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LES CALVAIRIENNES DE REDON |
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CHAPITRE PREMIER.
CALVAIRE DE REDON. - DU FONDATEUR DE CETTE MAISON ET DE CE QU'Y S'Y PASSA JUSQUES A SON UNION AVEC LA CONGRÉGATION DU CALVAIRE.
La ville de Redon, située au confluent de l'Oult et de la Vilaine, doit son origine, comme tant d'autres villes, à un monastère, l'abbaye de Saint-Sauveur, fondée au IXème siècle par saint Convoïon. Cette abbaye fut célèbre et puissante au moyen-âge, et l'abbé pouvait compter vingt-quatre prieurés et douze cures recevant ses ordres.
Au XVème siècle, l'abbaye de Saint-Sauveur de Redon tomba en commande ; le premier de ces abbés commandataires fut un franciscain, le frère Alain de Coetivy, d'abord évêque de Dol en 1438, puis de Quimper en 1444. Créé cardinal et archevêque d'Avignon le 20 décembre 1449, il devint abbé de Redon de 1468 à 1474. Au XVIIème siècle le grand cardinal de Richelieu fut lui-même abbé commandataire de Redon. Mais nous n'avons à faire ici ni l'histoire de Redon, ni l'histoire de son abbaye, mais à dire ce que nous connaissons de l'ancien monastère du Calvaire de Redon ; nous laissons donc parler Les Annales Calvairiennes : [Note : Les Annales Calvairiennes, par le Père Siméon Mallevaud, recollet Angers, 1671, p. 878 et suivantes]
« Ce monastère n'étant pas originairement du Calvaire, mais de l'abbaye de la Trinité de Poitiers, nous n'en traiterons pas l'histoire comme des autres, et suivrons simplement le mémoire qui nous en a été fourni.
Monsieur de Pléthatel, bénédictin, en a été le fondateur. Ce pieux religieux se nommait Noüel de la Raygnerais, natif de l'Evêché de Saint-Malo, près Montfort. Son père s'appelait de la Raygnerais, sa mère était issue des Chefs de Mail, sieurs de la Bétulaye, parents et alliés aux maisons de la Roirie, de la Cotardais, la Chaise-d'Albrée et d'Espinay.
Il avait un oncle maternel religieux de l'ordre de saint Benoit, en l'abbaye de Saint-Melaine-lès-Rennes, que en prit grand soin, prévoyant, par inspiration divine, que cet enfant se rendrait capable d'étendre la gloire de Dieu ; en quoi il n'a pas été trompé, car ce jeune enfant, à peine parvenu au bout de ses études, se fit religieux du même ordre et fut un des grands prédicateurs de son temps, et des plus suivis, ayant un don particulier de toucher les cœurs. On l'appelait ordinairement l'amoureux de Jésus, tant il s'énonçait avec ferveur. Il a possédé plusieurs bénéfices de son ordre, avec édification, se retranchant à lui-même pour aider au prochain et rétablir en bon ordre les églises, les ornant de calices, croix, tableaux et beaux ornements, et prenant grand soin que les messes y fussent bien servies. Il a même été employé aux affaires d'Etat ; car on le députa vers le roi Henri IV, afin de lui demander Monsieur de Vendôme pour gouverneur de la Bretagne ; en quoi il réussit si parfaitement et agréa tellement que le roi voulut le retenir à la cour.
Ses épargnes sur les biens qu'il a possédés ont servi à l'amplification de la gloire de Dieu, aidant plusieurs monastères et subvenant à leurs nécessités : la noble abbaye de la Joie, près d'Hennebont, en Basse-Bretagne, en peut rendre témoignage. Le malheur des guerres l'ayant ruinée, il la secourut tant de ses biens que de son bon conseil et industrie à faire recouvrer les rentes et revenus qui étaient presque perdus. Les religieuses de Nazareth, près de Vannes, lui sont aussi très obligées : une fois, elles- se trouvaient en très grande nécessité et ne savaient à qui s'adresser pour être secourues. Prêchant alors à Vannes, dans l'église cathédrale, il apprit leurs besoins et les fut trouver, avec une bonne somme d'argent, pour laquelle il fit la fondation d'une messe par semaine, en l'honneur du Saint Nom de Jésus, qu'il aimait tendrement. Il donna aux Capucins de la même ville pour mille francs de livres, dont ils étaient fort pauvres et affligés de n'en pouvoir avoir pour leurs études. Les Rds Pères Minimes de Rennes furent en grande disette en leur commencement, personne ne s'offrant à continuer la construction de leur couvent. Ce dévot personnage sachant cela leur porta quatre mille livres, à dessein de continuer et de les fonder tout-à-fait. Mais Dieu, le voulant réserver à la fondation du monastère, dont il porte heureusement la qualité de fondateur, fit que Monsieur l'Evêque de Rennes, messire Cornulier, l'entreprit avant lui ; ce qu'il lui céda volontiers, retenant seulement la principale de l'église avec monsieur le président Marboeuf, dans l'espérance que Dieu ferait naître une autre occasion favorable à sa piété.
La vénérable Congrégation de Saint-Maur en France, lui doit une partie de son bonheur pour son établissement en Bretagne ; ayant fait venir ces religieux et leur ayant cédé son droit de prieur, il les établit en cette belle abbaye, se contentant d'une petite pension, comme un simple religieux. Il y mit premièrement les réformés de Bretagne, et leur conseilla et permit de s'unir à la congrégation de Saint-Maur.
Non content de tant de bienfaits, il projetait toujours de faire bâtir à ses frais un monastère où Dieu fut servi et adoré jusqu'à la fin des siècles ; et jetant les yeux sur plusieurs Religions, il crut qu'il était plus à-propos d'établir des religieuses de son Ordre en cette ville de Redon ; si bien qu'en l'an 1629, — par un touchement de l'esprit de Dieu — il communiqua le dessein qu'il avait de faire construire un couvent de l'Ordre de son patriarche Saint Benoît, au R. P. Baudry, pour lors prieur de l'abbaye de Saint-Sauveur de Redon lequel le congratula de son dessein et s'offrit d'obtenir des religieuses de Madame Jeanne Guischard de Bourbon, très vertueuse abbesse de la Trinité de Poitiers. En bref, ce R. P. Baudry en donna avis à cette dame et conseils de ce qu'il fallait faire : premièrement l'autorisation du cardinal de Richelieu, abbé commandataire de Redon, autorisation qu'il fit donner par son grand vicaire, de 5 juillet 1629 ; ensuite la permission de l'évêque de Vannes qui fut expédiée par Monsieur Gentil, official et vicaire-général.
Cependant Monsieur de Pléchatel écrivit à l'abbesse de la Trinité, pour lui témoigner le désir qu'il avait d'être fondateur du couvent qui devait se faire dans la ville de Redon, comme l'en assuraient les pères Bénédictins ; ce que volontiers elle acepta.
Elle en fit promptement dresser l'acte de fondation, en date du onze juillet 1629, sous la condition de 3000 livres, pour lesquelles il serait tenu pour principal Fondateur et participerait à toutes les messes, prières et bonnes œuvres que feraient les religieuses, et autres conditions écrites en l'original. Il fit associer Monsieur le Président Marbeuf à la fondation, afin d'assister et de maintenir les Religieuses après sa Mort.
L'abbesse ayant obtenu de Monseigneur de Poitiers l'obédience pour huit religieuses, y joignit la sienne et choisit,
la Révérende Mère Philippe d'Ollivier, dite de St-Paul, en qualité de sa vicaire,
la Révérende Mère Georges Farcy, dite de Ste-Cécile, pour prieure,
Anne Ménage, dite de St-Benoît,
Verane Couplier, dite de St-joseph,
Catherine de la Pommerais, dite de la Croix,
Anne de la Trinité,
Charlotte Vorger, dite de St-Placide, converse, et une petite fille , nommée Louise Loranceau, nièce du R. P. Baudry ; elles eurent pour guide le R. P. Bétélaud, prieur de St-Jean d'Angély.
Elles ne manquèrent pas d'exercer leur patience pendant ce voyage ; car, dès la première nuit, étant arrivées dans une maison noble de leur connaissance, où elles se tenaient en grande sûreté, il s'y rencontra nombre de Messieurs qui, sans respect pour eux-mêmes et pour ces dames, se présentèrent le soir, en foule, à la porte de leur chambre, voulant qu'on l'ouvrit, prenant pour prétexte d'avoir oublié quelques armes dans cette chambre. La plus ancienne leur ayant humblement répondu, les pria d'envoyer quelques servantes de la maison les quérir. Entendant cette réponse, ces libertins gardèrent quelque temps le silence, puis contrefirent la voix. La bonne Mère s'en apercevant, leur parla sévèrement, ce qui les irrita tellement qu'ils firent tout leur pouvoir pour y entrer par force ; ce dont ces pauvres filles furent inquiètes toute la nuit.
Six jours après, elles furent dans un péril evident : ayant été surprises par la nuit, leur carrosse se trouva sur le haut d'un précipice et ne pouvait ni avancer, ni reculer, lorsque tout-à-coup le R. P. Bétélaud, le voyant déjà tout penché sur le bord, fut inspiré de le faire arrêter. Il fit descendre les religieuses le mieux qu'il put, et on les conduisit à pied au premier village voisin. Le reste de l'équipage resta sur les lieux, attendant le jour ; et on constata alors la protection de Dieu et de ses bons anges.
