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CULTE DE SAINT ARMEL DANS LE DIOCÈSE DE RENNES |
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Plusieurs églises en Bretagne se glorifient d'avoir saint Armel pour patron, et dans un certain nombre de paroisses on retrouve la tradition du séjour de ce bienheureux en notre pays.
Dans le diocèse de Quimper, Plouarzel rappelle le premier monastère que Saint Armel, breton émigré de Grande-Bretagne en Armorique, fonda au comnencement du VIème siècle. Ce fut, en effet, sur la côte du pays de Léon, au Havre Béni (Aber-Benniguet), qu'aborda le saint solitaire.
Dans le diocèse de Vannes, la ville de Ploërmel est fière à juste titre de porter depuis plus de mille ans le nom de saint Armel ; les chartes du Cartulaire de Redon nous apprennent, en effet, qu'au IXème siècle cette ville s'appelait Plebs Armel c'est-à-dire paroisse d'Armel. Maintenant encore la belle église de Ploërmel conserve dans ses splendides verrières représentant l'histoire de son patron, la tradition du culte séculaire voué au bon saint Armel dont elle possède les reliques.
Le diocèse de Rennes est encore mieux partagé, car c'est sur son territoire que le bienheureux semble avoir vécu le plus longtemps, et c'est chez nous qu'il a rendu sa belle âme au Seigneur ; nos églises paroissiales de Saint-Armel, de Loutehel, de Langouet et de Bléruais le reconnaissent pour leur patron, et la paroisse de Bruz revendique l'honneur de lui avoir élevé une chapelle, là même où il secourut ses habitants [Note : N'oublions pas non plus que l'ancienne cathédrale de Rennes renfermait une chapelle Saint-Armel fondée par l’évêque Michel Guibé, qui y reposait ainsi que son frère Jacques ; on y voyait aussi le cénotaphe du cardinal Robert Guibé].
Nous n'avons point recueilli de traditions sur le séjour de saint Armel à Bléruais et à Langouet ; il est vraisemblable que ces églises se sont mises tout simplement sous la protection du bienheureux moine , sans qu'il ait dû séjourner sur leur territoire ; mais il n'en est pas de même des autres paroisses que nous venons de nommer.
A Loutehel, par exemple, à côté de l'église est une fontaine vénérée depuis des siècles et restaurée avec goût depuis quelques années ; non loin de là se tenait en 1680 la foire de Saint-Armel dépendant de la Seigneurie de La Lohière ; aujourd'hui la statue du saint s'élève au-dessus de la fontaine, et les pèlerins viennent en grand nombre y prier avec ferveur. Si l'on s'en rapporte à la tradition locale c'est à Loutehel que s'accomplit le miracle rapporté comme il suit dans la vie de saint Armel par le R. P. Albert-le-Grand : « Passant par un village où il ne se trouvait point de bonne eau, le saint planta son baston en terre et après avoir fait oraison , le retira, et, incontinent, il parut en ce lieu une source de bonne eau, laquelle n'a, depuis, cessé de couler, et s'appelle la fontaine de Saint-Armel » (Vie des Saints de Bretagne).
Dans la paroisse de Bruz, tout près du manoir des évêques de Rennes, au bord même de la Seiche, se trouvait jadis une chapelle dédié à saint Armel est très honorée dans toute la contrée. Il est fait mention pour la première fois de cet oratoire en l'an 1329. A cette époque, un paroissien de Bruz, nommé Jehan de la Lande, fit une donation à la chapelle de Saint-Armel dépendant du manoir épiscopal de Bruz « capellœ manerii episcopalis sancti Armagilli de Breuz ; » il donna, entre autres choses, tous les fiefs nobles qu'il possédait dans la paroisse de Bruz sous la mouvance de l'Evêque de Rennes et le droit de pêche dans la rivière de Seiche depuis le moulin de Carcé jusqu'au moulin de Saint-Armel (Archives départ. d'Ille-et-Vilaine).
Là encore, si l'on en croit la tradition des paroissiens de Bruz, saint Armel fit un grand miracle ; laissons de nouveau la parole au pieux hagiographe breton : « Il y avait en ces quartiers (au VIème siècle) un horrible dragon, qui avait sa caverne en une petite montagne, près la rivière de Seiche, lequel faisait un grand ravage par le pays circonvoisin ; saint Armel regrettant le dommage qu'en recevaient les paysans pria Dieu de les vouloir délivrer de cette calamité, et, le lendemain, ayant célébré la messe, il déposa sa chasuble, puis se fit conduire à la caverne du monstre, auquel il commanda, de la part de Dieu, de sortir : ce qu'il fit. Alors il lui lia son estole au col et le traisna à travers ladite montagne jusques sur le bord de ladite rivière, luy commmandant de s'y précipiter ; ce qu'il exécuta. Et pour mémoire de ce miracle, la route ou sentier par lequel le saint traisna le monstre à travers la montagne (qui fut nommée le Mont-Saint-Armel) parut sec et aride, sans qu'il y crust aucune herbe » (Albert-le-Grand, loco citat).
Là même où saint Armel « jeta la guivre en Seiche, » comme dit la légende de la verrière de Ploërmel, s'éleva donc la chapelle dédiée à ce bon moine ; à côté se forma plus tard le village de Saint-Armel que les habitants de Bruz prétendent avoir été jadis le bourg primitif de leur paroisse.
Mais il est temps d'arriver au bourg même de Saint-Armel, où vécut longtemps et où mourut ce bienheureux.
