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PROMENADE SUR LA GREVE

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Promenade en Bretagne                Petit poisson deviendra grand,

               Pourvu que Dieu lui prête vie.

               Mais le lâcher en attendant

               Je tiens pour moi que c’est folie.

 

Jean La Fontaine n’avait pas tort. Si l’on ne pêchait que les espèces de poissons qui en fournissent de gros, les consommateurs et les gourmets se verraient frustrés de plus d’un mets délicat ; et, pour ne parler que d’un tout petit habitant de la mer, on citerait la chevrette comme pouvant figurer avec honneur sur la table la plus somptueuse.

La pêche de ce petit crustacé est aussi fort amusante. Sur nos côtes, tout le monde peut la faire, à marée basse, dans le creux des rochers. Promenez-vous un jour d’été sur la grève de Saint-Michel-en-Grève ou de Saint-Efflam, et après avoir admiré l’immense horizon qui se déroule du côté de la mer et la masse imposante du Roc’h-Allès, jetez les yeux vers la plage. Sur la blancheur éblouissante du sable strié par la mer, s’avance un groupe joyeux. A la figure imberbe, au cigare fumant, à la conversation bruyante et animée, vous devinez des collégiens en vacances. Chacun porte un panier couvert, et une sorte de filet allongé en poche et emmanché d’un bâton, appelé haveneau, ‘avano’ ou havenet quand il s’ouvre comme une paire de ciseaux. Plus loin apparaît une voiture d’où descendent des dames, des messieurs, des enfants. Plusieurs sont armés comme les jeunes gens ; vous pourriez croire qu’il chasse les papillons. Sur tous les points se dessinent entre les rochers, des formes blanches changeant souvent de place et de position. Tout le monde a son but de plaisir, d’agrément ou de santé : prendre un bain et pêcher la chevrette. Il y en a qui sont venus de Morlaix, de Lannion, même de plus loin. La mer est si belle ! Elle vous envoie une si délicieuse fraîcheur ! Voyez comme on barbotte dans l’eau, Comme on s’en asperge, comme l’on court, comme on s’y ébat. Exploitant successivement toutes les mares, on plonge et on retire tour à tour son haveneau, ratissant le fond, grattant les bords, poursuivant la chevrette sous le goémon où elle se réfugie. On parle bon et mauvais temps, un peu de ses affaires et beaucoup de celles des autres, on devise quelquefois d’amour. Ceux qui ne pêchent pas la chevrette, s’amusent à chercher des crabes, des anguilles, des homards, etc.., sous les pierres, dans les cavités : distraction charmante, sans fatigue, sans malaise, sans danger physique ou moral : les cancres vous entaillent bien quelquefois un petit pied mignon ou des doigts délicats, mais on n’en tient pas compte. Un ‘haut-le-pied’ convulsif, un cri strident et aigu toujours accompagné d’un éclat de rire, ne font qu’augmenter le plaisir. Plaignez-vous donc ! L’incident court la grève et l’hilarité se prolonge.

