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HISTOIRE DE L'EGLISE DE SAINT-THEGONNEC

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Saint-thégonnec (Pleiber-Saint-Tégonec, Saint-Égonec) est plus célèbre son clocher et ses annexes que par son église, œuvre assez médiocre et faite par morceaux. Toutefois, elle mérite d'être examinée, parce que, grâce à la consciencieuse étude de M. l'abbé Quiniou et à sa complaisance qui m'a permis de chercher dans les précieuses archives de la paroisse quelques renseignements complémentaires, elle est désormais presque entièremat datée.

Saint-Thégonnec possédait, à la fin du moyen âge sous le vocable de « Notre-Dame de Vrai Secours », une petite église à collatéraux dont nous ne savons pas la date, car elle ne nous est connue que par quelques pièces d'archives relatives aux enfeus qui en tapissaient les murs. Cet édifice subit des remaniements au commencement du XVIème siècle. La chapelle seigneuriale du Herlan, située au sud du chœur, dont il est question en 1494, se retrouve bien en 1539, mais, en 1540, on refait un pignon, peut-être le chevet, très probablement plat, dans une église aussi peu importante. En 1557, elle s'augmente, du côté de L'Evangile, d'une chapelle latérale, au-dessous d'une chapelle plus grande précédemment construite. En 1563 s'éleva le clocher-porche occidental, seul témoin encore debout de ce cycle de constructions.

Mais bientôt les paroissiens de Saint-Thégonnec conçurent des desseins plus grandioses. Pleyben achevait de monter, sur la façade méridionale de son église, une tour monumentale dont ils étaient jaloux. Ils s'en inspirèrent manifestement, vers 1595, pour accoler un clocher semblable à la petite église, sans s'embarrasser de la disproportion. On y travailla au moins jusqu'en 1626. Malhenreusement, le nom de l'architecte [Note : Jacques Leuzenes, qui travaille à la tour en mai 1626, n'est qu'un « maçon » payé le même prix que les autres « picoteurs », 10 sous par jour], qui dut bâtir aussi le clocher de Pleyben, ne figure pas dans les comptes, très incomplets pour cette période.

En 1640, l'égalise, se trouvant trop petite pour la population, fut élargie de huit pieds et demi par le bas-côté nord, dont Paul Prediry et Mathurin Renault, maîtres tailleurs de pierre, construisirent le nouveau mur [Note : Archives paroissiales de Saint-Thégonnec, acte pronal du 13 mars 1639 et procès-verbal du 3 juin 1640. Le bas-côté nord n'a rien de gothique, comme on l'a écrit et répété]. Les fenestrages « formures », sortis de l'atelier de Jean Le Bescont, sculpteur, furent transportés tout faits de Landerneau it Saint-Thégonnec et remontés en 1651, ainsi que la vitrerie. Cette campagne ne se termina qu'en 1652 par la couverture en ardoises et le lambrissage, en berceaux transversaux.

De 1653 à 1658, même élargissement, de la partie du bas-côté sud qui se trouve à l'est du nouveau clocher-porche, avec rélection des grandes, arcades. Un seul remplage neuf fut commandé à Landerneau ; pour les deux autres fenêtres, on dut réemployer des remplages anciens. Jaques Hamon et Hervé Bourriguen, « maîtres-vitriers », furent chargés de la vitrerie.

De 1653 à 1658, on agrandit la partie occidentale du bas-côté sud et le clocher fut englobé dans œuvre. Toutefois, les nouvelles arcades se trouvaient encore en dedans du clocher et retombaient, de chaque côté de la nef, sur cinq piliers, ainsi qu'en témoigne une pièce de procédure datée de 1671. Cette rois, les remplages furent taillés à pied d'œuvre, la vitrerie confiée au sieur Martin (1666).

