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MUNICIPALITE  DE SAINT-THEGONNEC EN 1792

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Municipalité de Saint-Thégonnec (1792). — Ses démélés avec le curé Allanet et le District de Morlaix.

L'année 1792 fut marquée par une recrudescence de violence contre les personnes et les choses sacrées. Au commencement de cette année, les paroissiens de Saint-Thégonnec et de Guiclan, ne voulant pas avoir recours au ministère des intrus, avaient demandé à l'Administration l'autorisation de se servir des chapelles pour le culte, laissant l'église paroissiale aux prêtres assermentés. Cette demande, transmise à Expilly, évêque constitutionnel, eut pour réponse l'avis suivant, ainsi formulé :

« Quimper, le 8 Janvier 1792. Vu les pétitions des paroisses de Saint-Thégonnec et Guiclan demandant ouverture des chapelles de ces paroisses ; Considérant que la loi du 13 Mai 1791 donne toute liberté à tout prêtre, indistinctement, de dire la messe dans les églises paroissiales ; Considérant que nous avons enjoint à MM. les Curés d'avoir tous les égards possibles, dans leurs églises, pour les prêtres insermentés ; Considérant que nous avons les preuves les plus affligeantes que l'on ne réclame les ouvertures de ces chapelles que pour en faire des foyers de division et y perpétuer le trouble. Nous sommes pleinement de l'avis du District de Morlaix, et pensons qu'on ne peut, sans le plus grand danger pour la tranquillité publique, permettre l'ouverture de ces chapelles. EXPILLY, Evêque du Finistère ».

S'en tenant à cet avis de l'Evêque, le District de Morlaix, sans prévenir la Municipalité de Saint-Thégonnec, envoya, le 13 Janvier, deux gardes nationaux qui s'emparèrent de l'abbé Guy Cras, demeurant au bourg, chez Guillaume Bonel, bedeau ; c'était un prêtre non assermenté que suivait toute la paroisse. La Municipalité protesta contre cette ingérence du District dans ses affaires, et réclama la mise en liberté de l'abbé Cras

 A cette juste protestation, le District répondit par l'arrêté suivant : « District de Morlaix, 3 Février 1792. Vu l'extrait du greffe de la Municipalité de Saint-Thégonnec, du 13 Janvier, et la pétition des Officiers municipaux, du 31 Janvier ; Considérant que si l'Administration était tenue d'aviser les Municipalités des campagnes toutes les fois qu'il est nécessaire d'y maintenir l'ordre et d'exécuter les arrêtés du Département, il en résulterait que dans les paroisses, comme à Saint-Egonnec, où le germe du fanatisme a pris racine, qu'ils ne sortiraient jamais leur plein effet ; car, comment espérer que des Officiers municipaux, qui n'ont d'autres dieux que des prêtres fanatiques, donnent la main à leur arrestation, lorsqu'ils sont les premiers à les soustraire et à autoriser la résistance à la loi. L'arrestation du sieur Cras, prêtre, est fondée sur ce qu'il a plus fait de mal dans ce canton que tout autre. Le District est donc d'avis qu'il y aurait plus de danger à remettre ce fanatique hors d'état d'arrestation, qu'il n'y en aurait eu de laisser les chapelles ouvertes où, lui plus que tout autre, attirait les trois-quarts de la paroisse ».

Le District ne s'en tint pas là et envoya des gendarmes pour s'emparer de deux autres prêtres fidèles de Saint-Thégonnec. Toutes les précautions avaient été prises, de connivence avec le Curé intrus, pour surprendre les prêtres sans donner l'éveil à la population. Le résultat de cette expédition nous est connu par le procès-verbal dressé à cette occasion par les gendarmes eux-mêmes :

« PROCÈS-VERBAL DE GENDARMERIE pour l'arrestation des prêtres réfractaires de Saint-Thégonnec. 10 et 11 Février 1792. Nous, brigadier et gendarmes (il y en avait quatre) de la résidence de Morlaix, certifions que, conformément au réquisitoire du District de cette ville, en date de ce jour, 10 Février, nous nous sommes transportés jusqu'au bourg de Saint-Thégonnec où, étant arrivés un peu avant minuit, ayant descendu chez M. Alanet, curé constitutionnel, chez lequel nous devions trouver tous les renseignements nécessaires pour arrêter les sieurs Drolach et Rolland, prêtres réfractaires de la dite paroisse.

