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En tête d'un nouveau groupe qui vient se presser sous notre plume, nous remarquerons particulièrement M. Pierre Porcon de la Barbinais, né le 31 octobre 1639, et grand-oncle de notre célèbre Du Guay-Trouin. Ce nouveau Régulus [Note : Marcus Régulus, prisonnier à Carthage vers l'an 251 avant Jésus-Christ, fut envoyé de même à Rome, sous le serment d'un prompt retour, pour y porter des conditions de paix : mais au lieu d'engager le sénat à accepter les offres qu'on lui faisait, il lui persuada au contraire de ne rien accorder ; et revint aussitôt reprendre ses fers. Les Carthaginois irrités, inventèrent contre lui de nouveaux supplices : on lui coupa les paupières ; on l'exposa après cela plusieurs jours aux ardeurs du soleil ; on l'enferma ensuite dans un tonneau garni de pointes, qui ne lui laissaient aucun moment de repos ; enfin l'on termina par l'attacher à une croix, où il finit sa vie. L'héroïsme de cet ancien païen n'a guère, ce nous semble, jeté plus d'éclat que celui de notre généreux chrétien] fut chargé, en 1665, par des négocians de Saint-Malo, du commandement d'une frégate de trente-six canons, pour aller protéger nos bâtimens de commerce contre les Algériens, en attendant que Louis XIV put envoyer ses flottes punir ces barbares Africains des outrages faits au pavillon de France. Notre brave remplit heureusement une partie de sa mission : mais le dey déploya contre lui des forces si supérieures, qu'il fallut enfin succomber, et se rendre prisonnier.

Le Maure, s'imaginant que celui qu'il considérait comme député pour lui faire la guerre, devait être un personnage de marque, le fit venir ; et lui donna commission d'aller porter au vainqueur de l'Europe des propositions de paix : mais il exigea en même temps de lui sa parole d'honneur, qu'il viendrait reprendre ses fers s'il ne réussissait pas ; l'assurant du reste que la vie de six cents Français qu'il tenait dans les chaînes, répondrait de sa conduite.

Porcon se rendit dans sa patrie ; ne put rien gagner sur Louis XIV, à qui l'on avait fait des conditions exorbitantes ; passa par Saint-Malo pour mettre ordre à ses affaires ; et retourna à Alger, rendre compte du refus que faisait son souverain d'entendre à aucune composition de la nature de celles qu'on lui avait proposées.

Qui le croirait ? le féroce dey, sans égard pour un acte de dévouement aussi admirable, et tout éperdu d'apprendre qu'il éprouverait bientôt les effets du ressentiment du roi, n'écouta que sa colère. Il commanda à ses sbires de se saisir de son captif ; et lui fit sur-le-champ couper la tête en sa présence, en l'année 1681.

Les philosophes Evéphène et Damon, dans l'antiquité, furent plus heureux. Charmé de les avoir vus lui tenir parole dans une circonstance à peu près pareille, Denys, tyran de Syracuse, leur rendit la liberté, en les priant de l'admettre dans leur amitié pour l'avenir.

Le ministre Lambtock, parmi les modernes, est le seul qui puisse soutenir le parallèle avec notre Malouin. Détenu chez les chinois, qui se proposaient de prendre Formose ; il fut envoyé par eux vers les Hollandais ses compatriotes, pour les déterminer à rendre le fort de Zélande : mais arrivé dans ce lieu, il exhorta au contraire la garnison à tenir ferme ; et malgré les efforts de ses deux filles pour l’arrêter, il retourna présenter son sein au fatal couteau. (F.-G.-P. Manet).