Après le bas-côté sud, les paroissiens de Saint-Thégonnec s'attaquèrent au chevet. Guillaume Pledran, « maître picoteur », fut chargé de le remplacer par de nouveaux pignons, avec de nouvelles « fenestres donantes sur les deux boutz du grand autel », c'est-à-dire presque certainement par une abside à trois pans, contemporaine de Guimiliau (1664) et Sizun (1665). La grande baie à trois meneaux de l'ancien chevet et sa verrière, « avec dix soufflets et une rose en forme de poire au-dessus » représentant les scènes de la Passion sous les armoiries de France, de Bretagne et de Penhoët, y furent réemployées. Cette construction, y compris la charpente, occupa les années 1667 à 1609.

Elle fut immédiatement suivie d'un exhassement du bas de l'église, motivé par l’installation de nouvelles orgues (1670). Ici se place, pour les travaux du gros-oeuvre, une, interruption de près d'un demi-siècle, qui fut occupée par les annexes et le mobilier, dont nous parlerons tout à l'heure.

Ainsi, dès cette époque, sauf le clocher-porche occidental, l'église avait été entièrement renouvelée. Mais l'ambitieuse paroisse ne devait pas en rester là. La nef, qui ne recevait pas d'éclairage direct, était basse et obscure. Ce fut un prétexte pour la remanier complètement. Cette campagne fut la dernière et aboutit à l'état actuel de l'église.

L'entreprise fut adjugée .en 1713 à Étienne Le Marchand, architecte, sur présentation de ses plans et devis moyennant 14.200 livres, mais lui fut retirée, en 1716, après expertise constatant qu'il n'avait pas satisfait aux conditions du contrat. La fabrique continua les travaux en régie, sans reprendre toutefois tout ce qu'elle avait condamné, ni même achever tout ce qui figurait au devis primitif. Au total, les grandes arcades furent refaites, la nef élargie jusqu'à la face intérieure du clocher sud, surhaussée, pourvue de fenêtres hautes et terminée par un faux transept. L'abside, qui n'était plus dans l'axe depuis le déplacement entier du bas-côté sud, fut encore reconstruite, mais à cinq pans cette fois. Les gâbles qui devaient en faire l'ornement extérieur ne furent jamais exécutés. Le bas-côté sud fut, en outre, retouché par Le Marchand, au moins quant à ses fenêtres. En revanche, le percement de deux baies dans le bas-côté nord, l'une sur la façade occidentale, l'autre dans le troisième pignon, resta à l'état de projet, que la mise au carré de la chapelle des fonts, qu'un passage extérieur voûté en berceau ampute encore aujourd'hui de son angle sud-ouest. La fabrique se contenta d'y percer une porte, actuellemet murée, donnant sur la facade occidentale. La charpente était l'œuvre de Lazare Flutter.

 

Intérieur. — Ainsi transformée, l’église comprend une nef de cinq través, deux bas-côtés, mais celui du sud est interrompu par le soubassement du clocher, dont le porche s'ouvre directement sur la nef ; un faux transept sans saillie, séparé des bas-côtés par un arc-diaphragme relancé entre la dernière pile de la nef et un contrefort intérieur ; enfin, dans l'axe, un chœur à cinq pans.

Les piles de la nef sont cylindriques et les arcades, sans moulures, décrivent une courbe en plein cintre. Les parements de moellon sont recouverts d'un enduit. La charpente lambrissée épouse la forme d'un berceau surbaissé, sans entraits, ni poinçons. Les travées sont de largeur variable comme dans toutes les églises que nous avons décrites, car les maîtres maçons ne paraissent pas avoir abusé de l'épure.

Le clocher occidental, seul vestige de l'église du XVIème siècle, percé d'un porche et d'une fenêtre moulurée en doucine extrêmement étroits, n'est plus dans l'axe de la nef, mais se trouve beaucoup plus rapproché du bas-côté nord. Comme on sait que la muraille fut déplacée de 2m 75 et que le clocher, commencé en 1599, s'appliquait, à l'origine sur l'ancien bas-côté sud, il est facile de restituer l'emplacement de l'église du XVIème siècle, dont la largeur intérieure n'excédait pas au total 12m 50 à 13 mètres, soit, environ 9m 50 de moins que l'édifice atuel.