Le sieur Alanet nous ayant assuré que l'un et l'autre ne couchaient jamais deux nuits de suite sous le même toit, et jamais chez eux, et que le vrai moyen de les prendre était de les attendre à 6 heures du matin ; immédiatement après l'angelus du matin, ils se rendaient à l'église pour dire leur messe.

Effectivement, une petite cloche a sonné, ce qui nous a fait connaître que l'un ou l'autre allait dire sa messe ; en conséquence, nous nous sommes rendus à l'église, et nous avons connu le sieur Rolland à l'autel, auquel nous n'avons rien dit pour le moment, pour attendre qu'il eût tout à fait fini.

Plusieurs personnes assistant à cette messe ont pris de l'ombrage à notre vue.

Une grosse femme [Note : Cette femme s’appelait Françoise Le Roux] a sauté à la corde de la cloche, qui a commencé à sonner le tocsin. Moi, brigadier, j'ai arraché la corde des mains de cette femme, qui a cherché à m'entortiller avec, et Moulinier, gendarme, a aussitôt coupé la corde. Tout le monde a sorti de l'église en criant et hurlant comme des loups garous. Nous avons connu dans le nombre des ameutés le nommé Alain Géric, fermier, armé d'une fourche qui avait un long manche, et Jean Abgrall, ci-devant sergent de basse juridiction, armé d'un fusil et d'un bâton, l'un et l'autre excitant par leurs cris et menaces à nous tomber sur le corps.

A l'instant, s'est présenté le sieur Le Roux, officier municipal, en écharpe, accompagné du sieur Ridelleur, secrétaire, greffier de la Municipalité, auxquels j'ai déclaré, en breton et en français, que je venais d'arrêter un prêtre nommé Rolland, et que je le rendais responsable de tous les événements. Le dit Le Roux a dit : " Voyons vos ordres ! ". Les lui ayant communiqués, il les a lus en breton et français à tout le peuple, dont quelques-uns ont dit : " Ce sont des ordres supposés ".

Néanmoins, il a tranquillisé le peuple un moment, leur disant que le sieur Rolland ne partirait pas que M. le Maire ne fût arrivé, que l'on venait de l'avertir.

Dans cet intervalle, le nombre des émeutiers augmentait toujours, ce qui nous a fait nous tenir sur la deffensive sous le portail de l'église, et gardant toujours notre prêtre dans la sacristie.

M. Bernard Breton, étant arrivé, nous a demandé à voir nos ordres. Les lui ayant communiqués : " Je n'ai moyen empêchant, a-t-il dit ; mais je vois de grandes difficultés, attendu l'affluence du monde ameuté ". Puis il a ajouté qu'il valait mieux prendre un tempérament plus doux dans le moment, qu'il allait nous délivrer un certificat en conséquence.

Avons voulu, cependant, notifier le mandat d'arrêt au sieur Rolland, et nous nous sommes retirés en disant au peuple : " Votre prêtre vous restera jusqu'à nouvel ordre... ", déclarant que nous aillions rapporter procès-verbal de rébellion et rendre compte de notre mission au Directoire ».

M. Rolland ne tarda pas à s'en aller, et le lendemain, 11 Février, le Maire, pour ôter tout prétexte aux perquisitions du District, se chargea lui-même de la recherche des deux prêtres dont on demandait l'arrestation, bien décidé, sans doute, à ne trouver personne. Le procès-verbal de ses recherches, qu'il s'empressa d'adresser au District de Morlaix, était conçu en ces termes :

« MUNICIPALITÉ DE SAINT-THÉGONNEC. 11 Février 1792. Ce jour, samedi, au retour du marché de Morlaix, nous, Maire, nous sommes transportés en la demeure du sieur Drolach, à Penanabat, près du bourg, où nous avons trouvé Jacques Drolach, père du dit, qui a dit que le sieur Drolach n'était pas. Nous avons fait perquisition, sans trouver le sieur Drolach ni le sieur Rolland, prêtre. Nous avons demandé où nous pourrions les rencontrer. Il nous a répondu qu'il avait appris que le sieur Drolach s'était déguisé et avait quitté la paroisse ; mais il ne sait rien de la route qu'il a prise. Il ne peut donner aucune connaissance du lieu ou de la paroisse où se trouve le sieur Rolland. Même perquisition inutile chez le sieur Rolland ; sa soeur Jeanne a dit qu'elle avait entendu dire qu'il avait changé d'habillement et quitté la paroisse, sans savoir vers où il s'était dirigé.

