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La paroisse de Saint-Juvat durant la Révolution.

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Renseignements ecclésiastiques. — Saint-Juvat, cure de l'ancien évêché de Saint-Malo, dépendait autrefois de l’archidiaconé de Dinan et du doyenné de Plumaudan.

Dès l'an 1156, d'après un titre mentionné par les auteurs des Anciens Evêchés de Bretagne, op. cit., t. IV, p. 359, les moines de Léhon possédaient l'église de Saint-Juvat. L'an 1181, une convention passée entre les religieux de Saint-Magloire de Léhon et ceux de Saint-Magloire de Paris, attribue aux premiers l'église, le bourg, le cimetière et les dîmes de Saint-Juvat (Fouéré-Macé : Le Prieuré Royal de Léhon, op. cit., p. 314). Les religieux de Léhon conservèrent l'église de Saint-Juvat jusqu'en 1767, date à laquelle leur mense prieurale fut définitivement réunie à celle de Marmoutiers. (Fouéré-Macé, op... cit., p. 151).

En conséquence, le prieur de Léhon, puis après lui l'abbé commendataire de Marmoutiers, présentèrent le titulaire du rectorat de Saint-Juvat jusqu'à la Révolution Française.

En 1754, M. Le Maistre de la Garlaye, à cause de la terre de la Mettrie-Saint-juvat, qui lui était advenue par suite de son mariage avec Françoise-Marie de la Bourdonnaye, était seigneur fondateur et prééminencier à Saint-Juvat. En 1770, ces titres appartenaient à Louis-Charles de la Bourdonnaye, seigneur de la Vallée-Plumaudan, et président au Parlement de Bretagne.

D'après un aveu rendu en 1557, les religieux de Léhon possédaient en Saint-Juvat le fief et bailliage dudit nom, lequel leur valait 7 sols 4 deniers d'argent et 6 mines de froment, mesure de Bécherel. Ils levaient à cette même époque dans cette paroisse les dîmes de la Ségonnière, de Caharel, de Lagat, de Trégat, de la Gaudière et du Perhou. L'ensemble leur rapportait 62 mines 12 boisseaux de froment et cent sols d'argent. (Archives de Loire-Inférieure, B 864).

En 1777, la dîme de Caharel était affermée 300 livres et celles de la Gaudière, du Perhou, de Trégrit et de Tréfumel, 1.500 livres. Quant au bailliage de Saint-Juvat, il rapportait alors 177 livres à l'abbaye de Marmoutiers. (Fouéré-Macé, op. cit., p. 360 et 361).

Les gros décimateurs, cependant, avaient dû laisser au recteur de Saint-Juvat, pour sa subsistance et celle de son vicaire, le sixième des revenus de cette paroisse ; aussi, le 14 septembre 1790, le recteur Gallée déclarait-il posséder pour son traitement l'usufruit d'un presbytère situé assez loin de l'église et consistant en une cuisine, une salle, une grange, un cellier, une écurie et une boulangerie avec cour au milieu ; un journal de terre dit le « Verger du Presbytère », plus un trait de dîme qui rapportait en 1790 150 boisseaux de paumelle, 190 bx de blé, 45 de blé noir, 30 d'avoine menue et 15 de mouture. Le district de Dinan estima ces grains valoir 1.704 livres avec déduction de 250 livres pour frais de récolte. Sur cette dîme, le bénéficiaire, devait payer 350 l. à son vicaire, 35 livres pour son abonnement aux réparations du presbytère, 2 boisseaux de blé au bailliage de Saint-Juvat, et enfin les « décimes royaux ». Tant et si bien qu'une fois défalquées ses charges, il ne restait plus guère au recteur de Saint-Juvat que la valeur d'une modeste portion congrue.

Le Pouillé de la Bastie note l'église de Saint-Juvat comme en assez bon état, propre et bien pourvue. En 1769, une visite épiscopale y signale la présence d'un autel dédié à Saint Blaise. L'on y voit encore maintenant les statues en bois de Saint Sébastien, de Saint Dominique, de Saint Jean et de Saint Blaise. Cette église, à laquelle on a en le bon goût d'épargner jusqu'ici une reconstruetion a été décrite par G. du Mottay dans son Répertoire Archéologique des Côtes-du-Nord, déjà cité, p. 416. On y remarque au bas-côté midi, un vieux portail roman surmonté d'un porche, et au bout orient, une porte ogivale du XVème siècle. Elle possède entre autres raretés une bannière de 1776 représentant d'un côté Saint Juvat revêtu d'une chasuble du XVIIème siècle, tenant un coeur dans sa main droite, et, de l'autre. Côté, Saint Sébastien.

L'on voit toujours dans le cimetière un remarquable calvaire de l'époque de la Renaissance, mais en 1655 il s'y trouvait de plus, du côté ouest, une chapelle dédiée à Notre-Dame, avec chambre au-dessus, servant tant pour faire la classe aux enfants que pour leur enseigner le catéchisme. Nous possédons dans nos archives personnelles plusieurs documents intéressants concernant cet édifice.

Trois chapelles rurales, ou frairiennes, d'après le pouillé conservé aux Archives de Saint-Malo sous la cote GG 292, existaient autrefois à Saint-Juvat. La première, dite de la Rionnais, construite en 1627 par Guillaume Suas du Rionnais, était dédiée à Saint Yves et possédait 40 livres de revenu ; la seconde, appelée Carragat, était sous l'invocation de la Sainte Vierge. Son revenu s'élevait à 60 livres. Enfin, la troisième, dédiée à Saint Mathurin, était connue sous le nom de la Gaudière, et possédait 60 livres de rente également.

Carragat, ainsi que la Gaudière, existent encore aujourd'hui (1925) et sont parfois utilisées pour le culte. Cependant, la chapelle de Carragat, avec un emplacement de maison, un jardin et le « Courtil Neuf », avaient été vendus comme biens nationaux le 27 juillet 1791, pour 2.700 livres, mais Mgr. Cafarelli sollicita en 1808 du gouvernement impérial la faveur d'y faire célébrer les divins offices, ainsi que dans la chapelle de la Gaudière, vu que leurs acquéreurs voulaient restituer ces édifices à leur destination première.

D'après le Pouillé de la Bastie, il y avait avant la Révolution une fondation à Saint-Juvat pour la messe du matin, tous les dimanches, et une autre pour dire une messe tous les jeudis, ainsi que pour exposer le Saint Sacrement le troisième dimanche de chaque mois. Cette dernière était de 60 livres, dont 10 revenaient à le Fabrique, laquelle du reste ne possédait en tout que 15 livres de revenu fixe.

Mais la générosité des paroissiens de Saint-Juvat suppléait à cette insuffisance. En 1728, ils avaient offert à leur église un cochon vendu 22 sols, du beurre pour 12. l. 7 s., du chanvre pour 3 l. 8 d., du lin pour 4 l. 17 s. ; les pommes du cimetière avaient été vendues 19 l. 6 s. ; les oblations le jour de Saint Barthélemy avaient rapporté 11 s. 7 deniers ; un poulet mis aux enchères avait trouvé acquéreur à 3. sols, tant et si bien que les ressources de cette année, s’étaient élevées à 51. l. 13 s., et les dépenses à 33 l. 6 sols seulement.

Saint-Juvat possédait aussi au profit, de ses pauvres, sous l'ancien régime, un contrat de constitut de 1.250 livres sur le Clergé de France, produisant 50 livres de revenu annuel.