Elles arrivèrent à Redon le jour de St-Mathieu 1629, et descendirent à l'abbaye de Saint-Sauveur pour y entendre la sainte messe. Le R. P. Baudry les reçut avec un grand témoignage de joie et pensait les conduire dans une maison louée provisoirement, lorsque la personne se dédit de telle sorte que ces pauvres religieuses étaient sous le toit de la Divine Providence. Mais Dieu n'abandonne pas les siens et il inspira, par le moyen du R. P., à une bonne veuve nommée Yvonne Chercais, femme de feu Monsieur Outin, de les loger au Port. Cette bonne dame les a beaucoup aidées en ce commencement, mais les charités des révérends Pères de l'abbaye ont été sans bornes, leur, disant tous les jours la sainte messe et leur envoyant leurs repas tout apprêtés.
Cependant elles obtinrent la permission de Messieurs de la ville, donnée en date du 18 octobre 1629, d'acheter une maison dans la ville et de s'y établir ; elles y restèrent jusqu'à l'année 1637. Ensuite, Monsieur, de Pléchatel travailla pour obtenir des lettres patentes de Sa Majesté, qui lui furent concédées au mois de décembre de l'an de grâce 1633, le 24ème de son règne. La vérification en fut faite en parlement le 18 janvier 1635, à quoi fut jointe la permission du chapitre des Bénédictins de Saint-Sauveur ; permission qu'ils avaient déjà donnée le 12 décembre 1634. Assuré de toutes ces permissions, on commença à travailler au bâtiment le 2 janvier 1636. Le R. P. Placide des Arcus, visiteur, donna pour architecte aux religieuses, par le commandement du R. P. Général, un de leurs pères oblats, sous la conduite du R. P. Denys, religieux de l'abbaye. Mais avant que de poser la première pierre, Satan, jaloux de l'œuvre, fit élever tant d'oppositions, que ni Monsieur le fondateur, ni les religieuses ne savaient quel lieu envisager, pour se placer ; vu même qu'un religieux ancien, nommé Monsieur Radeau, poussé par une grande affection pour les religieuses, leur avait donné un emplacement de l'autre côté de la ville, désirant les y établir et avoir la qualité de fondateur. Or, comme c'était un ancien ami qui, dès leur arrivée à Redon les avait assistées, tant au spirituel qu'au temporel, on craignait fort de le désobliger. Mais comme Dieu dispose et conduit secrètement ses desseins, il fit qu'on s'arrêta sur une pièce de terre, au faubourg St-Michel, laquelle Monsieur de Pléchatel acheta. Ce qui fit souvenir de la révélation faite au R. P. Bétélaud, une nuit après mâtines : considérant le lieu que Monsieur Radeau leur avait donné pour y bâtir, et le trouvant fort malsain et incommode, il s'endormit à demi et, en même temps, il lui sembla voir le R. P. Baudry, depuis peu décédé, qui lui dit : « Ne vous mettez pas en peine : ce ne sera pas là qu'elles bâtiront, mais à Saint-Michel, par expresse volonté de Dieu ».
Le R. P. Bétélaud confia cette révélation à un de ses amis, lequel en a donné connaissance lorsqu'il en a vu l'effet. En réalité, il ne se présenta aucun empêchement, comme sur plusieurs autres lieux que l'on avait fait effort d'avoir, ou la justice, les prêtres mêmes et les habitants se sont opposés formellement. Ce n'est pas qu'elles n'aient été troublées par quelques voisins, à qui l'on ôtait un chemin qui conduisait à la rivière ; ce qui les aigrissait de telle sorte que la nuit ils abattaient ce que l'on avait fait le jour. Lorsque la construction fut en état de loger les religieuses, ces voisins s'avisèrent d'un autre stratagème : ce fut de faire courir le bruit que dans ce lieu on voyait des spectres et des fantômes, qu'on y entendait des cris et des hurlements épouvantables, et tout cela afin d'intimider les religieuses. Mais ces bonnes âmes, se confiant en Dieu, ne tardèrent pas d'y aller, le plus vite possible. Ce fut le 29 septembre, fête de St Michel, l'an 1637. Elles quittèrent donc leur hospice sur les 4 heures du matin, conduits par Monsieur leur fondateur, revêtu de l'aube, assisté de deux prêtres portant un crucifix, les mains jointes et psalmodiant; les religieuses voilées, conduites par quelques demoiselles de leurs amies ou de leurs parentes, suivaient en silence. Lorsque le cortège arriva à leur petite chapelle, Monsieur le fondateur entonna le Veni Creator et une antienne à la Sainte-Vierge que les religieuses poursuivirent ; à la grand'messe, après la communion, il entonna le Te Deum, et sur les 4 ou 5 heures du soir, le R. P. Prieur vint congédier le peuple qui s'était rendu en foule au nouveau monastère. Il ferma alors la porte et, au grand contentement des religieuses, il y établit la clôture qui depuis a été très exactement observée. Leur bon fondateur les visitait souvent, augmentait ses largesses et ses bienfaits, fournissait le nécessaire pour l'agrandissement du bâtiment et les fournit même de meubles. Le tout se peut monter à plus de quarante mille livres, soit en ce qu'il donna pour la construction du monastère, ou bien encore en considération de sa nièce, soeur Joachine des Salles, dite de la Trinité, et sœur Gabrielle du Mas, dite du Saint-Esprit, sa filleule quoique bien dotées de leurs parents. Ce bon vieillard les a aimées et chéries jusqu'à la fin.
Il est à noter que le plan de l'église ayant été accepté, on fit le vœu ou promesse d'y joindre une chapelle au glorieux Saint Michel ; cette chapelle resta quelque temps sans autel, Monsieur le fondateur semblant indifférent à ce vœu et faisant même la sourde oreille, lorsqu'on lui en parlait. Or, étant un jour en son ancien prieuré de Pléchatel, il devint tout à coup aveugle et demeura plusieurs heures en cet état : ce qui l'étonna étrangement. Persuadé intérieurement que c'était une punition du peu de dévotion qu'il avait au pieux Archange Saint Michel, de n'avoir pas fait élever un autel dans sa chapelle, il promit de le faire au plutôt. Peu après, dans, le même jour, la vue lui revint comme devant ; ce qui l'obligea incontinent à faire faire l'autel.
On a souvent remarqué les protections de ce grand Archange.
Ces mots sont écrits sur la pierre fondamentale de l'église ; Sancta Trinitas unus Deus ; avec dessein de la consacrer à l'honneur de cet auguste mystère ».
CHAPITRE II.
DE L'UNION DE CE COUVENT A LA CONGRÉGATION DU CALVAIRE.
« Pendant les années qui s'écoulèrent entre la fondation de ce monastère et son union à la congrégation du Calvaire, les religieuses de cette communauté très désireuses de la perfection, ne respiraient que les moyens pour y avancer. Dans leurs recréations quelques-unes d'entre elles qui avaient été à Beaugé et connu les pratiques du Calvaire ne cessaient de faire récit de tout ce qu'elles avaient ouï dire de feue Madame d'Orléans ; ce qui allumait un feu dans ces bonnes âmes et les faisait aspirer sans cesse de se voir unies à une si sainte congrégation, sans pourtant avoir l'espoir de voir le jour où elles pourraient y parvenir.
Elle surent qu'en l'an 1635 les religieuses de l'abbaye de la Trinité — d'où en partie elles étaient venues — avaient obtenu un bref du Saint-Père, pour s'unir à celles de la congrégation du Calvaire [Note : Le Ms. 2301 de la bibl. Maz. Contient de nombreuses lettres du P. Joseph au sujet: de la réunion de cette abbaye à l'ordre du Calvaire]. Cela leur donna bonne espérance d'y parvenir aussi ; et dès lors, elles tentèrent tous les moyens possibles pour s'y acheminer.
Il est à remarquer que dès l'année 1633, une jeune novice ne fit sa profession que sur l'espérance que lui donna le R. P. Dom Anselme des Rousseaux, prieur de Saint-Sauveur qu'en peu de temps cette maison serait unie à la congrégation du Calvaire. Aussi cette âme, en toutes les rencontres où elle entendait quelque chose des pratiques qui s'y observaient, s'échauffait et projetait comment elle pourrait contribuer à cet heureux acheminement. Ce qu'elle a fait avec ardeur, s'exposant à bien des bourrasques, en découvrant les empêchements que quelques-unes mettaient à retarder ce bien, quoiqu'en apparence toutes semblassent s'y porter ; mais effectivement elles n'en désiraient pas l'exécution, s'estimant être dans la parfaite réforme, en observant les constitutions de leur monastère. Ces obstacles ne faisaient qu'augmenter les difficultés pour celles qui désiraient l'union, lesquelles ne manquaient pas d'écrire secrètement tant au R. P. Joseph, qu'au général des Bénédictins et à Madame la Générale du Calvaire, faisant parvenir leurs lettres par le moyen des Rds Pères Prieurs de l'abbaye qui tous, successivement, leur ont prêté la main pour cet effet. Malgré ces précautions, il y eut surprise de quelques lettres ; ce qui occasionna des mortifications et des orages à leurs auteurs, sans pouvoir pourtant affaiblir leur courage, ni faire cesser les écrits pour cette persécution.
