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LES ABBES DE L'ABBAYE NOTRE-DAME DE LA CHAUME (1100-1792)

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Dom Taillandier [Note : Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, t. II, pp CX, et CXI] a le premier dressé une série des abbés de la Chaume, en même temps qu'il éditait un travail semblable sur tous les monastères de la province de Bretagne. Il n'est donc pas étonnant qu'elle présente d'assez grandes lacunes et quelques erreurs.

M. l'abbé Tresvaux [Note : L’Eglise de Bretagne, p. 471] s'est borné à la reproduire, en y joignant seulement les deux ou trois abbés nommés postérieurement.

M. Haureau [Note : GALLIA CHRISTIANA, in provincias ecclesiasticas distributa, tomum quartum decimum ubi de provincia Turonensi agitur, condidit Bartholomœus Haureau, Parisiis 1856, col 851, 852, 853] n'a pas ajouté grand chose aux citations de ses devanciers. Il a négligé de consulter les riches archives départementales, qui lui eussent fourni pour ses séries abbatiales d'intéressants documents. En effet si, à l'égard d'un monastère dont tous les titres ont été anéantis, nous avons pu donner deux ou trois noms nouveaux, préciser quelques dates et formuler d'assez importantes rectifications, ce résultat, quelque minime qu'il soit, démontre qu'il ne faut plus se borner à recopier les noms donnés par Dom Taillandier, mais que son travail peut être amplement modifié.

Afin d'éviter à cette sèche et aride énumération, la monotonie que présente la liste de ces personnages la plupart peu connus, j'ai indiqué les faits extraits des actes qui me sont passés sous les yeux, et qui fournissent des détails historiques sur l'antique moustier des Sires de Rays.

Le sceau de l'Abbaye portait au centre un écusson d'azur chargé d'une croix d'or, légère variante, ou peut-être simple altération du blason des seigneurs de Sainte-Croix ; et autour la légende : SCEAU DE L'ABBAYE N.-D. DE LA CHAUME [Note : Armorial général de d'Hozier ; Bibliothèque Nationale, sect. des manuscrits, pl. III N° 1].

L'abbaye de Chaume à Machecoul.

GLEMABOCH
Glemaroch, successeur de Justin, comme prieur, devint le premier abbé de la Chaume.

Il signa la fondation du prieuré de Frossay, faite vers 1100, par le clerc Urvoid, fils du prêtre Rivalton : « Glemarochus, abbas Sanctœ-Mariœ de Machicol » [Note : Cartul. de l'Abbaye de Redon, p. 166. — D. Morice, Pr. I, col. 504]. Sa souscription est encore apposée, en 1104, au bas de la donation faite à l'abbaye de Redon, par le même Urvold, alors revêtu de l'ordre de la prêtrise [Note : Cartul. de l'Abbaye de Redon, p. 250].

TANGUY
Il signa « Tangico, abbate de Culmo », le chirographe contenant l'accord définitif passé, de 1107 à 1110, entre les abbayes de Marmoutier et de Redon, au sujet du prieuré de Béré [Note : Arch. dép. de la Loire-Inférieure ; Titres du prieuré de Béré. — D. Morice, Pr. I, col. 422].

GAUTIER
« Gauterio, Machicolensi abbate », assista à la réconciliation de l'église de Redon, faite le 23 octobre 1127, par l'archevêque de Tours, Hildebert, en présence du duc Conan, de sa mère Ermengarde, et d'une imposante assemblée de la noblesse et du clergé breton [Note : Cartul. de l'Abbaye de Redon, p. 399. — D. Morice, Pr. I, col. 557]. « Gauterius, abbas de Machicol », souscrivit la donation, faite à Redon, le lendemain 24, par Olivier de Pontchateau [Note : Cartul. de l'Abbaye de Redon, Appendix, p. 392. — D. Morice, Pr. I, col. 553. La date 126 donnée par D. Morice est erronée]. Sa signature se trouve encore au bas de la donation faite, en février 1133 (1134 N. S.), au même monastère, par Guegon de Blain [Note : Cartul. de l'Abbaye de Redon, Appendix, p. 396. — D. Morice, Pr. I, col. 554].

ALFRED
Alfredus, qui, encore simple religieux en 1131, signa avec plusieurs des moines de l'abbé de Redon, la donation faite à cette abbaye par Olivier de Pontchâteau [Note : Cartul. de l'Abbaye de Redon, Appendix, p. 395], succéda au précédent.

Alfred ne nous est connu que par l'acte d'association dans lequel Hervé, abbé de Saint-Serge d'Angers, lui accorde le bénéfice des prières de son église, et l'inscription de son nom au martyrologe après son décès. Cette pièce est antérieure au 31 mai 1150, date de la mort d'Hervé [Note : « Domno Aufredo abbati Beate Marie de Calma, concessit D. abbas Herveus in generali capitulo beneficium ecclesie nostre, et ad finem suum martirologium pro anniversaria commemoratione. Ex obit. Mon. S. Sergii. ». Biblioth. Nat., Dom Housseau, t. XIII, N° 10,046].