En 1780, le budget de l'église de Saint-Juvat était accru : le beurre offert à l'église avait été vendu 20 l. ; le lard et la filasse des commençailles avaient produit 10 l. 17 s. ; le blé offert à la, même occasion, 102 l. ; le lin et le fil, 23 l. ; les pommes du cimetière, 35 l. ; un cochon, 45 sols ; la chape et le carillon des baptêmes, 16 l. 7 s. ; le casuel, 97 l. Somme faite de ces revenus, l'église de Saint-Juvat avait recueilli cette année 358 livres, et ses dépenses n'avaient atteint que 193 l. 6 s. seulement.

Le Pouillé de la Bâstie signale à Saint-Juvat une confrérie dédiée à Saint Sébastien, sans aucun revenu fixe. Saint Jean-Baptiste [Note : Saint Jean-Baptiste, second patron de la paroisse, est invoqué surtout pour la conservation des bestiaux] possédait anssi dans l'église de cette paroisse non seulement un autel sur lequel on déposait des offrandes de beurre, mais aussi une confrérie conjointement avec Saint Armel et Saint François. A cette confrérie, le pape Clément XI, l'an 1703, avait accordé à perpétuité plusieurs indulgences, tant plénières que partielles.

Nous possédons dans nos archives plusieurs inventaires des « joyau, ornements et autres biens de l'église de Saint-Juvat », datés de 1638, 1646 et 1659. Nous y voyons figurer entre autres « une grande croix d'argent avec deux écharpes en taffetas, l'une bleue, l'autre rouge ; un grand calice et sa patène en argent doré, un autre calice et sa patène en argent ; une custode, soleil et calice n'ayant  " qu'une même patte ", le tout d'argent ; une bannière de velours rouge d'un côté et verte de l'autre ; ornée de l'image de Saint-Juvat d'un côté et, au milieu et en autres endroits, parsemée d'étoiles en fils d'or et d'argent. Une grande chape ,de velours rouge ramée et brochée de fils d'or et d'argent et ornée de l’image de N. S. Père le Pape ; une chasuble jaune et rouge ; une chasuble de drap d'or ; quatre grands chandeliers de cuivre, quatre petits chandeliers d'étain ; quatre chandeliers de bois peint ; deux encensoirs et leurs navettes en cuivre, etc., etc... ».

Le tout s'était encore notablement accru à l'époque de la Révolution. Ses fauteurs se chargèrent de dilapider en quelques mois ces objets acumulés au cours des siècles. Le 7 mai 1793, les municipaux de Saint-Juvat durent livrer au distriet de Dinan : une croix, un encensoir et sa navette, deux burettes et leur cuvette, une lampe, et une statue de la Sainte Vierge ; l’ensemble pesant 35 marcs, 6 gros d'argent blanc (le marc équivalant à 244 grammes). Quinze mois après, le 24 août 1794, on inventoriait à Dinan comme provenant encore de ladite église : un ostensoir pesant 6 marcs, 1 once, 2 gros d'argent blanc ; deux calices et leurs patènes, un ciboire, un croissant pesant 7 marcs, 7 onces, 2 gros d'argent doré, plus 2 marcs, 4 onces de galon doré.

L'église de Saint-Juvat possède encore, entre autres curiosités, des ampoules et une coquille en argent données en 1700 par Louis-Charles de la Bourdonnaye et sa soeur Marie. On put soustraire ces objets aux spoliations de la Révolution.

Du reste, nous l'avons déjà vu maintes fois, l'idéal révolutionnaire était de réduire l'Eglise de France au dénûment de la crèche de Bethléem. Aussi, dès le 27 juillet 1791, le courtil d'Ahaut, les Noés, le Porumerel, le Cogneux et le courtil Juhel, dépendant de la chapellenie de Carragat, avaient-ils trouvé acquéreur dans la personne de Toussaint Ozou. Le 12 octobre suivant, c'était la métairie de l'Epine, dépendance de la chapellenie de la Vallée, en Plumaudan, qui fut vendue pour 4.025 livres à Pierre Moucet. Les 3 et 13 août 1798, on liquida les terres affectées à la chapellenie de la Gaudière, louées 75 francs, et à celle de la Rionnais, louées 61 frs. Cette dernière comprenait, outre la chapelle de ce nom avec un enclos de quatre cordes, le pré de la Chapellenie, celui des Batailles, le pré de Languédias et le clos Suet, celui-ci contenant deux journaux. L'ensemble fut adjugé pour 10.000 frs, payables en valeurs très dépréciées, au dénommé Pierre Moucet. Quant à la Gaudière et à ses dépendances, François Martin demeura leur acquéreur. Enfin, le 8 mars 1799, Joseph Faustel acheta pour 480 frs le Verger du presbytère, Néanmoins, le gouvernement consulaire restitua à la fabrique de Saint-Juvat deux pièces de terre d'un revenu de 33 livres qui n'avaient pas été vendues au cours de la Révolution.

Dans le travail de réorganisation des paroisses effectué en 1792, Saint-Juvat devait être conservé et comprendre la partie occidentale de Plumaudan, la partie septentrionale de Saint-Maden jusqu'aux vallées de Breludan, le bourg de Saint-André des Eaux et la partie de cette commune située sur la rive gauche de la Rance.

Disons pour finir que, sous l'ancien régime, la paroisse de Saint-Juvat était groupée pour les prédications des stations avec Saint-Maden et Guenroc, et que ses jours d'adoration étaient fixés aux 23 et 24 avril de chaque année.

 

CLERGÉ.GILLES GALLÉE, recteur, fils de Charles et de Françoise Pinault, naquit à Saint-Juvat le 7 août 1728. Il étudia à Dinan, puis entra au Séminaire. Il reçut la prêtrise le 24 septembre 1752, après avoir subi de bons examens théologiques. Seule la partie chant laissait chez lui à désirer. M. Gallée succéda dans la cure de Saint-Juvat à messire Jean Le Roux, précédent recteur. San visa pour cette paroisse est du 17 décembre 1765.

Non seulement ce prêtre refusa de s'assermenter, mais il signa l'Exposition des Principes sur la Constitution du Clergé. Aussi, quand vint le moment de remplacer les curés insermentés par des curés jureurs, M. Gallée vit-il élire à son lieu et place, le 13 juin 1791, l'ex-capucin Gouriou, dont nous verrons un peu plus loin les mésaventures à Saint-Juvat.

Après l'installation de son successeur comme curé intrus de Saint-Juvat, le 26 juin suivant, le pasteur légitime fut contraint d'abandonner sa paroisse, aux termes de l'arrêté départemental du 18 juin de cette année, et le maire de Saint-Juvat se vit féliciter le 13 juillet suivant par le district de Dinan sur « l'exactitude » qu'il avait mise à exécuter l'arrêté précité. Cependant, la servante de M. Gallée, nommée Anne Camereuc, n'avait pas suivi son maître lors de son départ. Demeurée à Saint-Juvat et soutenue par la majorité de la population, elle fit à l'intrus une opposition acharnée. Aussi, lorsque celui-ci eût du, au bout de quatre mois, abandonner sa cure devant le scandale causé par sa conduite et celle de son vicaire, M. Gallée s'empressa-t-il de revenir au milieu de ses ouailles, et put même célébrer une grand'messe dans son église paroissiale le 22 décembre 1791, au grand mécontentement du district de Dinan, qui se hâta d'aviser la municipalité juvatine que « si l'ex-curé récidive, il sera dénoncé au Département, les curés ou vicaires remplacés ne pouvant s'immiscer en aucune manière dans leurs anciennes fonctions curiales, sous peine d'être poursuivis suivant la rigueur des lois... ». Il était évidemment préférable de laisser toute une population privée des secours religieux, plutôt que de la voir recourir au ministère de son ancien pasteur !

