Claude RANNOU

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Barde Roc'h Allaz

(1808 - 1869)

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Découvrez sa VIE et son OEUVRE (cliquez sur Vie ou Oeuvre)

Dans l’article que sous l’inspiration de Charles Le Goffic, Maurice Barrès donna en août 1886 au journal "le Voltaire sur la Littérature de Basse-Bretagne", on cite parmi les poètes bretons « nourris de l’esprit français », La Villemarqué, Luzel, Proux, Quellien et Rannou de Saint-Michel-en-Grève. 

Rannou de Saint-Michel-en-Grève, cité auprès des quatre premiers ! Rannou qui, sauf chez les bardes de son époque, n’avait jamais rencontré qu’une assez médiocre audience ! Mais Le Goffic, qui songeait alors à ce livre qu’il n’a jamais écrit sur les bardes de Bretagne errants ou sédentaires n’était pas mal renseigné. Il n’est pas étonnant qu’il en avait parlé à Maurice Barrès qui, on s’en doute, n’avait aucune connaissance de la langue bretonne et n’eut pas le temps, au cours des trois semaines qu’il passa du côté de Lannion et de Morlaix, d’instruire une sérieuse enquête sur l’art, la littérature, le charme des filles de Bretagne et l’ivrognerie de ses hommes.

Exception faite d’une sorte de notice publicitaire paru en 1838 et dont il sera incessamment question, se rapportant au temps où Rannou débutait dans les fonctions d’instituteur, c’est uniquement à ses « confrères » en ‘bardisme’ qu’il dut sa réputation. Elle était méritée sans doute puisque le Journal de Lannion accueillait volontiers ses productions, et puisque Luzel, Le Scour, Jean-Marie Le Jean, d’autres encore faisaient cas de son talent. 

Jean-Marie Le Jean dit de lui :

« Ha te, roc’h ar strobinel pe welloc’h Roc’h-Allaz

Digas d’eomp ivez Rannou, breizad stard a viskoaz

Gand he Laouenidigez da holl varzed ar vro,

Ker Kouls hag ar « c’hlac’har-gan » saved a nevez so. » 

Bien qu’aucun de ses écrits en langue bretonne ne soit venu à notre connaissance antérieurement à la date de 1861, il n’est pas douteux qu’il avait depuis plusieurs années attiré l’attention sur lui, puisque Benjamin Jollivet le cite dès 1859.

Le livre que Goffic n’écrivit pas, fut écrit et publié en 1895 par le poète nantais Joseph Rousse, qui ne manqua pas de consacrer quelques lignes à Claude Rannou :

« Peu d’années avant J.-M. Le Jean, a-t-il écrit, était mort à Saint-Michel-en-Grève, près de Lannion, un autre instituteur, Rannou, le barde de Roc’h-Allaz, la Roche du Meurtre, qui avait moins de talent, mais mérite de ne pas être oublié ; parmi ses poésies on cite une jolie ballade, La Femme du Matelot. Le 3 août 1861, il avait fait paraître dans le journal Le Bas-Breton un chant intitulé : Laouenidigez da holl Varzed Breiz – La joie de tous les poètes de Bretagne – où il disait : ‘Voici venir les bardes du temps passé ; ils étaient morts ; maintenant ils s’éveillent de leur sommeil, ils sont dans le pays.’. Ses vers, comme ceux de J.-M. Le Jean, n’ont point été réunis en volume. Dans les derniers temps de sa vie, il tenait une auberge à Saint-Michel-en-Grève. Il est enterré au pied du clocher de ce bourg dans le cimetière qu’assiègent sans cesse les vagues, si bien que, pendant les tempêtes, elles en ont plusieurs fois arraché les ossements et même des cercueils. Il y a laissé de très bons souvenirs, car, un soir d’automne, j’ai entendu des enfants, qui déchiffraient son épitaphe, en parler avec admiration, tandis qu’assis sur le mur de cimetière, je regardais les goélands planer dans le ciel, et les chariots de varechs traverser la grève de la baie immense, traînés par des chevaux ’trécorrois’ qui faisaient tinter au loin leur grosse sonnaille. ».

Si Joseph Rousse, dont les scrupules d’exactitude sont indéniables, a entendu les enfants de Saint-Michel-en-Grève « parler avec admiration » de Rannou, c’est qu’il fit son pèlerinage au cimetière marin de la bourgade très peu de temps après la mort du barde-aubergiste, alors qu’ils pouvaient avoir encore en mémoire quelques-uns des chants populaires composés dans les dernières années de sa vie. Car l’oubli s’est étendu rapidement sur cet humble et curieux personnage, qu’il peut être intéressant de faire ou revivre ou plutôt connaître.

 [ Inspiré des articles que Léon Dubreuil a publié en 1952 dans la Nouvelle Revue de Bretagne (revue aujourd’hui disparue)]