Il y avait donc de nombreuses chaînes à rompre : la prieure était perpétuelle et si bien établie qu'à moins d'une vertu extraordinaire, — comme elle l'a fait bien paraître — il n'y avait pas sujet d'espérer de la disposer à cet acte. A cette difficulté se joignaient les avis de quantité de personnes, tant de religieux que d'ecclésiastiques et de séculiers que désapprouvaient ce pieux dessein. De plus, l'évêque de Vannes s'y opposait de toutes ses forces, et dans toutes ses visites, après avoir réuni les religieuses au chapitre, leur promettait toute sorte de secours et d'assistance, si elles voulaient vivre à leur ordinaire, sous sa direction. Ce que voyant, ces filles recouraient à la bonne mère prieure, l'importunaient afin qu'elle écrivît elle-même aux différents personnages susnommés : ce que cette bonne âme ne manquait pas d'accomplir. De plus, afin de hâter la réalisation de ces ardents désirs, elle assemblait toute la communauté, une fois le jour, devant un petit autel dédié à l'ange gardien, où après avoir chanté l'hymne Custodes hominum, chaque religieuse, les bras en croix, récitait une dizaine du chapelet, — ce qui composait plus d'un rosaire par jour — demandant instamment le secours de la Sainte Vierge.
Cependant, quatre ou cinq ans s'écoulèrent, sans aucun avancement de l'affaire, lorsque Dieu les secourut dans leurs angoisses, en inspirant à Madame la Générale, qui faisait alors la visite de ses monastères, de passer par Redon, afin de voir cette communauté et de discerner quel était son esprit. Sa révérence ayant donc envoyé un exprés pour avertir qu'elle était proche, on ne saurait exprimer la joie que la pluspart des religieuses reçurent de cette bonne nouvelle.
Il y avait pour lors une de ces bonnes filles malade au lit depuis plusieurs semaines, laquelle ayant appris cette nouvelle, se leva, immédiatement et prenant un balai s'en alla aider à approprier le couvent. La joie la transporta de telle sorte que tant que Sa Révérence fut dans la maison elle ne ressentit point son mal et resta debout comme les autres. Toutes des ferventes religieuses se tenaient auprès de cette digne Mère et de sa compagnie, sans oser dire un mot et se trouvaient même indignes de lever les yeux pour les regarder ; il faut dire qu'on les avait instruites à ce faire, leur ayant été répété bien souvent que tout irait bien, pourvu qu'elles pe parlassent point.
Un jour et demi s'étaient cependant écoulés et ells n'avaient pu découvrir leurs aspirations à Sa Révérence, qui désirait pourtant l'apprendre d'elles-mêmes, sans les y convier de sa part. Enfin, voyant le terme du départ s'approcher, une religieuse, ne pouvant plus retenir ses mouvements accosta la soeur Charlotte, secrétaire de Madame, et lui témoigna le grand désir qu'elles avaient de se communiquer à Sa Révérence, mais qu'elles n'osaient le faire. La secrétaire entendant cette confidence, enleva toute crainte à la religieuse, en lui disant que si on perdait l'occasion d'ouvrir son cœur, que c'en était fait de leur dessein, mais que le secret l'empêchait d'en dire davantage.
Cette bonne sœur s'en alla trouver toutes les autres vraiment animées du désir, afin de leur communiquer cette petite conférence ; de telle sorte que tout aussitôt il y eut foule à aller se jeter aux pieds de Sa Révérence qui les reçut avec tant de bénignité et de douceur qu'elle leur donna toute la nuit pour les écouter. Elle fut aidée de la Rde Mère de Saint-Paul, son assistante qui, de son côté recevait les déclarations de ces ferventes filles ; elles virent ainsi clairement et connurent celles qui désiraient le plus l'union. Le tout se passa de telle sorte que de part et d'autre chacune se trouva contente et édifiée. Aux adieux, la Générale leur donna toute sorte d'espérance, leur disant que cette visite leur servirait pour leur bien. Elle leur témoigna aussi beaucoup de tendresse et d'affection, les exhorta à lui écrire franchement à l'avenir, et qu'elle allait les recommander au R. P. Prieur, en passant à Saint-Sauveur : ce qu'elle fit.
Or, depuis ce temps-là, elles eurent la consolation de lui écrire et d'en recevoir les réponses par les mains de ce R. Père. Ce qui les aida à supporter encore l'ennui du délai de deux ans avant leur réunion au Calvaire, à cause de l'opposition de l'évêque de Vannes qui ne voulait donner son consentement, prétextant que les Mères du Calvaire ne faisaient que s'en moquer (Voir à la fin les pièces justificatives). Cet évêque y consentit enfin, mais à condition que la Rde Mère Agnès de Sainte-Croix, dite de Plœuc, sa nièce, et assistante de la Rde Mère Directrice, y serait envoyée comme prieure. Elle y arriva donc lel 9 octobre 1641. Elle était accompagnée des vénérables mères,
Anne de Sainte-Marie,
Magdeleine de Jésus, dite Alaneau,
Et sœur Perrine de la Vierge, dite Malin, converse.
Peu de jours après la Rde Mère de Saint-Joseph, dite de Boussac, et Marie-Magdeleine des Pieds-de-Jésus, dite Le Maistre, vinrenti les rejoindre. Toutes furent reçues avec tant de joie et d'estime qu'elles n'étaient regardées que comme des miroirs de perfection.
Le R. P. prieur qui savait les sentiments de cette communauté ne manqua pas de se trouver à l'église, au moment de l'arrivée de ces religieuses, afin de les recevoir dignement. Il conduisit jusqu'à la porte de clôture la Rde Mère Agnès, assistante du Calvaire ; et là, il lui témoigna la part qu'il prenait de la satisfaction des religieuses auxquelles elle allait s'unir, union depuis si longtemps souhaitée. Elle lui répondit en termes très simples, qu'elle venait dans le dessein de leur donner tout le contentement possible et qu'elle n'épargnerait rien pour correspondre aux desseins de Dieu sur ces bonnes âmes ; elle implora ensuite pour la communauté le secours de ses prières et ses assistances ordinaires.
Les professes et les novices vinrent ensuite au-devant d'elle, jusqu'à la porte, en chantant le Veni Creator. Elle les embrassa et teur donna des témoignages de son affection plus que maternelle.
Ces pauvres filles ne se possédaient pas, tant leur joie était grande.
La
Mère Agnès les trouva disposées à tout ce qu'elle voulait ; chacune se démettant
de bon cœur de toute charge et obédience, pour n'être plus rien qu'en Dieu et
pour Dieu. Elles prirent humblement le voile blanc et le rang de novices, tout
autant de temps qu'on le jugea à propos, et firent dévotement les
10 jours toutes ensemble, afin de faire les vœux, selon la forme de la
Congrégation du Calvaire. Elles les prononcèrent le jour de la Conception de la
Sainte Vierge, la même année 1641, après la messe qui fut chantée par le R. P.
Arsène, prieur de l'abbaye et le sermon de l'un de ses religieux. La grande
grille fut ouverte, et devant le Saint-Sacrement, tenu par le R. P. prieur,
chacune prononça hautement les vœux, commençant par la Rde Mère George de
Sainte-Cécile, dite Farcy, prieure ci-devant,
Ensuite les Mères Vérane de Saint-Joseph, dite Couplier ; Catherine de la Croix, dite de la Pommerais ; Jeanne de Saint-Benoît, dite. Mahé ; Anne de la Conception, dite Dohin ; Renée de Sainte-Gertrude, dite Georget ; Joachine de la Trinité, dite des Salles ; Gabrielle du Saint-Esprit, dite du Mas ; Louise de Saint-Thomas, dite Loranceau, toutes du chœur,
Et sœur Renée de la Nativité, dite Romagne ; Et sœur Raouline de Saint-Michel, converses.
Il y avait pour lors cinq
novices, lesquelles recommencèrent leur année de noviciat, selon les pratiques
établies dans la congrégation du Calvaire, à savoir :
Sœur Jeanne de
Sainte-Scholastique, dite de Talhouët,
Sœur Marguerite de Saint-Maur, dite
Guillermeau,
Sœur Anne de Saint-Bernard, dite le Bel,
Sœur Françoise
de Saint-Placide, dite Greffier.
La cinquième sortit par infirmité.
Elles accomplirent leur année de probation avec ferveur. Animées des mêmes désirs que les professes, elles ont prononcé les mêmes vœux, avec satisfaction tant de leur part que de la communauté qui en a reçu service et édification. Toutes furent donc unies par le désir de la perfection et par la pratique des exercices et autres observances de la Congrégation du Calvaire. Il n'y a maintenant aucune différence entre cette communauté et les Calvairiennes d'origine, et elles sont, avec justice, tenues pour telles par les Supérieurs.
Il semble que leurs anciennes constitutions leur avaient prophétisé ce bonheur, par les paroles suivantes : « Allez filles bien-aimées du grand saint Paul, avancez-vous aux pratiques qui vous sont ici prescrites, et Dieu vous fera voir encore de plus grands dons ».
CHAPITRE III.
DES VERTUS QUE FIT VOIR EN CETTE MAISON, LA Rde MÉRE AGNÈS DE SAINTE-CROIX.
La Rde Mère Agnès de Sainte-Croix était noble d'extraction et s'appelait au siècle, demoiselle Agnès de Plœuc. Elle fit profession à l'Encloître, et fut une des vingt-quatre compagnes de Madame d'Orléans. Sa parenté avec Monseigneur de Vannes fut cause du consentement qu'il donna de changer cette maison en un monastère du Calvaire ; malheureusement le nouveau monastère ne garda pas longtemps la nouvelle prieure. Elle y resta cependant assez longtemps pour lui donner les premières teintes de l'esprit crucifié du Calvaire ; en effet, son éloquence, son bon exemple, sa ferveur, faisaient une grande impression dans les âmes. Sa charité et sa prévenance, spécialement pour les malades, ont été sans bornes ; elle disait souvent que si elle eût pu prolonger la vie à l'une de ses filles, quand ce n'aurait été que d'une heure et même d'un moment, qu'elle l'aurait voulu faire, à quelque prix que ce fut, d'autant que par cette prolongation l'âme pouvait accroître en grâce par les vertus qui se peuvent pratiquer en un tel état de souffrance.