ROBERT
« Robertus, abbas de Chalma », assista à la dédicace de l'église de la Benâte, faite par Bernard, évêque de Nantes, en présence des abbés d'Orbestier, de Breuil-Arbaud et de Nieul, entre les années 1150 et 1155 [Note : Arch. départ., Titres de Buzay, boîte A, liasse 7, N° 37. Don fait à l'Abbaye de Buzay, par Renaud Agnel de la Benâte, croisé].

PHILIPPE
Philippe était abbé en 1184, suivant la charte que nous reproduisons en entier, parce qu'elle sert à rectifier plusieurs erreurs.

Carta Bernardi de Machecollio de prato Marescautiœ et terris apud Paux et Machecollium.

Notum sit omnibus, tam futuris quam presentibus, quod ego Bernardus de Machecollio, divine pietatis intuitu et more Gaufridi Mengui, concessi, ad faciendam filiam suam sanctimonialem, ecclesie Dei et S. Marie Andegavensis, pratum de Marescautia et unam sextariam terre in saltibus de Paux et aliam in territorio Machecolli, in terra videlicet Radulfi Corsodii, eo concedente et fratribus Gaufridi Mengui concedentibus, scilicet Guillermo et Guerrivo : Salvo tamen meo et ipsius Radulfi jure in perpetuum habendum, videlicet duabus partibus decime, et terragio salvo in terra Radulfi, et in terra mea tota decima salua et terragio ; quas sextarias supradictas Gaufridus Mengui sibi acquisierat. Ne quis concessionem meam infirmare valeat, litteris annotare feci et sigillo meo corroboravi. Hujus rei testes sunt : Ego Bernardus Machecolli dominus, Rollandus Radiensis decanus, Radulfus de Corsot, Guillermus Mengui et frater ejus Guerriz, Raginaldus Serpant, Raginaldus Tedet, Guillermus Menart, Aalar Cornilles, Raginaldus Cornillel, Philippes abbas Calme, Agnes priorissa de Monasteriis Prugné et alii muni. Hec carta facta (est) et recitata ante me in capitulo S. Marie de Calma, secundo die Natalis Domini, anno ab incarnatione Domini MCVIII° IIII° [Note : Melius MCLXXXIV°]. R. 6, C. 23.

La date, « in capitulo S. Mariœ de Calma, secundo die Natalis Domini, anno ab incarnatione Domini M. C. VIII° IIII° », mal interprétée, par Dom Taillandier et ses copistes, a donné 1112. Mais Bernard de Machecoul, fils puîné de Raoul sire de Rays, qui figure parmi les chevaliers bannerets de Philippe Auguste en 1204, vivait incontestablement à la fin du XIIème et au commencement du XIIIème siècle. Il n'a donc pu signer une charte eu 1112. Dom Mabillon ne s'y est pas trompé, et cite la date exacte, octuagesimo quarto, 1184 [Note : Cartularium monasterii Beatœ Mariœ Caritatis Andegavensis, In-8°, 280 pp., s. n. d. ni l. ni d., p. 218. CDXLIV].

Dom Taillandier et les autres, y compris M. Hauréau, disent : que le savant Bénédictin ne connaît pas d'abbé de la Chaume plus ancien que ce Philippe. Mais Dom Mabillon, ne voulait ni faire une liste, ni même émettre le sentiment qu'on lui prête. Il constatait seulement un fait : dans la suite des temps, le monastère de la Chaume fut érigé en abbaye, et la signature de l'un de ses abbés se trouve au bas d'une charte, etc... « Processu temporis hoc monasterium erectum est in abbatiam, cujus abbas Philippus inscriptus occurrit in quadam charta, etc. » [Note : Annales Ordinis Sancti Benedicti, t. IV, p. 67].

De plus, ce n'est pas, comme il a toujours été dit, une constitution de dot, accordée par Bernard à sa fille, prenant le voile dans l'abbaye du Ronceray, mais un don fait par ce haut baron, pour l'affection qu'il portait à Geoffroi Maingui, dont la fille se faisait religieuse.

Philippe gouverna l'abbaye fort longtemps.

HAMON
« Haimo, abbas Calme », signa deux actes, peu différents l'un de l'autre, par lesquels Bernard, seigneur de Machecoul, permet aux religieux du prieuré de Saint-Martin, de bâtir un bourg et d'y tenir une foire. Ces actes durent être passés vers 1213 ou 1214 [Note : Arch. départ., série H, Prieures dépendant de Marmoutier. — L'un de ces actes a été publié par D. Morice, Pr., t. I, col. 541, qui a eu le tort de le placer vers 1120, c'est-à-dire presque un siècle avant sa date réelle, ainsi que le fait également remarquer M. A. de la Borderie dans l’Inventaire analytique des titres des Prieurés de Marmoutier situés dans l'Evêché de Nantes, p. 72].