Le recteur de Saint-Juvat, lors de l'application de la loi du 26 août 1792, préféra, quoique sexagénaire, l'exil à l'étranger à l'internement dans une maison de réunion. Il s'embarqua donc le 11 septembre de cette année, à 4 heures du soir, au Chatellier, en Rance, avec 15 autres prêtres, pour gagner l'Angleterre. Battu par la tempête, leur frêle esquif mit deux longues journées avant d'atterrir à Jersey. Un des passagers, l’abbé Macé, de Dinan, succomba même aux atteintes d'une congestion, et l'on dut immerger sa dépouille funèbre près des îles Chausey. Enfin, le 13 septembre, au midi, les Confesseurs de la Foi abordèrent la terre étrangère, où plusieurs d'entre eux devaient trouver leur tombeau. Ce fut le sort de Monsieur l'abbé Gallée, qui décéda à Jersey-Saint-Hélier le 26 juin 1794, à l'âge de 66 ans (L'Estourbeillon, op. cit., p. 348). Un mois auparavant, le 21 mai, la vente des effets mobiliers de ce prêtre, laissés à Saint-Juvat, avait produit 174 livres 19 sols au profit du gouvernement révolutionnaire, non compris les objets de cuivre, d'étain, et le linge qui avaient été déposés par ordre aux magasins du district de Dinan pour les besoins des armées de la République.

HYACINTHE-ANDRÉ BARBIER, vicaire, naquit à Saint-Nicolas de Montfort le 27 juillet 1760, du mariage d'André et de Louise Guérin. Il fut ordonné prêtre le 18 décembre 1784 et signe pour la première fois comme vicaire de Saint-Juvat, le 24 septembre 1789.

Ayant refusé de s'assermenter, M. Barbier fut remplacé dans ses fonctions de vicaire en même temps que son recteur. Il ne s'éloigna cependant pas pour cela du territoire juvatin, et suivant une dénonciation de son successeur, il se mit « à confesser dans les maisons particulières et à dire la messe en dehors de l'église paroissiale » (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 17).

Ce prêtre s'exila néanmoins à Jersey après la loi 26 août 1792 et nous le voyons, d'après les registres de Mgr. de Cheylus, recevoir dans cette île un secours de 95 livres pour le mois d'août 1796, ainsi que pour les mois de février et mars 1797. L'abbé Barbier revint en France cette même année et fit dès lors à Saint-Juvat du ministère caché, et spécialement des baptêmes en 1798 et 1799 (Archives Nationales, F 7, 7246, N° B 7964).

D'après l'enquête de Boullé, ce prêtre résidait à Plumaudan depuis frimaire an VII (novembre 1799), en qualité de curé d'office. Voici les notes que lui donnait alors le préfet : « A renvoyer dans son diocèse, à moins d'être placé simple vicaire. Taxé d'avoir pris une part active à la Chouannerie ».

Cela n'empêcha pas Mgr. Cafarelli de désigner l'abbé Barbier pour le rectorat de Vildé-Guingalan, auquel il fut nommé lé 9 juin 1804, malgré de nouvelles observations du préfet, qui qualifiait ce prêtre de « caractère tracassier et opiniâtre, nullement propre, sous aucun rapport, à être placé à la tête d'une paroisse ». Après avoir démissionné de sa cure, M. Barbier mourut à la Maison Rouge, en Saint-Juvat, le 19 octobre 1820.

Fut nommé recteur de Saint-Juvat, le 16 janvier 1804, JOSEPH-XAVIER FOUGERAY, né à Saint-Méen le 11 novembre 1756 du mariage de Christophe et de Jeanne-Ursule Mine, lequel, après avoir été noté au Séminaire comme « ayant passablement de voix et beaucoup de chant », reçut la prêtrise le 10 mars 1781.

M. Fougeray était pourvu depuis le 14 février 1783 du rectorat de Châteauneuf de la Noüe, lorsqu'il refusa, le 22 janvier 1791, de prêter serment. Obligé, à la suite de son refus, de quitter Châteauneuf, où un nommé Letourneur, originaire de la Manche, fut élu à sa place le 29 niai 1791, ce prêtre vivait réfugié à Saint-Méen en mai 1792. Son nom ne figure sur aucune liste d'exil. M. Fougeray reparut à Châteauneuf durant les quelques mois que dura la pacification, en 1795. En novembre 1797, il signait à Saint-Méen un acte de soumission aux lois purement civiles de la République.

Voici les notes que donne sur lui, en 1801, le préfet d'Ille-et-Vilaine : « N'a fait ni serment, ni soumission... Est sesté caché et rentré à Saint-Méen comme simple prêtre, il a de bonnes mœurs ». Le préfet des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) ajoutait, vers 1802, que ce prêtre « résidait depuis un an comme desservant à Saint-Juvat, et qu'on le dit estimable ». D'après l'abbé Leray, M. Fougeray desservait eu 1801 la paroisse de Bédée comme curé d'office ; il la quitta à la rentrée de l'abbé Tollive et s'en vint peu après à Saint-Juvat, où il fit le 21 août 1802 la promesse de fidélité à la Constitution de l'air VIII.

Lorsque son grand âge l'obligea à abandonner la cure de Saint-Juvat, ce prêtre se retira à l'hospice de Saint-Méen, où il mourut à 78 ans, le 6 mai 1834.

M. FRANCOIS PICOUAYS, que nos voyons à l'article Broons, remplit les fonctions de vicaire à Saint-Juvat jusqu'à 1806, date de sa nomination au rectorat de Lancieux.

Etaient originaires de Saint-Juvat en 1790, en plus du recteur, Messieurs :

GUILLAUME-MATHURIN BIFFART, né le 20 juillet 1746 de Jean, sieur de la Hautière, et de Jeanne Louvet, lequel était élève de cinquième au collège de Dinan en 1762. Il fut tonsuré en 1768 mais ne reçut la prêtrise à Saint-Malo que le 24 septembre 1774, ses examens par trop faibles l'ayant fait par plusieurs fois différer pour les ordres. Aussi M. Biffart demeura-t-il tout le temps chapelain à Saint-Juvat. Cependant, lors de la promulgation de la Constitution Civile, il sut se garder de tout serment hétérodoxe. Mais quelles que sévères que fussent les mesures prises contre le clergé fidèle, cet ecclésiastique ne put se résoudre à quitter ses compatriotes, à qui il rendit toutes sortes de services au cours de la Révolution, disant la messe à la ferme Pommelin, écrivent les auteurs du Diocèse de Saint-Brieuc, etc., op. cit., t. I, p. 300.

Mais si M. Biffart ne s'était point exilé, il appartenait néanmoins du fait de sa non-prestation de serment, à une classe d'individus qui étaient censés l'être, et que l'on avait mise hors la loi. Aussi, ses effets mobiliers et ceux de son frère, prêtre insermenté comme lui, furent-ils séquestrés, inventoriés, puis enfin mis en vente le 14 mai 1794, au village de la Hautière. Ils produisirent 659 livres au profit de la République, en vertu de la loi du 12 mars précédent.

Au rétablissement du culte catholique, M. Biffart ne fut pourvu d'aucune situation ecclésiastique officielle. L'enquête du préfet Boullé le note d'ailleurs comme « ayant peu de capacités ».

Ce prêtre mourut à Saint-Juvat le 20 octobre 1804, à l'âge de 63 ans.