Le bas-côté nord est éclairé par quatre fenêtres en cintre brisé, au droit, des première, deuxième, quatrième et cinquième travées ; une porte sous un petit oculus s'ouvre dans la troisième. La baie voisine du faux croisillon, plus large et plus courte que les autres, où se profile un cavet au lieu d'une doucine, est peut-être antérieure à cette campagne (1640-1652). Les remplages sont dépourvus de redents.

Les deux dernièmes travées du bas-côté sud, placées à l'est du clocher principal, sont éclairées par des fenêtres en plein cintre à remplages métalliques refait au commencernent du XVIIIème siècle. Une porte basse s'ouvre près du clocher, dont les niches décoratives, enchâssés dans les constructions du collatéral, suffiraient à prouver l'élargrissement de l'église en l'absence de tout texte. Les trois premières travées ont perdu leurs piles pendant les travaux d'agrandissement du XVIIIème siècle. La troisième est entièrement occupée par le clocher. L'emplacement des deux premières, séparé de la nef par un mur de refend percé d'une arcade, constitue la chapelle des fonts baptismaux, limitée au sud-ouest par un pan coupé qui correspond au curieux passage voûté extérieur.

Une petite porte en anse de panier donné accès à la vis du clocher occidental.

Les bas-côtés sont lambrissés en berceaux transversaux pour lesquels les comptes rapportent qu'on employait des « fustails de barriques ».

A noter, dans la nef, un bénitier intérieur faisant corps avec le soubassement du clocher sud, dont la cuve et le lonternon sont godronnés et les colonnes lisses à tailloirs sans chapiteaux.

 

Extérieur. — L'église est construite en granit appareillé provenant de la Montagne d'Arrée.

La façade occidentale porte les traces des remaniements que nous avons signalés et qui suffiraient à prouver, en l'absence des comptes, l'élargissement successif des deux bas-côtés. La porte en anse, de panier — aujourdhui murée — percée à droite du porche est celle que l'expertise de 1716 reproche à Étienne Le Marchand de n'avoir pas établie conformément au devis et dont la fabrique se chargea évidemment par la suite. Quant au porche, très étroit, il s'ouvre à la base du petit clocher barlong, entre deux contreforts, et porte la date de 1563.

Les murs et la toiture de la nef du XVIIIème siècle emboîtent complètement la tour du rez-de-chaussée, directement couronnée par la plate-forme en encorbellement. La cage ajourée, très réduite en hauteur, porte une flèche octogone à crochets frisés sur les arêtes et flanquée de lucarnes sur les faces orientées. Sur les autres faces, des pinacles rachètent le plan carré, et quatre clochetons analogues chargent, à l'étagé inférieur, les angles de la balustrade.

Ce petit clocher, dont la balustrade et les gâbles sont inspirés de la Renaissance, dérive évidemment du clocher de Guimiliau, qui est plus ancien.

L'élévation nord n'est pas sacrifiée, contrairement à l'usage de la région. Une série de pignons, à l'extrémité des toits transversaux qui recouvrent le bas-côté, simulent des chapelles latérales. La nef est dépourvue d'arcs-boutants. Le collatéral est simplement épaulé, entre chaque pignon, par des contreforts décorés de moulures et de niches à frontons : des gargouilles déversent les eaux de pluie, au droit des noues.

Une porte en plein cintre, à fronton triangulaire et pilastres cannelés, s'ouvre sous un oculus sous le troisième pignon. Une autre porte en plein cintre, condamnée, se voit dans l'angle ouest du pignon qui précède le transept. Malagre la date avancée — 1640-1652 — toute cette disposition est inspirée des traditions gothiques. La décoration seule dérive de la Renaissance : lanternon en guise de fleuron à la pointe des gâbles, crochets en doubles volutes, interprétés des postes antiques, sur les rampants.

