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Jean FROCRAIN, prêtre guillotiné à Lorient
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.

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264. — Le 24 juin 1735, naquit en la trêve de Sainte-Reine, paroisse de Pontchâteau, au village de Lorganais, Jean Frocrain, fils de François et de Guillemette Guihennenc. Il fut baptisé le lendemain de sa naissance. On trouve M. Frocrain tonsuré le 17 décembre 1757 et prêtre le 20 mai 1760. Cet ecclésiastique desservait un peu avant le 20 mai 1765, date de sa première signature, la frérie trêviale de Sainte-Reine en Pontchâteau. Comme tel, il y refusa le serment. Obligé pour cela de quitter son poste, il s’y maintint néanmoins le plus longtemps possible, puisque sa signature ne disparaît des registres de la frérie de Sainte-Reine qu’à la fin d’avril 1792, et c’est encore son écriture qu'on retrouve dans la rédaction d’un acte de sépulture au mois d’août de cette année.

Lorsque survint la loi du 20 août 1792, M. Frocrain, directement atteint par cette loi, voulut s’embarquer pour l’Espagne avec ses confrères au port de Vieille-Roche, près la Roche-Sauveur, au mois d'octobre qui suivit. Mais ceux-ci lui expliquèrent « qu’à cause de ses infirmités (il était affligé en effet d’une claudication prononcée et on l’appelait le clochard), sa place était toute désignée pour une maison de réunion » dont la création avait été prévue pour les prêtres infirmes.

M. Frocrain se laissa convaincre, mais ne se rendit cependant pas à la maison de réunion de Nantes, échappant ainsi aux horreurs de la noyade. Il crut pouvoir vivre ignoré dans son canton. Un supplice d’un autre genre lui était réservé.

265. — M. Frocrain chercha d’abord une retraite à Crossac, puis à Sainte-Reine, chez sa propre sœur, Madeleine, épouse de Guillaume Guihard. Les soldats de la Révolution visitèrent plusieurs fois Lorganais et la maison Guihard. Le prêtre proscrit, lorsqu’il les voyait arriver, les attendait sans trouble et les recevait affablement, leur faisant servir ou leur servant lui-même à boire et à manger. Les militaires trompés par sa manière d’être, qui imitait admirablement celle des gens de la campagne, ne pouvaient soupçonner qu’ils avaient devant eux un prêtre proscrit.

Mais il arriva qu’un Vendéen échappé au massacre de Savenay reçut chez les époux Guihard une généreuse hospitalité. Remis de ses fatigues et guéri de ses blessures, cet homme profita d’une amnistie et prit du service dans la cavalerie des révolutionnaires. Or, quelque temps après, Laumailler, commandant temporaire de Vannes, faisait fouiller activement les campagnes environnantes, dans l’espoir d’y découvrir des prêtres réfractaires. Le 14 juin 1794., une troupe de hussards aborda le village de Lorganais. A leur approche, M. Frocrain, une bêche sur l’épaule, prit de son pas boiteux la direction des cultures, quand tout à coup une voix connue s’écrie : « Voilà le clochard de Sainte-Reine, arrêtez-le ». C’était l’abominable Vendéen qui payait ainsi l’hospitalité à laquelle il était redevable de la vie.

La troupe aussitôt s’empare du malheureux prêtre, le garrotte et l'emmène à La Roche-Bernard, puis de là à Vannes et enfin à Lorient. C’était la dernière étape avant la guillotine.

266. — M. Frocrain demeura plus d’un mois en prison avant de comparaître devant le tribunal criminel du Morbihan, puisque c'est le 22 juillet seulement qu’il subit la constatation d’identité prescrite par la loi avant de le livrer au couperet de la guillotine. Il déclara franchement devant ses juges n'avoir prêté aucun serment, ne s’être point exilé à cause de ses infirmités, bien qu’ayant pris un passeport pour l’Espagne, et n’avoir pas osé, à la suite de la loi du 23 avril 1793, demander un laisser-passer pour se livrer aux autorités du département.

Il prit garde par ailleurs de compromettre quiconque par ses réponses, mais il eut soin quand même de faire remarquer que la loi du 22 floréal, qui visait spécialement les prêtres de sa catégorie, n’était parvenue à Sainte-Reine que postérieurement à son arrestation, mais cet argument n’obtint aucun succès.

Cette parodie judiciaire terminée, le tribunal rendit sa sentence : c'était tout naturellement la mort. Les motifs, on les a vus bien des fois. A la base, on invoque contre M. Frocrain un crime irrémissible : c’est un prêtre réfractaire. La loi du 26 août 1792 voulait purger le territoire de la République des êtres de son espèce. Il n’a pas obéi à la loi qui ordonnait son départ pour l’étranger, pas plus qu'il ne s’est fait interner dans une maison de réunion. Les décrets persécuteurs édictés depuis n’ont pu le faire sortir de sa passivité. Quant à la loi du 22 floréal, son ignorance à son sujet n’est pas une excuse, l’insertion de son texte au Bulletin des Lois tenant lieu de toute autre publication.

267. — En conséquence de l’application de toute cette législation nettement persécutrice, M. Frocrain fut livré au bourreau, « le Vengeur du Peuple », le jour même de son jugement, le 22 juillet 1794 aux 8 heures du soir. Son acte de décès fut dressé le lendemain à la mairie de Lorient. Une tradition qui a cours dans la Brière, veut que M. Frocrain, très boîtoux, comme on l’a dit, étant tombé sur l’échafaud, le bourreau eût eu la cruauté de l’amener sous le couperet en le tirant par les cheveux. Les anciens à Sainte-Reine n’ont pas encore perdu le souvenir de son nom et croient à son martyre.

BIBLIOGRAPHIE.Semaine religieuse de Nantes du 11 février 1888, p. 135. — Laillé, Le Diocèse de Nantes pendant la Révolution, in-8°, Nantes, 1893, t. 1er, p. 42 ; t. II, p. 421. — P. M. Briand, Notices sur les Confesseurs de la Foi pendant la Révolution, in-8°, Nantes, 1903, t. II, p. 518. — R. P. Le Falher, Les Prêtres du Morbihan victimes de la Révolution, in-8°, Vannes, 1921, p. 100-104, publie une partie des pièces de son procès. — Abbé Grégoire, Histoire religieuse de la ville et du pags de Guérande pendant la Révolution, p. 160.

(Sources : Archives du Morbihan, Z 412 et Z 500).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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