Mais voilà qu’un animal hideux et dégoûtant soulève le varech, allonge ses bras visqueux et semble vous fasciner de ses deux yeux, toujours fixes, et démesurément ouverts. Ne le touchez pas, une commotion galvanique s’ensuivrait, et vos mains vous démangeront comme au contact de l’ortie ; voyez comme il se meut dans tous les sens. Imprudent ! Le monstre s’est collé sur vos bras nus, et de ses nombreux suçoirs il les enlace, les entortille, les serre comme dans un étau ! N’essayez pas de le détacher, ce serait en vain, vous ne feriez que l’irriter . Dans votre effroi vous l’avez retiré de l’eau, plongez-l’y encore ; le voilà qui lâche ses suçoirs et veut se sauver. O ciel ! vos mains, vos bras sont couverts d’un crêpe funèbre ! Le poisson vous a lancé son encre et vous a donné des manchettes et des gants d’un noir velouté du plus beau lustre. C’est à en rendre ces dames jalouses. Quelle belle occasion d’imprimer des hiéroglyphes sur leurs robes de neige, à l’encre de chine indélébile et ineffaçables, sans brevet du gouvernement ! Mais vous paraissez embarrassés. Si le dessin n’entre pas dans vos goûts du jour, lavez-vous tout bonnement les mains, et parlons un peu zoologie. Cet animal n’est ni mollusque ni poisson, c’est une seiche. On en compte une vingtaine d’espèces. Les deux sexes sont séparés. Elle a toujours les yeux ouverts. La partie osseuse, blanche et très tendre, est recherchée pour polir les corps peu durs et pour mettre dans les cages des petits oiseaux qui y nettoient ou aiguisent leurs becs. Sa chair est employée comme appât, et consommée sur les côtes et les îles de la Méditerranée. Les Grecs en font provision pour le carême. Elle a une vésicule pleine de matière noire qu’elle rejette en cas de danger et dont en fait de l’encre de chine. On s’en sert en peinture sous le nom de sepia. L’ambre gris, assure-t-on, n’est autre chose que cette matière noire passée par l’estomac de la baleine et altérée par la mer. Les tentacules de la seiche sont munis de suçoirs énergiques, et sa bouche est assez semblable à un bec de perroquet. La poulpe, genre de seiche, a une coquille en forme de chaloupe, relève et ouvre quelques-uns de ses bras en formes de voiles, et se sert de ses autres comme de rames pour voguer à la surface de l’eau.

Quand à la chevrette, ses moeurs sont peu connues. Elle ressemble beaucoup à l’écrevisse, mais n’est pas armée comme cette dernière de fortes pinces. L’enveloppe crustacée est grisâtre. Sa queue est composée de quatre pièces en forme d’ailes, se repliant et s’écartant à volonté, plumeuses sur les bords. Les deux pièces extérieures sont garnies de pointes saillantes en dehors. Elle a plusieurs antennes fines et soyeuses, celles latérales sont plus longues que le corps. A l’extrémité d’une protubérance en forme de tube très court, on remarque deux yeux saillants. A la partie antérieure de la tête se trouve un appareil de mouvement en forme d’éventail, à bords plumeux comme les pièces de la queue, transparent, flexible, très mince et d’un tissu très solide. La première paire de pattes et la plus longue porte des pinces pour saisir les aliments. Trois autres paires, de grandeur égale, viennent après deux bras terminés par deux mains, cinq autres paires de longueur décroissante, garnies de soie courte et raide servent aux femelles à porter leurs œufs. Tout le monde sait qu’il faut les cuire vivantes et bien les saler. Cuites, elles sont rouges comme des écrevisses, mais ceci n’a pas lieu quand elles sont mortes avant la cuisson.

Diable ! tandis que nous causons seiche, crabe, et crevette, nos jeunes pêcheuses sont toutes à la mer, se donnant réciproquement des leçons de natation . Mais quelle est cette siréne qui effleure le sable dans son costume ci-devant léger, rendu par l’eau excessivement lourd et gênant pour la course ? - Ici ! Médor ! ici ! Tiens, tiens ! - Et essoufflée elle veut atteindre une forme fantastique et aérienne qui glisse sur la grève. C’est son roquet qui s’est emprisonné dans le ‘jupon-crinoline’, et qui, trouvant le jeu charmant, veut garder le chenil qu’il s’est improvisé. Oh ! mais tout le monde se sauve ! La mer monte ! la mer monte ! crie-t-on de toute part. On saisit ses vêtements à la hâte, qui une chemise, qui un pantalon, la panique est générale et ce n’est que sur un rocher haut et loin, qu’on ose respirer, s’apercevant que l’un y a laissé ses bottes et l’autre son chapeau. Bah ! la mer les ramènera, et demain nous les trouverons peut-être.

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