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LA CATHÉDRALE DE RENNES |
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L'ÉGLISE MENACE RUINE - SA DÉMOLITION
Si le portail et les tours de l’église se construisaient, les autres parties de l’édifice qui présentaient déjà peu de solidité au commencement du XVIème siècle, se lézardaient et menaçaient de tomber en ruines.
Dans le
procès-verbal du 3 avril 1674 de Maître de Bretin, les experts « constatent
en outre que les murailles des deux cotés de lad. église depuis la tour neuffe jusques à la croisée qui porte
l’entre-clocher, et en toute leur hauteur sont coulleuvrées, ruinées et
de nulle valeur et prestes à tomber, le charpentier constate que la cherpante est vieille et caduque de même que la
couverture »
Pierre
Corbineau, architecte, évalue à 90,000 livres la dépense pour « démolir
les murailles de la nef, les voultes des ailes des deux cotés d’icelle et les rétablir, épaissir lesd.
murailles, reffaire les voultes, arcs boutants et piliers, iceux fortifier et réparer le pavé du bas de l’église ».
Ed. Vinay charpentier
dit qu’il appartient au moins la somme de 24.000 livres pour « faire une
charpente neuffe », et Trotoux couvreur demande au moins 15.000 livres pour
« fournir
d'ardoizes, clous, lattes, journées et tous autres matériaux pour refaire de neuff la
couverture »
La dépense paraissant trop élevée, aucun travail ne fut entrepris.
Le 29 octobre 1687, le chapitre apprenant que M. Marc Dondel, escuyer, sieur dudit lieu, conseiller du roy, trésorier de France et général de ses finances en Bretagne était descendu à l'hostellerie où est pour enseigne Les Quatre Ventz, rue de la Reverdiays, lui délègue les chanoines Bouessay et Prioul pour lui remettre une supplique lui disant que « leur église est si caduque et si ruineuse qu’elle menasse une chutte évidante ».
Marc Dondel communique cette supplique le même jour au procureur du Roy, Guy Aulnette qui déclare consentir pour le Roy, aux fins de la requête.
Marc Dondel fait alors dresser par Godefroy Bretin, notaire royal, assisté de Sylvestre Thomas, maçon, Claude Gallin, charpentier et Yves Mandon, couvreur d'ardoizes. un procès-verbal à l’effet de : « Constater le mauvais état de l’église dont la ruine et l’indigence augmente de plus en plus ».
Dans ce
procès-verbal on constate : « Que la
muraille costale de la grande neff du coté du Midy est beaucoup penchante en dehors et qu’elle surplombe de
18 pouces sur 70 pieds qu’elle a de hauteur... que les maçonneries de la grande neff de l’autre coté qui est vers le
Nord surplombe et que lad. pente est de deux pieds sur la hauteur de la muraille qui est de 70 pieds... que les petites
neffs penchent aussy en dehors, que la dernière des petites voutes est tombée et les deux autres voutes au dessus prestes
à tomber... que la charpente au-dessus de la neff menasse ruine et serait
tombée sans la quantité de liens de fer avec lesquelles elle est attachée... que la costale de la croixée du
costé du Nort sur laquelle est l’horloge penche en dehors vers la rue Saint-Sauveur de deux pieds sur la hauteur qui
est de 82 pieds... que tout le maçonnail du haut du tour du choeur et dans les autres pends de murailles est si viel et si
caduc et composé de si méchante pierre si mal maçonnée qu’il tombe de soy-même... que les pilliers qui sont autour
d’iceluy sont trop faibles pour porter les grands pands de murailles qui sont
au-dessus, desquels pilliers il y en a cinq
de crevés et qui ne subsistent que parce qu’ils sont attachés avec des bandes de fer... que la charpente sur lesd. recherches et chapelles autour dudit choeur, est absolument
ruisnée, vieille et caduque, et ne subsiste que par le moyen de quarante estayes qui la supportent, et qu’il est encore requis
d’y en mettre pour le moins dix, incessamment à faulte de quoy lad. charpente est en grand péril de tomber... qu’au
clocher toutes les pièces de boys qui le composent, comme poultreaux, sont hors
de leur plant et ne sont soutenues que par des liens de fer et huit estayes, en
sorte qu’il est fort à craindre que le branslement des cloches qui se faict tous les
jours ne fasse tomber led. clocher... que le boys de la charpente du clocher de l’horloge est tout pourri et de nulle
valeur... que les vitraux sont rompus pour la plus grande partie et qu’il y avait autrefois des fenestres qui ont été
bouchées
de maçonnail au lieu de vitres, ce qui rend lad. église
fort sombre et obscure... que toutes les couvertures d'ardoizes
de lad. église sont beaucoup veilles et caduques, les chevrons, les lattes
et ardoizes pourries... »
Aussitôt que le Chapitre eut connaissance de ce procès-verbal il présenta au roi une requête pour lui demander qu’il lui fût permis d’appliquer aux réparations de l’église les sommes qui lui avaient été accordées pour la construction des tours, et il envoyait un devis dressé le 1er septembre 1687 estimant le montant des réparations à la somme de 170.953 livres.