Une haute baie en plein cintre s'ouvre dans le croisillon nord, bâti vers 1714 et dépourvu de décoration.

Dans l'angle de ce croisillon et de l'abside à cinq pans, Guillaume Tauc logea, de 1685 à 1690, la sacristie actuelle. Elle remplaça deux sacristies antérieures, dont la dernière avait été terminée vers 1668. Les sacristies monumentales étaient appréciées par le clergé breton : celle-ci, de plan rectangulaire, est flanquée de contreforts d'angle amortis par des lanternons et décorée de moulures.

Les pièces relatives aux travaux du XVIIIème siècle n'indiquent pas clairement la part de l'élévation latérale sud. J'incline à penser qu'elle avait dejà été mise à l'alignement du clocher, en 1658, à l'est, en 1665, à l'ouest, et fut seulement remaniée, en 1714, lors de la réfection de la nef. Les pignons, disposés comme au nord, supportent des toits transversaux, gauchement collés sur la face occidentale du clocher-porche ou logés entre sa face orientale et le croisillon.

Les contreforts, sauf deux exceptions, sont amortis par de petits lanternons à cheval sur les gargouilles. A la fin du XVIIème siècle, un passage voûté en berceau a été percé en biais dans la masse de l'angle sub-ouest pour permettre aux processions de faire le tour du cimetière, car l'église agrandie est tangente en ce point à l’enclos, dont les limites ne dépassaient pas celles d’aujourd’hui. Les pilastres cannelés que flanquent une porte en plein cintre, à droite du clocher, correspondent à un fronton supprimé au XVIIIème siècle.

Le résultat de tous ces remaniements est fâcheux. Il eût fallu agrandir l'église avant de bâtir le clocher, que méritait mieux.

Plus encore que le clocher de Gouiven (1593), amorti par une flèche octogone, il dérive directement de la tour de Pleyben (1588), qu'il a suivie de près. On relève dans le porche les dates de 1599 et de 1610 ; à l'extérieur, on lit celle de 1603 ; plus haut, sur le cadran solaire, 1606. Les comptes prouvent d'ailleurs que la construction n'était pas terminée en 1626, et une statue d'apôtre du porche porte le millésime de 1632.

Ce qui caractérise ce clocher, comme celui de Pleyben, c'est l'importance extraordinaire de la tour carrée qui précède une large plate-forme, en encorbellement au-dessus de la cage, où s'élève un tambour octogone, cantonné de quatre clochetons, surmonté d'un dôme et d'un lanternon. On voit que, malgré le changement considérable de la silhouette, la tradition du clocher gothique est sensible. Les contreforts en équerre de chaque angle, qui, à Pleyben, s'arrêtent au soubassement, montent jusqu'à la plate-forme. Une seule baie, au lieu de deux à Pleyben, s'ouvre dans chaque face de la cage. Des bandeaux moulurés ceignent à divers intervalles la tour et ses contreforts.

A la base des contreforts de la façade extérieure et des faces actuellement enchâssées dans l'église, l'architecte a ménagé des niches sous des lanternons à deux étages de colonnettes, reposant eux-mêmes sur deux colonnes lisses, et qui rappellent par leur importance les grands dais gothiques. Les prototypes de ces dais se trouvent à l'intérieur du porche de Pleyben.

Dans ces niches, sur la façade, de gauche à droite, on voit les statues suivantes : saint Jean l'Évangéliste assis. L'aigle tient dans son bec un écritoire, comme au calvaire de Guimiliau. Cette statue porte sa date (1625) et la signature du sculpteur : R. DORE : MA : FAICT. M. Abgrall a signalé cette même signature sur les fonts baptismaux de Plouédern ; l’ange Gabriel, à genoux, le lis à la main, faisant face à la Vierge, agenouillée, qui complete le groupe de l'Annonciation. Les noms inscrits sur les socles sont des noms de donateurs. Saint Nicolas et les enfants au saloir terminent la série.