JULIEN-JOSEPH-PIERRE-MARIE BIFFART, frère du précédent, naquit le 8 mai 1752 et fit son cours au collège de Dinan. On le note au Séminaire comme « promettant pour l'avenir, mais répondant avec timidité ». L'abbé Biffart reçut la prêtrise le 27 septembre 1776, et lors de la Révolution, il était aumônier des religieuses de Sainte-Anne, en Saint-Servan. Ayant refusé de s'assermenter, lors des mesures décrétées par le Directoire d'Ille-et-Vilaine contre les prêtres fidèles, M. Biffart prit le parti de demander un passeport le 18 avril 1792 pour regagner Saint-Juvat.

Nous n'avons point retrouvé le nom de cet ecclésiastique parmi ceux qui séjournèrent à Jersey ou en Angleterre, et il est probable qu'il passa toute la Révolution caché en Bretagne.

Le chanoine Guillotin de Corson, dans son Pouilié Historique déjà cité, signale un Monsieur Biffart qui fut nommé recteur de Saint-Thual en 1803, et qui doit être celui auquel nous consacrons la présente notice. Cependant, nous doutons que ce prêtre ait conservé longtemps cette situation, et même qu'il l'ait jamais occupée. En tout cas, il mourut à Saint-Malo de l'Isle, rue des Halles, le 2 août 1810, âgé de 58 ans.

THOMAS-JEAN LE FORESTIER, né à Saint-Juvat le 9 avril 1745, du mariage de Jean et de Rose Colin, fut noté au Séminaire comme « bon sujet pour la science et les moeurs, ayant passablement de voix et sachant un peu son chant ». Il reçut la prêtrise à Saint-Méen le 23 septembre 1769, après avoir passé un excellent examen.

A la mort de Guillaume Thébault, qui administrait Saint-Lunaire de Pontual depuis le 10 septembre 1781, M. Le Forestier, à la suite d'un concours subi le 17 avril 1782, fut nommé par le Pape pour le remplacer, et prit possession de son poste le 28 juin de cette année. Après avoir tout d'abord prêté le serment à la Constitution, le 13 février 1791, ainsi que Jacques Ollivier, son vicaire, ils se rétractèrent « dans le temps de l'élection des curés constitutionnels », puis, devant les mesures sévères adoptées le 14 avril 1792 par le Conseil général d'Ille-et-Vilaine, ces deux ecclésiastiques, avec six autres « prêtres et abbés », dont MM. Gorget et Favrot, prêtres de Saint-Lunaire ; Capprel et Le Moigne, séminaristes de cette paroisse, et Lecoq, prêtre de Saint-Servan [Note : Sur Jacques Ollivier, cf. art. Ploubalay. — Sur Capprel, cf. art. Trigavou. — Sur Le Moigne, cf. art. Plouër. — Ambroise-Servan Gorget était né à Saint-Lunaire le 17 février 1743 de Jean et de Jeanne Aillet. Il reçut la prêtrise le 14 avril 1778. Nous croyons qu'en sa qualité d'insermenté, il crut prudent de demeurer toute la Révolution à l'étranger. Il décéda à Saint-Lunaire le 11 avril 1809. — François-Noël Favrot naquit à Saint-Lunaire le 8 mai 1763 du mariage de Noël et de Jeanne Guihomatz. On le note au Séminaire « d'une bonne conduite, mais caractère un peu difficile ». Ordonné prêtre le 19 décembre 1789, il fut quelque temps vicaire à Campanéac, où il refusa de s'assermenter. Il demeura à l'étranger jusqu'en 1795, et revint alors à Saint-Lunaire, où il fit du ministère au milieu de cette année. Ce prêtre affirme avait résidé à Saint-Malo rue des Cimetières dans une maison appartenant à la citoyenne Roudot depuis septembre 1795 jusqu'au 11 nivôse an V (31 décembre 1797). Il habita ensuite à Saint-Servan jusqu'au 25 floréal an VIII (15 mai 1800). Le général Bernadotte lui accorda une carte de sûreté le 6 prairial an VIII. (Arch. Nat., F 7, 5154). Nous ne le retrouvons qu'à la fin de 1801 comme vicaire de Saint-Briac, où il décéda en 1810], s'embarquèrent pour Jersey dans l'anse de la Fosse-aux-Vaux, en Saint-Lunaire, la nuit du 25 avril 1792. Les fugitifs débarquèrent le lendemain, vers midi, sur la terre étrangère. M. Le Forestier devait y passer tout le reste de la Révolution.

Durant ce temps, son mobilier demeuré au presbytère de Saint-Lunaire, y fut vendu en 1794 au profit de la République.

M. Le Forestier était revenu à Saint-Lunaire et y célébrait un mariage le 26 mai 1801. Au Concordat, ce prêtre fut nommé curé de Plélan-le-Grand et prêta le serment prescrit pour ce poste le 10 août 1803. Il y décéda en fonctions le 14 avril 1820, âgé de 75 ans.

JEAN-MARIE PICOUAYS, fils de Joseph et de Rose Delourme, naquit au bourg de Saint-Juvat le 2 mars 1747, et étudia au collège de Dinan. Il passa de bons examens préparatoires à ses ordinations, et reçut le sous-diaconat le 2 mai 1770, puis la prêtrise à Rennes, par dimissoire, en septembre 1771.

On trouve la première signature de ce prêtre comme vicaire de Caulnes le 19 mai 1785, et sa dernière le 23 octobre 1789. M. Picouays dut ensuite revenir à Saint-Juvat. Les registres du Directoire du district de Dinan nous apprennent qu'il fut en effet conduit par un gendarme devant cette administration le 5 août 1791, comme « coupable d'avoir célébré sa messe à basse voix dans ladite paroisse de Saint-Juvat, sans vouloir assister le dimanche et fêtes au service divin (célébré par l'intrus Gouriou) comme tout bon chrétien y est obligé ». L'abbé Picouays dut s'engager d'honneur, pour être relaxé, à n'accomplir désormais aucune fonction extérieure du culte et à garder le silence touchant les actes et les décrets de l'Assemblée Constituante.

Le nom de ce prêtre ne figure point parmi ceux qui s'exilèrent à Jersey. Les auteurs du Diocèse de Saint-Brieuc, etc., op. cit., I, p. 300, assurent, d'après la tradition, que « M. Picouays, très infirme, rendit aux fidèles de Saint-Juvat tous les services qu'il pouvait et qu'il coucha souvent dans les fossés des fourrés Thébault ». Le 1er avril 1794, Jean-Marie-Pierre Aubry, fils du sieur de la Lohouas et de Marie-Madeleine Fouéré, capitaine des canonniers de la Garde Nationale de Dinan, et l'un des meilleurs limiers pour diriger la chasse aux prêtres réfractaires, perquisitionnait vainement chez Joseph Picouays, à Saint-Juvat, afin d'y arrêter les abbés Picouays et Auffray, mais on leur répondit qu'ils n'habitaient plus cette demeure depuis huit mois (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 63). Quant à nous, après avoir vainement recherché jusqu'ici le lieu et la date du décès de ce prêtre, nous le classons dans la catégorie trop nombreuse des ecclésiastiques « disparus » au cours de la Révolution Française. Les registres conservés au presbytère de Saint-Juvat, et que nous a très aimablement communiqués le recteur, M. l'abbé Bourseul, ne contiennent qu'une fois la signature de M. Picouays à l'occasion d'un baptême, le 18 septembre 1795.

Nous avons déjà dit un mot de son frère FRANÇOIS-JEAN-BAPTISTE–MICHEL PICOUAYS, qui remplit en 1790 et 1791 l'emploi de vicaire auxiliaire à Broons.

