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DEUX CURES SOUS LA REVOLUTION A SAINT-THEGONNEC

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Deux Curés. — Abjean et Alanet.

L'Assemblée Constituante décréta le 27 novembre 1790 que tous les évêques et curés qui n'auraient pas fait, sous huit jours, le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé, seraient censés avoir renoncé à leurs fonctions. La presque totalité de l'épiscopat français et la très grande majorité du clergé séculier refusèrent de prêter serment à une Constitution déclarée schismatique par le pape Pie VI, le 10 juillet 1790.

Les prêtres de Saint-Thégonnec : René-Marie Abjean, recteur, Guy Cras et Robert Tanguy, vicaires, se montrèrent fidèles au jour de l'épreuve. Sur leur refus de prestation de serment ils furent décrétés d'arrestation. Le recteur et l'un de ses vicaires Robert Tanguy furent conduits à Brest, au couvent des Carmes, le 11 juillet 1790. Guy Cras ne fut arrêté qu'en janvier 1792.

Le 13 septembre le Roi, après une nouvelle acceptation de la Constitution, fit porter à l'Assemblée par ses ministres un message qui se terminait par cette phrase : « Pour que la loi puisse d'aujourd'hui commencer à recevoir une pleine exécution, consentons tous à l'oubli du passé. Que les accusations et les poursuites qui n'ont pour principe que les événements de la Révolution soient éteintes dans une réconciliation générale ».

La grande majorité de l'Assemblée couvrit d'applaudissements la lecture de ce message, et l'amnistie fut votée d'acclamation.

Le Département fut donc obligé de rendre la liberté aux prêtres détenus aux Carmes. Il le fit par son arrêté du 22 septembre 1791, rédigé avec tant de restrictions qu'il était facile de prévoir que la liberté rendue aux prêtres fidèles ne serait pas de longue durée. Les prêtres réfractaires avaient ordre de se tenir à quatre lieues de leurs anciennes paroisses. René-Marie Abjean, remis en liberté le 27 septembre, émigra en Angleterre.

La paroisse de Saint-Thégonnec, en l'absence de son légitime pasteur, fut pourvue d'un nouveau curé qui avait eu soin de se mettre en règle avec la Constitution civile du clergé. Il fut loin d'y recevoir un accueil triomphal, et pendant les deux années qu'il voulut gouverner cette paroisse on lui fit voir qu'on ne le reconnaissait que pour un intrus. Les officiers municipaux, d'accord avec la population, manifestaient à l'occasion leur antipathie pour le curé assermenté.

« 16 octobre 1791. Municipaux de Saint-Thégonnec à District. Le sieur Alanet, curé constitutionnel de cette paroisse, a aujourd'hui, au prône de sa grand'-messe, dit qu'il avait sur la semaine trouvé attaché à sa porte un écriteau par lequel on le menaçait de faire couler son sang. Alors, prenant cet air et ce ton menaçant qu'il a toujours dans la chaire, il a dit qu'il était aux trousses de l'auteur de cet écriteau, et que pour faire voir qu'il n'avait pas peur il déclarait que, passé ce jour, il défendait au sieur Drolac'h de dire aucune messe.

Le même jour, après la grand'messe, Pierre Fichou maire, Jean-Marie Pouliquen, Gabriel Cam, François-Marie Cotain et Jacques Le Guen, ces quatre derniers officiers municipaux, se sont trouvés dans l'église quand le sieur Alanet y a arrêté le sieur Drolac'h, prêtre, qui y était venu pour dire la messe. Le sieur Alanet a enjoint au sieur Drolac'h de rester au milieu de l'église, jusqu'à ce que lui, sieur Alanet, eut dit en chaire ce qu'il avait à dire. Alors le sieur Drolac'h ayant déféré à cette injonction, le sieur Alanet a dit en chaire que, de sa part d'abord et ensuite de la part de l'Evêque du Finistère, il interdisait le sieur Drolac'h et qu'il n'aurait plus à célébrer de messes.

Sur ces propos, il s'est élevé une grande rumeur parmi le peuple, qui était très nombreux dans l'église. Le sieur Alanet, ayant descendu de chaire, s'est mis à genoux auprès de l'autel de la Vierge, où il s'est trouvé entouré d'une infinité de personnes qui le menaçaient ; on a entendu entr'autres une voix, qu'aucun de nous n'a pu reconnaître, qui criait : " Il y a trop longtemps que celui-ci embarrasse cette paroisse, que l'on tombe dessus ! ". Le maire s'est interposé et a enjoint à tout le monde de se retirer chacun en sa place ; il a ensuite escorté le sieur Alanet jusqu'à la sortie de l'église, étant précédés et suivis d'une foule de monde qui, en murmurant, paraissait toujours menacer le sieur Alanet, qui s'est retiré en son presbytère.