Même perquisition inutile chez le sieur Tanguy. Jeanne Lever a dit que depuis quelques jours elle n'avait pas entendu parler du sieur Drolach, et que depuis ce matin elle n'avait eu aucune nouvelle du sieur Rolland.

Même perquisition nulle, chez Guillaume Bonnel, hérault municipal.

Toutes ces perquisitions faites, nous nous sommes transportés au secrétariat, pour attendre le dit Guillaume Bonnel, que nous avions chargé de se rendre au village de Kernizan et de voir si chez Barbe Grall, veuve de Jean Pennec, ou chez Pierre Fichou, il ne trouverait pas les sieurs Drolach et Rolland, et au cas qu'il les eût trouvés, de leur enjoindre de se rendre sur le champ au bourg. Le sieur Bonnel arrive et n'a rien trouvé ».

A ce procès-verbal était jointe la lettre d'envoi suivante :

« Municipalité de Saint-Thégonnec à District. 12 Février 1792. Nous croyons devoir mettre sous vos yeux un procès-verbal rapporté par les membres du bureau municipal, le 11 de ce mois, une attestation qu'il donne à la gendarmerie, un procès-verbal de réquisition du même jour, le tout relatif à une affaire sur laquelle nous sommes jaloux de fixer votre opinion, de manière à ce qu'on ne vous fasse pas croire les dispositions de la paroisse de Saint-Thégonnec autres qu'elles ne sont. On y est parfaitement tranquille, et, nous le disons avec confiance, véritablement porté pour la Constitution. Les contributions s'y paient régulièrement. Si l'on avait voulu nous croire et laisser les citoyens jouir de la satisfaction d'avoir des messes à leur gré, il n'y eût pas eu un moment d'orage. Nous ne savons quel esprit peut porter à ne vouloir pas mettre à l'aise les consciences et laisser à chacun ses opinions religieuses. Les campagnes sont, en général, affligées de la privation d'ecclésiastiques à leur goût qu'on leur fait éprouver, et l'acharnement qu'on met à cet égard à vaincre leurs préjugés, y peut porter à des imprudences qu'on préviendrait en abandonnant ce système de conduite.

A Saint-Thégonnec tout allait au mieux ; les insinuations auprès de quelques mauvaises têtes et l'exaltation de ceux-ci, dirigée contre des prêtres non assermentés, ont jeté un germe de division. Il allait se développer d'une manière dangereuse, si notre fermeté ne l'avait presqu'aussitôt étouffé. Nous vous adressons un procès-verbal, du 5 de ce mois, qui vous justifiera des trames, aussi con­damnables qu'illégales, qui sourdissaient. Mais les moteurs de l'assemblée du 5 ont eu la satisfaction que l'un de leurs objets s'est trouvé indirectement rempli : l'ordre d'arrestation de nos prêtres non assermentés a mis en fuite ces ecclésiastiques, contre lesquels on n'eût pu prouver aucun délit, et que le peuple se voit à regret enlever. Nous avons cependant cru devoir punir ou réprimander, suivant que chacun l'a paru mériter, ceux qui avaient le plus figuré dans l'opposition à l'arrestation de ces prêtres.

Bernard BRETON, maire ; François-Marie COTTAIN ; Alain POULIQUEN ; Yves INIZAN ; Jacques LE GUEN ; CAROFF, procureur de la Commune ; LE ROUX ; Guillaume GRALL ; Alain LE SAINT ; LE RIDELLER, secrétaire greffier ».

Voici ce procès-verbal du 5 Février, auquel il est fait allusion dans cette lettre, et qui démontre que le désordre dans la paroisse provenait des agissements des Amis de la Constitution de Morlaix :

