Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

François-Jérôme TOURNOIS, prêtre mis à mort en 1796 par les colonnes mobiles
dans le territoire du diocèse actuel de Saint-Brieuc.

  Retour page d'accueil       Retour page "Ville de Trélivan"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

342. — François-Jérôme Tournois, né du mariage de François et de Marguerite Le Roy, fut baptisé le 30 septembre 1765 dans l’église de Trélivan, sa paroisse natale.

Le voisinage des Capucins de Dinan éveilla de bonne heure chez le jeune Tournois des germes de vocation à la vie franciscaine. Après avoir achevé son noviciat et fait profession à Saint-Brieuc, le 2 octobre 1786, il s’en fut ensuite à Nantes où il reçut la tonsure et les mineurs le 23 décembre de cette année. Il fut fait diacre dans la même ville, le 6 juin 1789. (Arch. Loire-Inf., G 86 et 87). Il a été impossible de retrouver la date de ses autres ordinations. Ce religieux vivait lors de la Révolution au grand couvent de la Fosse, à Nantes. Le 3 mai 1790, il y déclara se réserver de faire connaître sa décision concernant sa volonté de continuer ou non la vie commune. Cependant ses principes demeuraient toujours fermement attachés à l’orthodoxie. Aussi est-ce en vain qu’on l’élut curé constitutionnel de Chauvé, le 21 février 1791 (Lallié, Le Diocèse de Nantes pendant la Révolution, t. II, p. 375) ; il refusa. Puis, à la fermeture de sa maison, lors de la dispersion de ses membres, le 6 mai 1791, le P. Tournois, auquel souriaient peu les conditions désagréables que les législateurs avaient mises à la vie commune, s’en revint dans son pays natal et se mit à la disposition des recteurs voisins pour les aider dans leur ministère. C’est, ainsi que les auteurs du Diocèse de Saint-Brieuc, op. cit., I, p. 226, signalent plusieurs fois la signature de ce bon prêtre sur les registres de Saint-Solen, du 21 décembre 1791 au 1er septembre 1792, et M. Fouéré-Macé, dans son étude sur le prieuré de Léhon, l’indique également comme présent à Léhon le 13 juillet de cette même année.

Lors de l’application de la loi du 26 août 1792, le P. Tournois, bien qu’insermenté, ne chercha pas à s’exiler. Du reste, en sa qualité de « non fonctionnaire public », il n’était pas astreint à le faire aux termes de la loi. Mais quand parut l'arrêté du Directoire des Côtes-du-Nord du 1er décembre de cette même année, qui condamnait à la déportation ou à l’internement tous les ecclésiastiques insermentés de ce département, le courageux religieux, tout insermenté qu’il était, ne chercha pas davantage à s’expatrier, mais, remplaçant dans la mesure de ses forces les recteurs et les vicaires de Léhon, de Tressaint et de Saint-Solen, qu’une législation cruelle avait obligés de prendre le chemin de l’étranger, il exerça en secret dès lors, et durant tout le temps de la Terreur, un ministère caché aussi fructueux que rempli de périls et dans l’accomplissement duquel il risqua cent fois sa vie.

343. — Au printemps de 1795, les représentants du peuple, en mission en Bretagne, s’étant convaincu que pour rallier les habitants des campagnes au régime nouveau il était indispensable de tolérer l'exercice public du culte dans les départements de l’Ouest, une accalmie momentanée s’en suivit. Les habitants de Léhon en profitèrent pour solliciter la réouverture de leur église et, le 12 mai de cette année, le P. Tournois, qui commençait à se montrer publiquement depuis environ trois semaines et avait obtenu un passe pour circuler de l’agent national du district le 7 du mois précité, le P. Tournois, disons-nous, fit devant la municipalité de cette commune la déclaration officielle d'exercer désormais les fonctions cultuelles à Léhon, tâche dont il s’acquitta du reste avec tout le zèle imaginable depuis la fête de l’Ascension jusqu’à celle de l’Assomption 1795. C’est alors que prit fin cette tolérance. La Convention en effet avait voulu obliger, par sa loi du 11 prairial an III (30 mai 1795), tous les prêtres catholiques à souscrire la déclaration d’une promesse de soumission « in globo » à toutes les lois de la République, mais quand la municipalité léhonnaise signifia cette exigence au P. Tournois, le 16 août 1795, celui-ci, « qui exerçait les fonctions du culte à la satisfaction du peuple », ne crut pas en conscience pouvoir s’y conformer.