Elle gagnait les cœurs par sa tendresse et une véritable affection, et elle enflammait les âmes tant pour le service divin que pour les autres observances. Elle-même s'y portait avec zèle, et plus que ses forces et sa santé ne le permettaient, car elle excédait dans les austérités et autres mortifications de surérogation ; ce qui faisait craindre qu'elle ne contribuât elle-même aux infirmités qui l'affligeaient. Ses filles la suppliaient souvent de se modérer : à quoi elle répondait qu'il fallait être bien pur pour comparaître au jugement épouvantable de Dieu, que ses yeux divins voyaient de grosses fautes, là où ne connaissions pas seulement de défaut. Son humilité la tenait toujours dans un état d'abaissemenit devant Sa Majesté adorable et lui faisait beaucoup appréhender ce moment.
Sa dernière maladie, qui ne dura que quatre jours, l'arrêta au sixième mois de son emploi dans cette maison ; et, quoique sa maladie ne parut pas d'abord mortelle, elle ne laissa pas de demander les sacrements le troisième jour. Mais le matin elle perdit tout d'un coup la parole, d'une manière si prompte, qu'elle ne pût recevoir que la bénédiction et l'absolution générale, avec l'application des indulgences ; il n'y avait du reste qu'un jour et demi qu'elle avait communié.
La communauté resta fort affligée de cette perte ; mais elle se consola cependant dans l'espérance que leur chère mère jouissait de Dieu, et elle regarda comme une grande faveur de posséder en leur monastère le corps de celle qu'elle révérait beaucoup. Quelques religieuses ont assuré que, passant auprès de son tombeau, elles ont ressenti une très suave odeur et à la mort d'une religieuse, comme on creusait sa fosse, tout proche de celle de la mère de Plœuc, le fossoyeur ressentit une odeur si bonne, qu'il assura n'avoir rien senti de si agréable.
Une religieuse de la communauté s'étant fait donner une relique de sa châsse, à cause de l'affection et de la dévotion qu'elle portait à la défunte, la gardait précieusement ; une fois entr'autre, cherchant quelque chose dans sa table, elle fut embaumée d'une odeur si suave qu'elle en fut surprise. Ne sachant d'où cela procédait, elle sentait tout ce qu'elle ôtait de cette table, sans trouver aucune odeur, sinon lorsqu'elle toucha ce petit ossement ; ce fut pour elle une grande joie, et qui lui donna le désir d'imiter les vertus qu'elle avait vu cette bonne Mère mettre en pratique.
Les petites pensionnaires ressentirent aussi une fois une très bonne odeur, se trouvant dans la cellule de la religieuse qui gardait cet ossement : la première qui en eut l'odeur tenait le petit reliquaire où il est renfermé et alla incontinent quérir ses compagnes ; toutes ensemble assurèrent qu'il leur en venait une fort bonne odeur, et elles en restèrent joyeuses et excitées à la dévotion.
Les bonnes Mères qui l'ont assistée dans l'établissement de la Congrégation en cette maison, ont aussi été de grande édification, zélées pour l'observance, soumises à leur supérieure et charitables envers la communauté.
La Rde Mère Catherine de Saint-Joseph, dite de Boussac, succéda à la Mère Agnès dans la charge de prieure ; elle avait été du vivant de celle-ci maîtresse des novices et avait exercé cette charge avec bon succès. Ses solides vertus l'avaient fait désirer à cet office. Elle était douée d'une charité si grande qu'elle ne pouvait voir les religieuses en peine, les consolant jusqu'à ce que elle pût les voir en paix.
La vénérable Mère Paule du Saint-Calvaire a été sous-prieure plusieurs années, maîtresse du noviciat et du séminaire et a laissé une bonne impression de ses vertus à toutes celles qui ont eu le bonheur d'être sous sa sainte conduite, leur apprenant non seulement de parole quel est le trésor et la richesse de l'âme, mais leur montrant encore par l'exemple comment il faut le prendre et l'acquérir ».
CHAPITRE IV.
MADAME DE GONDY ET LE CALVAIRE DE REDON. — LETTRES INÉDITES. — DERNIERS JOURS DU CALVAIRE.
Dans ce chapitre nous allons publier quelques-unes des lettres inédites de Madame de Gondy ; elles sont adressées, soit au Calvaire de Redon, soit d'une manière générale à toute la Congrégation. Le Ms. 3,933, suppl. fr. de la Bibl. Nat. nous les fournira. Ce Ms. commet une erreur quand il appelle la mère de Gondy la 26ème supérieure générale de la Congrégation, elle n'est bien que la 6ème religieuse qui ait gouverné le Calvaire, ainsi que nous allons voir :
LA TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE SAINT JEAN DE LA CROIX, actuellement Générale, n'est que la 17ème religieuse qui depuis sa fondation ait gouverné la Congrégation du Calvaire, la TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE DE GONDY, PETITE-FILLE DE MADAME D'ORLÉANS, n'a donc pu être la 26ème Générale.
Voici la liste des 7 premières Mères Directrices, ou Prieures générales :
1re. TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE GABRIELLE DE SAINT-BENOIT DE L'ESPRONNIÈRE, a gouverné 9 ans, de 1620 à 1629.
2ème. TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE MADELEINE DE LA PASSION DE RIEUX, de 1629 à 1641.
3ème. TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE MARIE DU SAINT-ESPRIT, DITE MICHEL, de 1641 à 1653 ; la Très Révérende Mère de Rieux a repris la Charge de 1653 à 1663.
4ème. TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE FRANÇOISE RENÉE DU SAINT- ESPRIT, dite GRAVE, de Janvier 1664 à 1676 ; ce fut cette digne Mère qui donna le saint habit à MADEMOISELLE DE GONDY, le 18 Février 1667, et reçut encore ses vœux l'année suivante.
5ème. TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE GABRIELLE DE L'ANNONCIATION, dite DE LA TROCHE DE SAVONIÈRE, de 1676 à 1678.
6ème. TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE SCHOLASTIQUE DE GONDY, de 1678 à 1692.
7ème. TRÈS RÉVÉRENDE MADELEINE DE LA PASSION, dite CRÉNAN, de 1692 à 1704. La Très Révérende MÈRE DE GONDY reprit la charge de 1704 à 1716, elle mourut dans l'exercice de sa charge, âgée de 68 ans. La TRÈS RÉVÉRENDE MÈRE DE CRÉNAN reprit de nouveau la charge où elle mourut également le 24 Novembre. 1721.
LETTRE DE NOTRE RÉVÉRENDE MÈRE DE GONDY A LA COMMUNAUTÉ DU CALVAIRE DE REDON. (Fol. 509).
La paix de Jésus-Christ soit dans vos coeurs ! Je l'en supplie avec un redoublement d'ardeur, me voyant de nouveau chargée de vos âmes. Je vous conjure de la demander vous-mêmes, et de travailler à l'acquérir par la soumission aux ordres de la Providence, par le renoncement à vos désirs particuliers, et enfin par la confiance que tous les chrétiens doivent, avoir dans la bonté de Dieu qui donne les secours proportionnés à nos besoins, lorsqu'on les espère et qu'on les demande par les mérites de Jésus-Christ.
Il faut encore, mes chères sœurs, que vous renonciez à vos lumières pour vous soumettre à celles de vos supérieures. Soyez bien persuadées qu'en mon particulier il n'y en a pas une que je ne souhaiterais satisfaire dans tout ce qu'elle peut désirer, si je ne voyais pas si clairement que le bon ordre et la clôture s'y opposent. Je suis bien aise de dire ceci en général. Ne pouvant pas répondre à toutes les lettres particulière que j'ai reçues, celles qui m'ont écrit, trouveront ici leur réponse. Je suis aussi bien aise de vous dire que j'ai vu avec plaisir dans ces lettres la justice que vous rendez à ma Révérende Mère de l'Incarnation, de souhaiter sa continuation dans la charge de Prieure. Sa vertu et son mérite l'en rendent digne, et l'amitié qu'elle a pour votre communauté vous engage doublement à recevoir sa continuation avec joie. Son humilité lui a fait souvent demander du repos. Aidez-lui à porter son fardeau par votre attachement et votre fidélité à tous vos devoirs. C'est ce que Dieu demande de vous et moi aussi, et que vous fassiez la justice de croire que je suis votre.... 1707.
A UNE RELIGIEUSE QUI AVAIT DE LA PEINE A ACCEPTER UNE CHARGE. (Fol. 534).
