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ABBAYE NOTRE-DAME DE BOQUEN (aperçu historique)

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Abbaye Notre-Dame de BOQUEN - Plénée-Jugon

Abbaye de Boquen

APERÇU HISTORIQUE

Ne prétendant en aucune manière donner ici une Histoire complète de l'Abbaye de Boquen, nous nous contenterons de jeter un regard rapide sur les six siècles et demi de son existence monastique pour en signaler quelques événements plus notables.

Boquen eut des destinées semblables à celles de la plupart des autres abbayes cisterciennes. Deux siècles et demi environ de prospérité. Au spirituel, la ferveur et la régularité marchent de pair dans la maison ; le personnel est nombreux, suffisant tout au moins pour assurer l’exécution normale du programme monastique. Au temporel, après des débuts pénibles et fort laborieux, peu à peu s’est constitué un domaine considérable ; des donations nombreuses, des échanges, des achats ont contribué à le former, à l’agrandir, à l’améliorer ; il assure largement l’entretien de la Communauté, pourvoit aux aumônes considérables habituelles dans les monastères de l'Ordre : il est de si belle allure qu’il a déjà commencé à exciter la jalousie, la convoitise de voisins puissants. Les familles seigneuriales des environs qui, au début, ont contribué si libéralement à sa constitution, contemplent maintenant avec des yeux pleins d’envie cette immense tenue que la piété, la charité ont constituée, que le labeur intense, l’industrie, le savoir-faire des religieux ont augmentée, aménagée, embellie et enrichie ; l’ère des procédés gênants, des procès a commencé déjà ; elle ne prendra fin que le jour où la cupidité criminelle aura ravi à la religion ce que la dévotion lui avait donné et qu’elle avait su faire fructifier et multiplier.

L’existence de l’abbaye se poursuit encore, moins fervente peut-être, mais normale pourtant, jusqu’à l’introduction de la Commende. Ce changement radical dans l’administration, ajouté aux circonstances des temps très défavorables, c’est l’époque des guerres de religion, de la Ligue, époque de confusion, de désordres sans nom, produit à Boquen des effets désastreux. Nous constatons une ruine totale ; il n’y a plus, au commencement du XVIIème siècle, qu’une ombre de Communauté ; quelques pauvres moines, sans observance, errent au milieu des ruines. Car les bâtiments édifiés aux XIIème et XIIIème siècles avec tant de soin et tant de peine sont tombés en majeure partie ; les abbés commendataires ne se sont pas souciés de leur entretien et les religieux, privés de toute ressource, réduits à un nombre infime, n’ont pu les maintenir. Le domaine lui-même a beaucoup souffert sous la gérance de commendataires absents ou négligents ; une partie a été aliénée, dûment ou indûment ; beaucoup de droits, de redevances ont été perdues. Les revenus ont diminué à ce point que Boquen, duquel le dicton populaire affirmait que : Partout où le vent vente, Boquen a rente. Boquen n’est plus considéré que comme un bénéfice de très médiocre importance et de fort peu de ressources.

En 1663, l’abbé commendataire Urbain d'Espinay introduit des moines réformés en son abbaye et lui redonne de la sorte un peu de vie. Nous disons un peu de vie, car les ressources allouées à la subsistance des religieux ne permettaient pas d’entretenir un nombre de moines suffisant pour assurer une régularité convenable. Un procès-verbal de Visite canonique en 1682 nous montre à Boquen trois moines et un convers ; comment, dans des conditions pareilles, s’acquitter avec la décence voulue, de la célébration des divins offices et pourvoir aux autres observances ? Ce petit troupeau vivota, si on peut parler ainsi, dans l’effacement et la médiocrité, jusqu’à la grande tourmente de 1789. La conduite de la plupart des religieux cisterciens de nos contrées à cette époque néfaste montre bien leur peu de ferveur et leur manque d’attachement à un état qu’ils avaient embrassé, le plus souvent, sans conviction et sans élan, parce que, comme nous l’avons déjà fait observer, ils y avaient été poussés plutôt qu’ils ne l’avaient choisi. Victimes plus malheureuses, plus à plaindre que coupables d’un état de choses, de conditions sociales déplorables.

Le dernier Prieur de Boquen, un nommé Josse Louis, originaire de Saint-Igneuc, prêta le serment constitutionnel et acheta l’abbaye avec les terres environnantes le 26 mai 1791. Nommé recteur de Mégrit par les électeurs du district de Broons le 19 juin 1791, il refusa d’accepter. Un jour qu’il recevait à Boquen des confrères assermentés comme lui, il tomba de cheval en chassant dans la forêt et se tua. Triste fin d’un triste sire ! Sa mère, héritière de ses biens, les vendit à vil prix à un certain Méheust 0llivier, de Jugon. Ils passèrent par héritage aux Brindejonc, puis aux familles Boyet et Renault qui les ont détenus jusqu’à nos jours. Tous ces possesseurs successifs ont d’ailleurs également laissé péricliter et le domaine et les bâtiments, les anciens étant transformés en carrière d’où le voisinage tirait pour ses bâtisses de beaux matériaux à vil prix.

Cinq siècles de ferveur ou de régularité convenable, un siècle et demi de laisser-aller et de décadence, ainsi peut donc se résumer l’histoire religieuse de Boquen l’abbaye, isolée au milieu des landes et des forêts, perdue au fond d’un vallon éloigné de tout centre important, ne vit se dérouler entre ses murs presque aucun fait susceptible d’attirer l’attention. Seule, la sépulture de Gilles de Bretagne lui valut un moment de célébrité.