344. — Une nouvelle loi, celle du 7 vendémiaire an IV (29 septembre 1795), en prescrivant un nouveau serment [Note : Celui de reconnaître comme souverain l'universalité des citoyens], vint sur les entrefaites aggraver encore les dispositions coercitives de la première ; aussi le P. Tournois dut-il désormais se cacher à nouveau, et, la loi du 3 brumaire an IV (25 octobre 1795) ayant rouvert contre le clergé romain les dispositions les plus sanguinaires des lois persécutrices, il devint dès lors l’objet de recherches intenses de la part des colonnes mobiles, auxquelles son orthodoxie intransigeante l’avait spécialement fait signaler. Ses jours étaient désormais comptés, et il en avait le pressentiment.

« Un jour, écrit l’abbé Carron (lequel avait recueilli des témoignages de témoins oculaires, op. cit., III, p. 482), que ce religieux confessait à Saint-Solen, averti dans son confessional, que les « patriotes » arrivent pour l’arrêter, il n’eut que le temps de se réfugier dans les bois. Mais c’est en vain, disait-il, que je diffère ; certainement (et il le répétait encore sept jours avant de périr), certainement je serai pris. Ils sont trop acharnés contre moi. Tout ce que je demande au Seigneur, c’est qu’il daigne m’accorder la faveur d’être arrêté dans un champ, afin que je n’ai pas la douleur de compromettre personne. Je mourrai ! Oui, je mourrai content pour la Foi catholique, si je péris de la main des révolutionnaires, et d’avance, je leur pardonne ma mort ».

345. — Le samedi 23 janvier 1796, l’intrépide missionnaire, retiré à la ferme de la Forestrie, en Trélivan, se disposait à célébrer la sainte messe dans la chapelle de Coëtmeur, lorsqu’on accourut l’avertir de l’arrivée d’une troupe de gens armés.

Accompagné de Jean-Mathurin Le Bourdais, 27 ans, fermier à la Forestrie, et de Marcel Ruquays, 23 ans, de Léhon, le P. Tournois s’empressa sans tarder de prendre la fuite, de crainte de causer la perte de ses hôtes s’il était trouvé dans leur demeure. Mais comme les trois hommes essayaient d’éviter la colonne mobile, cette troupe les aperçut, à l’instant même où, sortant du bois de la Forestrie, les fugitifs sautaient dans un champ voisin, dans l’espoir de traverser la route de Broons pour gagner ensuite les vallées de Léhon.

Aussitôt les soldats se précipitèrent avec furie sur ces personnes sans défense et les fusillent presque à bout portant. Mais là ne s’arrêta pas la rage des assassins : ils se jetèrent ensuite sur les cadavres de leurs victimes, les dépouillèrent de leurs vêtements, ne leur laissant que leurs chemises ensanglantées qu’ils leur retroussèrent jusqu’aux épaules ; puis ils coupèrent la main droite du P. Tournois et dans leur fureur, lui écrasant la tête à coups de crosses, ils répandirent par terre sa cervelle toute fumante encore.

Une petite fille, qui gardait ses bestiaux, fut seule témoin de l’horrible drame, et toute tremblante d’épouvante, s’en fut se réfugier à la ferme des Clos-Gastels. Elle y raconta ce qui venait de se passer entre les onze heures et midi sur les confins des paroisses de Trélivan et de Léhon, dans un champ sis en la paroisse de Quévert, nommé le Champ aux Agneaux.