Entre les contreforts de facade, un portique à deux étages et colonnes corinthiennes encadre le porche. Au milieu de l'étage supérieur, une niche contient la statue de saint Thégonnec avec le chariot de sa légende. En dessous, une arcade en plein cintre à double ébrasement, dont la voussure intérieure retombe sur des colonnes cannelées et ornées de bagues, selon la mode récente due à Philibert Delorme. Intérieurement, le porche offre les dispositions habituelles.. Lors de sa construction, il faisait, selon la règle, saillie sur l'ancienne église. La voûte sur croisée d'ogives a été refaite récemment, mais les sommiers témoignent du profil : tore aplati à filet saillant relié de chaque côté par un talon à la voussure extérieure, seulement épannelée. Les parois latérales sont garnies de bancs de pierre et de douze niches pareilles à celles de l'extérieur, à l'exception des chapiteaux traités selon l'ordre corinthien, et destinées aux statues d'apôtres, qui ne sont plus que quatre : saint Jacques, saint Pierre, saint-Thomas et son épieu, saint Jean et son calice. Ces niches reposent sur une corniche moulurée sous laquelle court une frise ornée de motifs en relief : masques de femme ou de lion, volutes, feuilles stylisées, etc. Dans l'angle nord-est, un bénitier porte la date de 1599. Contrairement à l'usage, une seule porte en plein cintre s'ouvre, comme à Pleyben, dans le mur de fond, sous un portique à colonnes ioniques cannelées, dont l'entablement à frise bombée et à denticules reçoit la décoration du tympan. Deux cariatides engaînées, soulevant des chapiteaux ioniques, servent de support au fronton courbe chargé de trois cassolettes godronnées et sous lequel une niche abrite la Vierge et l'Enfant. Ce porche avait été percé latéralement pour le passage des processions à l'intérieur de l'église depuis qu'il interceptait le bas-côté. Il a élé remis dans l'état primitif à la, fin du XIXème siècle.

Le croisillon sud et le chevet sont nus comme le croisillon nord. C'est le travail condamné d'Étienne Le Marchand, en 1714, économiquement achevé par la fabrique.

Les cinq pans de l'abside étaient probablement destinés à recevoir des gâbles décorés.

Le mur de chevet du croisillon sud offre des traces de portes condamnées et des pierres d'attente qui font penser à d'anciennes annexes détruites, probablement une des sacristies dont, il a été question plus haut.

 

Mobilier. — Après l'agrandissement de 1714-1716, la fabrique voulut décorer la nouvelle abside. Elle eut l'heureuse idée de renoncer aux retables monumentaux, qui masquent les vitraux, et se contenta de faire poser des boiseries sur les murs. D'après les comptes, le côté de l'Évangile fut dessiné par Boismaurin, sculpteur de Lampaul, et exécuté, moyennant plus de 2.000 livres, entre 1724 et 1725, par Jacques Lespaignol, le maître sculpteur de Morlaix dont il a été question à Saint-Jean-du-Doigt. Le Goff, de Brest, acheva le côté de l'Épître, de 1730 à 1732, sur le dessin de Robellain, de Morlaix, et reçut plus de 4.000 livres. IL fit, en outre, moyennant 300 livres, un tableau pour le milieu du retable, sur un dessin de Boismaurin. Il semble, étant données les sommes déboursées, qu'il faut attribuer à Le Goff une part plus considerable qu’à Lespaignol, peut-être la partie centrale, les hautes colonnes qui flanquent la baie d'axe et le tympan qui la surmonte.

Des guirlandes, des pilastres, des trophées religieux, etc., sont les éléments de cette décoration, qui s'étend jusque dans le transept au-dessus des retables d'autels des croisillons.

