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LA PAROISSE DE SAINT-AUBIN (avant la Révolution) |
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Les Recteurs de Saint-Aubin avant la Révolution.
Tous les curés de la ville étaient appelés recteurs avant la Révolution et leurs vicaires étaient des curés. Il en est encore de même en Basse-Bretagne. Nous savons peu de choses sur les recteurs de Saint-Aubin avant le XVIIème siècle. Il suffira d’en donner la liste qui d’ailleurs est incomplète.
Pierre CHIEFDASNE, vers 1378 était recteur au moment de la fondation du Couvent de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle.
Thomas GUILLEMAUD, vers 1450.
Jehan GUILLEMAUD, mort en 1458, autorisa la fondation de la Chapellenie du Bois l'Abbé dont il sera question dans la suite. Un jugement conservé aux archives nous apprend que ses héritiers avaient emporté une partie du mobilier et des ustensiles de ménage : des escabeaux, une table, une broche de fer, un landier, une couëtte garnie de deux couëtis et quelques autres menus objets estimés à 23 livres. Les trésoriers défendirent les droits de la Fabrique devant l'Abbé de Saint-Melaine. Les parties finirent par s’entendre et les héritiers eurent même l’amabilité de rendre le livre des statuts synodaux et un grand parchemin sur lequel étaient inscrits les noms des excommuniés.
Ce n’est donc pas d’aujourd’hui que les héritiers des recteurs ont parfois la manie de confondre les biens patrimoniaux avec les biens de la paroisse.
Raoul CADOU (1492-1493).
Pierre HUET (1503).
Pierre LOHÉAC, recteur de Saint-Aubin de 1526 à 1531, devint ensuite chanoine de la Cathédrale où il fonda la fête Saint-Yves. Cette fondation ne dut pas manquer de plaire à Yves Mahyeuc, alors évêque de Rennes. Ce bon chanoine mourut en 1540 et fut enterré « au grand de l'Eglise ».
Jean BOUYS (1540). On conserve aux archives l’acte de présentation de l’abbé de Saint-Melaine.
Du MOULIN, vers 1550.
Guillaume LE LIEPVRE (1561-1586 ?) a vécu au moins jusqu’en 1586 et non jusqu’en 1581 comme le note le chanoine Guillotin de Corson. Il a comparu en 1586 devant les notaires royaux pour constat de servitudes dans son presbytère situé rue aux Foulons.
Laurent COUPÉ né à La Bazouges-du-Désert, mourut le 26 octobre 1606.
Macé ATTEIGNANT « construisit une maison près le cimetière Sainte-Anne pour le sacriste et officiers. Ayant donné deux logis, il demanda qu’on payât à lui et à ses successeurs douze livres tournois de rentes ».
Pierre LE GROS (1634-1639).
André COMPADRE, prêtre de Saint-Brieuc, fut d’abord aumônier de l’évêque de Saint-Malo. Il aimait les déménagements : la même année (1640) on le voit chapelain de Saint-Symphorien en Gaël, recteur de Saint-Aubin (le 10 février) le 18 du même mois il cède cette paroisse à Jean Bazille et retourne en 1641 à Saint-Symphorien, après avoir été quelque temps recteur de Betton.
Jean BAZILLE, meurt entre le 18 février et le 5 avril 1640. Il est remplacé par Olivier Nepveu, du diocèse de Saint-Malo qui se démet la même année en faveur de Mathurin Baudouin, du diocèse de Dol. Nous savons par un aveu de 1650 que ce dernier habitait place des Lices. Les habitants de Saint-Aubin (on peut le penser), durent avoir du mal à retenir les noms des recteurs qui passèrent en 1640...
Julien AUBRY, mort le 26 septembre 1659.
Après cette énumération qui présente peut d’intérêt, nous allons entrer dans une période où nous trouverons quelques recteurs qui semblent avoir été des hommes remarquables :
Jean BONNIER (1659-1693), fils de Raoul Bonnier, sieur des Bagottières et Procureur au Présidial, et de Jeanne Deshaie, fut présenté le 27 septembre 1659 par l’abbé de Saint-Melaine. (Les archives conservent l'acte de présentation). Il était originaire de la paroisse Saint-Aubin. Il agrandit l'église en prolongeant la chapelle des Huart. Il fut un bienfaiteur des hôpitaux de Rennes. A la charge du rectorat il joignit celle d’aumônier de la Prison Saint-Michel [Note : Cette fonction ne dut pas être une sinécure pour M. Bonnier. C'est sous son rectorat qu’éclata à Rennes, place du Champ-Jacquet, la fameuse révolte du Papier Timbré (1675) qui fut si sévèrement réprimée par le Duc de Chaulnes] pour laquelle il recevait 48 livres.