Le roi Louis XIV ordonna que le chapitre se pourvoirait devant les Commissaires des Etats de la Province. La requête fut présentée mais les commissaires n’y prirent aucune attention disant que la province était obérée. Le Conseil du roi n’accorda qu’un secours annuel de 6.000 livres, c’était insuffisant.
En 1700
l’état de l’église s’est aggravé, une nouvelle requête est présentée
à M. de Rointel, intendant de Bretagne à laquelle on joignait un procès-verbal
de trois architectes disant : « Il est
unanimement reconnu que le total d’icelle église menace d’une ruine prochaine, qu’elle est de nulle valeur
et qu’elle ne peut subsister longtemps, qu’il n’est pas possible d’y faire aucunes réparations qui puissent la faire
subsister et par
conséquent qu’il est à propos et même nécessaire pour en prévenir la chute de l’abattre et de la rebastir
à neuf », et dans cette requête le chapitre ajoutait : « Le
coeur nef est soutenu par le moyen de piliers boutant qu’on a eu soin d’y
faire depuis le procès-verbal du sieur Lavardin, mais le corps de l’église dépérissant de jour en
jour il est nécessaire de le démolir incessamment »
Un arrêt
du Conseil d'Etat de 1702 ordonne la démolition et les Etats de Bretagne
votent 20.000 livres, mais cette somme était insuffisante pour entreprendre les
travaux et l’arrêt n’est pas mis à exécution, « car il s’est trouvé de
la difficulté de la
Communauté de Ville qui est accablée de dettes, il s’en est encore
rencontré davantage de la part des bénéficiaires du diocèse
dont presque tous les recteurs sont à la portion
congrue et les fabriques sans aucunes rentes..., la fabrique de la
Cathédrale est si pauvre que jusqu’ycy le Chapitre a été
obligé de payer le luminaire »
Survint en 1720 le terrible incendie qui détruisit et ravagea la ville et à la suite duquel les Etats de Bretagne votèrent en 1724 un fonds de 300.000 livres pour être employé aux ouvrages et édifices publics de la ville de Rennes.
Bien que la Cathédrale n’ait pas été atteinte par l’incendie, un arrêt du Conseil du Roi du 3 août 1725, décide que sur ce fonds de 300.000 livres, il serait prélevé une somme de 20.000 livres pour le rétablissement de l'Eglise Cathédrale.
A ce
moment Gabriel, contrôleur des bâtiments du Roi, vint à Rennes, procéder à
la reconstruction de la Ville et à l’édification du Présidial, de la Tour
de l'Horloge et de l'Hôtel de Ville. Consulté
sur la solidité de la Cathédrale, il écrivait le 15 décembre 1725 : « Ayant
examiné les plans et desseins remis et procès-verbaux de l'Eglise Cathédrale de la Ville de Rennes, et reconnu le
danger éminent
de cette église très difficile à réparer, sommes d’avis avant que de se déterminer aux réparations que l’on
jugerait à propos d’y faire de dresser un plan d’une nouvelle église qui s’accorde avec les deux tours et le portail qui sont
faits pour connaître lequel sera plus avantageux à la Province, à la Ville de Rennes et au Chapitre de construire une église
sur un nouveau
plan ou de reédifier plusieurs parties qui menacent ruine. Et comme des projets de cette importance
ne peuvent se faire que dans un temps proportionné, il nous paraît que l’on pourrait dès à présent pour accélérer l’ouvrage faire des adjudications de matériaux de toute espèce... »
Et le 9 avril 1726 il fut procédé à « l’adjudication de la fourniture des matériaux nécessaires pour l'établissement de l'Eglise cathedralle de cette Ville de Rennes conformément au devis dressé par le sieur Mousseux ».