LOUIS LE COQ naquit à la Gaudière, en Saint-Juvat, le 18 janvier 1719, du mariage de Jean-Marie et d'Angélique Tournevache, et étudia au collège des Laurents. Il fut tonsuré le 16 septembre 1767 et ordonné prêtre le 18 septembre 1773, après avoir été différé un, an pour cet ordre comme « n'ayant pas assez de science et de piété ».

Après, avoir été vicaire à Plouasne, à Saint-Juvat et à Combourg, M. Le Coq remplissait ces fonctions en 1790 à Saint-Onen, paroisse du doyenné actuel de Saint-Méen, poste dans lequel il fut élu curé constitutionnel du Bois-Gervily le 22 août 1791. N'ayant pas accepté son élection, pas plus qu'il ne consentit à s'assermenter, M. Le Coq fut obligé de quitter Saint-Onen et de se retirer à Saint-Juvat, d'où il s'exila à Jersey en compagnie du recteur, M. Gallée, à la date du 11 septembre 1791.

Quoiqu'il ne se fut déporté que pour obéir à la loi, les autorités du District, le 2 novembre 1794, firent cependant apposer les scellés sur le mobilier des parents de M. Le Coq, alors résidant à la maison de la Ville-Navière, sise au village de la Gaudière, en Saint-Juvat, et seul le décret rendu par la Convention le 8 septembre 1795 vint empêcher la confiscation d'une partie de leurs biens, pour les châtier de la faute qu'ils avaient commise en donnant le jour à un futur prêtre insermenté.

Nous pensons que M. Le Coq revint à Saint-Juvat au printemps de 1795, Il fit à son arrivée les baptêmes de tous les enfants nés dans cette paroisse en 1793 et 1794 (ceux nés en 1792 ayant été pour la plupart présentés à baptiser à l'intrus Chrétien, au Quiou). Aussi, est-ce à bon droit que, d'après une tradition consignée sur le registre paroissial de Saint-Juvat et reproduite par les auteurs du Diocèse de Saint-Brieuc, etc., op. cit., I, p. 300, nous lisons dans cet ouvrage que M. Le Coq fit beaucoup de ministère caché près de ses compatriotes, non sans pour cela négliger de s'occuper de chouannerie.

Une note de police du 29 mai 1797, annonce que ce prêtre réside dans le canton de Tréfumel, et ajoute : « C'est un très mauvais sujet, très dévoué aux chouans ». Le 13 novembre de cette même année, le commissaire exécutif du Directoire près le canton de Plumaudan, grand acquéreur de biens nationaux et futur député aux Cinq-Cents, accusait l'abbé Lecoq d'avoir acheté huit fusils avec un particulier nommé l'Arbalétrier, de la commune de Trévron. (Archives Nationales, F 7, 7332, N° 7261).

Ainsi désigné à l'attention des colonnes mobiles, on finit par arrêter l'ancien vicaire de Saint-Onen dans la commune de Saint-Maden, le 24 septembre 1798, grâce aux efforts d'un détachement sous les ordres du chef de bataillon Mattat, lequel faisait alors aux curés réfractaires une chasse acharnée. (Archives des Côtes-d'Armor, L 290, folios 82 et 83). Au moment de sa capture, M. Le Coq était porteur d'un passeport daté du 29 janvier 1797, signé par l'administration cantonale de Tréfumel, et contenant ces mots : « avec permission d'avoir un fusil chez lui pour sa défense », ce qui valut à ces autorités des observations très vives de l'administration centrale des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor).

Incarcéré à Saint-Brieuc après son arrestation, M. Le Coq fut peu après transféré à la prison de Guingamp. Il s'y trouvait encore quand les autorités départementales des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) le condamnèrent à la déportation à la Guyane le 2 mai 1799, comme « coupable de n'avoir pas prêté le serment auquel il était assujetti en qualité d'ex-vicaire à Saint-Onen, Plouasne et Combourg ».

Dirigé le 12 de ce même, mois sur l’île de Ré avec un détachement dont faisaient partie douze autres prêtres réfractaires des Côtes-du-Nord (Côtes-d'Armor), M. Le Coq y arriva le 30 mai 1799 et fut aussitôt enfermé dans la citadelle. Suivant l'historien Manseau, il s'en évada le 17 mai de l'année suivante. Cet ecclésiastique remplissait les fonctions de curé d'office à Saint-Maden lorsqu'il y trépassa le 24 octobre 1802. (Cf. Archives Nationales, F 7, 7852 (833), F 7 7253, n° 8507).

JEAN-MARIE SEVESTRE, fils de M. Guy, notaire, et de Perrine Reslou, naquit à la Hautière, en Saint-Juvat, le 25 mars 1750. Appartenant à une famille dont plusieurs membres avaient déjà servi l'Eglise, le jeune Sevestre fut de bonne heure orienté vers le sacerdace, et nous le trouvons dès 1766 élève au collège de Dinan, Il reçut la prêtrise le 6 septembre 1775, après avoir mérité la note « passable » au Séminaire, tant pour son chant que pour ses examens théologiques.

Ayant refusé de s'assermenter, M. Sevestre, qui vivait simple prêtre à Saint-Juvat, dut s'exiler après la loi du 26 août 1792. Il s'embarqua donc pour Jersey le 11 septembre de cette année, avec son recteur et son compatriote l'abbé Le Coq, et passa dans cette île, puis en Angleterre, tout le reste de la Révolution.

L'enquête de Boullé note ce prêtre comme « souffrant d'une mauvaise santé, à laisser dans sa famille ». Aussi l'abbé Sevestre fit-il beaucoup de difficultés pour accepter le rectorat de Tréfumel, auquel on l'avait nommé le 16 janvier 1804, à tel point qu'il ne figura pas à la cérémonie de la prestation de serment, le 24 mai de cette année. Ce prêtre décéda à Saint-Juvat le 26 février 1810, étant démissionnaire de sa cure pour infirmités depuis le 9 mars 1808.

Etait encore originaire de Saint-Juvat en 1790, l'abbé JOSEPH FAVEREAU, né dans cette paroisse le 2 novembre 1734 de Philippe et de Françoise-Rose Gallée. Il reçut la prêtrise en 1761 et fut pourvu du rectorat de Trévérien, le 9 octobre 1789. Comme tel, nous savons qu'il refusa le serment, mais nous ignorons ce qu'il devint ensuite. ? Etait encore natif de cette paroisse OLIVIER JUHEL né le 24 février 1722 de Pierre et de Guyonne Hautière, prêtre à Saint-Méen le 23 juin 1749, vicaire de Saint-Père-en-Poulet dès 1757, recteur de cette paroisse le 2 août 1764. Arrêté à Saint-Servan comme insermenté et, conduit le 3 avril 1793 à la Trinité à Rennes. Décédé au Mont-Saint-Michel le 27 octobre suivant âgé de 71 ans.

Etaient séminaristes de Saint-Juvat en 1790, MM. Guillaume Le Forestier, né dans cette paroisse le 11 janvier 1766, du mariage de Joseph et d'Anne Chaton, lequel, après avoir étudié au collège de Dinan, reçut la tonsure à Saint-Malo de l'Isle, église Saint-Sauveur, le 18 septembre 1790. (Archives d'Ille-et-Vilaine, G 91).

Fut aussi tonsuré le même jour : Jean-Toussaint Chapel, de Saint-Juvat, fils de Jean et de Françoise Gallée, lequel, à l'encontre de son confrère, persista dans sa vocation, reçut la prêtrise à Saint-Brieuc le 2 avril 1808 et devint recteur d'Eréac le 15 juin 1814. Il y mourut le 7 mars 1845.