Un fait va nous montrer que c’était un prêtre très pieux et très dévot envers la Sainte Eucharistie. Le 9 Juillet 1673, il fonda une messe hebdomadaire en l’honneur du Saint-Sacrement. « Après l’issue de la Grand'Messe paroissiale et dominicale célébrée par Noble et Discret Messire Jean Bonnier, prêtre et recteur de Saint-Aubin, Messieurs les paroissiens d’icelle s’étant assemblés en forme de Corps Politique au Quenot (?) et Sacristie d’icelle église, par devant nous, Notaires Royaux (suivent les noms) fait entendre que depuis quelques années, il a le désir de procurer la dévotion au Saint-Sacrement de l'Autel, dans son église du dit Saint-Aubin, pour la gloire de Dieu, le zèle de son clergé et le bien de la paroisse et son salut particulier, il fonde à perpétuité et à jamais dans la dite église, une Grand'Messe du Saint-Sacrement qui sera chantée au Gloria et Credo, tous les jeudis de l’année et sans exception à même heure et précédée des mêmes sonneries que le service des Grand'Messes ... » (suivent certaines formalités). Il laissait pour cela à la Fabrique 6.000 livres [Note : Dans le même acte il demandait au célébrant après toutes les « Vespres ou complies du Carême », d’aller chanter un Requiem sur la fosse de ses parents qui se trouvait près de la chapelle de Notre-Dame de Pitié, vers la Nef].
Mgr de la Vieuxville, alors évêque de Rennes, avait non seulement approuvé M. Bonnier mais l'avait exhorté à faire cette fondation le 30 Juin 1673. Cette fondation fut imprimée sur parchemin.
Raoul BONNIER (1693-1700) neveu du précédent, après avoir été recteur de Visseiche en 1666, vint prendre le rectorat de Saint-Aubin. Il a essayé d’introduire à Rennes les Frères de la Doctrine Chrétienne, et ce n’est pas un mince honneur. Pour cela, il acheta 1.400 livres une maison et un jardin rue Saint-Dominique en Saint-Germain, qui appartenait à Robert Louisel, sieur de la Grabotière, habitant « au premier plan » place du Champ-Jacquet, pour en faire une école où les garçons pourraient recevoir gratuitement l’enseignement. Ce logis était composé « d’une petite maison comprenant un cabinet avec cheminée, une grotte avec tous ses jets d’eau et tuyaux de plomb, d’une autre maison avec un étage ». Ceci se passait en 1694. Quelles difficultés surgirent qui empêchèrent l’arrivée des Frères de Saint-Jean-Baptiste de la Salle ? A la mort de M. Bonnier, cette maison fut vendue à Pierre Hurel et à Demoiselle Marie Biard son épouse, par les héritiers de M. Bonnier.
M. Bonnier voulut comme son oncle, laisser un témoignage de sa dévotion à la Sainte Eucharistie en fondant une octave de saluts du Très Saint Sacrement. Il fut également aumônier de la Prison.
André DROUET, fils d'André de Montgermont, bachelier en Sorbonne, fut d’abord recteur de Montgermont et prit possession de Saint-Aubin en 1701. En 1708, il fut nommé Grand Chantre et Chanoine de la Cathédrale et mourut en 1732.
Jean JAMOUAYS, né en Saint-Aubin, fils de Julien Jamouays, sieur des Fontaines, avocat au Présidial, et de Jacqueline Jamouays, après avoir été recteur de La Mézière, prit possession de Saint-Aubin le 11 mai 1709, et mourut le 9 janvier 1737 [Note : Le fameux incendie de Rennes eut lieu sous son rectorat].
Jacques JAMOUAYS de la Musse [Note : Fils de Jacques Jamouays, sieur de la Musse, receveur des fouages et de Charlotte de Lourmel], Docteur en théologie. Après avoir été recteur de La Mézière, il prit possession de la paroisse de Saint-Aubin le 12 janvier 1737.