Lorsque saint Armel, appelé du pays de Léon à la cour du roi franc Childebert, eut obtenu, après six années de sollicitations, la permission de retourner en Petite Bretagne, ce roi, dit Dom Lobineau, « qui ne le perdait qu'à regret, lui fit présent tt son départ d'une assez grande étendue du terre inculte et déserte, dans un canton à moitié moins éloigné de Paris que le Léonnais, afin de pouvoir apprendre plus souvent et avec plus de facilité de ses nouvelles. Cette terre était au pays de Rennes, sur la rivière de Seiche, dans un lieu qu'on nomme aujourd'hui Saint-Armel-des-Boschaux. Armel y bâtit un monastère qui a été cause que ce lieu a porté longtemps le nom de Moustier » (Vie des Saints de Bretagne, 80).
C'est là que mourut le bienheureux, le 16 août, vers l'an 552 ; là aussi il fut inhumé, et l'on montre encore son cercueil dans l'église paroissiale de Saint-Armel : c'est une auge en pierre dépourvue de son couvercle et placée dans la muraille, derrière le maître-autel.
Quant au monastère fondé en ce lieu par saint Armel, on ne sait s'il subsista longtemps après la mort de son premier abbé ; l'histoire est complètement muette à son sujet. Il existe bien dans le bourg de Saint-Armel une maison appelée le Prieuré, qui passe pour avoir remplacé le couvent du Saint breton ; sur un reliquaire de cette paroisse on lit aussi , avec la date toute moderne de 1653, le nom de « Joachim Le Contat, prieur de Saint-Armel ; » mais aucune abbaye n'a réclamé, à notre connaissance, ce prieuré de Saint-Armel ; bien plus, aucun pouillé n'en parle et aucun document historique ne le signale. Nous sommes donc porté à croire que le monastère de Saint-Armel ne survécut guère à son fondateur, ou disparut tout au moins durant les effroyables invasions des Normands, aux IXème siècle et Xème siècles. Seulement, comme dit Dom Lobineau, le nom de « moustier » qui veut dire monastère, resta longtemps attaché au bourg de Saint-Armel en souvenir du couvent établi par ce pieux solitaire. Les recteurs de Saint-Armel cherchèrent peut-être à entretenir ces dévotes réminiscences en prenant parfois le titre de prieur. Ce qui nous fait adopter plus facilement cette hypothèse, c'est qu'on nous a dit que le recteur de Saint-Armel jouissait, avant la Révolution, de la maison appelée le Prieuré, vieux logis du XVIème siècle, d'aspect assez original.
Les paroissiens de Saint-Armel prétendent bien que la fontaine de ce Saint, située à une petite distance du bourg, est celle que fit sourdre miraculeusement leur puissant patron. Ils montrent aussi, au bord de la Seiche, près de l'emplacement du très antique manoir de la Motte-Saint-Armel, la colline d'où le bienheureux précipita le dragon dans la rivière. Nous nous garderons bien de les contredire, et nous exposons volontiers leurs traditions comme nous avons rappelé celles des habitants de Loutehel et de Bruz. Si Dom Lobineau vivait encore, le savant bénédictin les accorderait tous, en leur disant que ces traditions merveilleuses sont de pieuses « fictions » (Vies des Saints de Bretagne, 80) qui rappellent seulement le triomphe de saint Armel sur le serpent infernal, c'est-à-dire le démon mais hélas ! nous n'avons plus de Dom Lobineau !
Mais ce que nous avons encore, ou plutôt ce qu'ont les habitants de Saint-Armel, c'est une fort belle église paroissiale dédiée à leur saint patron et restaurée présentement avec beaucoup de soin.
Bâtie presque en totalité au XVIIème siècle [Note : La façade occidentale et une partie des colonnes des nefs sont plus anciennes, remontent aux XVème siècle et XVIème siècles et portent souvent répétés les écussons des Sires du Tiercent, alors Sgrs de la Motte-Saint-Armel] par Jean-François de Cahideuc et Gillonne de Langan Sgr et dame de Chambière et de la Motte-Saint-Armel, cette église fut dédiée en 1666 par Mgr de la Vieuville, évêque de Rennes. C'est un édifice construit dans de vastes proportions, présentant extérieurement un campanile du plus élégant aspect et de riches corniches sculptées, offrant à l'intérieur trois belles nefs et cinq autels placés presque sur la même ligne, et formant un tout très remarquable dans le style Renaissance du temps de Louis XIV.
C'est dans ce beau temple que se pressent, chaque année, au mois d'août, les nombreux pèlerins qui accourent de tous les environs pour vénérer le tombeau de saint Armel, prier dans les lieux qu'il sanctifia, boire de l'eau de sa fontaine bénie et se recommander à sa puissante intercession. A ces dévots serviteurs de notre Saint, il ne ferait pas bon parler des « pieuses fictions » découvertes par Dom Lobineau ; leur foi naïve et sincère respecte trop tout ce qui rappelle le pieux solitaire breton, et chacun d'eux répète volontiers avec l'humble poète de Ploërmel, parlant de saint Armel :
Ah ! c'est bien le meilleur d'entre tous
nos amis !
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Sa vertu non pareille et son sublime esprit
Attiraient tout le monde au Sauveur Jésus-Christ ;
Sa bouche ne s'ouvrait qu'à de divins oracles,
Il brillait en tous lieux par de puissants miracles.
[Note : La légende de saint Armel mise en vers français, par Mre Baudeville, maître d'école à Ploërmel en 1600].
(abbé Guillotin de Corson).
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