Nous croyons devoir vous faire observer que le sieur Drolac'h a dit sa messe les dimanches et fêtes à cinq heures et demie du matin ; le sieur Alanet se plaignit alors parce qu'il disait la messe avant celle du vicaire constitutionnel à six heures. Sur ces plaintes, nous priâmes le sieur Drolac'h de la dire à huit heures ; le sieur Alanet encore mécontent, nous priâmes le sieur Drolac'h de dire sa messe après la grand'messe.

Tout le monde assure, Messieurs, qu'on ne sait pas comment le sieur Alanet se serait tiré de cette scène qui s'est passée aujourd'hui à l'église, si M. le Maire ne s'y était trouvé pour apaiser le peuple. Nous vous prions d'écrire au sieur Alanet pour lui rappeler les limites de ses droits et la modération qui convient à un ministre de l'Evangile ».

Le District de Morlaix avait reçu de son côté une plainte du curé constitutionnel Alanet, et le 21 octobre, il ordonna que « le 23 octobre, dimanche, on enverrait à Saint-Egonnec deux gendarmes et deux autres à Pleyber-Christ, dont le ci-devant recteur Gall est le centre de la coalition formée dans ce pays contre les prêtres conformistes ; qu'on tiendrait soixante hommes de la garde nationale prêts à marcher, s'il y a besoin dans l'une ou l'autre de ces paroisses de la force armée pour y faire maintenir l'ordre, le respect aux lois, à la religion et à ses ministres ».

Nous venons de voir, d'après cette lettre des officiers municipaux que Saint-Thégonnec, outre un curé constitutionnel, avait aussi un vicaire assermenté. C'était Guillaume Charles, ancien vicaire de Plouneour-Ménez. Charles remplaça Guy Cras arrêté à Saint-Thégonnec le 13 janvier 1792 et détenu à la prison du Château à Brest, en même temps que quatre-vingts de ses confrères. Le Département était pressé de se débarrasser de ces prêtres qui étaient pour lui l'occasion de tracasseries continuelles, à raison de pétitions et contre-pétitions dont ils étaient l'objet. Le 1er juillet 1792, il prit un arrêté qui autorisait les prêtres détenus au Château de choisir entre la permanence en arrestation ou la déportation en pays étranger ; le Département espérait bien que la majeure partie fatiguée du régime dur de la prison, choisirait comme une délivrance la déportation. Il n'en fut pas ainsi et tout d'abord la grande majorité se déclara pour la permanence.

Le Directoire du Département, sans tenir compte des réclamations et observations des prêtres, envoya à Brest des commissaires pris dans son sein avec mission d'organiser le départ des détenus et de faire en sorte que le nombre des déportés fût le plus considérable possible.

Le 4 août 1792, Guy Cras, vicaire à Saint-Thégonnec, opta pour la déportation, et fut embarqué sur le navire le Jean-Jacques pour Saint-Ander, en Espagne.

M. Jacques Coat. — Les poursuites contre les prêtres réfractaires continuaient dans toutes les paroisses. Le Département, dans son arrêté du 18 août 1792, après avoir accordé « une prime de 72 livres sur la caisse destinée aux frais du culte, à quiconque conduirait au district le plus voisin de sa résidence, un prêtre non assermenté », ajoutait : « Les prêtres non septuagénaires ni infirmes actuellement détenus à Audierne, ou qui seront arrêtés à l'avenir, seront transférés au château du Taureau ».

En conséquence de cet arrêté, entrait au château le 4 septembre, M. J. Coat, recteur de Lesneven, mais il ne demeura pas au château du Taureau jusqu'à la déportation. Le 4 novembre 1792, il écrivait au district de Morlaix : « Je me nomme J. Coat, né à Saint-Thégonnec le 18 mai 1723. J'ai été 25 ans recteur de Lesneven, je me suis retiré de cette ville avant le 22 juillet 1792, jour de l'installation du citoyen Pochard ; pour obtempérer à l'arrêté du Département, j'ai fixé mon domicile à Saint-Thégonnec, à six lieues de Lesneven ; je demande mon élargissement, ou du moins que vous me transfériez à Quimper pour rejoindre mes confrères septuagénaires ». On dut déférer à cette juste réclamation et M. Coat ne figure pas sur la liste des prêtres déportés du château du Taureau à Brême, le 17 avril 1793. M. Coat avait été vicaire à Saint-Thégonnec en 1758. Un de ses parents, son frère peut-être, périt dans les noyades de Nantes le 17 novembre 1793. (F. Quiniou).

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