Ce recteur joua un rôle assez important dans l'histoire religieuse du diocèse. Son acte de décès lui donne le titre de subdélégué de l’archevêque de Tours [Note : L’évêché de Rennes comme tous les évêchés bretons dépendait alors de la Métropole de Tours].
Il fut également syndic du Clergé. Le 30 Mai 1743 nous le voyons « faisant, agissant et stipulant, pour Messieurs du Clergé du diocèse aux fins de la délibération de la Chambre ecclésiastique dudit diocèse » dans un acte de donation de 240 livres de tentés à l’hôpital Saint-Yves. C’est peut-être ce qui lui valut d’être un des directeurs des hôpitaux. La confiance de son évêque l’appela comme examinateur du concours dans le diocèse. Il fut nommé Supérieur de la Communauté du Bon Pasteur [Note : Cette communauté est devenue la caserne du Bon Pasteur] fondée en 1718 par Mme Pugin pour recevoir les filles pénitentes.
Ce qui retiendra surtout notre attention, ce fut son rôle prépondérant dans la fondation des écoles chrétiennes dites des « Ignorantins ». Il reprit le projet de son prédécesseur, M. R. Bonnier, qui avait voulu doter le quartier d’une école primaire gratuite pour les garçons.
En 1737, deux Frères de saint Jean-Baptiste de la Salle furent appelés à Rennes et logèrent dans une maison située rue Haute. M. Jamouays leur assura une pension de 400 livres. La même année un prêtre, Messire Pierre Lambin, leur assura une somme de 4.000 livres pour « aider à faire le fonds qui sera nécessaire pour fournir à la subsistance et entretien des Frères des Ecoles Chrétiennes ».
En 1739, M. Jamouays agissant comme syndic du clergé de Rennes, et « acceptant la dite qualité » pour les écoles chrétiennes de garçons, reçut un legs de 4.000 livres produisant 200 livres de rente de Dame Françoise de Robien, Marquise de la Roche, à condition que les Frères élèveraient gratuitement les enfants originaires des diocèses de Tréguier, Quimper et Léon, qui viendraient à Rennes.
La corporation des maîtres d’écoles laïques [Note : Il ne faut pas donner au mot « Laïque » le sens que nous lui donnons actuellement. On enseignait la religion dans ces écoles dirigées par des laïcs] voyait la venue des Frères à Rennes d’un mauvais oeil. Elle trouva un appui auprès des magistrats jansénistes et réussit à obtenir du Parlement de Bretagne un arrêt interdisant aux Frères d’enseigner dans la ville de Rennes, leur enjoignant même de « déguerpir » aussitôt. Cet arrêt, heureusement, n’eut aucun effet. Le Comte de Florentin, ministre d'Etat, écrivit à l’intendant de Bretagne « que l’intention de Sa Majesté était de conserver à Rennes les Frères des Ecoles chrétiennes et qu’elle le chargeait de faire entendre à Messieurs de la Communauté de Rennes [Note : Les Conseillers Municipaux] de ne point les inquiéter ».
Les Frères restèrent donc à Rennes et en 1747 M. Jamouays, de concert avec M. du Guersans, Vicaire Général de Mgr de Vauréal, alors ambassadeur en Espagne et avec le Frère Blaise, Directeur de l'Ecole, achetèrent à Pierre Boudoux, sieur des Orrières et à Aline Hurel sa femme pour 10.000 livres la maison [Note : La même sans doute que M. Bonnier avait acquise] qui se trouvait au 64 de la rue Saint-Malo [Note : Une partie du terrain est occupée vers 1935 par l'école de la Providence]. En 1770, elle comptait 230 élèves. L’instruction y était gratuite, grâce à la générosité de l’évêque de Rennes. Ce fait mieux que tout autre montre que l'Eglise a toujours eu le souci d’instruire les enfants et qu’elle avait déjà réalisé au XVIIIème siècle la gratuité de l’enseignement pour les classes pauvres. Ce n’est pas un petit honneur pour la paroisse de Saint-Aubin d’avoir eu comme recteurs deux prêtres qui ont essayé de réaliser dans la mesure de leurs ressources, cette oeuvre capitale. La vie de M. Mongodin, successeur de M. Jamouays, nous réserve d’autres surprises qui prouvent que Saint-Aubin avait des recteurs « à la page ».