(Lacune pendant le XIIIème siècle presque entier).

PIERRE LOUYS [Note : Il existait en Bretagne, plusieurs familles de ce nom mais nous ne savons à laquelle appartenait cet abbé].
Cet abbé reconnut les droits féodaux et judiciaires du sire de Rays sur son monastère, ainsi qu'il résulte de la mention de l'Inventaire du Trésor des chartes « Copie soubz le sceau royal de la ville de Saint-Jehan-d'Angely, d'une sentence donnée par Philippe de Beaumanoir, chevalier, baillif de Touraine, entre Monsieur Girard Chabot, chevalier, sieur de Rays et de Machecoul d'une part et Pierre Louys, abbé de la Chaulme, au nom de luy et de ladite abbaye d'autre, lequel baillif avait été spécialement commis par le roy, et envoyé à Nantes, pour connaître des appellations pendantes entre lesdites parties en la cour dudit seigneur Roy. Et après que ledit abbé au nom dudit couvent, se départit de l'appellation qu'ilz avoient fait de la cour du comte de Bretagne, à la cour dudit sieur Roy, il ordonna que le jugement fait en ladite cour dudit comte pour ledit Monsieur Girard, sortirait son effect. Et est l'acte du jugement donné par ledit sieur comte de Bretagne inséré, par lequel jugement est dit que lesdits religieux et hommes de ladite abbaye, demeureront en la garde justice et obeissance dudit Girard et tiendront de luy tous les fiefz et arrière fiefz et temporalité de ladite abbaye. Ledit jugement dudit comte daté du lundy après la feste de saint Berthelemy apostre (24 août) l'an 1292 ; et la sentence dudit baillif de Touraine, le vendredy apres ladite feste saint Berthelemy, audit an ; et ledit Vidimus du 24e de septembre 1446. Signé Vallée. V. C. de Feuz » [Note : Archiv. départ., Inventaire du Trésor des Chartes ; Arm. V. cass, D. N° 3. — Le Cartulaire des Sires de Rays, publié par M. P. Marchegay, donne sous le N° 113, un acte qui est le même que celui-ci ; le siège de la juridiction seigneuriale était fixé à Machecoul, ou dans le périmètre d'une lieue].

L'abbé Pierre, mourut probablement deux ans après ce règlement ; du moins la vacance du siège abbatial est constatée en ces termes par « autre vidimus soubz le seel royal de la dite ville de Saint-Jehan-d'Angely, des lettres escriptes par Jehan, abbé de Redon, à Monsieur Gérard Chabot, chevalier, seigneur de Rays et de Machecoul, par laquelle ledit abbé luy mande, que comme il est de coustume que quand l'abbaye de la Chaulme vaque, de nommer troys moynes de ladite abbaye de Redon, desquels ledit abbé de Redon en doit eslire ung s'il est suffisant et capable, pour estre abbé de la Chaulme, et que nagueres ledit sr de Rays avoit envoyé à Redon aulcuns de ses gens, pour faire ladite nomination, lesquelz ne furent bien advisez et pour cela la chose feut prolongée jusqu'a ce qu'il eut fait parler audit sieur de Raiz, lequel ledit abbé prie de bien adviser sur ce fait, et nommer preudes gens et luy en escripre sa volunté. Laditte lettre dattée du jour de la Magdelaine (22 juillet), l'an 1294 ; et ledit vidimus du 24 septembre 1446. Signé Vallée, le Filz » [Note : Archiv. départ., Invent. du Trésor des Chartes. V. D. N° 7].

A la suite de cette citation assez diffuse de l'article de l'Inventaire, il est utile de reproduire la lettre même de l'abbé de Redon ; document « aussi curieux comme orthographe que charmant par le style et par son écriture », dit avec raison M. P. Marchegay, qui nous a fait connaître ce texte intéressant pour la philologie dè la langue française au XIIIème siècle.

« A noble home, son ami e seignor, monsor girard chabot, chevalier, seignor de rais e de machecou, frere johan, humble abbe de redon, salut e lui tot.

Sire, come vous ayez de costume, quant labaye de la Chaume vaque, de nomer de nostre abbaye trais moynes, e nos devons eslere un diceux, si il y est renable, a astre abbe de la Chaume ; e, Sire, come vos eussez lautrier envoye a Redon aucuns de voz gens pour fere icelle nomee, les queux nestayent mie mout bien avisez sus ce, si come len nos feseit entendre, e por ce, Sire, nos feimes tant o eux que la chouse fut porloignee juque nos eussons parle ou fet parler o vous, quar nos avons grant fiance que il vos plese que la chouse ange en meillore maniere que a nul de voz genz. Por quey, Sire, nos vos raquerons en soppleyant, come ami e seignor, que il vos plese vos aviser sur ce, e nomer prodegent por que nous peussons porveir a la povre abbaye de un prodome, quar grant mester en a.