Ce devis prévoyait 4.000 pieds cube de pierre de grain, 2.000 pieds cube de pierre de Taillebourg et 80 milliers d’ardoises.
Si les matériaux s’accumulaient en vue de la reconstruction de la cathédrale, les fonds alloués par les Etats de Bretagne étaient affectés au paiement de ces matériaux, et il ne restait aucune somme disponible pour la démolition, cependant l’état de la vieille église s’aggravait.
Mgr. l’évêque appela à nouveau Gabriel et celui-ci dans son rapport du 30 octobre 1731 écrivait : « Que cet édifice était absolument irréparable à cause de sa corruption générale dans toutes ses parties et des mauvais matériaux dont il était construit qu’il n’y avait pas de sûreté d’y rester et d’y faire le service divin » et il conclut qu’il soit entièrement démoli.
Le chapitre après avoir reçu ce rapport fit une nouvelle demande et obtint, en 1732, 30.000 livres, et en 1740 également 30.000 livres, mais toutes ces sommes étaient insuffisantes pour maintenir debout un édifice qui s’écroulait de toutes parts à tel point que les fidèles n’osaient plus s’assembler dans l’église.
Et
cependant malgré ce triste et dangereux état, Chocat de Grandmaison, ingénieur
de la ville, écrivait dans son rapport du 29 septembre 1751 : « Les avis
des ingénieurs et des architectes qui ont visité tour à tour l'Eglise
Cathédrale de Rennes depuis plus de cent ans ont annoncé dans tous les
temps la ruine prochaine de ce monument, ils ont même déclaré verbalement et
par écrit qu’ils ne seraient point surpris si cet édifice écroulait le
lendemain de leur visite..., ils ont inspiré de la frayeur à Messieurs du
chapitre et le préjugé au sujet de la ruine prochaine de cette Eglise s’est
emparé de l’esprit de tous les citoyens de Rennes, de façon que des objets
de dégradation qui subsistent sans aucun changement depuis plus d’un siècle donnent
lieu à des terreurs paniques... J’ai
été chargé à l’occasion de ces terreurs de visiter plusieurs fois les parties de cette église et j’ai toujours remarqué
qu’il
n’y avait rien à craindre... Réfléchissant
sur la capacité de ceux qui m’ont précédé dans ces visites et étonné que de très habiles gens avaient raisonné
si affirmativement sur la chute prochaine de cette église, j’ai reconnu que ces Messieurs n’avaient jugé que sur les apparences qui étaient
à leur portée... »
Et après
une visite détaillée, il conclut : « Il résulte
de toutes mes remarques qui sont vrayes, qu’il n’y a rien
à apréhender dans l’église lorsque la couverture sera remise
en bon état, que l’on rétablira la charpente des bas-cotés
du coeur, que les crevasses et lézardes dans les remplissages
de voutes auront été bien reprises, l’on peut même rétablir
les lézardes dans les murs latéraux de la croix ainsi que le
pignon vers l’évêché, et je ne crains pas même de dire et de
soutenir qu’il est très possible de rétablir l’église en entier
et de la finir sur son plan actuel... et il estime la dépense à
4.400 livres »
Les événements qui suivirent devaient lui infliger le plus cruel démenti.
Le 11 février 1754, moins de trois ans après ce rapport, au moment où l’on s’assemblait pour chanter Vêpres, il se détacha une grosse pierre et une quantité de terre de la voute des recherches, et le sieur Duchemin, ingénieur des Ponts et Chaussées, après une visite minutieuse de l’église, déclara « qu’il ne serait pas étonné que dans le moment, elle s’écroulât sur sa tête ».
C’était la condamnation définitive de l’antique cathédrale, elle avait vécu plus de cinq siècles. L’évêque Louis-René Desnos par une ordonnance du 25 février 1754 ordonna que le mercredi 27 du même mois, à neuf heures du matin serait opérée la translation du Saint Sacrement, du service divin et de l’office canonial dans la chapelle de l'Hôtel-Dieu (hôpital Saint-Yves) et il interdit l’église cathédrale avec défense d’y faire aucune fonction ecclésiastique.
