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RECUEIL DES FORMULES ANCIENNES DU XVIème siècle

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En parcourant dernièrement, aux Archives départementales, quelques papiers non classés, j'ai rencontré un petit cahier, qu'on pourrait intituler Recueil de formules. On y trouve en effet des formules à l'usage des notaires, et même des formules de médecine, sans compter quelques notes historiques. L'auteur du Recueil est un clerc du diocèse de Vannes, notaire royal et apostolique. Il se nommait Thomas Le Moëllic ; il vivait dans la première moitié du XVIème siècle, et habitait Vannes et plus tard Sarzeau.

 

I. — La première formule qu'il donne est celle de la nomination d'un maître d'école : J'y reviendrai dans un moment.

Les formules suivantes, empruntées à la chancellerie de Robert Guibé, évêque de Nantes et administrateur de Vannes (1511-1513), concernent la tonsure, les fiançailles, la célébration des mariages, et autres actes ecclésiastiques.

D'autres formules se rapportent à des actes purement civils, comme des reçus, des règlements de comptes, des fermes, des chargements de navires, etc.

On y trouve aussi des formules de politesse, à mettre au commencement ou à la fin des lettres, et qui variaient nécessairement suivant la qualité de la personne à qui l'on écrivait.

Presque toutes ces formules se rencontrent dans les Preuves de l'Histoire de Bretagne ; mais il n'en est pas de même de celle de la nomination d'un maître d'école : c'est une pièce rare.

En voici la traduction littérale, faite sur le latin :

« Yves du Quirissec, scolastique de l'église de Vannes, à tous ceux qui verront les présentes lettres, salut dans le Seigneur et foi absolue dans leur contenu. Sachez que, pleinement informés de la science littéraire, de l'honnêteté de la vie et des mœurs, de la probité et des louables vertus d'honnête homme, maître N., clerc du diocèse de Vannes, Nous le députons, le créons et l'instituons présentement au gouvernement et à la conduite des écoles dans la paroisse de N. de ce diocèse, en se faisant aider d'un adjoint pour le chant, et nous lui confions par la teneur des présentes, et pour un an à partir de la date de ces lettres, le soin, le gouvernement, l'administration et l'exercice des dites écoles, avec tous les honneurs, les charges, les privilèges, les libertés, et les profits qui en proviennent et qui ont coutume d'en provenir ; et nous défendons à qui que ce soit, de quelqu'état, grade ou condition qu'il soit, sous peine de soixante livres d'amende à employer en œuvres pies, de s'ingérer ou de s'immiscer, en dehors de lui, de quelque manière que ce soit, dans l'exercice de cette fonction à l'avenir, ou d'empêcher le dit N. , par un moyen quelconque, de gouverner et de diriger les dites écoles. — En foi de quoi, nous avons ordonné de dresser nos présentes lettres, et d'y mettre notre petit cachet, à défaut actuel de notre grand sceau, parce que le dit maître a juré entre nos mains de se bien et fidèlement conduire dans le gouvernement de ces écoles. Donné et fait le ... jour ... mois et an ... ».

On voit que le régime des écoles au XVIème siècle était bien différent de celui du XIXème.

 

II. — Parmi les formules d'actes se trouvent aussi des formules de médecine ; elles se rencontrent presque toutes entre un acte de 1532 et une note de 1539. En voici quelques échantillons, qui donneront une idée de la thérapeutique populaire, chez nous, au XVIème siècle.

« Remède pour le mal de teste. — Prenez du siccado et le bouillez et le meptez en ung pot neuff, avec de bon vin blanc, et puis mettez le tout en une petite poche, et le plus chaudement que pourez mètez sur le mal. Approuvé est.

Pour la touz. — Il convient que preniez la reys (racine) de la valérienne et lâ reys de galiot, et du miel et de la  quenelle, et mettez le tout en un pot neuff, avec de bon vin blanc, et le bouillez et en bevez souvent.

Pour bien faire ung dormitoire, prenez du lait de femme, ung aubin (blanc) d'euff fort battu et du siccado, mettez le tout sur la teste du patient : il dormira.

Pour faire dormir un malade : prenez de la vervoyne et en frotez les tamples du malade : si dormira.

Remède contre la fieuvre : prenez de l'esclère, de la vervoyne et de la sauge, et les pilez touz ensemble o du gros sel, et puys meptez sur le bras droit o ung beau linge : soit feuvre quarte tiercze ou quotidienne, si guérira.

Contre-pouéson : prenez de la reys (racine) de boullon blanc et la cuillez la nuyt de la saint Jehan-Baptiste, et meptez la secher ; qu'elle soit sur vous, si allez en quelque compagnie et que ayez suspicion, mettez la dite reys soubz la touaille (nappe) devant vous avant que bevez et mangez, en disant quelque chose, et s'il y a quelque sort ou pouéson, elle randera l'eau et suera, et incontinant prenez-la et la grattez et en mettez en votre vin » — Voilà de la superstition.

Pour la maladie de peste : prenez du romarin, du siccado et la reys de valérienne, et les bouillez ensemble avecques de l'eau de fontaine en ung pot neuff, et puis en bevez souvent, et quand ladite maladie sortira hors du corps du passient, mettez sur la bosse (bubon) le marc et merde de chyen, blanche et destrampée.

— Si cette dernière prescription fait, sourire, voici un autre remède plus sérieux.