Frère du duc François Ier, Gilles fut assassiné le samedi 25 avril 1450 au château de la Hardouinaye en Saint-Launeuc, à quelques lieues au sud de Boquen ; la vengeance de son frère l’y avait enfermé, elle l’y fit périr. Selon certains, ce fut un moine de Boquen qui reçut la dernière confession du malheureux, à la dérobée, à travers les barreaux du soupirail servant de fenêtre à son cachot. Averti le jour même du décès, l'abbé de Boquen, Louis du Verger, partit le lendemain avec ses religieux pour réclamer le corps du prince et lui donner la sépulture en son abbaye. Légende ou histoire ? On rapporte que le cercueil était placé sur un chariot traîné par deux paires de boeufs ; au village de la Tringaie, en Langourla, les boeufs s’arrêtèrent, en vain essaya-t-on de les faire avancer. On se mit à prier pour l’âme du défunt, à demander à son patron saint Gilles aide et assistance. Aussitôt, l’un des boeufs frappa de son sabot une pierre du chemin, l’empreinte du pied s’imprima dans le roc et s’y montre encore de nos jours ; le cortège continua ensuite sa route sans encombre. Dans le lieu, en souvenir du prodige, fut élevé un oratoire à saint Gilles, remplacé ensuite par une chapelle.

Le sire de Merdrignac, d’autres gentilshommes, tel Geofroi de Beaumanoir, un grand concours du peuple des environs, ému de compassion pour les malheurs du défunt, assistèrent aux funérailles solennelles du prince. Le corps fut enseveli au pied du maître-autel ; sur la tombe, Louis du Verger posa une dalle d’ardoise surmontée de la figure en bois du trépassé. Cette statue existe encore ; emportée de l’église abbatiale à l’époque où celle-ci fut désaffectée, elle trouva place dans la chapelle du château du Parc. Saint Jacut ; reléguée ensuite dans la grange d’une ferme voisine, avec l’assentiment de M. de Kerouartz, propriétaire de cette ferme, elle fut transportée en 1862 au musée de Saint-Brieuc.

Cependant, le duc François de Bretagne voulut se montrer reconnaissant à l'abbé de Boquen des honneurs rendus à l'infortuné Gilles. « Item, ordonnons, disait-il au codicille de son testament, que en l’abbaye de Boquien, soit faicte fondation solennelle pour beau frère Gilles, que Dieu pardoint et services tels qu’adviseront lesdits exécuteurs et, des services jà faicts audit moutiers, voulons que les abbé et convent d’iceluy soient satisfez raisonnablement ». Les lettres du duc Pierre III, en exécution des volontés de François, portaient entre autres : « Pour ce que, après le tréppas de notre très chier et très amé frère Gilles, dont Dieu aie l’âme, il fust par noz, bien amez religieux et humbles orateurs les abbé et couvent du monastère de N. D. de Bocquien honorablement inhumé et ensépulturé en l’église et près le grand autier dudict moutier, et dempuys iceluy temps ont lesdits abbé et religieux, ainsy que suismes a plain informez, dit et célébré cotidiennement tant pour l’âme de notre dit frère que de nous, nos prédécesseurs et antécesseurs, une messe de Requiem à notes o diacre et sous-diacre et amprès celle messe ung respons de mort, abbé et couvent assemblez sur la sépulture et enfeu de notre dit frère et aprez Vespres ainsy le font semblablement et oultre dient et font dire par chacung moys au jour de samedy un anniversaire en commémoration pour mémoire du jour dudit tréppas qui fust iceluy jour de samedy et pour l’âme d’iceluy... ». Pierre III assignait comme assiette de la fondation solennelle, voulue par son frère François Ier, la somme de 100 livres à prendre sur les recettes de Jugon.

Des fouilles faites, le 11 décembre 1821, à l’effet de s’assurer si on retrouverait le tombeau de Gilles et si on n’y découvrirait pas quelqu’écrit pouvant servir à jeter du jour sur le point d’histoire auquel se rattache sa mort, n’amenèrent d’autre résultat que de prouver que les précautions nécessaires avaient été prises pour faire consumer promptement le corps, il avait été entouré de chaux vive dont on retrouva les débris à 6 ou 7 pieds de profondeur. L’emplacement de la tombe est marqué par une croix des plus simples dans le sanctuaire ravagé de l’église abbatiale. Les gens du voisinage n’ont pas entièrement perdu le souvenir du prince à l’infortune célèbre. Chose curieuse, une confusion s’est opérée, au cours des temps, dans la pensée populaire, entre Gilles et son patron saint Gilles, abbé très connu, très vénéré dans la contrée : on vient en pèlerinage dans les ruines à « saint Gilles de Boquen », à celui qu’on nomme le « vrai saint Gilles » ; on fait des neuvaines sur le lieu de son tombeau, on fait brûler des cierges dans l’ancienne armoire des reliques et on y dépose de modestes offrandes. Touchants témoignages, précieux vestiges de la compassion transformée en vénération et en culte... 

Ajoutons, pour clore ces humbles pages, que Boquen n’est plus le désert spirituel qu’il fut pendant près de 150 ans. Le chant de la louange divine s’y fait entendre à nouveau ; au milieu des ruines résonne l’écho des psaumes antiques et des hymnes joyeuses. Les vieux moines ont tressailli dans leurs tombes oubliées. Les seigneurs, les personnages dont les cendres gisent dans les décombres ont été secoués d’un transport d’allégresse au son des sacrés cantiques, de la cloche argentine appelant à l’office les nouveaux habitants de la solitude, successeurs, héritiers des Cisterciens. 

Puisse le grain de sénevé jeté de nouveau dans le sillon défriché jadis par le labeur et la piété monastiques prospérer encore et faire refleurir le Val béni consacré à sainte Marie de Boquen. 

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