J'ai reçu, ma Chère Mère, votre lettre et je prie Notre-Seigneur de bénir vos bonnes dispositions à l'obéissance, par lesquelles je crois que vous avez même peine à représenter celles que vous sentez sur l'office, où on veut vous mettre; mais en Même temps vous me marquez votre répugnance à ce qui s'appelle conduite, sur quoi je vous dirai que Dieu nous conduit à lui- en deux manières, qui s'unissent pour l'ordinaire, savoir par la grâce intérieure et par les secours que nous' tirons des choses extérieures qu'il emploie, comme en étant le Créateur et le Souverain Maître, pour accomplir ses desseins. Dans la vie regieuse il nous a marqué la dépendance que nous devons avoir aux créatures, pour l'amour de lui, nous faisant leur promettre obéissance ; mais comme notre corps ne voit et n'entend que par ses organes, Dieu qui est un pur esprit veut nous conduire à lui par la voie qui est convenable à notre propre être. Il nous parle par des créatures comme nous, afin de se faire entendre et nous assurer que nos mouvements intérieurs sont de lui. C'est par l'ouïe, dit Saint Paul, que nous recevons la foi, mais c'est Dieu qui applique au cœur les paroles qui frappent l'ouïe. La conduite religieuse vient donc de Dieu, et il se sert de ceux qui servent les autres, comme d'un instrument, pour se proportionner à notre infirmité. Dans le ciel, il nous parlera par son Verbe, sans nuages, dans les splendeurs de la gloire et de la génération éternelle. Dans la terre, il nous parle par toutes les créatures, comme par des énigmes, pour nous élever peu à peu des choses corruptibles aux incorruptibles, des choses sensibles aux spirituelles ; et celles qu'il emploie pour nous parler se doivent regarder entre ses mains, comme un instrument sans intelligence, sans harmonie et sans mouvement de lui-même, et que cependant fait entendre aux autres ce qu'il n'entend pas quelquefois, parce que le Maître qui s'en sert s'explique par lui-même à ceux qui l'écoutent. Or, il est constant que l'instrument ne peut dire : je ne veux pas servir à une telle chose, ou je veux servir à une autre ; mais il faut qu'il demeure sans résistance entre les mains de celui à qui il appartient, pour faire ce qu'il veut.
Etudiez-vous donc, ma chère Mère, non à réussir, mais à faire ce que Dieu veut de vous et à lui plaire en tout. Voilà la pratique que je vous donne cette année, et soyez bien persuadée de ma véritable affection et du zèle que j'ai pour tout ce qui vous regarde.
Priez, je vous supplie, pour moi, ma chère Mère, et vous assure que je le fais pour vous de tout mon cœur ...
A UNE NOVICE SUR LE DÉTACHEMENT. (Fol. 537).
J'ai reçu votre lettre, ma chère Sœur, et j'ai, je vous assure, tous les sentiments d'amitié que vous pouvez attendre de mon bon cœur. C'est, ma chère fille, ce que me fait avoir de la joie, en me séparant de vous pour un temps ; car, mon amitié pour vous est sincère et vraie. C'est-à-dire qu'elle désire vous procurer le vrai bien qui ne se trouve que dans le dégagement des créatures. Le démon a des ruses bien grandes pour nous tromper.
Pendant que vous m'avez vue et qu'il a cru vous arrêter dans le chemin de la perfection, par votre attache pour moi, il vous a laissée en paix sur votre vocation, car il ne se soucie pas qui occupe notre cœur, pourvu qu'il soit partagé et que Dieu ne l'ait pas tout entier. Vous croyez votre attache pour moi juste ; mais, mon enfant, elle n'est pas si innocente que vous le pensez, puisqu'elle vous trouble avec quelque sorte d'excès, aussi bien que vous me louez avec exagération. Je ne prends cela, ma chère fille, que comme l'effet d'âne commençante. Ne vous occupez donc pas de moi, je vous en supplie, si ce n'est devant Dieu, pour lui faire un sacrifice de vos sentiments. Attachez-vous à lui uniquement. C'est la meilleure part qui ne vous sera point ôtée. Dites-lui souvent, ma chère fille : Mon Dieu, vous êtes mon tout, tout le reste ne m'est rien.
Je vous embrasse de tout mon cœur. Soyez bien
assurée du zèle que j'ai pour votre salut.
Sœur DE SAINTE SCHOLASTIQUE.
A LA MÊME APRÈS SA VÊTURE. (Fol. 539).
Je vous crois à présent revêtue des livrées du Calvaire, ma très chère fille ; j'en rends grâces à Dieu de ce qu'il a commencé à vous faire part des trésors de sa Croix, par la souffrance que vous avez eue dans l'esprit, dans votre santé et dans la privation des personnes qu'on croyait qui vous auraient assisté dans dette grande action. Vous voyez, machère fille, le fondement qu'on peut faire sur les créatures. Concluez donc de là que Dieu seul est stable, que Dieu seul ne nous abandonne point, et que c'est en lui seul que nous devons mettre notre confiance et notre force, si nous voulons n'être pas confondus. Il vous a caché, à la vérité, quelque temps, les douceurs de l'état où il vous appelle ; ce n'a été, ma chère fille, que pour éprouver votre constance à le suivre pour l'amour de lui-même ; et non pour l'amour de ses dons. Que cette leçon qu'il vous donne par là est grande. Je ne puis vous l'expliquer entièrement; mais il me semble que c'est pour vous apprendre que toute votre vie doit se passer dans la pratique de la foi, de l'union de votre volonté à la volonté divine, et dans la privation des consolations même légitimes, qui cependant ralentissent l'âme dans la poursuite du dessein d'être à Dieu d'une manière parfaite.
Marchez, ma chère fille, dans les voies de la grâce, dans le jour des consolations. Soutenez par la foi la terreur que donne la nuit des tentations. Pensez que c'est toujours le même. Dieu qui vous appelle ; il ne change jamais. La récompense éternelle sera d'autant plus grande que le combat aura été rude.
Je prie Notre-Seigneur, mon Enfant, de vous fortifier de plus en plus dans vos bonnes résolutions, et soyez bien assurée de mon affection et amitié pour vous...
A UNE RELIGIEUSE SUR LA COMMUNION. (Fol. 542).
Je loue, ma chère Sœur, après les Saints, les personnes qui, par un grand amour pour Jésus-Christ, s'approchent très souvent de la communion. Je loue pareillement celles qui, par la crainte de n'être pas assez ferventes pour se nourrir souvent de cette viande divine, s'en éloignent quelquefois, pour même par cette privation être plus disposées à en approcher.
Je ne blâme donc pas, ma chère fille, les sentiments que vous m'avez expliqués sur celà ; au contraire, et je crois même qu'étant aussi peu avancée dans la vertu, qu'il est bon de vous priver une fois la semaine et même davantage de la sainte Communion, afin de vous humilier, de vous voir indigne d'en approcher si souvent que les autres. Il faut que pour vous rendre cette privation utile, que vous vous appliquiez avec plus de ferveur à vous en approcher. Une autre fois, vous rendrez compte à votre Mère du Séminaire quand vous ne communierez pas, et vous pouvez même lui faire voir ma lettre, car il est bon qu'on comprenne que les communions générales sont permises et non commandées à chacune en particulier.
Que si je vous oblige de ne pas vous en priver, sans le dire à la Mère du Séminaire, c'est afin de conserver la dépendance, et que si vous êtes longtemps sans le faire, elle vous procure les secours nécessaires pour guérir les peines qui vous en empêcheraient, n'étant pas à propos que des Religieuses soient si longtemps sans communier, à moins que ce ne fut par l'avis ou l'ordre du confesseur, qui est le ministre de Jésus-Christ, pour être le dispensateur et le juge des Sacrements.
Voilà, ma chère enfant, ce que j'ai été bien aise que
vous m'ayez donné occasion de vous dire dans le commencement de votre vie
religieuse, afin que vous vous en souveniez toujours. Je vous prie d'être bien
persuadée de mon affection.
Sœur de SAINTE SCHOLATIQUE.
A UNE RELIGIEUSE PENDANT SES DIX JOURS. (Fol. 544).
Je crois que vous êtes à présent en retraite ; je prie Notre Seigneur de vous remplir de ses lumières, pour bien faire en tout temps et en toutes choses sa sainte volonté ; car ce n'est, ma chère fille, ni l'occupation, ni la retraite qui sanctifient, mais seulement l'attachement de notre cœur à faire par amour ce que Dieu demande de nous dans notre état. Affermissez-vous bien dans ce principe qui est une vérité fondamentale de la religion chrétienne. Il regarde encore plus les personnes qui ont fait un vœu particulier d'obéissance.
Je vous supplie, ma chère fille, de lire les deux premiers chapitres de l'épître aux Romains. Je ne trouve rien qui parle si bien de la foi et qui donne plus d'espérance. Saint Paul dit aussi pour la charité tout ce qu'on peut désirer dans le chapitre 13ème de la 1ère épître aux Corinthiens. Appliquez-vous bien à tous ces endroits du Nouveau Testament pendant votre retraite, et à l'Evangile de Saint Jean, surtout le 6ème chapitre, le 15 ème, le 16ème, le 17ème et le 19ème. Voilà plus de matières qu'il ne vous en faut, pour le peu que vous avez de temps. Ce doit être même l'étude de toute votre vie.
Je prie Notre Seigneur de tout mon cœur pour vous, ma chère sœur ; faites-
le pour moi, et me croyez avec sincérité et affection....
Sœur de SAINTE
SCHOLASTIQUE.
A UNE RELIGIEUSE SUR L'ESPRIT DE PÉNITENCE. (Fol. 546).
Je n'ai pu répondre plus tôt à votre lettre, ma chère fille ; ne croyez pas que je manque de zèle pour vous rendre tous les services, qui me seront possibles. Je vous assure que c'est le temps qui m'a manqué et que j'ai été fort occupée de vous devant Dieu. Je voudrais que vous pensiez souvent aux grâces qu'il vous a faites, et la bonté qu'il a eue malgré vos infidélités de vous avoir retirée du monde, et de vous faire connaître à vous-même. Cela est le remède à la sécheresse et dissipation d'esprit dont vous vous plaignez. Vous craignez, dites-vous, que Dieu ne se soit lassé de vous ? Vous voyez cependant, ma chère fille, que votre cœur est bien plus dégagé qu'il n'était et que l'état que vous avez embrassé met votre salut en assurance. Il faut regarder la source de votre difficulté, qu'elle vient de la miséricorde et de la justice de Dieu, lequel ne traite pas ordinairement les pécheurs qu'il rappelle à lui, comme les âmes qui lui ont été conformes dans la souffrance. Si vous voulez avoir part à sa gloire, mettez-vous bien dans l'esprit ce principe ; qu'étant pécheresse, vous ne méritez que des peines.