André-Jacques MONGODIN, fut le dernier recteur présenté par l'abbé de Saint-Melaine [Note : En 1770, Mgr de Givac, évêque de Rennes, obtint du Pape l'abolition de la dignité abbatiale de Saint-Melaine]. Il prit possession de sa paroisse le 18 septembre 1749. Il fut, à n’en point douter, l’un des plus marquants parmi les prêtres du diocèse de Rennes avant la Révolution. On l’appellerait, s’il vivait actuellement, « un prêtre social ». Il fut l'Ami et le Bienfaiteur des Pauvres, et sa réputation dépassa au XVIIIème siècle les limites de Rennes.
La paroisse de Saint-Aubin n’a jamais été regardée comme une paroisse riche. Sans doute dans les registres paroissiaux on pourrait relever le nom de bien des familles nobles, mais au moment où vivait M. Mongodin, la situation des ouvriers qui composaient la majeure partie de la paroisse n’était pas brillante.
Un événement allait mettre le zèle de M. Mongodin pour les pauvres en pleine lumière. Vers le milieu du XVIIIème siècle, un incendie éclata à l’angle de la place Sainte-Anne et de la rue Saint-Michel (côté Est) dans la « maison des quatre fils Aimont ». « Il rassembla alors une somme assez considérable pour soulager avec abondance le grand nombre des malheureux qui perdirent dans les flammes tous leurs effets. Il répara en entier la perte des plus pauvres et une grande partie de celle des autres, selon la proportion de leurs ressources ».
Voyant une bénédiction aussi sensible sur son entreprise et confiant dans la Providence, il essaya alors de former en 1769 un Bureau de Charité, pour les besoins de ses pauvres. Il reçut l’approbation des « premiers magistrats » et du Général de la Paroisse. Ce Bureau de Charité ne put continuer ses assemblées pendant les dernières années de la vie de Mongodin, mais ce vénérable pasteur ne ralentit pas son zèle pour soulager les pauvres dans leur détresse. « On l’a vu, jusqu’à son décès, exercer son zèle avec la plus grande activité et avec persévérance, employer tous ses soins à inspirer les mêmes sentiments à ses paroissiens par ses fréquentes instructions publiques, et à tous ceux qu’il fréquentait par ses discours familiers. Ce fut par ces moyens et tous ceux que sa pitié lui suggéra qu’il fournit aux pauvres de sa paroisse, non seulement les secours de toutes espèces, mais qu’il leur procura des fonds propres à perpétuer une si grande oeuvre ».
Ces lignes empruntées au Règlement qui portait l’établissement d’un Bureau pour le soulagement des Pauvres de Saint-Aubin font le plus grand honneur à M. Mongodin [Note : Ce règlement fut rédigé l'année qui suivit la mort de M. Mongodin]. Il méritait ces éloges. Sa charité était d’ailleurs très éclairée. Il donnait lorsqu’il y avait nécessité et, au lieu de favoriser la paresse, il portait les pauvres à utiliser les dons que Dieu leur avait donnés. C’est ainsi que plus de 200 artisans lui durent d’avoir fait des progrès dans leur métier, et la dernière année de son rectorat, il s’occupait encore de 60 jeunes gens qu’il avait placés pour apprendre une profession.
A l’époque où il vivait, Parmentier introduisait la culture de la pomme de terre ; M. Mongodin, l’esprit ouvert à toutes les nouveautés, la fit cultiver pour en donner aux indigents.
Les archives départementales conservent une partie du testament de M. Mongodin. On découvrira mieux dans ces quelques lignes, son désintéressement et son esprit pratique. C’était un homme d’ordre. « Dans la crainte d’être surpris par la mort, je fais une déclaration juste et nécessaire de l’état actuel de mes affaires. Je déclare que je ne possède aucun bien et que le seul argent qui puisse m’appartenir se trouvera dans un tiroir de mon petit bureau qui est le premier d’en bas au-dessous de celui des pauvres. C’est le seul bien qui me soit propre et légitime. Toutes les autres sommes qu’on me trouvera sont des dépôts où il y a des étiquettes (suit une énumération). Je déclare dans la crainte d’être volé, étant chargé de l’argent du clergé et des pauvres et même de quelques dépôts, tout se trouvera dans un double fond du petit cabinet ou bureau, au milieu où il y a une porte marbre en noir. Ce cabinet est situé dans ma chambre, près de la porte au-dessous de ma pendule, il est même marbré de différentes couleurs, soutenu par des colonnes torses, il a onze tiroirs et une petite porte au milieu. C’est dans cette partie qu’il y a un double fond, où est contenu l’argent qui ne m’appartient pas ».