L’évêque et le chapitre durent donc abandonner l'ancien temple et se réfugier dans la petite chapelle Saint-Yves. Un arrêt du Conseil du 2 juin 1754 ordonna « la prompte démolition de l’édifice à la réserve du portail et des tours » et le 26 octobre suivant les travaux de démolition furent adjugés, d’après le devis de Chocat de Grandmaison du 10 août 1754, au sieur Le Goux dit la Perrière moyennant la somme de quinze mille livres, les pierres de grain devant être transportées place des Lices, le moellon dans les contre-allées du Mail, les gravois devant servir à combler les fossés du Mail.
Les tours conservées servirent de dépôt aux objets enlevés de l’ancienne église, et un nouvel arrêt de 1755 attribua à M. l'Intendant la connaissance de tout ce qui concernait cet objet.
Une ordonnance en date du 13 octobre 1754 de M. Le Bret, intendant de Bretagne, nomma le sieur Chocat de Grand-Maison (Grandmaison), ingénieur en chef de la province de Bretagne, pour dresser procès-verbal des intersignes qui peuvent se trouver dans l’église cathédrale de Rennes avec un plan figuratif de l’intérieur de ladite église.
Le procès-verbal fut dressé le 1er février 1755 et jours suivants.
L’église en forme de croix latine se composait : des tours, de la nef avec collatéraux, du transept, du choeur en hémicycle, entouré d’un collatéral que l’on désignait alors sous le nom de « recherches du choeur ».
Au pourtour du choeur rayonnaient des chapelles absidiales, celle du centre était consacrée au Saint Sacrement ou de la Communion, celle à la suite vers sud, côté de l’épître, était dédiée à saint Armel et s’appelait aussi chapelle de l'Annonciation, puis dans une construction en annexe venaient les deux sacristies, ensuite dans le collatéral du choeur la chapelle de sainte Marguerite et celle de saint Nicolas à laquelle on accédait par le transept.
Vers nord, côté de l'Evangile et joignant la chapelle du Saint Sacrement se trouvaient la chapelle de saint André, puis la chapelle de saint Claude, ensuite la chapelle de Rillé, enfin la chapelle de Villebon et l’ancienne chapelle de saint Michel.
A l’extrémité sud du transept était la chapelle de saint Sébastien, dans la partie est se trouvait la chapelle de l'Ange-Gardien.
La chapelle de Cornulier appelée chapelle du Voeu à la suite de l’épidémie de peste qui ravagea la ville en 1631-1634 était située à l’extrémité nord du transept.
Sous les orgues placées dans la nef, près de la croisée du transept, côté de l'Evangile se trouvait la chapelle des piliers ; enfin dans une absidiale du collatéral sud on trouvait la chapelle de Coëtlogon ou de la grille.
Il
existait encore au sud du transept une petite chapelle dite « de la
Trésorerie
»
Le choeur, en hémicycle, entouré d’un déambulatoire qui donnait accès aux chapelles rayonnantes était éclairé par onze fenêtres décorées de vitraux peints à l’antique.
Sur le vitrail du milieu au-dessus du grand autel : des figures de saints sans aucunes armoiries. Sur la première verrière côté de l'Evangile : un écu de France, d’azur aux trois fleurs de lys d’or. Au deuxième vitrail : un écu de Bretagne plein d’hermines, Sur un autre vitrail un écu écartelé des armes de France et de Bretagne, puis les armes du Dauphin, et enfin sur les autres vitraux de nombreux écus aux armes de Chateaubriand, d'Espinay, de Goulaine, d'Armel de Liepvre, d'Aymar Hennequin, évêque de Rennes, du cardinal Arnaud d'Ossat, de messire Guillaume Brillet, de messire Charles Guibe, de Jean Guibe, de Loisel seigneur de Brie, de Brehan de Glacoet, de Dinan de Montafilant, de la maison de Coëtlogon, de la Guerche, de René de Bourgneuf et nombre d’autres non identifiés.
Le vieux vitrail historié, du XIVème ou XVème siècle représentant la cérémonie du sacre des ducs de Bretagne était depuis longtemps disparu.
Les murs au pourtour du choeur et de la nef étaient peints avec semis d’hermines sans nombre ; les colonnes et les arcades étaient recouvertes de fleurs de lys.