« Quant la peste aparoit, soit mins desus ung amplastre de galbanne contre du cuir bien délié ; dès incontinant que la créature se sentira frapée de cette maladie, prange à boire de l'eau de nones, du métridal, du triècle, du plus viel que on poura trouver, et de la pouldre de sang de dragon, tout mistionné en ung verre, et tédie sur le feu et le boire chaudement ; et si la bosse (bubon) vient à grossir, soit mins de sus du diaculum magnum, et puis après par trois ou quatre tours ; et pour ia faire pourir faites amplastre de l'oignon de liz et de la graine de lin fort bouillys ensemble o du lait dous, et après getez le lait et prenez l'oignon et en faites amplâtre et metez desus le mal ; et s'il y a escarboucle, soit mins amplastre de gratia Dei. Amen. — Jhesus Dieu donne santé à qui la demande. Amen ».

 

III. — Outre les formules d'actes et les formules de médecine, il y a aussi quelques notes historiques, intercalées en différents endroits du Recueil. Les voici, rangées par ordre chronologique.

« L'escripture du tombeau de maistre Guy du Quirissec, qui décéda le 22ème jour de mars 1515.
Eximie Guydo du Quirissec probitatis, omnique charitatis gratia stipatissimus, Archidiaconus et Canonicus Venetensis promeritus, hac mole enea contegitur, qui XI° Kalendas Aprilis expiravit, anno Virginei partus M. D. XV. — Posce igitur lector sincera numina mente spiritus ut tuta pace quiescat. Amen »
.

Son tombeau était dans la chapelle de saint Guigner, dite aujourd'hui du Sacré-Cœur, à la Cathédrale.

Autre note historique. « Le mercredy, quatriesme jour d'august l'an 1518, list le Roy de France son entrée au chasteau de Nantes et se nommoit Franczoys de Valloys, premier de ce nom couronné roy de France, et estoit la royne Claude, royne de France et duchesse de Bretagne, ovecques luy, et madame la régente mère du roy, et madame d'Alanson sœur du roy, ovecques les triumfez de ce pays et duché de Bretagne ; ils furent au chasteau dempuix le mercredy jucques au dimanche, sans faire leur entrée en la ville, et fist le Roy son entrée le dimanche ouictiesme du dit moys, environ quatre heures après mydy, et celle de la royne fut environ sept heures du soir, après soupper, et fut l'entrée de la royne la plus belle, et firent leur entrée par la porte de saint Nycollas ».

Ogée met l'arrivée des souverains au 13 août, et leur entrée solennelle au 20. A-t-il raison contre un contemporain et peut-être un témoin des évenements ?
« Le mardy 23ème jour d'octobre l'an 1521, fut fait et gréé notaire et tabellion de la court de madame la prieusse d'Artz, nommée dame Jehanne de la Rivière, aux plez généraulx tinz par monsieur Grot le sénéchal, maîstre Jehan Droillart sieur de Kerlen, présents Jehan du Bot sieur de Kerbot et autres ».

Ces noms nous intéressent peu, mais Thomas Le Moellic devait avoir des raisons particulières pour les consigner dans son cahier.
« Le lundy 26ème jour de may l'an 1522, issit l'âme et alla de vie à trespas le corps de feu Dom Jehan Le Moellic, presbtre et recteur de Camortz, et fut inhumé et enterré en l'église cathédralle de Vennes, au devant et entrée de la chapelle de Monsieur Sainct Guyner, où est enterré le corps de maistre Guy du Quirissec son maistre, archidiacre et chanoine dudit Vennes ; et décebda le dit Moellic en la méson de Me Guillaume Thomas, recteur de Montoir, et furent ses exécuteurs Dom Jehan Hellec, Jehan Chesdanne dit Ploërmel, et Roulet Ridezan, apothicaire ».

Il s'agit évidemment dans cette note d'un membre de la famille, et probablement d'un oncle de l'auteur.

« Le juédy, premier jour de septembre l'an 1532, vint le Roy Franczoys et Mgr le Dauphin son filz au chasteau de Succynio, et fut dempuys le juédy jucques au mercredy, l'an surdit. » — Cette note a son importance : elle prouve que le Roi, après avoir assisté le 4 août aux États de Vannes, où fut décidée l'union de la Bretagne à la France, et après avoir signé à Nantes, vers le 20 de ce mois, le décret d'union, revint sur ses pas, pour se trouver le 1er septembre à Sucinio.

« Le dimanche de Pasques floury, 25ème jour de mars l'an 1547 (N. S. 1548), alla de vie à trespas noble damoiselle Anne de Guitté, dame de Kerlen : que devant Dieu soit son âme. Amen. ». C'est par cette note, concernant une connaissance et peut-être une amie, que se termine la série des renseignements fournis par Thomas Le Moellic à la postérité.

Les dates qu'il donne sont écrites habituellement en toutes lettres, quelquefois cependant en chiffres arabes. L'usage de ces nouveaux signes commençait alors à se répandre en Bretagne, et on trouve dans son cahier des tableaux indiquant la correspondance de ces chiffres et des lettres du système romain.

Il mentionne aussi le symbolisme des couleurs, spécialement dans le blazon. « Rouge, dit-il, signifie fierté, blanc humilité, jaune jouissance, bleu beauté, vert gaité, noir deuil, et aussi espoir de mieux avoir ».

Il termine par quelques proverbes enseignés jadis au roi Alexandre :
« Parle peu. — Soys véritable. — Soys bénin à touz, familier à peu, flatteur à nulle personne. — Soys droicturier, ferme en adversité, humble et caust en prospérité. — Ne dis ton segret à femme né à enfans. —
Retiens cestuy enseignement :
Pense une foys tant seulment
Un chacun jour que tu mourras
Et par ainsi bien vivre pourras »
.

(M. Le Mené).

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