalité et de suite de moulins que pouvait avoir son altesse sérénissime à cause de sa seigneurie de Guingamp tant en proche qu'arrière fief, sur les hommes et habitants des paroisses de Guerlesquin, Loguivy, Plougras, Plounérin, Plounevez et Botsorel ; pour ledit sieur de Locmaria les assujélir à ses propres moulins comme bon lui eût semblé ».
En lui s'est éteinte la branche aînée des du Parc, au
quatorzième degré.
LOUIS-VINCENT DE GOESBRIANT, maréchal des camps et
armées du Roi, gouverneur du château du Taureau hérita de son cousin paternel,
Jean-Marie du Parc, et de ses principales terres et seigneuries, notamment de la
terre de Locmaria, qu'il conserva jusqu'à sa mort arrivée le 18 Juin 1752. Il
avait épousé,le 25 Janvier 1737, Marie-Rosalie de Chatillon. Quelques
difficultés s'étant élevées, après son décès, entre ses héritiers et quelques
créanciers, sa succession fut mise en vente divisée en deux lots. Celui qui
était composé des terres de Locmaria, Leverzault etc. fut adjugé le 27 Août
1760 moyennant la somme de cent seize mille cinquante livres à
ABRAHAM-MICHEL DE LIZARDAIS, chevalier des ordres, colonnel d'artillerie, capitaine de vaisseau, commandant alors une des prames de sa Majesté dans le port de Bordeaux, époux de Demoiselle Marie-Joseph Bernard. L'autre lot, plus considérable que le premier, contenant les seigneuries de Guerlesquin, de Kéradenec, etc., fut vendu, le 10 Septembre suivant, à M. Le Pelletier de Rosambo premier président du Parlement de Paris. M. et Mme de Lizardais n'eurent qu'un fils qui mourut au mois d'Octobre 1768, et par suite d'un traité passé le 1er Février 1770, entre les héritiers de MM. de Lizardais, père et fils, la terre de Locmaria passa entre les mains de M.
ANDRÉ LOUIS-MARIE DE GOURDAN, qui habitait cette terre en 1780.
L'ancienne seigneurie de Locmaria forme encore aujourd'hui une
importante propriété. Le château actuel, reconstruit à deux reprises, en 1752 et
en 1768 se développe au fond d'une vaste cour entourée d'édifices réguliers au
nombre desquels se trouve la chapelle qui est moderne aussi et toujours dédiée à
Notre-Dame de Locmaria. A l'extérieur, dans la partie du sud-ouest on reconnaît
encore une partie des anciennes douves, les moulins et les étangs, n'existent
plus ; ces derniers ont été desséchés pour faire place à de belles prairies
; toutes les terres incultes qui se trouvaient autrefois à proximité du château
sont actuellement couvertes de magnifiques plantations ; près de ces dernières on
remarque un énorme chêne, l'un des plus vieux, sans contredit, du département
toute la partie supérieure de son tronc est privée de branches et s'élève à une
grande hauteur ; les habitants du village appellent cet arbre : la quenouille de
Madame Locmaria.
Qu'il nous soit permis de remercier, ici, le propriétaire de Locmaria,
vers 1854, M. Villeféron aîné, pour la bonne hospitalité qu'il
nous y a donnée, et la complaisance avec laquelle il a mis à notre disposition
les curieuses archives de cet ancien fief qu'il a sauvées des affronts auxquels
elles étaient condamnées les unes dans l'atelier d'un relieur les autres sous le
pilon d'une papeterie.
(Habasque, François-Marie Guillaume).
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