E, Sire, ceste chouse aurait mester a fere brevement, quar les chouses ne vont pas bien. Por lamor Nostre Seignor, plese vous de ce tant fere que vos y eyez henor e le povre moustier prou, e que Nostre Seignor vous en sache gre. Vostre nomes, Sire, vous plese nous rescrire, e les nos envoyer par le portor de ceste lettres, ou par autre si vos veez que meauz soit. E, Sire, a ceste supplicacion e requeste vos fera, e a vostre volante en air, nos establissons frere Jame, nostre moyne, priou de Saint Nicholas, e le priou de Frocay, nos alloez, ou un diceus dous si amedous ni poayent estre.

Ce fut donc le jor de lundi avant la feste de la Magdalene, en l'an de grue mil e dous cent e quatre vint e quatorze » [Note : Revue de Bretagne et de Vendée ; avril 1879, « Vingt lettres missives originales et inédites du chartrier de Thouars », p. 264. Frossay, canton de Saint-Père-en-Retz, arrondissement de Paimbœuf. Le prieur de Saint-Nicolas était vraisemblablement celui de Saint-Nicolas de Redon, relevant directement de cette abbaye].

Original en parchemin, jadis scellé sur simple queue.

NICOLAS DE TRÉAL
Cet abbé, que les catalogues disent avoir été tuteur des enfants d'Olivier Le Roux en 1322, et vivant encore en 1324, appartenait à une ancienne maison de Bretagne, possessionnée dans les évêchés de Saint-Malo, Nantes et Vannes, portant pour armoiries : de gueules au croissant burelé d'argent et d'azur. (Pl. III, N° 2).

Proche parent de Raoul de Tréal, évêque de Rennes en 1364, Nicolas eut pour successeur sur le siège abbatial, un membre de sa famille ; et, déjà parmi les religieux de la Chaume cités plus haut 1081-1085, se trouve un de Tréal.

Nous avons deux actes, ayant rapport à lui.

« Sachent tous que nous, Girard Chabot, sire de Rais et de Machecou, avons baillé et baillons nostre garanne de conniz dudit Machecou et la Chaume à religieux homme et honneste frère, Nicholas de Treal, aabé de la Chaume, à tenir garder et explecter à sa vollonté, sans vendre, tant comme il vivra aabé de la Chaume, tant seulement en la manière que nous pouron alé jouer quand nous plaira ou ceux de nostre compaignie, et aussy nostre principal hoir, o arcz, o chiens et bostons, sans autres garnemens, par quoy ladite garanne soit grevée. Et doit ladite garanne tourner à nous o tout son amandement, tel comme pourra avoir fait ledit Nicholas, quitement, sans débat, après son décès ou son département de la Chaume ; et des maintenant à ladicte garanne, tant que ledict Nicholas la tendra, reservons à nous la justice a fere et les grousses amandes, tant seulement o toute nostre seignourye. Et ces convenances volons promettons tenir et garder en bonne foy pour nous et pour les nostres sans venir encontre, donné tesmoing Nostre sceau ; et requerons que le sceau des contratz de Nantes soit exposé a ces lettres en greignour tesmoing. De tout ce nous Jacques Souboys, garde dudit sceau des contractz, a la requeste dudit seignour, avons a ceste lettre ledict sceau des contractz appousé. Ce fut faict et donné le jeudy après la saint Micheau en Montegargane l'an de grace mil troys cens vingt et ung ».

On sait combien le droit de chasse était prisé par les seigneurs du moyen âge, jaloux de se livrer seuls à ce plaisir défendu sous les peines les plus sévères à leurs vassaux. Cette concession est donc une preuve des bonnes relations et de l'amitié qui existait entre le chatelain et le supérieur des religieux. Les garennes bien moins étendues que les forêts, n'étaient en général peuplées que de petits animaux, tels que lièvres, lapins, perdrix, faisans. Cependant une charte d'Edouard III, roi d'Angleterre 1326-1377, décide que le chevreuil est un animal de garenne et non de forêt [Note : Les eaux courantes, par Lucas Championnière, p. 64. « Videtur tamen justiciariis et consilio domini regis, quod caprioli sunt bestiœ de Warenna et non de foresta »].