S'il faut en croire M. l'abbé Quiniou, le dossier du triple siège placé dans le chœur pour le célébrant et ses assistants proviendrait du maître-autel et serait le dernier des travaux énumérés ci-dessus. On y voit, au centre, des panneaux garnis de guirlandes, d'entrelacs et d'angelots en relief, trois médaillons représentant, le Sacrifice d'Abraham, le Sacre de David par Samuel et la Prophétie de Gad au même roi. Toute l'ornementation de l'abside a été repeinte et doréé en 1834.

Le retable de l'autel du Saint-Sacrement, aujourd'hui autel du Sacré-Cœur, dans le croisillon sud, fut sculpté, en 1662-1664, par Gabriel Garquain, et payé 438 livres ; il provient d'un précédent maître-autel et subit quelques retouches en 1726 et 1732. La peinture et la dorure valurent davantage, 888 livres, à Guillaume Bourriguen, peintre à Morlaix. Des pilastres superposés, ornés de fleurs et de fruits, et une corniche à denticules le divisent en deux étages et six compartiments. En haut, l'Adoration de la Sainte Hostie par les anges ; en bas, un tableau de la Nativité entre les statues de la Vierge et de saint Thégonnec dans des niches.

Le retable du Rosaire, dans le croisillon nord, est l'œuvre de Jacques Lespaignol (1697-1700), reprise en 1724. Quatre colonnes corinthiennes de marbre noir reçoivent l'entablement de l'étage inférieur, qui, à l'origine, devait en posséder six, avec un tableau central peint par Alain Bourriguen.

Au centre, le groupe de saint Dominique et sainte Catherine recevant le Rosaire, sous un fronton courbe, encadré des quinze mystères du Rosaire, est probablement une refaçon. Le second étage dispose les mêmes colonnes de part et d'autre d'une représentation du Purgatoire, sous un entablement à ressauts et un fronton à pans. Le Christ, entouré de têtes d'anges, reçoit une âme délivrée des flammes du Purgatoire par les prières de saint Dominique et de sainte Catherine. Les niches latérales inférieures contiennent les statues de saint Paul-Aurélien et saint Jaoua ; les niches supérieures, saint Louis et un ange gardien.

Les retables de Notre-Dame de Vrai-Secours, dans le bas-côté nord, et de saint Jean-Baptiste, dans le bas-côté sud, sont moins importants. Les colonnes torses à pampres du premier, peint en 1668, font valoir une statue vénérée de Notre-Dame de Vrai-Secours, patronne de la paroisse avant saint Thégonnec.

La chaire à prêcher tranche sur la production moyenne des artistes bretons au XVIIème siècle. Elle fut sculptée Landivisiau, en 1683, par François et Guillaume Lerrel, père el fils, artistes véritables, dont le nom mérite d'être retenu avec celui de l'architecte de l'ossuaire. L'abat-voix date de 1722.

Cette chaire à pans coupés repose sur une base de pierre par un cul-de-lampe orné de six consoles à double enroulement, de moulures sculptées, de couronnes, guirlandes, entrelacs et draperies. Les quatre vertus cardinales sont assises sur la moulure inférieure de la cuve, chargée de roses. Des guirlandes de fleurs et des nœuds de rubans encadrent les panneaux, où l'artiste a réuni, comme à Lampaul, les quatre évangélistes et les quatre grands commentateurs de l'Évangile, saint Grégoire, saint. Ambroise, saint Augustin et saint Jérôme, ceux-là sur la cuve, ceux-ci sur la rampe.

Dans le dossier, un médaillon représente Dieu donnant à Moïse les tables de la loi, entre deux anges qui tiennent ensemble une couronne de roses et soutiennent de l'autre main l'abat-voix.

Les gradins, moulurés et décorés dans le même esprit, sont chargés d'angelots aux angles. Une renommée couronne le dôme. Le Saint-Esprit dans sa gloire figure au plafond.

On notera aussi deux niches à volets dans la nef : l'une renferme la statue de saint Thégonnec, et les bas-reliefs des volets ouverts rappellent quelques scènes de sa vie ; l'autre abrite un arbre de Jessé encadrant une statue de la Vierge portant l'Enfant Jésus. Sur les volets, l'Annonciation, la Visitation, l'Adoration des bergers et des plages, la Présentation au temple.