Le choeur était séparé de la nef par une menuiserie pleine du XVIème siècle surmontée d’une frise et d’une corniche, le tout formant jubé. Au-dessus de cette corniche se dressaient les statues en bois des douze apôtres. Le choeur était divisé en hautes et basses stalles, les premières faites en 1422, par l'évêque Anselme de Chantemerle, étaient de style ogival à tredos, surmontées de dais sculptés à jour et ornées de pinacles. Dans le choeur se trouvaient une statue de Moïse et un aigle formant lutrin.
De la même époque était le superbe rétable en bois doré, situé sur le maître-autel de l’ancienne cathédrale, il était divisé en trois parties perpendiculaires par des pinacles très élégants et subdivisé horizontalement de manière à présenter deux compartiments dans les parties latérales et trois au centre.
Dans la partie basse du centre est figuré le mariage de la Sainte Vierge ; à droite l’adoration des Bergers ; à gauche l’adoration des Mages. Dans l’étage supérieur, à droite la Circoncision, à gauche la vie dans le Temple, au centre la mort de la Sainte Vierge. En supériorité, l'Assomption.
Des centaines de personnages, hauts de 2 pieds, entrelacés au milieu des nervures flamboyantes fouillées comme de la dentelle sont les acteurs pleins de vie de ces scènes évangéliques.
Sur les volets de ce rétable d'intéressantes peintures représentaient plusieurs traits de l'Histoire Sainte et de l'Ancien Testament. Sous l'autel : 3 groupes. A gauche la naissance de la Vierge ; sainte Anne, au lit reçoit la nourriture des mains d’une femme ; au centre, le mariage de la Vierge ; à droite, trois personnages assis [Note : En 1756, lors de la démolition de la cathédrale, le rétable fut transporté à la chapelle Sainte-Anne située près l'église Saint-Aubin ; cette chapelle, y compris le rétable fut vendue comme bien national pendant la Révolution et un marchand de fer s’y installa. Après le rétablissement du culte le propriétaire mit le retable à la disposition de l’évêque, on le déposa alors sans aucun soin dans un coin de l'église Saint-Melaine qui était alors cathédrale, il fut mis à terre, chacun pouvait en emporter des parties. On en retrouva plus tard des morceaux chez les marchands de vieilleries. Quand en 1845 M. de Caumont, archéologue, fit connaître à l’évêque la valeur de ces débris, cet évêque les fit enlever et déposer dans les combles de l’évêché. Lorsque Mgr. Saint-Marc voulut entreprendre les travaux de restauration de la cathédrale, pour se procurer des fonds il songea à vendre l'antique rétable et l’envoya à Paris. N’ayant pas trouvé d’acquéreur il le fit revenir à Rennes et le déposa au Musée, ce n’est que quelques années plus tard qu’il fut réparé, restauré et remonté à la Métropole dans la première chapelle du collatéral sud].
Dans
l’ordonnance de Monsieur l'Intendant de Bretagne du 13
octobre 1754 il était ordonné « de rechercher tous les intersignes
qui se trouveraient dans l’église cathédralle de Rennes afin
que tous ceux qui prétendraient avoir des chapelles
prohibitives, tombeaux et autres droits honorifiques se présentassent si bon leur semblait pour y faire telle déclaration
qu’ils jugeraient bonne être » Dans un
autre arrêt du Conseil d'Etat du 23 mai 1755 le roi ordonnait que « tous les
tombeaux qui sont dans ladite église cathédralle
seront ouverts et démollis devant tel commissaire
qu’il plaira à Mgr l'Evêque de commettre..., que les ossements qui s’y
trouveront seront mis dans un charnier à prendre depuis les tours en remontant vers la nef ou dans tel
autre lieu saint qui serait indiqué par Mgr l'Evêque de Rennes, jusqu’à ce que la nouvelle église étant construite
on
puisse les y replacer s’il en est ainsi par lui ordonné, ainsi
que les châsses et cercueils de plomb dans lesquels il se
trouvera des corps ou ossements » En conformité de cette ordonnance et de cet arrêt on ouvrit près de cent tombeaux. Jusque vers la fin du XVème siècle, il existait un cimetière autour de l’église et à partir de cette époque tous les bénéficiaires de Saint-Pierre furent inhumés dans la cathédrale, elle était devenue une véritable nécropole tant les tombeaux étaient nombreux, chaque dalle du pavé était une pierre tombale. Lorsqu’on ouvrit ces tombeaux, on n’y retrouva que peu d’ossements, presque tous étaient réduits en poussière, on y recueillit quelques débris de mitres, des crosses en bois ou en cuivre et les anneaux des évêques. |
Il n’est pas surprenant que l’on n’ait retrouvé que des crosses en bois, c’étaient des crosses sépulcrales que l’on substituait dans le tombeau aux crosses portées par les défunts qui étaient ordinairement en métal précieux. On retrouva le tombeau d'Isabelle de Bretagne, soeur unique de la duchesse Anne, celui de l'évêque Yves de Mayeuc et ceux de quelques personnages entre autres celui de Messire Michel Guibé dont le tombeau se trouvait dans le mur de la chapelle de saint Armel bâtie par les Guibé (ce tombeau représentant un homme de guerre vêtu de sa cotte d’armes. C’est le seul qui ait été conservé, il est déposé au Musée archéologique).