« MUNICIPALITÉ DE SAINT-THÉGONNEC. 5 Février 1792. Nous, Maire et Officiers municipaux, certifions qu'étant assemblés et ayant été avertis qu'à l'issue de la grand'messe de ce jour, François Le Verge, demeurant à Lanharena, avait convoqué une assemblée à la Grande-Maison, appartenant à la fabrique, dont est fermier principal François Huet, nous nous sommes revêtus de nos écharpes, et rendus à la dite maison, nous avons trouvé, dans une chambre du premier étage sous-louée à Jean-Marie Perros, une infinité de personnes, et un homme sur une table, pérorant ; nous avons reconnu que c'était Jean-Baptiste Meurice dit Saint-Jean. Nous lui avons demandé qui avait autorisé l'assemblée ; il a répondu que c'étaient les Amis de la Constitution, de Morlaix, interpellant le Maire de déclarer s'il les reconnaissait ; mais il a répondu qu'il ne les reconnaissait pas pour avoir le droit d'autoriser de pareilles assemblées sur le territoire de cette commune ; c'est aux corps constitués à accorder cette autorisation sur une réquisition du Comité des Citoyens actifs. Le Maire, au nom de la loi, a fait, injonction à tous les individus qui composaient ce rassemblement de se retirer sur-le-champ, sinon qu'il dresserait procès-verbal. Le sieur Meurice a répliqué que M. le Maire n'avait qu'à rapporter procès-verbal ; que, de son côté, il ferait la Municipalité se mettre en règle ; aussitôt le rassemblement s'est dissipé. Ayant demandé à François Le Verge s'il connaissait l'objet de la dite assemblée, il a répondu qu'il ne le connaissait pas, qu'il s'est présenté dans cette assemblée et que, tôt après, il y a vu arriver le sieur Allanet, curé, et le sieur Guillaume Charles, vicaire ; qu'aussitôt le sieur Allanet a donné lecture, en breton et en français, d'une pièce qui tendait, entr'autres choses, à demander au District une protection contre les aristocrates, qui menacent d'assaillir les patriotes, et à se plaindre de ce que les prêtres insermentés auraient persuadé au peuple que la messe des prêtres assermentés n'était pas bonne ».

On conçoit, après tout cela, que l'uniforme d'un soldat ou d'un garde national ne fût pas vu d'un bon oeil à Saint-Thégonnec, tant on redoutait une nouvelle descente de la force armée pour reprendre la poursuite des prêtres cachés. Cette crainte donna lieu, dans le courant du mois de Mai, à un incident, plutôt comique que grave, quoique les victimes aient cru devoir le qualifier d'assassinat.

La plainte, adressée à la Municipalité de Landivisiau, est ainsi formulée par les assassinés eux-mêmes, trois soldats qui quittaient l'hôpital de Morlaix pour regagner leur régiment, à Landerneau ou à Brest :

« Mai 1792. Nous vous supplions de prendre fait et cause d'un assassinat qui vient de nous arriver à Saint-Egonnec, au nommé Charles-Bénoni Le Clerc, grenadier au 39ème, et François Cornillet, et Augustin Lallemant, fusilliers du 4ème régiment.

Lesquels réclament auprès de vous, pour que justice soit faite, pour rendre à chacun des braves citoyens militaires ce qui leur appartient.

Dont en voici les motifs : nous vous dirons, Messieurs, qu'étant sortis de l'hôpital de Morlaix, nous nous sommes arrêtés à Saint-Agonette, à l'auberge du Grand-Turc, pour nous y rafraîchir. Nous avons demandé à l'aubergiste, qui était assise auprès du feu, combien qu'elle vendait le vin ; elle nous a répondu que c'était 15 sols en argent et 18 sols en assignats. Nous l'avons priée de nous donner une bouteille. Mais après avoir attendu une demi-heure, et que l'on nous servait pas, nous avons récidivé notre demande, et l'on nous a répondu d'un jargon à nous inconnu. Le sieur Le Clerc leur a dit qu'ils pouvaient parler français, vu qu'il n'était pas obligé de savoir si c'était des sottises ou des politesses. Le sieur Lallemant ayant dit à Le Clerc qu'il avait tort de s'emporter, nous eûmes difficulté ensemble.

Après beaucoup de difficultés de part et d'autre, on a fait venir la Municipalité, qui ont tombé sur le moment sur nous trois, sans aucune explication, étant au nombre de dix-huit à vingt hommes, dont ils ont culbuté le sieur Le Clerc, par trois fois, en le tirant par les cheveux, et ont tiré son sabre de sur lui et un paquet qu'on n'a pas voulu lui rendre. Réclament le chapeau et le paquet ».