Les orgues, exécutées par Jacques Mascard, facteur d'orgues à Landerneau, provoquèrent, en 1670, l’exhaussement du bas de l'église et coûtèrent près de 5.000 livres. Elles rappellent le type déjà signalé à Guimiliau.

Il faut encore signaler une croix processionnelle d'une époque avancée, en vermeil, à double croisillon, le croisillon inférieur supportant les statuettes de la Vierge et de saint Jean. Aux pieds du Christ, un évêque agenouillé tient le calice de la Passion. Six statuettes d'apôtres rehaussent le nœud. Au revers, saint Thégonnec. Une lampe de sanctuaire en argent est ornée de trois épisodes de la vie de saints Martin. Un ciboire en argent semble être de la même main.

Le petit clocher renferme une cloche de 1643.

La cage du clocher méridional avait reçu, de 1658 à 1661, une forte charpente nécessitée par une nouvelle cloche pesant environ 4.000 livres et fondue sur place dans le même temps. La cloche seule coûta, à très peu près, 3.700 livres tournois. Il en fut fondu une autre en 1699, mais elles ont fait place aujourd'hui à deux cloches datées de 1754 et de 1875.

 

Porte monumentale du cimetière. — A l'entrée du cimetière, un architecte inconnu a élevé, en 1587, cette porte très originale, fort différente des monuments analogues de la région.

Quatre piliers relativement étroits, mais d'une épaisseur énorme, amortis en demi-cylindre à doubles volutes, sous deux étages de lanternons, s'espacent, de façon à laisser un triple passage. Ceux des extrémités sont fermés par des échalliers : au milieu s'ouvre une porte en plein cintre dont l’arcade, relancée entre les piliers centraux, supporte un attique sous un triple fronton. Des niches à coquille décorent les piliers et l’attique. Des boules godronnées chargent les petits pilastres des lanternons, et des croix fleuronnent tous les sommets. L'écoulement des eaux est assuré par des gargouilles en forme de bouche à feu.

Sur les faces intérieures des piliers, de part et d'autre de l'attique, on voit un groupe divisé de l'Annonciation, et dans la frise, sous l'attique, une inscription en breton datée de 1587.

 

Calvaire. — Le calvaire de Saint-Thégonnec (1610) se place chronologiquement après ceux dé Tronoën, dont la date est inconnue. Plougonven (1554), Kergrist-Moëlou, Guimiliau (1581-1588), Plougastel-Daoulas (1602-1604). Moins important que les deux derniers, il compte cependant parmi les meilleurs.

Une marche conduit au soubassenment barlong à tablette moulurée qui recoit sur des gradins le groupe de la Crucifixion, peut-être un peu trop développé en hauteur relativement aux dimension du massif. Un autel de pierre orienté fait saillie sur devant, sous une petite niche que abrite la statuette du patron de la paroisse, saint Thégonnec et son chariot.

Les croix des larrons, lisses, sont dominées par la croix principale, écotée et chargée de personnages. Quatre anges s’y acostent pour recuillir dans des calices le sang qui coule des cinq plaies. Deux traverses superposées reçoivent, en outre : la plus haute, deux cavaliers flanquant le Crucifix et le Christ à la Colonne, au revers : l'autre, en façade, saint Pierre, saint Jean et Notre-Dame de Bon-Secours, au milieu ; au revers, un Ecce homo entre la Vierge et saint Yves.

 

Sur le massif, un grand nombre de statues sont disposées dans un ordre mal restitué, les habitants de Saint-Thégonnec les ayant pieusement dissimulées pendant la Révolution. Il en manque quelques-unes. Les scènes représentées se rapportent toutes à la Passion.