 

CLERGÉ CONSTITUTIONNEL.FRANÇOIS-JEAN GOURIOU, curé, né à Cesson en Saint-Brieuc, le 6 septembre 1758, du mariage de Jacques et de Madeleine Chevalier, entra chez, les frères Mineurs capucins, où il fit profession en 1779. En 1790, il habitait le couvent de Guingamp et faisait savoir alors sa volonté de sortir du cloître. La disette de candidats pour les cures du district de Dinan obligeant les électeurs à étendre au loin leur recrutement, Gouriou rendu à la vie séculière, se vit élire le 13 juin 1791, par 27 voix sur 34 votants, curé de la paroisse de Saint-Juvat.

Du reste, l'ex-capucin s'était, on n'en peut douter, assermenté des premiers, car la municipalité très révolutionnaire de Guingamp l'avait, dès le 26 février précédent, désigné pour prêcher le carême en cette ville. Aussi Gouriou accepta-t-il avec joie son élection à la cure de Saint-Juvat, pour laquelle, le 17 juin, l'évêque Jacob, son chef hiérarchique, lui délivra l'institution canonique. Neuf jours après, le 26 juin 1791, eut lieu son installation solennelle dans sa nouvelle paroisse, et Gouriou débita pour la circonstance aux gardes nationaux rassemblés dans son église, un discours animé « de sentiments vraiment chrétiens et patriotiques ».

C'était la lune de miel, et sa durée fut éphémère, ainsi qu'il n'arrive que trop souvent aux lunes de miel.

A la vérité, la situation de Gouriou, comme celle de tous les curés constitutionnels, était extrêmement difficile. Il s'en rendait compte lui-même, et l'expliquait en ces termes dans un rapport au district de Dinan : « Il y a, disait-il, plusieurs messieurs ecclésiastiques réfractaires dans cette paroisse, dont ils sont tous natifs ou originaires, et sont tous parents ou alliés de M. le Maire, J'ai fait mon possible pour tâcher de les faire rester dans ma paroisse, et je n'ai exigé d'eux que de reconnaître M. Jacob pour évêque du département des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), de me reconnaître pour curé de Saint-Juvat et d'assister à l'office divin de la paroisse le plus régulièrement que faire se pourrait, eu égard à leur santé, et de me donner toutes ces promesses par écrit, sur papier timbré. Ce qu'ils ont constamment refusé ». — Ce qui ne nous surprend pas du reste de ces prêtres, lesdites promesses étant absolument inconciliables avec la stricte orthodoxie dans laquelle ces ecclésiastiques, prétendaient vivre et mourir.

« Il y a de plus, ajoutait Gouriou dans le rapport précité, des arrêtés du Département qui condamnent les réfractaires à s'éloigner de leur ci-devant domicile à six lieues dans le principe, et depuis bien plus loin, et sur lesquels M. le maire Bellebon ferme malignement les yeux ; j'apporte pour preuve de ce que j'avance la résidence de MM. Picquoys, Biffard et du Chastel [Note : L'abbé J.-B. du Chastel résidait alors parfois à la Gaudière, en Saint-Juvat, et le plus souvent à Dinan, rue de l'Ecole], cy-devant aumônier de la Reine, et l'ancien vicaire (Barbier) ; tous réfractaires, qui, malgré la lecture publique (de l'arrêté) qui leur ordonne l'eloignement, malgré mes vives instances pour les engager à rentrer dans le devoir, persistent dans leur entêtement opiniâtre, confessent dans les maisons particulières, disent la messe sans ma participation, et continuent à fomenter le trouble dans ma paroisse » (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 17).

Il est certain que la co-existence du clergé insermenté et du clergé constitutionnel dans une localité ne pouvait qu'y faire surgir des difficultés de toutes sortes ; mais, indépendamment de cette raison, nous croyons que la personnalité même de Gouriou et celle de l'acolyte qu'il s'était adjoint comme vicaire, dans son ami l’ex-capucin Gicquel, eussent été suffisantes à elles seules pour provoquer le scandale et faire naître de l'agitation au milieu de la population la mieux disposée.

On ne peut douter en effet que ce fut l'élément le plus médiocre du monde monacal qui profita des décrets de l'Assemblée Constituante pour recouvrer sa liberté, et Gouriou et Gicquel, en rentrant dans le monde, infidèles à leurs voeux les plus solennels, avaient déjà donné un triste échantillon de leur mentalité. Aussi, un mois ne s'était-il pas encore écoulé depuis leur arrivée à Saint-Juvat, que leurs nouveaux paroissiens, scandalisés par le sans-gêne et l'amoralité de ces extraordinaires pasteurs, déclaraient, ainsi que nous le verrons tout à l'heure, « qu'ils n'avaient aucune confiance en eux » (Cf. Archives Côtes-d'Armor, Lm 5, 17).

Dès le 11 juillet 1791, le vicaire Gicquel se plaignait d'avoir été gravement insulté à Saint-Juvat, et le Directoire du district de Dinan s'empressait aussitôt d'écrire au maire de cette commune pour s'informer des faits allégués dans sa plainte.

Le 21 de ce même mois, les administrateurs du District étaient en possession de la réponse du maire de Saint-Juvat, et tout émus des faits qu'elle leur apprenait, décidèrent sans désemparer d'envoyer l'un d'entre eux enquêter sur place et vérifier les imputations formulées contre le clergé constitutionnel juvatin.

Claude Forcoueffe, notaire à Corseul, nommé commissaire-enquêteur, se rendit donc à Saint-Juvat le 22 juillet 1791. Arrivé à deux heures de l'après-midi au bourg de cette localité, il pénétra dans l'ancien auditoire de la juridiction de la Mettrie-Saint-Juvat, et là, nous raconte le procès-verbal qu'il rédigea à l'usage de ses collègues restés à Dinan, il entendit les dépositions de MM. J. Bellebon, maire ; Pierre Haouisée et J.-B. Hautière, officiers municipaux, et de Jean-Laurent Ozou, procureur de la commune, lesquels furent unanimes à déclarer que « le sieur Gouriou, leur curé, tenait une conduite tout opposée à celle d'un vrai ecclésiastique, en s'enivrant souvent, en montrant le mauvais exemple, en n'enregistrant pas les actes d'Etat-Civil ou en ne le faisant qu'à moitié, en n'enseignant pas le catéchisme aux enfants, enfin en se permettant certains actes qui pouvaient faire soupçonner gravement sa moralité ».

« Quant au sieur Gicquel, ajoutèrent-ils, il est, par son incapacité, le sujet des conversations des habitants de la paroisse, et sa conduite est au moins aussi irrégulière que celle de son curé. Il se livre également à l’vrognerie et répand des propos contre les moeurs et la décence ».

Du reste, le maire Bellebon, dans sa lettre aux administrateurs du District, ne signalait-il pas tenir du curé Gouriou lui-même que « durant dix jours que celui-ci avait été malade, le petit ivrogne de Gicquel, après avoir fini une barrique de cidre, avait baissé jusqu'au tiers une barrique de vin de 191 pots, si bien qu'il avait dû se saisir de la clef du cellier. Je n'en finirais pas, ajoutait ce magistrat, si je voulais vous détailler tout ce qu'on dit ici de ces deux prêtres ».