Ce ne fut seulement que le lendemain, dimanche soir, à la nuit tombante (car les bourreaux avaient pris la précaution de monter la garde près des restes de leurs victimes), que les parents de Jean Le Bourdais et la femme du parrain du P. Tournois, aidés d’Olivier Cocheril, de Léhon, et de Joseph et de Jean Chollet, de Calorguen, purent s’approcher des cadavres des confesseurs de la Foi et pieusement procéder à leur ensevelissement.

346. — Inhumés d’abord près la pièce de terre, dite le Champ aux Agneaux, où ils étaient tombés, leurs ossements furent solennellement relevés le 3 septembre 1817 par les soins de l’abbé François Lécuyer, alors recteur de Quévert, qui, ayant passé la Révolution caché dans le pays, avait été témoin du dévouement du P. Tournois et connaissait admirablement la façon dont il avait péri. Puis, le 10 septembre suivant, on les enterra dans le cimetière de Quévert, au milieu d’une imposante cérémonie, dont un procès-verbal, que l’on n’oublia heureusement pas de rédiger, est seul aujourd’hui à conserver le souvenir ; car, par suite d’une inconcevable négligence lors du transfert du cimetière de Quévert, le lieu de la sépulture de l’héroïque P. Tournois est aujourd’hui complètement inconnu...

347. — Voici la seule pièce officielle mentionnant son trépas. Elle est extraite du Registre des Dépôts de pièces faits au Tribunal de Dinan du 24 frimaire an IV au 30 frimaire an XII :

« Du 3 pluviôse an IV (23 janvier 1796), le citoyen Lamy, lieutenant de la gendarmerie de Dinan, a déposé un procès-verbal du « lief » des cadavres de François Tournois, Jean Bourdas et d’un autre inconnu, présumés chouans, trouvés morts près les bois de Vaucouleurs. » (Ancien Greffe du Tribunal de première instance de Dinan. Aujourd’hui aux Archives des Côtes-du-Nord).

Quelques vieillards conservent encore à Léhon la mémoire de ce saint prêtre ; mais c’est surtout à Trélivan que le souvenir du P. Tournois est demeuré particulièrement vivant. De nombreux descendants en ligne collatérale de ce religieux existent encore dans cette localité. Sa famille a contribué à l’érection dans la chapelle dédiée à la Sainte Vierge dans l’église de Trélivan, d’un vitrail reproduisant d’un côté, en médaillon, le massacre du P. Tournois et de ses compagnons et d’un autre, l’inhumation des mêmes personnages. Tous les membres de la famille du P. Tournois, ont du reste la conviction que ce prêtre fut mis à mort en haine de la Foi. Semblablement, beaucoup de paroissiens connaissent à Trélivan le récit traditionnel de la mise à mort de ce martyr et se le transmettent religieusement de père en fils.

BIBLIOGRAPHIE. — Carron, Les Confesseurs de la Foi, etc., op. cit. (1820), III, p. 480 et sq. — Guillon, Les Martyrs de la Foi, etc. op. cit. (1821), IV, p. 659. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolut. en Bretagne, op. cit. (1845), p. 209-211. — Chanoine Fouéré-Macé, Le Prieuré royal de Saint-Magloire de Léhon, Rennes, in-4° (1892), p. 282. — Le Diocèse de Saint-Brieuc durant la période révolutionnaire, op. cit. (1895), I, p. 226. — R. P. Norbert, La Bretagne franciscaine, etc., Saint-Brieuc, 1911, in-16, p. 155-156. — A. Lemasson, Les Actes des prêtres du diocèse de Saint-Brieuc mis à mort, de 1794 à 1800, op. cit., p. 138-145. — R. P. Armel, P. Romanus Dinanensis a militibus pro fide mactatus, in Analecta ordinis capuccinorum, vol. XLII, 15 octobre 1927.

(Archives de la mairie de Léhon. — Archives de la Loire-Inférieure, série L et série Q).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

© Copyright - Tous droits réservés.