De son côté, l'abbé reconnut la bienveillance de son seigneur par l'acte suivant :

« Comme Noble Homme, Monsour Girart Chabot, seignour de Rais et de Machecol, par son don et par sa grace aet volu et veus-je que Messire Nicholas de Tréal, en celui temps aabé de la Chaume, eusse gardasse et esplectasse à ma volonté, sens vendre, sa garanne d'entre Machecou et la Chaume, non pas comme aabé ni en nom de ladite Abbaye, durant le cours de ma vie tant seulement comme je demoure abbé de la Chaume tant seulement. Sachent tous que je ny puis ne doy, ne autre en nom ne par raison de ceste baillée ni de ladite abbaie rien demander après ma mort ou mon département de la Chaume, ne empescher que lui doit retourner quitement et senz nul delay à la main et a la sezine doudit seignour, o tot son fet et son amendement, et si aucun en y avoit fait après mon décès ou mon département de la Chaume. Et sy ledit seignour reserve en povoir aler jouer o ceux de sa compaignie, o chiens et bastons et arcz et auxi son principal héritier, senz a nos garnemez qui puissent ladite garanne grever. Item a réservé ledit seigneur la justice a faire des mesfessans et les grosses amandes de ceux qui sont accusez ou prix par moi ou par mes gens durant le temps dessus divisé. Et en tesmoing de ce, ge ay donné a Monseignour dessusdict, cestes lettres scellées dou sceau dont len use a la Chaume, pour abbé et couvent, o l'assentement de mes compagnons. Et a plus grand fermeté, ge soupley et requiers que le sceau des contractz de Nantes, soit en tesmoing de cette chouse a cestes lettres appousé » [Note : Ces deux pièces sont empruntées à un vidimus de l'an 1667, d'après les originaux déposés à la Chambre des Comptes, aujourd'hui Archives départementales de la Loire-Inférieure, faisant partie du fonds Bizeul à la Bibliothèque de Nantes].

Nicolas de Tréal, jouit pendant sept ans seulement du droit de chasse dans la garenne de Machecoul, car en 1328, il fut transféré sur le siège abbatial de Saint-Melaine de Rennes, où il mourut en 1357.

MICHEL DE TRÉAL
Michel de Tréal, parent et peut-être frère du précédent, lui succéda en 1328, et était encore abbé en 1336.

JEAN DE TAILLEFER [Note : Avant cet abbé, tous les catalogues placent un PIERRE TOUYAC, « qui plaidait, comme abbé de la Chaume, contre Girard Chabot, sire de Rays, en 1346, suivant une sentence rendue sur cette affaire, par Philippe de Beaumanoir, chevalier, bailli de Touraine, le 24 septembre ». Or, c'est tout simplement une mauvaise interprétation de la date de l'acte de 1292, relatif à l'abbé Pierre Louys, dont un copiste étourdi a mal lu le nom et copié la date du vidimus, pour celle de l'acte même. D'ailleurs, Philippe de Beaumanoir fut bailli de Touraine à la fin du XIIIème siècle et non au milieu du XIVème. Il faut donc nécessairement rayer ce nom de Pierre Touyac]
Cet abbé appartenait à une très honorable famille de Dol et de Saint-Malo, portant pour armes : de gueules à trois fers de lances d'or (Pl. III, N° 3), il occupa le siège abbatial de 1351 à 1374 et peut-être plus longtemps.

THOMAS RUFFIER
Thomas Ruffier, abbé de la Chaume en 1386, appartenait à une famille ancienne des évêchés de Saint-Brieuc, Saint-Malo et Dol, portant : d'azur semé de billettes d'argent au lambel de même (Pl. III, N° 4).

Geoffroy Ruffier, de la même famille, « bien amé et féal escuyer » du duc François II, était, en 1486, lieutenant de Nantes, aux gages de « cent livres monnoye par chacun an » [Note : Archiv. municip., série EE, carton, capitaines et lieutenants].

JEAN LARCHER
Jean Larcher, régit l'abbaye de 1391 à 1402, suivant les catalogues, et eut pour successeur le suivant, qui de même que lui n'a laissé à l'histoire que le souvenir de son nom.

ANDRÉ LARCHER
André Larcher tint la crosse abbatiale de 1402 à 1411.

Ces deux abbés, très proches parents l'un de l'autre, sans qu'il soit possible cependant de savoir au juste à quel degré, appartenaient à une vieille famille bretonne, portant pour armoiries : de gueules à 3 flèches tombantes d'argent 2, 1. Devise : LE COUP N'EN FAULT (Pl. III, N° 5).

En 1171, Pierre l'Archier ou l'Archer, l'un des vaillants chevaliers du due Conan IV, fut tué en défendant la ville de Fougères contre les Anglais. Jean-Chrysostome l'Archer, comte de Touraille, mestre de camp de cavalerie, chevalier de Saint-Louis, eut entre autres enfants : Isidore-François l'Archer, né le 12 mai 1740, enseigne de vaisseau, tué en 1759, sur la frégate la Calypso, en défendant l'entrée de la rivière de Brest contre les Anglais [Note : Dictionnaire de la noblesse, par M. de la Chesnaye-Desbois; etc…, etc...].