Et, de fait, les témoins se succédaient devant M. Forcoueffe et chacun y allait de son histoire, chacune plus corsée l'une que l'autre. Ainsi défilèrent devant ce magistrat Louis Chapel, du Perhou, lequel raconta que le jour du Petit-Sacre, aux Vêpres, le vicaire Gicquel se montra incapable, bien qu'ayant un livre à la main, de réciter la prière du soir, qu'il ne dit que la moitié du Symbole et ne put achever l'Angelus. Le 10 juillet, c'est la moitié des psaumes des Vêpres, que Gicquel escamota, et, malgré le secours de François Picouays, « qui lui prêta son livre pour le mettre sur la voie, il ne put en venir à bout ». Trois autres témoins : Pierre Haouisée, de la Menaudais ; Joseph Leforestier, de la Maladrerie, ainsi que Jean Bretagne, chirurgien à la Maladrerie, confirmèrent cette déposition.

A leur tour, Jean Ramard, du Perhou, et Jean Lucas, de la Menaudais, conclurent leurs témoignages en affirmant « que la généralité des paroissiens n'a aucune confiance dans leurs nouveaux curés ».

Nous n'en serons nullement surpris quand nous aurons entendu Antoine Guessant et Marguerite Boscher, du bourg, déposer qu'ils ont vu le vicaire Gicquel chanceler et prêt à tomber par ivresse, et Julien Ribaud et Jean Le Forestier, de la Maladrerie, et Mathurin Le Forestier, du Mottais, raconter la même chose du curé Gouriou, avec force détails à l'appui. Les dépositions d'Anne Ramard, de la Maladrerie, et de Mathurine Neveu, ne sont pas moins édifiantes à l'égard des deux tristes ministres du culte constitutionnel, devenus curés de Saint-Juvat par la grâce des électeurs « patriotes » du district dinannais.

Nous devons à la vérité de déclarer que les deux inculpés n'acceptèrent pas sans protester les accablants témoignages de leurs ouailles.

Les administrateurs du district de Dinan ayant adressé à ceux du Département le procès-verbal rapporté par Forcoueffe, avec prière d'instruire de son contenu l'évêque des Côtes-du-Nord (Côtes-d'Armor), Gouriou et son vicaire rédigèrent à leur tour un mémoire assez bien tourné, du reste, où, laissant dans l'ombre une partie des faits qu'on leur reprochait, ils se disaient les victimes « d'un prétendu juge factieux ». Nous allons donner quelques extraits de leur réponse :

« M. Le Maire de Saint-Juvat, âgé d'environ 25 ans, écrivait Gouriou, nous a traité de « jeunes barbes », et mon vicaire d'« homme qui ne savait seulement pas lire... ». Il serait surprenant que mon vicaire, qui a mérité l'estime des plus honnêtes gens, qui a desservi des paroisses des cy-devant provinces d'Anjou, du Poitou et de Bretagne, qui a été aumônier sur terre et sur mer et le reste (sic), ne sût pas lire ! Quelle absurdité !

« On m’objecte, ajoutait Gouriou, que Mon vicaire ne sait point le chant. Mais je ne sache pas qu'aucun décret exige que les curés ou vicaires constitutionnels fussent obligés de savoir la note ».

Evitant ensuite de parler de l'histoire de la barrique de vin fournie par le sieur Lecoq, de Dinan, et si vite consommée en copieuses libations, Gouriou prend un ton indigné : « On me reproche d'avoir eu chez moi un pot d'eau-de-vie ! Mais quel mal y trouve-t-on ? Ah ! c'est qu'on ajoute que mon vicaire en a si copieusement bu qu'on a été obligé de le porter à quatre dans son appartement ! — Abominable calomnie, s'écrie-t-il, car, lui compris, nous n'étions que trois personnes à la maison : comment donc eussions-nous pu faire pour le porter à quatre dans sa chambre ? ».

Puis, passant à l'offensive, Gouriou déclare : « Nous sommes ici exactement sans pain ; au moins l'avons-nous été ces jours derniers. Nous avons été réduits à vivre de grosses galettes de blé noir, dont une personne respectable a bien voulu me faire les avances. Nous couchons sur la paille pure et simple. Une mince couverture nous met en partie à l'abri des injures de l'air. J'ai depuis peu une couette de plume d'emprunt à raison de mon infortunée maladie ; mon vicaire couche sur la paille sans cérémonie !

On nous refuse le pain et la viande, le bois, le sel et le tabac — en un mot, toutes les choses les plus nécessaires à la vie — parce que je n'ai point d'argent pour le moment.

On me fait un crime de n'avoir point enregistré l'extrait mortuaire d'une fille d'environ 9 ans, et d'un garçon âgé de près de 13 ans ; mais comment aurais-je pu les enregistrer, puisque les parents de ces deux morts ne sont pas venus à la sacristie, selon l'usage, se faire inscrire ? Après l'enterrement, ils se sont précipitamment retirés, et je ne les connais nullement ». (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 17).

L'évêque Jacob dut être fort embarrassé pour démêler la vérité intégrale dans cet amas d'affirmations contradictoires. La justification des deux moines en rupture de ban dut cependant, croyons-nous, lui paraître insuffisante, car, ne sachant quelle conduite adopter vis-à-vis d'eux, il n'hésita pas, lui évêque, à recourir pour une question de discipline ecclésiastique, aux lumières des laïcs qui composaient le Comité Ecclésiastique de la Constituante. (Archives Nationales, D XIX, 3).

La réponse très détaillée qu'il reçut de ces Docteurs de l'Eglise constitutionnelle n'apporta du reste aucune amélioration à la situation à Saint-Juvat, et la lutte, après comme avant, continua non moins vive entre la municipalité de cette commune et ses curés. Tout cela tant et si bien que le vicaire Gicquel, n'y tenant plus, prit le parti d'offrir ses services à l'évêque d'Ille-et-Vilaine à la date du 18 août 1791, laissant son compagnon Gouriou et les Juvatins se débrouiller ensemble.

Or, le malheureux curé intrus se débrouillait fort mal. Tout s'unissait pour l'accabler, y compris les autorités du District. C'est ainsi que celles-ci, en réponse à ses plaintes, lui présentent en exemple, le 19 août 1791, l'ex-capucin Chrétien, du Quion, et l'engagent à « savoir comme lui se faire aimer, respecter et chérir ».

La chose eût été difficile au curé de Saint-Juvat avec quelques unes de ses ouailles, dont certaines, telle Anne Camereuc, la servante de son prédécesseur, s'oubliaient jusqu'à le traiter de « chien » tout crûment.

Gouriou ne manqua pas de la dénoncer sans retard aux autorités dinannaises, mais celles-ci, désormais prévenues contre sa personne, se bornèrent à lui recommander la patience et le mépris de toutes ces misères : « Laissez, lui dit-on, la municipalité agir ». Mais celle-ci, visiblement excédée de la présence de Gouriou, ne souhaitait que son départ, si bien que le 27 septembre 1791, le curé de Saint-Juvat entra au Directoire du District et déposa sur le bureau « un mémoire en forme de dénonciation contre la municipalité de sa paroisse », mémoire dont le Directoire renvoya l'examen à sa séance de l'après-midi de ce même jour.

L'ex-père Gouriou ne manqua pas de revenir à l'heure indiquée et demanda qu'on expédiât son factum aux autorités départementales. Il réclama en même temps une garnison « pour le maintenir et le défendre contre les attaques journalières auxquelles il était exposé de la part de ses paroissiens ».

Or, celle-ci était à la vérité insoluble, et seul le départ de cet évadé du cloître pouvait clore la série de ses difficultés, difficultés du reste imputables, nous l'avons vu, autant à ses vices personnels qu'à sa fausse situation de pasteur intrus.