Dans ce testament il accuse également avoir dépensé personnellement plus de 3.000 livres pour des travaux exécutés à Saint-Aubin, dont il a été question précédemment.
M. Mongodin mourut subitement le Samedi 25 Février, à l’âge de 63 ans, dans son confessionnal, à 8 heures du matin, et il fut enterré le 27 dans l’ancien cimetière de Saint-Aubin. Le Général de la Paroisse fit graver sur un tombeau l’épitaphe suivant : Cy-git M. André-Jacques Mongodin, recteur de cette paroisse, syndic du Clergé de Rennes, administrateur des hospices de cette ville. Ses vertus jusqu’au tombeau - Furent du Bon Pasteur, une image accomplie, - Il mourut comme lui, en immolant sa vie - Au salut de son troupeau.
L’année suivante, en 1776, le Général de la Paroisse porta le règlement pour l’établissement d’un bureau de charité permanent, afin de continuer l'oeuvre de M. Mongodin.
« Le Général compte sur le zèle de Monsieur BIENVENUE et de son curé, mais il ne veut pas se rapporter d’une manière oisive à leur zèle à cause de la conservation des fonds municipaux, des titres et d’une quantité de choses qui n’entrent pas dans les fonctions curiales et dans les fonctions de trésoriers en charge. D’où nécessité de créer un bureau composé de Monsieur le Recteur, de son Curé et de deux autres ecclésiastiques, six laïques, dont deux anciens trésoriers et quatre habitants d’une condition honnête et distinguée du menu peuple ». Ce bureau continua-t-il de fonctionner régulièrement ? Aucun document connu ne peut nous renseigner sur sa vitalité. Quoi qu’il en soit l’idée était généreuse et surtout elle était neuve pour l’époque, au moins à Rennes, c’est ce qui en fait l’intérêt.
Le presbytère conserve une gravure représentant M. Mongodin en costume de choeur. Cette gravure a une histoire assez amusante qui mérite d’être contée, Elle fut faite à Paris chez Mondard, rue Saint-Jacques, par Beaudeau, sculpteur. La planche qui représente M. Mongodin en costume de choeur, surplis avec étole, avait d’abord été gravée en 1744 et présentait le portrait du P. Plessis, jésuite, alors en renom. Mais la vogue de ce personnage avait diminué et les gravures ne se vendaient plus. « Il ne faut rien perdre ici-bas, dut se dire Beaudeau, la réputation de M. Mongodin s’étend, profitons-en, mais évitons les frais pour faire le plus de bénéfice possible ». Il remania alors la planche du P. Plessis et en fit un portrait de M. Mongodin, qui se vendait alors six sols.
Jean-Baptiste BIENVENUE, né à Hédé, en 1732, de Jacques Bienvenue de Colombel et de Olive Gaisnel, après avoir été recteur de la paroisse de Notre-Dame de Vitré, fut transféré à Saint-Aubin, le 29 Mars 1775 et gouverna paisiblement sa paroisse jusqu’à l’époque de la Révolution. Il signa comme député des recteurs de Rennes le procès-verbal de l'Assemblée Municipale, le 16 Juillet 1789.
En Septembre 1790 M. Bienvenue signa l’adresse du Clergé de Rennes à son évêque, Mgr Bareau de Girac.
Le vendredi 2 Novembre 1790, M. Bienvenue reçut la visite de Joseph Sevestre et de Charles Maugé, officiers municipaux qui vinrent lui demander s’il avait lu en chaire le Dimanche précédent, au prône de la Grand'Messe, le décret sur l’organisation civile du Clergé. M. Bienvenue, d’après le rapport des commissaires, répondit habilement aux deux envoyés de la municipalité en disant que l'Assemblée Nationale dans sa séance du 2 Novembre avait ordonné qu’à l’avenir les publications des décrets se feraient par « affiches et placards » et que par conséquent il n’avait « fait lire aucun décret ni constitution civile ».