Ossuaire. — L'ossuaire de Saint-Thégonnec est le plus parfait de ceux que l'on voit en Bretagne. On doit aux patientes recherchés de M. l'abbé Quiniou le nom de l'architecte, Jean Le Bescont, de Carhaix, et la date de sa construction, 1676-1682. Sa découverte établit ce fait intéressant que les œuvres les meilleures du pays étaient dues alors à des artistes locaux, et non, comme on l'avait dit, à des étrangers. Elle dissipe aussi une grave erreur de Palustre. Trompé par le style Renaissance de l'édifice, il avait imprudemment corrigé la date de 1677 inscrite sur un contrefort en 1577. Le dépouillement des comptes a tranché la question L'inscription est exacte et le style de l'ossuaire en retard d'un siècle. Sans doute, on trouvera exceptionnellement en Bretagne quelques monuments de la Renaissance à leur date, mais l'archaïsme y est la règle. Palustre et quelques archéologues bretons ont réagi avec excès contre cette opinion.

Il avait aussi peine à croire « qu'à une époque où la Bretagne succombait sous les lois fiscales de Louis XIV, on ait entrepris dans un village une semblable construction ». Or, c'est précisément à cette époque que s'achevèrent et se meublèrent les églises rurales les plus riches de la Cornouaille et de Léon. Ainsi l'archéologie peut se faire l'auxiliaire de l'histoire et corriger plus d'une opinion fausse ou exagérée.

Cet ossuaire constitue, comme tant d'autres, une véritatable chapelle qui n'est pas orientée. L'abside à trois pans, engagée dans la porte du cimetière, présente vers le sud-est les gâbles à crochets faits de petites volutes adossées et ses fenêtres en tiers-point, trace des traditions gothiques sous la décoration nouvelle. Les contreforts, analogues à ceux de l’église, mais plus élégants, comme le reste du petit édifice, sont du style de la plus pure Renaissance.

L’évévation latérale, du côté de l'Épître, est aveugle et contribue à la clôture du cimetière, comme à Sizun, Lampaul, etc. L'autre est divisée en deux ordres interprétés du corinthien qui accusent les lignes de la manière la plus heureuse par des colonnes lisses, aux chapiteaux sculptés en pierre de Kersanton. A l'étage inférieur, elles flanquent six petites baies en plein cintre, et, à l'attique, huit niches à coquille réparties de part et d'autre de la porte cintrée. Le fronton est interrompu par une niche dont le dais-lanternon repose sur les volutes ioniques de cariatides engainées, comme dans le porche de l'église, et abrite une statue de saint Paul-Aurélien. Deux bénitiers extérieurs sont taillés dans les contreforts d'angle. Sous le pignon de la façade s'ouvre une porte, entre deux baies, encadrée de pilastres, sous trois niches à dais, à calotte domicale. Les lanternons habituels chargent les contreforts et couronnent les gâbles.

La frise de l'ordre inférieur porte une inscription légendaire qui fait le tour du monument.

L'intérieur est couvert en charpente lambrissée. Le retable de l'autel (1686-1688), en bois sculpté, fut commandé pour 400 livres à Pierre Lahaye, de Beuzec-Cap-Sizun, et Alain Castel, de Morlaix. Quatre colonnes torses à pampres portent l'entablement à ressauts où se détache, entre deux angelots et deux pots de fleurs sculptés, un petit portique encadrant Dieu le Père, buste en relief sortant d'un nuage et d'une draperie.

Un tableau de la Sainte Famille, payé 22 livres en 1688, a disparu du centre du retable.

 

Saint-Sépulcre. — Une petite crypte, sous l'autel de l'ossuaire, contient le Saint-Sépulcre, oeuvre de Jacques Lespaignol (1699-1702), payée 1.550 livres, non compris la peinture, qui en coûta 1.200. Ce travail en bois de chêne est intéressant à comparer avec celui de Lampaul, qu'il suit d'un quart de siècle et dont il diffère par une grande liberté d'interprétation en même temps que par les attitudes plus théâtrales de ses personnages.

(Par M. le Vicomte Alfred de la Barre de Nanteuil).

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