ANDRÉ DE LORME
André de Lorme, fut nommé en 1413, par le sire de Rays Guy de Laval, ainsi que le prouve l'analyse qui suit :

« Acte fait par Raoul abbé de S. Sauveur de Redon et du couvent de ladite abbaye, par lequel il atteste et confesse que toutes-fois et quantes que l'abbaye de nostre Dame de la Chaulme, membre dépendant de Rhedon, est vacante, il appartient au seigneur de Rays de nommer et présenter audit abbé de Rhedon trois relligieux profes de ladite abbaye, affin que lun deux au choix et election dudit abbé de Rhedon, avec le conseil du couvent, soit institué et ordonné abbé de la Chaulme, et que lesdits seigneurs de Rays sont en possession paisible dudit droit, et que le dernier, pénultieme et antepenultieme abbé de la Chaulme ont été receuz par ses predecesseurs abbez de Rhedon, à la presentation et nomination des seigneurs de Rays, qui ont estés pour ce temps ; et que ayant nagueres ladite abbaye de la Chaulme vacquée par le décès de frère André Larcher, ledit abbé de Redon, auroit elu et pourvu à la nomination et présentation de Guy, lors seigneur de Rays, frère André de Lorme. Datté du 5 aoust 1413 et scellé de deux sceaulx » [Note : Arch. départ., Arm. V, Cass. D, N° 6].

Nous n'avons aucun détail sur cet abbé, qui peut-être appartenait à une famille du comté nantais, parmi les membres de laquelle figurent : Pierre de Lorme, vivant en 1888, seigneur de la terre de la Mauguitonnière en Maisdon, et Marguerite de Lorme dame de Liancé, en Orvault, en 1475.

GUILLAUME
Abbé en 1418.

DENIS
Abbé en 1421.

Nous n'avons rien sur ces deux abbés.

JEAN GROILARD OU GIRESART
Le catalogue de D. Taillandier indique ici un Jean abbé de la Chaume en 1428 et 1486. Ainsi que Hauréau, nous sommes porté à croire que c'est Jean Giresart.

Un acte du 2 mars 1449 (1450 V. S.), inséré au Cartulaire des sires de Rays, nous apprend que Jean Giresart, abbé de la Chaume, échangea son bénéfice, pour le prieuré de l'île Bremesen, avec Alain Loret. L'abbé de Redon conféra à celui-ci la dignité abbatiale, mais seulement après avoir constaté que le seigneur de Rays, Prégent de Coëtivy, amiral de France, avait approuvé cette permutation dès le 9 février précédent.

Cet acte, parfaitement explicite, obligerait donc à rayer du catalogue, Nicolas de Tréal en 1446, Jean-Louis Le Roux en 1448 et Jacques. Rousseau en 1453, sur lesquels, du reste, les catalogues ne donnent aucun détail.

ALAIN LORET
Alain Loret, encore abbé de la Chaume en 1456, était fils de Pierre Loret, conseiller du duc Jean V et sénéchal de Broerec en 1418, et de son épouse Jeanne de Neuville. Il portait pour armes : d'argent au sanglier rampant de sable (Pl. III, N° 6) [Note : Un Alain Loret était abbé du monastère de l'Ile-Chauvet, au diocèse de Luçon en 1468. Comme dans les documents suivants, il est seulement question de la vacance de l'abbaye de la Chaume, sans mention de la mort de l'abbé, peut-être pourrait-on en inférer que c'est le même personnage qui avait échangé son abbaye ?....].

GUILLAUME JEHANNO
Les Archives départementales possédaient jadis un acte du 25 juillet 1456, signé par Yves le Seneschal, abbé de Redon, et dont nous n'avons plus que la mention analytique portée à l'Inventaire [Note : Arch. départ., série E 243 (registre).— Le même dépôt, série E 247, cassette 108, contient : l'Inventaire de divers titres extraits du Trésor des Chartes à la requête d'Albert de Gondy, duc de Retz. Le N° 524 de ce dernier inventaire donne la note suivante, qui se rapporte évidemment à la nomination de Jehanno : « Une nomynation et presentation faicte par André de Laval, sire de Rays, et de Machecoul, à l'abbé de Redon, de l'abbaye et moustier de Notre-Dame de la Chaume, le 21 avril 1456, attachées a une provision et institution faite par ledit abbé de Redon d'icelle abbaye de la Chaume a la présentation susdite, en date du 9 mai 1457 »]. L'abbé « déclare que le seigneur de Rays, suivant le droit de patronnaige qui lui appartenoit, en l'abbaye de la Chaume, toutesfoiz qu'elle est vacante, il luy auroit présenté trois des religieux de ladite abbaye de Redon, afin d'en pourvoir celui qui serait le plus proffitable : scavoir frère Yves le Mercier, prieur du bourg des Moustiers, Jacques Ruaigier, prieur de l'Isle et Yves le Pourceau secretain de ladite abbaye de la Chaulme ; et néanmoins ladite presentation, n'auroit encores pourveu à la collation de ladite abbaye, auroit différé de ce faire, en partye pour ce que l'ung desdits religieux nommés en icelle presentation, estoit au voyage de saint Jacques en Galice » [Note : Arch. départ., arm. V, cass. N° 2. — Cet acte était signé Y. abbé de Redon et scellé].

