Retour page d'accueil       Retour Ville de Saint-Malo   

ORIGINE MIRACULEUSE DE LA VIERGE DE LA GRAND'PORTE

C’était à cette époque merveilleuse, où comme par enchantement, nos belles cathédrales ogivales surgissaient de terre, élevant bien haut vers le ciel leurs chapiteaux fleuris et leurs clochers de dentelle, époque si poétique et si belle, qu’elle a donné à tout ce qui la touche ou s’en rapproche quelque chose de son suave parfum et de ses riches couleurs. C’était à cette époque, où, comme autant de fleurs éclatantes et suaves, naissaient de tous côtés ; sur notre sol de France, les jolies légendes dorées dont les naïfs récits ont bercé notre enfance et ont donné à beaucoup de nos écrivains le meilleur de leur charme !  C’était au Moyen-Age ! Par conséquent, vous pouvez à votre gré, avec le plus poétique de nos écrivains malouins, placer ce premier récit au dernier jour de la légende ou au premier jour de l'histoire !

« Un beau brick de Saint-Malo voguait vers les Indes. Un matin, son équipage découvrit, flottant entre deux eaux, à deux ou trois encablures, un objet volumineux. Une chaloupe fut le chercher. Cet objet était une grande caisse cerclée de fer que l’on ouvrit à grand'peine et qui renfermait un lourd monolithe figurant une statue de la Vierge Marie. L’équipage du navire, à la vue de la Madone de pierre, demeura frappé d’étonnement, se demandant comment une telle masse de pierre, autrement que par miracle, avait pu surnager. Le capitaine, cependant, fit disposer une place convenable dans l’entrepont pour y placer la statue miraculeuse, faisant le voeu de l’offrir à la ville de Saint-Malo aussitôt son retour. Après il voulut continuer sa route ; mais il eut à essuyer une telle série d’ouragans extraordinaires dont la cause lui échappait, qu’il finît par comprendre que la Madone de pierre ne voulait pas aller aux Indes et avait hâte de se trouver à Saint-Malo. Alors le beau brick vira de bord, bout pour bout, et grand vent arrière, fila vers le Clos Poulet où il arriva après une très rapide traversée. La Vierge miraculeuse fut portée triomphalement dans le choeur de la Cathédrale où elle resta exposée plusieurs mois à la vénération des fidèles. Ensuite, elle fut placée au-dessus de la Grand'Porte, à la place où elle se trouve encore aujourd’hui » (La Côte d'Emeraude, par E. HERPIN, pp. 3 et 4).

Dans son Histoire de Saint-Malo, le R. P. Prampain rapporte la même légende : « L’imagination populaire, dit-il, s’est plu à entourer la Vierge de la Grand'Porte d’une merveilleuse poésie : lourde statue de granit, elle voguait sur les vagues, lorsqu’un pêcheur la recueillit » (Saint-Malo Historique, par Edouard PRAMPAIN, page 65. note 3).

Ce récit est rapporté également dans un vieux manuscrit qui appartenait autrefois à l'Abbé Zinguerlé, ancien aumônier de l'Hôtel-Dieu, de Saint-Malo. Ce manuscrit fut écrit au début du XIXème siècle par un prêtre du diocèse de Blois, né dans notre ville ; et il lui fut entièrement dicté par sa vieille mère qui avait passé à Saint-Malo toute la révolution.

En tout cas, cette légende, avec plus ou moins de variantes, est fortement accréditée dans l’esprit des Malouins. On raconte même que le capitaine du beau brick, qui offrit cette statue à sa ville natale, n’était autre que Jacques Cartier ; cependant, le plus grand nombre des versions du récit de cette miraculeuse origine, place cette histoire à une époque beaucoup plus reculée que celle où vivait l’illustre marin.

Une tradition populaire rapporte que les cloches de la Cathédrale se mirent toutes seules en branle, et sonnèrent à toute volée lorsque la Vierge miraculeuse fit son entrée dans la ville de Saint-Malo. (abbé J. Descottes).