L'on peut croire facilement que le Curé constitutionnel de Saint-Thégonnec ne devait pas trouver, dans une Municipalité aussi attachée à ses anciens pasteurs, un grand appui pour l'exercice de ses fonctions. C'est ainsi que le sieur Alanet est obligé de briser l'armoire où l'on conserve la bannière, pour pouvoir s'en servir le jour du pardon. La Municipalité protesta contre cette violence, par la délibération suivante, du vendredi 8 Juin 1792 :

« En l'assemblée du Conseil de la commune, où étaient Breton, maire, Salomon-Marie Le Roux, Jacques Le Guen, officiers municipaux, se sont présentés Alain Rannou et Jean-Marie Goarnison, trésoriers en charge de la fabrique, lesquels ont rapporté que hier, entre 9 heures et 9 heures 1/4 du matin, le dit Goarnisson étant à la sacristie des fabriques, le sieur François Alanet, curé, lui vint demander les clefs de l'armoire qui renfermait la bannière de l'église. Que lui, dit Goarnisson, répondit qu'il ignorait où elles étaient ; que son collègue pouvait les avoir ; que l'armoire n'avait pas encore été ouverte depuis qu'il exerçait, et qu'il se rappelait que, longtemps avant qu'il entre en charge, le général avait donné aux trésoriers ordre verbal de ne point les laisser sortir (afin de prévenir les accidents que les tours de force dont elle était l'objet pourraient occasionner) ; qu'au surplus, il n'avait qu'à attendre son collègue, qui devait arriver dans le moment.

Sans attendre, le sieur Alanet alla se placer sur les marches de l'autel, et de là dit, en s'adressant au peuple, qu'il venait de demander la clef de l'armoire de la bannière aux fabriques, qui lui avait répondu qu'ils n'avaient pas d'ordre pour faire ouvrir cette armoire ; que lui, sieur Alanet, désirait que l'on fit sortir la bannière pour la procession qui devait se faire après la messe ; que cette bannière appartenait au peuple, et que si celui-ci était de son avis, il allait forcer l'armoire ; qu'après que quelques personnes eurent répondu d'une manière adhérente à cette proposition, le sieur Alanet, qui était revêtu d'une aube et d'une étole, se porta jusqu'à l'armoire, dont il a, au moyen d'une pioche qui sert aux fossoyeurs, forcé la fermeture inférieure. N'ayant pu, pour cette fois, forcer la serrure supérieure, il vint au choeur, où il chanta l'Introït et la messe, laquelle finie, il recommença l'opération avec l'aide de Jean-Baptiste Meurice, de ce bourg, qui, à force de coups de hache, fit sauter la serrure supérieure, et donna la bannière à porter à un jeune homme qu'ils croient s'appeler Pierre Calvez. L'assemblée décide qu'il sera donné avis de cette effraction au District de Morlaix ».

Cependant, le Conseil de la commune, ayant réfléchi que sa plainte au District n'avait aucune chance d'être accueillie, décida, par délibération du 10 Juin, « qu'on se bornerait à réclamer du sieur Alanet la réparation, à ses frais, de l'armoire brisée ».

Peu après, c'est le sieur Alanet qui porte plainte au District, le 7 Août 1792, contre Guillaume Bonel, bedeau, nommé par la Municipalité, et qui lui refuse absolument ses services.

Constamment attachés à leur sentiment ridicule, les bedeaux prétendent que la messe des Curés constitutionnels ne vaut rien, et, soutenus par la Municipalité, ils se refusent à répondre la messe sur semaine, depuis un an, quoique salariés d'une somme de 240 livres.

« Comme leur état les oblige indispensablement de se trouver à l'église les dimanches et fêtes gardées, ils ont la sage précaution de courir à Guiclan, de grand matin, pour y entendre la messe. Je vous demande, en conséquence, leur destitution, pour mettre à l'aise leur conscience justement alarmée ».

Le District ne tarda pas à répondre à cette plainte, par l'arrêté suivant :

« 21 Août 1792. Vu les plaintes portées et réitérées des Curé et Vicaires constitutionnels de Saint-Thégonnec contre l'entêtement de Guillaume Bonel, bedeau, de se refuser à la desserte de messe et autres fonctions à lui attribuées ; ouï le sieur Huon, commissaire, nommé par le Département au recrutement de l'armée, et le sieur Meuris, chirurgien au dit bourg, qui ont été témoins du refus de ce sacriste ; au-dessus de ce que les Officiers municipaux ont de tout temps manifesté une opinion religieuse contraire aux principes de la Constitution ; qu'ils n'approchent aucunement des cérémonies curiales ; ils ne peuvent être instruits du refus du sacriste, et semblent même l'autoriser par une semblable conduite ; par ces motifs, est d'avis qu'il est plus que temps d'appliquer au sacriste de Saint-Thégonnec l'arrêté du Département du 26 Juin, en destituant le nommé Guillaume Bonel de ses fonctions, et d'autoriser provisoirement le Curé de cette paroisse à se choisir lui-même un sacriste qu'il présentera à la Municipalité, pour être par elle admis aux émoluments de la place ». (F. Quiniou).

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