Ces Messieurs lui demandèrent ensuite s’il avait prêté ou s’il comptait prêter le serment civique ordonné par l’article 39 du décret du 20 juillet sur le traitement actuel du Clergé ? M. Bienvenue répondit « qu’à l’égard du serment civique, quant à présent, il ne pouvait s’obliger à le promettre jusqu’à ce que, suivant sa conviction intime, ce qui est du ressort de la puissance purement spirituelle soit réglé par elle ».
La paroisse de Saint-Aubin fut supprimée par Guyot, le 13 mai 1791 et réunie pour le culte à celle de Saint-Sauveur [Note : On transporta même les balustrades en fer du maître-autel de Saint-Aubin à Saint-Sauveur où elles furent placées à l’autel dit de la Sainte Vierge et à celui du bas de l’église. Du couvent des Dominicains, on y transporta également le fameux tableau de l’incendie, à la demande des habitants des quartiers des Lices et de la rue Saint-Michel]. Qu’allait devenir M. Bienvenue ?
Il fut autorisé à rester le 20 décembre 1791 dans son presbytère dont on ne savait que faire, jusqu’à la Saint-Jean 1792, à condition de verser 50 livres de location. Il avait avec lui une tante âgée de 82 ans et une soeur aveugle depuis plus de 20 ans.
Mais les événements se précipitèrent. N’ayant pas prêté le serment schismatique à la Constitution Civile du Clergé, il fut appréhendé et enfermé dans le monastère de Saint-Melaine, transformé en prison. De là il fut transféré au couvent de la Trinité [Note : Couvent qui se trouvait sur la place de la Trinité]. Ensuite il fut envoyé comme beaucoup d’autres prêtres réfractaires à l’abbaye du Mont Saint-Michel, transformée elle aussi en prison d'Etat.
Rendons hommage à la mémoire de ce prêtre fidèle. Nous n’avons pas de renseignements sur sa vie à cette époque, mais ne suffit-il pas pour le rendre vénérable à nos yeux, qu’il ait été un Confesseur de la Foi ?
M. Bienvenue fut remis en liberté au printemps de 1795. Il dut sans doute rentrer à Rennes et put espérer reprendre ses fonctions [Note : Le citoyen Fortin, curé constitutionnel de Saint-Aubin nous apprend au début de son registre paroissial que dès le mois de mars 1795 (Ventôse de l’an III de la République une et indivisible) l’exercice libre et public du culte catholique a commencé à Rennes] ; mais, au mois de septembre de la même année, la persécution recommença. A cette époque beaucoup de prêtres s’enfuirent à l’étranger. M. Bienvenu resta dans la paroisse et continua à exercer secrètement son ministère. Il a laissé le registre des baptêmes et mariages qui fait foi de son activité. Le premier baptême inscrit date du 4 avril 1795 et le dernier du 6 septembre 1800. Il faisait les mariages sans doute au domicile de l’un des conjoints. Toutefois, en 1800, il signale qu’il en a fait un dans la « chapelle où il exerce l’office paroissial de Saint-Aubin ». Où était cette chapelle ? On serait tenté de penser qu’il put utiliser à cette époque un des nombreux sanctuaires qui se trouvaient sur le territoire de la campagne de Saint-Aubin. Où logeait M. Bienvenue pendant ces années de persécution ? Impossible de le savoir. Il faisait cependant des baptêmes rue Saint-Dominique, rue Reverdiais, rue Pont-aux-Foulons. Cela suppose de sa part beaucoup d’abnégation [Note : Si M. Bienvenue avait été découvert, après le 18 fructidor (septembre 1797), il eût été envoyé comme beaucoup de ses confrères, sur les pontons de Rochefort ou à la Guyenne où les privations de toutes sortes en tuèrent un grand nombre] et de la part de ceux qui le gardaient chez eux, beaucoup de courage et d’esprit chrétien.
Après le Concordat, M. Bienvenue devenu infirme fut nommé chanoine titulaire en 1804 et mourut en 1810 (Henri Poisson).
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