Cette présentation n'eut pas de suite ainsi que le constate la lettre de Pierre II, duc de Bretagne, à André de Laval, sire de Loheac, baron de Rays.

« De par le duc, Tres cher et tres amé cousin et féal, nous avons sceu comment en faveur de nous, vous avez presenté a beau cousin le legat, notre bien amé et feal conseiller, maistre Guillaume Jehanno, secretain de Redon, a l'abbaye de la Chaume, obtenir, dont de vous suymes tres contans, et vous en mercyons. Si vous,prions que a maire fermeté, icelui maistre Guillaume veillez presenter a l'abbé de Redon, affin que, sur icelle abbaye de la Chaume, nulli ne puisse donner audit maistre Guillaume aucun empeschement. Et ce faisant vous nous ferez singulier plaisir. Tres cher et tres ame cousin, le saint esprit soit garde de vous. Escript en nostee ville de Nantes le XXVjème jour de juillet. PIERRE » [Note : Cette lettre missive, porte pour adresse : « A notre tres cher et tres amé cousin et féal le sr de Loheac marechal de France ». Arch. départ., série E, 77, cassette 29. — Elle donne seulement à G. Jehanno la qualité de secretain de Bedon, ce qui nous fait croire que la désignation de secrétaire du roi, portée dans les listes de D. Taillandier, Hauréau et Tresvaux, est fautive].

Il y avait, on le voit, de graves compétitions, et les plus puissantes influences étaient mises en jeu pour obtenir la crosse abbatiale. Guillaume Jehanno, qui est cité dans les Conclusions du Chapitre de l'Eglise cathédrale de Nantes, à la date des 27 janvier et 7 février 1457 (1458 N. S.), avait été également chargé des intérêts de l'abbé et du monastère de Redon, à l'encontre du chapitre de la Collégiale de Notre-Dame, lors de la translation du prieuré de Toutes-Joies dans la rue de la Petite-Notre-Dame. Il ne jouit pas longtemps de sa dignité, car il mourut cette même année 1458.

Guillaume Jehanno portait pour armoiries : d'argent à la croix fleurdelisée de sable soutenue par deux lions affrontés de même (Pl. III, N° 7).

JEAN DE SAINT-GUEDAS
La famille ducale, jalouse sans doute de la haute prérogative des puissants barons, semblait chercher à s'immiscer dans le choix du sujet, en intervenant par ses recommandations. C'est du moins la pensée que fait naître la lettre d'Artur de Bretagne, comte de Richemont, dont il ne reste plus que la mention analytique, trop succincte, inscrite à l'inventaire, et par laquelle ce prince « remercie le sieur de Raiz de ce qu'il avoit présenté Jehan de Saint-Guedas, avecques autres pour être pourveu de l'abbaye de la Chaulme, par l'abbé de Redon, et le prie tenir la main que ledit Saint-Guedas en soit pourveu nonobstant la poursuite que en faisoit pour son neveu ledit abbé. Ecrit à Redon, le septieme jour d'avril non millesimé (1458 ?). Signé. Artur » [Note : Cet acte portait le N° 5, de la Cassette D de l'Armoire V].

Nous ne savons rien de plus sur cet abbé qui appartenait à une famille du diocèse de Saint-Brieuc, portant pour armoiries : de sable à 12 étoiles d'or, 4.4.4 (Pl. III, N° 8).

(Lacune pendant la fin du XVème siècle).

RAOUL GESLIN
Frère Raoul Geslin était issu d'une maison d'ancienne chevalerie du diocèse de Saint-Brieuc, portant pour blason : d'or à 6 merlettes de sable, 3.2.1 (Pl. III, N° 9).