Ayez beaucoup de reconnaissance, ma chère fille, vers la bonté de Dieu, de toutes celles qu'il vous envoira, soit pour la sécheresse intérieure ou par les humiliations extérieures. Dites-vous à vous-mêmes : cela m'est dû ; mes péchés méritent bien d'autres souffrances, puisqu'ils méritent des peines éternelles. Soumettez-vous donc de bon cœur à celles qui n'ont qu'un temps. Dieu voit votre cœur ; il vous jugera par ses dispositions. Faites donc toutes vos actions par un esprit de reconnaissance des miséricordes de Dieu qui vous a retirée péché. Ayez sans cesse cette faveur présente à votre esprit, et regardez chaque pratique de la Religion comme un moyen de marquer à Dieu que vous êtes véritablement reconnaissante de ses miséricordes, puisqu'étant pécheresse, vous ne pouvez attendre que des châtiments, car la mort est la solde du péché, dit saint Paul. C'est-à-dire, que comme les soldats qui servent dans les armes des princes reçoivent le paiement qui leur est dû, de même les hommes qui se laissent conduire au démon pour suivre les tentations qu'il leur inspire, en satisfaisant aux désirs de la chair, c'est-à-dire à tout ce que la nature corrompue nous fait sentir, qui produit les actes du péché qui mérite la mort comme un paiement; et cette mort est celle de l'âme, par la privation éternelle du souverain bien. Or, la vie éternelle, dit Jésus-Christ, c'est de connaître mon Père et celui qu'il a envoyé. Vous devez donc, ma chère fille, vous regarder comme ayant mérité cette mort par le péché, et comme étant véritablement morte.
Mais Jésus-Christ a voulu mourir pour vous délivrer de cette mort ; il est resuscité pour vous donner la vie. Il vous la redonne, en faisant cesser le péché en vous, par la séparation des occasions, et en vous appliquant le mérite de son sang par le sacrement de pénitence. La grâce vous ayant éclairée, pour vous faire connaître à vous-même et donner la force d'ouvrir entièrement votre cœur à ses ministres, vous devez tout espérer de ses bontés ; mais il faut, ma chère fille, que le péché soit puni. Dieu change par sa miséricorde les peines de la mort éternelle dans des mortifications temporelles qui finissent avec la vie. Vous ne devez pas prétendre d'être un moment sans souffrir. Est-ce ma chère fille, que ce changement n'est pas heureux pour vous ? La difficulté que vous avez à vous occuper de Dieu ne doit pas vous surprendre, après l'avoir perdu par vos péchés. Il n'est pas juste qu'il vous fasse goûter ses douceurs ; votre consolation doit être dans les larmes de la pénitence. C'est par elle que Dieu vous appliquera les mérites de notre Sauveur, auquel il faut mettre toute votre espérance. Persévérez à toujours lire et adorer les paroles de Jésus-Christ dans le nouveau testament. Marquez les endroits qui vous paraîtraient l obscurs, afin que si Dieu m'en donne le temps, je vous en dirais mes pensées. Je vous le répète encore, ma chère fille, appliquez-vous, le plus que vous pouvez, par un esprit de reconnaissance vers Dieu, à bien faire tout ce que vous désirez faire, et ne vous étonnez pas des peines que vous ressentez, puisque vous les avez bien méritées. Malgré ces peines, il faut que vous fassiez ce que Dieu vous ordonne pour se donner à vous dans le ciel.
Je vous assure, ma chère enfant, de ma sincère affection pour vous.
A UNE NOVICE QUI ALLAIT FAIRE PROFESSION. (Fol. 551).
Le parti que vous prenez, et la profession que vous allez faire de vous renoncer jusqu'à la mort, est une grâce, ma chère sœur, que Dieu ne fait d'ordinaire qu'à ses élus ; pourvu cependant qu'il vous apprenne à n'y pas chercher votre repos, ni une vie assurée, vous pouvez compter qu'une grande récompense vous est réservée dans le ciel, et que, vous recevrez dès ici-bas le centuple de ce que vous quittez pour l'amour de Dieu, car il parle toujours aux âmes qui ont joint la solitude du cœur à celle du corps. Tâchez, ma chère fille, de ne pas corrompre par aucun retour sur vous-même les vérités qu'on vous fera connaître. Soyez dans le monastère, à la fin de votre vie, comme le premier jour de votre entrée, vous regardant continuellement comme la dernière et la plus méprisable de la maison, dont on ne s'est chargé que par compassion. Ne vous relâchez en quoi que ce soit de vos devoirs. Ayez une obéissance à toute épreuve, aussi bien qu'une patience sans borne. Ne faites jamais aucune amitié particulière avec qui que ce soit ; cela n'est rien moins dans la Religion qu'un violement de la charité générale. Quelque faute que vous voyez commettre, ne vous exposez pas à juger de personne ; c'est à Dieu à qui il est permis de juger. Ce sont les avis que les Pères de l'Eglise ont toujours donné aux Vierges. Mais, ce qu'ils leur ont le plus recommandé, a été de se cacher exactement, même aux personnes qui leur étaient le plus cher.
L'histoire de l'Eglise nous apprend qu'une Vierge aima mieux se priver des lumières de saint Martin, que de s'exposer à voir ou à entendre la voix d'un homme ; et plusieurs autres ont fait la même chose, comme Ste Macrine, sœur de Ste Basile. Sainte Macrine, après avoir pris le voile de la virginité s'étudia si exactement à se faire oublier même des Saints dont Dieu s'était servi pour la toucher, et qui avaient plus de part à sa vocation. On peut dire d'elle, comme de la Sainte Vierge et de toutes ces saintes solitaires, que leur vie et leur mort ne sont connues que de Dieu.
Vous allez faire profession, ma chère sœur, de n'avoir besoin que de lui ; il sera aussi votre consolation, pourvu, dit l'Ecriture, que vous n'en cherchiez pas d'autre qui vous ferait perdre l'onction de la grâce qui vous instruit, et sans laquelle vous ne sauriez garder votre règle.
Je sais bien qu'il y a beaucoup à souffrir dans la Religion, que ceux qui se sauvent ont des lis au milieu des épines. C'est à cause qu'on se trouve dans de grandes épreuves qu'il faut, ma chère sœur, avoir recours aux grands remèdes, qui est de se préserver du monde dans les afflictions, aussi bien que dans la paix, car il y a toujours de l'homme dans les secours que l'on en reçoit, et on ne trouve Dieu qu'en ne cherchant que lui.
Vous ne trouverez de véritable soulagement et de paix que dans la recherche de la vérité ; si vous êtes fidèle à n'avoir aucun commerce au dedans, ni au dehors de la maison, votre cellule vous instruira sur tout ce que vous me demandez.
Je ne sais si ce que
je vous écris ne vous paraîtra pas porté trop loin ; cependant, ma chère fille,
c'est sur quoi, vous et moi seront jugées. Nous connaîtrons peut-être trop tard
les obligations des personnes consacrées à Dieu. Je crains, je vous l'avoue,
qu'il n'y ait bien des choses que nous croyons contribuer à notre salut, qui ne
sont que des amusements d'amour-propre. Il faut pour se sauver être du petit
nombre dans la Religion, aussi bien que dans le monde ; parce qu'il n'y a aucun
lieu ni aucun rang, où on ne doive s'attendre à l'accomplissement de cette
parole de Notre-Seigneur : l'un sera pris et l'autre sera laissé. Veillons donc,
ma chère fille, c'est la conclusion de Jésus-Christ même. Faites-moi la charité
de demander à Dieu qu'en faisant mon possible pour vous avertir des dangers de
votre état, je ne tombe pas dans ceux du mien.
Je suis avec bien de
l'affection……….
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Nous avons dit ce que nous connaissions du Calvaire de Redon ; ajoutons quelques lignes sur l'état actuel du vieux monastère : chassées de leur asile le 5 octobre 1792, les Calvairiennes, fidèles à Dieu et à leurs saintes obligations, se réunirent dans une maison particulière, afin de continuer la vie commune. Elles n'y restèrent pas longtemps en repos, car le 9 mars de l'année suivante on vint de nouveau les disperser, avec défense, sous peine de mort, de se réunir désormais. Carrier, représentant du peuple, donna la communauté et ses vastes dépendances à un citoyen de ses amis, qui s'y établit avec sa famille. Exécré du peuple, il fut obligé de se faire protéger par Carrier lui-même, et le 19 nivôse, l'an 2 de la République, ce citoyen se présente à l'assemblée du Conseil général de la Commune de Redon portant un décret, signé Carrier, déclarant traître à la Patrie et devant être puni comme tel quiconque manquerait au citoyen L..., très fidèle serviteur de la République et propriétaire du ci-devant Calvaire.
L'église et le monastère du Calvaire souffrirent de grands dégâts pendant la Révolution, car ils servirent souvent de caserne aux troupes, républicaines. Cependant le rétablissement du culte ayant été autorisé à Redon en 1798, l'ancienne église des religieuses Calvairiennes servit de paroisse jusqu'en 1800.