Dans son
Itinéraire de Bretagne de 1636, Dubuisson-Aubenay décrit ainsi le tombeau de
l'évêque Yves de Mayeuc. « La sépulture
de Yves de Mayeuc au bout austral de la croisée
avec un petit portique à colonnade et ornemens de pierre
blanche d’ordre composite avec son portrait en huyle priant
en evesque, dans le tympan du plat-fonds de l'intercolonne et ses armes là partout dans les voutes de l’église »
Tous les ossements trouvés dans la fouille de l’église furent déposés provisoirement dans le caveau de la chapelle du Voeu.
Le corps de l'évêque Yves de Mayeuc fut recueilli dans un cercueil de plomb fait par le plombier Duclohier, les ossements d'Ysabeau de Bretagne furent mis dans une boîte de plomb ainsi que ceux de l’évêque Lavardin de Beaumanoir. Tous les autres ossements épars furent mis dans un cercueil de bois et le tout fut déposé le 12 mars 1756 dans le caveau construit pour la sépulture de Messieurs du Chapitre, par les sieurs Le Roux et Marmayon dit Bayonnais, sous la direction de Chocat de Grandmaison, en exécution de l'arrest du conseil du 23 mai 1755 [Note : En 1872, Mgr. Brossais Saint-Marc, voulant retrouver les restes de l'évêque Yves de Mayeuc fit faire des recherches dans l'église. Dans le caveau construit en 1755, on ne retrouva que des ossements épars, il avait été violé pendant la tourmente révolutionnaire. Ces ossements furent recueillis dans un cercueil de bois renfermé dans un sarcophage de pierre reposé dans le même caveau. Ce caveau est situé au centre de la nef à quatorze mètres de la grande porte intérieure, il mesure 4 mètres 50 cent. sur 7 mètres. Un losange gravé en creux sur le dallage désigne l’entrée du caveau].
Depuis, un arrêt du roi du 15 mai 1776, défendit d’inhumer dans les églises nulle personne ecclésiastique ou laïque de quelque état et quelque dignité qu’elle puisse être à l’exception des archevêques et évêques dans leurs cathédrales, les curés dans les églises de leurs paroisses, les patrons et haut justiciers dans l’église dont ils sont patrons ou sur laquelle la Haute justice leur appartient, et les fondateurs de chapelles, à condition de faire construire dans les dites églises et chapelles des caveaux à six pieds en terre au-dessous du sol intérieur.
Dans la
cathédrale, la Communauté de Rennes possédait quatre bancs clos au-devant les
uns des autres, vis-à-vis les orgues qui sont entre les deux piliers du côté
septentrional de la nef, elle les revendiqua en disant : « que lesdits quatre
bancs appartiennent à la Communauté, qu’elle les a eus de temps immémorial en cet
endroit vis-à-vis la chaire, pour entendre les prédications, que les officiers de la chancellerie voulurent
en 1606 la troubler dans sa possession, mais qu’elle y fut maintenue par un arrêt du Conseil contradictoire du
1er septembre 1608, déclarant que lesdits bancs devraient être replacés dans
un pareil endroit vis-à-vis la chaire dans la nouvelle cathédrale qui sera
bâtie »
Au-dessous des orgues, il existait en outre un banc sur lequel était écrit : « Pour Messieurs du Siège » ; il était réservé aux membres du Présidial.
L’entière démolition de l’église ne fut achevée qu’en 1768 (G. Nitsch).
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