Gouriou comprit enfin cette solution à la longue, et le 21 novembre 1791, la municipalité de Saint-Juvat, après avoir constaté « que le sieur Gouriou a vendu ses effets clandestinement dans la nuit du samedi au dimanche 19 novembre, avisait en conséquence le Directoire du District de l'évasion de son curé », qui s'était retiré à Saint-Brieuc. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 24).

Avec le départ de celui-ci, prit fin à Saint-Juvat le culte constitutionnel. Ce fut en vain que, le 6 septembre de l'année suivante, les électeurs du District prirent la peine d'élire à cette cure, par 40 voix sur 43 votants, le sieur MATHURIN LE GOFF, de Pléboulle, où il était né en 1766 du mariage de Jacques et de Rose Bertrand. Ce jeune prêtre, récemment ordonné par Jacob, et alors vicaire à Matignon, ne voulut point accepter Saint-Juvat, et l'histoire est là pour nous apprendre que les Juvatins n'eurent pas lieu de regretter son refus de s'en aller leur porter la bonne nouvelle.

Quant à Gouriou, nous le retrouvons en 1792, le 15 du mois de juin, réclamant encore près des autorités du Département « ses meubles, qu'il prétendait la municipalité de Saint-Juvat lui avoir retenus » [Note : Elle avait empêché les acquéreurs de les enlever, prétextant que Gouriou avait dilapidé les arbres du jardin du presbytère]. En juillet 1793, un François Gouriou, qualifié capucin de Dinan, recevait une pension du district de Lannion, et pourrait bien être notre personnage, alors émigré en la partie bretonne. En tout cas, nous ne pouvons douter qu'il séjourna quelque temps à Plerneuf, où le registre classé L 260 aux Archives des Côtes-d'Armor, signale sa présence en germinal an II, et nous apprend qu'il était pourvu d'une carte de civisme depuis frimaire de cette même année (décembre 1793). Nous savons même, grâce aux auteurs du Diocèse de Saint-Brieuc, etc., op. cit., I, p. 66, que l'ex-père Gouriou était connu dans cette paroisse sous le nom de Brico et qu'il trouva moyen de scandaliser le maire, tout révolutionnaire qu'était celui-ci, en voulant célébrer un jour la messe sans être à jeun.

Lors des décrets de Le Carpentier, Gouriou fut emprisonné à Guingamp et s'y trouvait encore le 10 vendémiaire an III, date à laquelle il réclamait sa liberté. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 61).

Enfin, deux ans plus tard, nous retrouvons Gouriou, qualifié vicaire et réfugié à Saint-Brieuc à cause de la chouannerie, recevant dans cette ville une pension en mars-avril 1796.

Lors de la réorganisation du culte en France, Mgr. Cafarelli, peu désireux de conserver un semblable collaborateur, accorda le 16 juin 1803 à Jean-François Gouriou, alors fixé à Saint-Brieuc, un exeat définitif pour quitter son diocèse, et nous ignorons vers quels cieux l'ex-capucin dirigea ses pas. (Cf. sur cet ecclésiastique aux Archives municipales de Dinan, le premier registre de délibérations et le premier registre de correspondances du district de cette ville. Cf. Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 17, 20 et 23).

MICHEL-GUILLAUME GICQUEL, vicaire, naquit dans le Finistère le 6 septembre 1745. Il était capucin de la maison de Guingamp en 1790, et profès depuis 1762, lorsqu'il exprima à cette première époque sa volonté de sortir du cloître. Amené à Saint-Juvat par son confrère Gouriou, nous venons de voir que devant le scandale causé par sa conduite, il dut abandonner ce poste le 18 août 1791 et offrir ses services à l'évêque d'Ille-et-Vilaine. Celui-ci le nomma trois jours après vicaire à Bourg-des-Comptes, puis curé provisoire à Poligné le 19 janvier 1793. Le 24 ventôse an II (4 mars 1794), il remettait ses lettres de prêtrise au district de Bains, mais refusait de se marier, ce qui lui valut son arrestation le 14 germinal (3 avril 1794) et sa réclusion au Mont-Saint-Michel jusqu'au 23 décembre de la même année.

Dès lors, réfugié à Rennes, rue Vasselot, il signa sa soumission aux lois de la République, et, l'an IV, rue des Jeunes Nantais, il prêta le serment du 7 vendémiaire. Bientôt, se dirigeant sur Saulnières, il s'y installa et ouvrit un cayer (sic) de catholicité qui commence le 25 décembre 1796. Il administrait simultanément le Petit-Fougeray, où de temps à autre il allait dire la messe. Il signe pour la dernière fois le 27 octobre 1799 et s'en fut à Rennes pour se faire soigner. Une fois guéri, il essaya de se faire incorporer dans le diocèse du Loir-et-Cher, mais Le Coz écrivit à son collègue Grégoire : « Vous aurez bientôt un certain Gicquel, ex-capucin, qui, après avoir beaucoup scandalisé dans ce pays, l'a quitté en volant à l'hôpital le prix de sa pension, qu'on lui avait avancée. Je ne vous conseille nullement de peupler votre diocèse de pareils sujets ». Gicquel se tourna alors vers Dordolot, évêque de la Mayenne, lequel lui confia dès 1799 la cure de Blandouet, où il mourut en 1805. [Renseignements fournis par M. l'abbé Leray, ancien recteur de Moutiers (Ille-et-Vilaine)].

 

APPENDICE.

Deux lettres écrites par le district de Dinan à la municipalité de Saint-Juvat, peu après le départ de Gouriou, nous documentent sur la situation faite aux catholiques de cette paroisse, lesquels, après l'expérience qu'ils venaient de faire du culte et des curés constitutionnels, n'en voulaient plus entendre parler, et furent cependant obligés, durant toute l'année 1792, de s'adresser à l'ex-capucin Chrétien pour leurs baptêmes et leurs mariages.

Nous reproduisons intégralement ces deux pièces, puisées aux Archives municipales de Dinan.

Le 24 novembre 1791, les administrateurs écrivaient les lignes ci-dessous :

« Le nommé Michel Gautier est venu nous demander quel parti il avait à prendre, étant sur le point de se marier, vu le départ du sieur Gouriou et la fermeture de votre église.

Il est absolument nécessaire que vous avisiez aux moyens à prendre pour que ce mariage ne souffre aucun retard. Il serait prudent que vous priassiez M. Chrétien, curé du Quiou, de recevoir les promesses de ce mariage et d'envoier M. Prioul (voir article Le Quiou) vous dire la messe et publier les bans, car pensez toujours qu'il ne peut en aucun temps être permis qu'aux prêtres constitutionnels de faire les fonctions curiales ».

« Nous sommes instruits que le curé du Quiou (Chrétien), qui, dans l'absence du sieur Gouriou, votre curé, a dû aller dans votre paroisse pour y recevoir une promesse de mariage, y a été insulté. Vous ne devez pas ignorer, messieurs : 1° que pour assurer l'état des personnes, il est nécessaire que les formalités usitées pour la célébration des mariages, baptêmes et sépultures, y soient célébrées en conformité de la loi ; 2° que les curés et vicaires remplacés ne peuvent s'immiscer en aucune manière dans les fonctions curiales, sous peine d'être poursuivis suivant la rigueur des lois...

Vous devez donc inviter le curé constitutionnel le plus voisin et, bien loin de souffrir qu'il soit en aucune façon insulté, vous devez le protéger de toutes vos forces, étant personnellement responsables du mal qui peut lui arriver par votre négligence ». (A. Lemasson).

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