Lorsque la paix fut rendue à l'Eglise de France, les Calvairiennes voulurent reprendre la vie commune ; hélas ! La mort aussi avait fait son œuvre, et il ne restait plus de ce couvent que deux religieuses de chœur, la Mère Saint-Alexandre, la Mère Saint-Benoît, ainsi que trois converses. Le propriétaire de leur couvent leur permit d'en habiter une partie, et elles y ouvrirent une école. Elles y demeurèrent peu de temps, faute de pouvoir le racheter, et prirent une petite maison à l'intérieur de la ville, où continuant leur vie de prière et de sacrifice, elles se donnaient avec plus de soin à l'instruction des enfants.
La Mère Saint-Benoît ferma les yeux à ses quatre sœurs ; elle eut bientôt le bonheur de voir s'ouvrir le Calvaire de Landerneau, et elle y rendit en paix son âme à Dieu. Quoique les Calvairiennes eussent quitté pour la seconde fois leur monastère ; avec douleur et regret, elles eurent cependant au fond de leur âme une véritable joie en voyant leur église rendue au culte et leur cloître de nouveau habité par des âmes religieuses. Les nouvelles venues appartenaient à la Congrégation de la Retraite, établie en Bretagne dans la seconde moitié du XVIIème siècle, par M. de Kerlivio et Mlle Francheville.
L'ancien Calvaire de Redon a peu changé : l'église à baies flamboyantes est toujours debout ; la statue de sainte Scholastique, saur de saint Benoît, surmonte encore le portail principal ; le chœur des religieuses garde aussi quelques vieux tableaux, devant lesquels les Calvairiennes ont prié. A l'ombre de l'Eglise reposent aujourd'hui plusieurs des nouvelles habitantes de ce cloître, et parmi ces tombeaux, nous avons remarqué une pierre bleuâtre portant cette inscription :
CY GIT LA RÉVÉRENDE MÈRE
VÉRANE DE SAINT-JOSEPH,
DITTE COUPLIER, FONDATRICE DE CE MONASTÈRE,
DÉCÉDÉE
LE 2 NOVEMBRE 1677, AGÉE DE 72 ANS
ET 38 DE PROFESSION.
ET LA RÉVÉRENDE MÈRE
ANGÉLIQUE-LOUISE,
DITTE ROMAIN MANCEL, PRIEURE EN CHARGE,
DÉCÉDÉE LE 23 DÉCEMBRE
1769, AGÉE DE 63 ANS
DE NAISSANCE ET 42 DE PROFESSION.
REQUIESCANT IN PACE.
Le cloître, d'une belle architecture romane, voit glisser sur ses dalles l'ombre de la religieuse de la Retraite, ange gardien de cette maison de Dieu ; on y rencontre ça et là quelques niches renfermant des statues, et des sentences pieuses rappelant les devoirs de la vie monastique et religieuse. Le parc qui descend jusqu'aux bords de la Vilaine garde toujours les traces aristocratiques de la splendeur passée de ce monastère bénédictin.
Que Dieu le protège de nouveau, car aujourd'hui comme au siècle dernier le temps est mauvais, et la République qui gouverne est toujours fille de la Révolution et ennemie de Dieu.
PIÈCES JUSTIFICATIVES [Note : Histoire de l'établissement de la Congrégation du Calvaire, etc. Bibl. Nat. f. fr. 10,571, p. 352-364. Ce manuscrit contient 393 p., plus 9 de table des matières].
UNION DU PRIEURÉ PERPÉTUEL DE LA TRINITÉ DE LA VILLE DE REDON A CETTE CONGRÉGATION QUI EST LE DIX-HUITIÈME MONASTÈRE DE CETTE CONGRÉGATION.
« Les religieuses de la Trinité de Redon avoient connu, par quelqu'unes d'entr'elles qui avoient esté à Baugé, la congrégation du Calvaire. Le bien qu'elles en entendoient dire leur faisoit désirer d'y être unies, mais elles n'y voient aucun jour, jusqu'en 1635, qu'ayant apris que l'abbaye de la Trinité dont, elles sortoient avoit obtenu un bref pour s'unir à la congrégation, elles espérèrent aussy la même grâce et travaillèrent à l'obtenir. Cependant quatre ou cinq ans s'étant écoullés sans y voir aucun avancement par tous les obstacles qu'on y apportoit tant du côté de M. lêvesque de Vannes que de quelques religieuses de la Communauté, Dieu inspira à la Révérende Mère de Rieux, directrice, de passer par cette ville, en faisant sa visitte pour voir cette communauté et pour connoistre par elle-même si elles désiroient l'union. Elle fut si satisfaite du désir qu'elles luy en témoignèrent, qu'elle leur donna toutes sortes de bonnes espérances. M. de Vannes fut encore deux ans sans donner son consentement, et il n'y consentit enfin qu'en considération de la Révérende Mère Agnès de Sainte-Croix de Ploëuc, sa parente, qui y fut envoyé (sic) prieure. Elle y fut reçeue le 9 octobre 1641, assistée de la Mère Anne de Sainte-Marie, de la Mère Madelaine de Jésus, dite Alancon, et de la Sœur Perrine de la Vierge, dite Malin, Converse. Peu de jours après la Révérende Mère de Saint-Joseph de Bossac et la Mère Marie-Madelaine des pieds de Jésus, dite Le Maître, y vinrent. Le R. P. prieur de l'Abbaye les conduisit à la porte où les religieuses les reçurent avec grande joye. Elles prirent le voile blanc et le rang de novices et demeurèrent dans cet état autant qu'on le jugea à propos. Elles firent leurs vœux selon la forme de la congrégation le jour de la Conception de la Sainte Vierge, la même année, au nombre de neuf religieuses du chœur et de deux converses.
La permission de Mgr l'Evesque de Vannes est conçue en ces termes :
SÉBASTIEN DE ROSMADEC, par la grave de Dieu et du Saint-Siége apostolique, Evesque de Vannes, Conseiller du Roy en ses Conseils, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut. Veu la requeste de l'autre part à nous présentée par les religieuses bénédictines du monastère de la Trinité de Redon en notre Diocèze, tendante à ce qu'il nous plaise, pour les raisons y contenues, consentir et permettre que leur dit monastère soit uny et incorporé à la congrégation des religieuses de Notre-Dame du Calvaire.
Nous, désirant de tout notre pouvoir favoriser les pieuses intentions de nos susdites bonnes filles en Notre-Seigneur les religieuses bénédictines de Redon, avons consenty et permis, consentons et permettons que les dites religieuses de Redon, avec leur dit convent et maison soient et demeurent à perpétuité unie et incorporée à ladite congrégation du Calvaire, sujettes et soumises aux supérieurs d'icelle pour être régies et gouvernées par eux en l'observance des règles et constitutions de la dite Congrégation suivant l'Institut d'icelle, comme il est requis par les susdites requestes. En témoignage de quoy nous avons signé les présentes de notre seing fait contresigner par notre Secretaire et sceller du sceau de l'Archevêché de Paris, que nous avons emprunté pour ce fait, au déffaut du nôtre. A Paris, ce douzième de juillet mil six sent quarante-un. Signé en l'original: Sébastien de Romadec, et plus bas, par le commandement de mon dit Seigneur, Signé Gastcher pour secretaire.
M. LE CARDINAL DE RICHELIEU, en qualité d'Abbé de St-Sauveur de Redon, donna aussy sa permission en la forme suivante :
ARMAND, cardinal duc de Richelieu et de Fronsac, abbé de l'Abbaye de St- Sauveur de Redon, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, Salut. Sçavoir faisons que, veu la requestre à nou présentée par nos bien aimées en notre Seigneur les prieures et religieuses bénédictines du monastère de la Trinité situé en notre ville de Redon, diocèze de Vannes en Bretagne, contenant que, leur dict monastère étant un membre dépendant de l'abbaye de la Trinité de Poitiers, dans laquelle ont été introduites les religieuses de la congrégation du Calvaire ; elles auroient de longtemps fort désiré de s'unir et incorporer à ladite Congrégation pour être régies et gourvernées par les supérieurs d'icelle selon leur règle et constitutions, ce qu'elles auraient depuis peu obtenu de la supérieure et directrice generalle d'icelle Congrégation, nous requérant pour ce lesdites Supliantes qu'il nous plaise agréer et consentir leur dite union. Nous, désirant contribuer ce que nous pouvons à un si pieux dessein, avons agréé et consenti, agréons et consentons que lesdites religieuses bénédictines de la Trinité de Redon, avec leur convent et monastère soient et demeurent à perpétuité unies et incorporées à ladite congrégation du Calvaire, sujettes et soumises aux supérieurs d'icelle, pour être régies et gouvernées par eux en la pratique et observance des règles et constitutions de ladite congrégation conformément à son institut. Donné à Perronne sous nôtre seing manuel et celuy de notre secrétaire avec l'apposition de notre sceau, le troisième jour de Septembre mil six cent quarante-un. Signé Armand, cardinal de Richelieu, et frère Jean, abbé de Prières et de St-Sauveur de Redon.
Les religieuses passèrent un acte le 24 d'Août 1641, comme il s'ensuit :
« Par devant les notaires royaux héréditaires de la cour de Rennes, soussignez : du nombre de quatre établis en la ville de Redon, furent présentes en leurs personnes révérendes mères Sœur Agnès de Ploeuc, dite de Ste-Croix, religieuse de la congrégation de Notre-Dame du Calvaire, de l'ordre et règle primitive de St-Benoît, et assistante de la révérende mère directrice et supérieure généralle de toutes les religieuses et convents de ladite congrégation en France, et ayant charge et pouvoir d'icelle par procuration passée par devant Jean Dupuis et Nicolas le Boucher, notaires au Châtelet de Paris, le vingt-quatrième jour d'Aoust mil six cent quarante-un, dont est apparu aux dits notaires soussignez, laquelle est demeurée atachée à la minute des présentes pour être transcrite à la fin des expéditions d'icelle, pour et au nom de ladite congrégation du Calvaire, d'une part et les révérendes mères prieures et religieuses bénédictines du couvent de la ville de Redon ès personnes de Sœurs Georges Farcy, ditte Sainte Cécille, supérieure, Catherine de la Poinsheraye, dite de Sainte-Croix, Jeanne Mahe, dite de Saint-Benoist, Anne Dohin, dite de la Conception, Renée Georges, dite de Sainte-Gertrude, Joachine des Salles dite de la Trinité, Gabrielle du Mats, dite du Saint-Esprit, Louise Lorenceau, dite de Saint-Thomas, Renée de Romaigné, dite de la Nativité, Raouline Sourget, dite de Saint-Michel, faisant et représentant la communauté dudit couvent, et pour et au nom d'icelle canoniquement et capitulairement assemblées au son de la cloche en la manière accoutumée, pour délibérer et disposer de leurs affaires, à la grille du parloir dudit monastère, d'autre part : disant qu'en conséquence d'un arrest rendu au Conseil privé du Roy le vingt-uniesme d'Aoust mil six cent trente-cinq, touchant l'union de l'abbaye de la Trinité de Poitiers à la dite Congrégation du Calvaire, par lequel il a été ordonné que les prieuré et membres dépendants de ladite abbaye de la Trinité de Poitiers dépenderoient à l'avenir des supérieurs de ladite Congrégation du Calvaire, comme auparavant laditte union ils dépendoient de ladite abbaye de la Trinité. Il y a eu acte passé pardevant le Moine et Vergers, notaires royaux en ladite ville de Redon, le quinzième de novembre mil six cent trente-cinq, par lequel lesdites dame prieure et religieuses dudit monastère de Redon se sont soumises à l'examen dudit Arrest, ce qui a esté agréé et consenty par Révérend Père frère Noël de la Reigneraye, ancien prieur de l'abbaye de Saint-Sauveur de Redon et de Pléchatel, comme fondateur et directeur dudit monastère de Redon, par acte passé par-devant les notaires et ce jour, ainsy que tout don, il a apparu plus amplement par lesdits actes, ensuite desquels les susdites dames prieure et religieuses de Redon auroient désiré et demandé l'introduction et établissement des mères de la dicte congrégation du Calvaire audit monastère de Redon, en l'association d'iceluy à la dicte congrégation, à l'effet de quoy elles ont passé procuration à Révérend Père dom Desrousseaux, prieur claustral de ladite abbaye de Saint-Sauveur de Redon, par devant Claret et Verger, notaires royaux audit Redon, le vingt-deuxième d'Avril, mil six cent trente-six, et présenté requeste à la Révérende Mère supérieure et directrice généralle de ladite Congrégation du Calvaire, le dixième de Mars, mil six cent trente-huit et, depuis, par succession de temps, lesdites dames prieure et religieuses de Redon, ayant acquis une plus particulière et plus parfaite connoissance et expérience de la profession régulière exercée en ladite Congrégation du Calvaire, elles ont souhaitté et recherché avec ferveur et instance d'être aggrégées et unies à ladite Congrégation pour vivre à l'avenir selon les Constitutions et pratiques d'icelle, et n'estre pas seullement, comme elles sont, de la dépendance de la dite Congrégation, mais de plus en être du corps et communauté, et ledit monastère de Redon être l'un de ceux de ladite Congrégation, ce que, ayant été accepté par ladite Révérende Mère supérieure et directrice généralle pour et au nom de ladite Congrégation, lesdites dames prieure et religieuses de Redon ont obtenu de Monseigneur l'illustrissime et révérendissime évesque de Vannes, dans le diocèze duquel est ledit monastère de Redon, en leur monastère et appartenances et dépendances d'iceluy, soient et demeurent à perpétuité sujettes et soumises aux supérieurs de ladite Congrégation du Calvaire, pour être régies et gouvernées par eux en l'observance des règles et constitutions d'icelle, lequel décret, en datte du douzième Juillet mil six cent quarante-un, signé Dupuy et Le Boucher, par coppie et collation, a été représenté par lesdites dames prieure et religieuses de Redon à ladite dame de Plœuc, audit nom, en passant les présentes, et est demeuré attaché à la minute d'icelle pour y avoir recours quand besoin sera ; et ont pareillement lesdittes dames prieure et religieuses de Redon obtenu dudit, sieur de la Reigneraye, leur fondateur et directeur, les consentements de ladite union par acte passé par devant Viart et Claret, notaires royaux audit Redon, le vingt-neuvième Juillet mil six cent quarante-un, lequel a été aussi représenté à laditte dame de Plœuc audit nom, et est demeuré attaché à, la minute des présentes pour y avoir recours quand besoin sera : et au moyen de tout ce que dessus ladite dame de Plœuc, au nom de ladite Congrégation du Calvaire, et lesdites dames prieure et religieuses dudit monastère de Redon, en leurs noms, ont librement et volontairement arrêté et accordé entr'elles les traités et conventions qui ensuivent : c'est à sçavoir que lesdites dames prieure et religieuses de Redon et leur dit monastère avec toutes ses appartenances et dépendances, ainsi que le tout se poursuit et comporte et en quoy, qu'il consiste, sans en rien excepter, retenir et rembourser, tout et demeurent dès maintenant et à toujours, perpétuellement, purement et simplement, sans autre charge ny condition que de satisfaire aux devoirs de la fondation dudit monastère, agrégés, unis et incorporez à ladite Congrégation du Calvaire, tant au spirituel qu'au temporel, pour être les constitutions et pratiques de ladite Congrégation observées audit monastère de Redon par les religieuses qui y sont à présent et seront à l'avenir, ainsy que par les religieuses des autres monastères de ladite Congrégation du Calvaire et sous la même supériorité et jurisdiction que tous monastères de ladite Congrégation, et le temporel dudit monastère de Redon être régi et administré comme celui des autres monastères de ladite Congrégation du Calvaire, et générallement ledit monastère de Redon, les personnes et biens d'iceluy et tout ce qui y apartient et en dépend, estre de ladite Congrégation du Calvaire, tout ainsy que si originairement et dès son commencement ledit monastère avoit été fondé pour être de ladite Congrégation, et que lesdites dames en leurs noms ont respectivement promis et se sont obligez, promettent et s'obligent par cette présente d'entretenir et d'accomplir sans y déroger ni contrevenir en aucune manière que ce soit, et ont renoncé et renoncent à toutes choses contraires à l'effet des présentes ; et pour requérir et consentir l'homologation du présent concordat partout où besoin soit et en obtenir les actes, lesdites dames ez quels noms ont d'une part et d'autre constitué leurs procureurs irrévocables, les porteurs des présentes, auxquels elles ont donné pouvoir et mandement exprès de faire tout ce qui pouroit être en cas requis.
Fait et passé à la grille du parloir dudit monastère de Redon, le trentième jour d'Octobre mil six cent quarante-un, avant midy, et ont signé, le tout en la présence dudit sieur de la Reignerayes, faisant tant pour luy que pour Monseigneur le président de Marbeuf, fondateur, avec ledit sieur de la Reigneraye dudit Monastère. Ainsy signé : Frère Noël de la Reigneraye ; sœur Agnès de Ste Croix, dite de Plœuc, assistante de la Congrégation ; sœur Georges Farcy, dite de Ste Cécille, sœur Vérane Couplier, dite de St Joseph ; sœur Catherine de la Pommeraye, dite de la Croix ; sœur Jeanne Mahé, dite de St Benoît ; sœur Anne Dohin, dite de la Conception ; sœur Renée Georges, dite de Ste Gertrude ; sœur Joachine des Salles, dite de la Trinité ; sœur Gabrielle du Mats, dite du St Esprit ; sœur Louise de Laurenceau, dite de St Thomas ; sœur Renée de Rommaigné, dite de la Nativité ; sœur Raouline Sourget, dite de St Michel ; Claret et Jean Pécot, notaires royaux.
Par devant Jean Dupuis et Nicolas le Boucher, notaire et garde-lettre du Roy notre Sire, en son Châtelet de Paris, soussignant fut présent et comparu personnellement très Révérende et dévote religieuse Marie-Michel, ditte du St-Esprit, mère directrice et supérieure de tous les convents des religieuses de l'ordre et règle primitive de St-Benoist, de la Congrégation de Notre-Dame du Calvaire en France, résidente à présent au convent d'iceluy ordre, situé au Marais du Temple de cette ville de Paris, laquelle, après qu'elle a vu, lu, et que de rechef lecture, lui a été présentement faite par l'un desdits notaires soussignant, l'autre présent, du contenu au contract devant écrit, et qu'elle a dit le bien sçavoir et entendre, a reconnu et confessé avoir ledict contract et tout le contenu en iceluy, comme directrice supérieure généralle de laditte Congrégation, l'a ratiffié, confirmé et approuvé, la teneur a pour bien agréable, veut et consent qu'il vaille, vienne et sorte en son plein et entier effet, de point en point, selon sa forme et teneur, promettant…… Fait et passé en la grille et parloir dudit Convent sus déclaré, le onzième jour de décembre, après midy, l'an mil six cent quarante-un, et a signé, et est sujet aux suitte dans quinzaine, à peine de nullité et de l'amende de dix livres, suivant lesdites déclarations et arrest. Signé : Sœur Marie du Saint-Esprit, dite Michel ; Picault et Boucher et scellé le 14 Décembre 1641 ».
(Emmanuel de Lanmodez).
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