Il fut maintenu en possession de son abbaye, malgré les démarches de son compétiteur frère Mathurin de Chauvigny, proche parent d'André de Chauvigny, baron de Rays, mort en 1502, essaya de le supplanter et en appella au Conseil de Bretagne, qui à la date du 4 septembre de la même année, rendit l'arrêt suivant :

« Mandement dirigé aux Juges de Nantes, impétré de la part du procureur général, contre Me Mathurin de Chauvigny, non originaire de ce dit pays, et suppozant que par les indulz de cedit pays, n'est loisible ne permis aux alienigènes tenir bénéfice en cedit pays, sans tout premier en avoir congié et licence du prince, et pareillement treicter les subgectz en icelluy, en autre lieu que cedit pays, en matière possessoire aprês y avoir esté intentée ; et que neanmoins ledit de Chauvigny en y contrevenant a fait convenir en court de Romme, frère Raoul Geslin, originaire de cedit pays touchant labaye de la Chaulme, neanmoins le proceix intenté en conseil par avant ces heures. Sur quoy a esté deffendu audit de Chauvigny, de non le tracter en cour de Romme, a peine de diz mil escuz et autres peines arbitrables, avecques prandre de corps ledit de Chauvigny, et celui qui fist savoir ladite citation en cour de Romme » [Note : Arch. départ., série B., reg. de la Chancellerie, 1502, fol. 111].

JEAN DU PLEISSEIX
Ce religieux était abbé en 1506, mais il fut débouté l'année suivante.

JEAN COUTELIER
Jean Coutelier prend le titre d'abbé en 1507.

LOUIS DE SAIGES
Louis de Saiges ou d'Aiges tenait la crosse abbatiale en 1513.

L'abbaye de la Chaume ressentait alors les fâcheux effets produits par la mort du baron de Rays, André de Chauvigny, en 1502. Ce riche et puissant seigneur étant décédé sans enfants, nombre de prétendants surgirent pour entrer en possession de la Baronnie. Parmi eux figurent les de la Tremoille, le sire du Plessis-Guérif, les de la Lande-Machecoul, etc... De longs et ruineux procès furent entamés, les archives du château enlevées et pillées par chacun des prétendants, qui voulant faire acte de possession nommait ses adhérents. C'est ce qui explique les compétitions et les nominations qui eurent lieu pendant le premier quart du XVIème siècle.

JACQUES DE LA PORTE
Frère Jacques de la Porte, présenté par le baron de Rays, à la nomination de l'abbé de Redon, le 1er octobre 1519, ne fut pas agréé de ce dernier, qui lui opposa frère Antoine Geoffroy, élu en 1516 et maintenu postérieurement par lettres de la Chancellerie du 18 juillet 1522.

Mais Jacques de la Porte appella de cette décision au Conseil, le 23 juillet, et gagna sa cause [Note : Hist. de Bretagne. — D. Lob. Pr. II col. 1622. « Présentation par Tanguy Sauvaige, baron de Rais, seigneur du Plessis-Guérit et de Machecou, de la personne de frère Jacques de la Porte, pour être pourvu de l'abbaye de la Chaulme, à notre Saint-Père le Pape et à l'abbé de Redon, duquel dépend l'abbaye. — Les registres de Chancellerie, auxquels les historiens bretons ont emprunté ces citations, manquent aujourd'hui dans l'intéressante série conservée aux Arch. départ. de la Loire-Inférieure].

Le 15 octobre 1543, « humbles religieux et dévotz orateurs, Révérend père en Dieu frère Jacques de la Porte, humble abbé de ladite abbaye du benoist moustier de Nostre-Dame de la Chaulme, frère Jaroceau, secrétaire d'icelle, frère François Cyphye, recepveur de ladite abbaye, frère Thomas Hurtin, frère Jean Picard, les tous prebstres et religieux de ladite abbaye », réunis en chapitre dans leur couvent, rédigèrent l'aveu et dénombrement des terres, rentes et héritages qu'ils tenaient « prochement et noblement de Monseigneur le Daulphin de Viennois, duc de Bretagne, en et soubz sa court et juridiction de Loyaulx », pour le présenter à la Chambre des Comptes [Note : Arch. Départ. de la Loire-Inférieure ; Domaines ecclésiastiques. Aveux de l'abbaye de la Chaume].

Le 13 novembre de la même année, l'abbé de la Porte prêta « serment de fidélité au Roy pour cause du temporel de son abbaye » [Note : Arch. Départ. de la Loire-Inférieure ; Reg. des hommages, B 1008, fol. 52 ; B 1009, fol. 58].

Le 20 janvier 1555, Me Nicolas Chatellier, docteur en droits, délégué par l'archidiacre de Nantes, pour visiter les églises du climat ou doyenné de Rays, constatait que l'abbaye, alors sous saisie et fort mal menée, devait compter dans son personnel cinq religieux prêtres et un novice [Note : Arch. Dép. de la Loire-Inférieure ; Visite du climat de Rays ; Machocoul, « CALMA ; retulerunt dicti monachi quod deberent esse quinque prubiteri et unus novicius. Dicta abbatia est in saesina et male tractatur »].

Le 22 mai 1556, Jacques de la Porte rendit aveu pour son monastère et son église à Jean d'Annebaut, baron de Rays [Note : Arch. Départ. ; Aveu du pays, terre et duché de Rays, par Messire Pierre de Gondy, rendu le 19 août 1675, magnifique manuscrit in-folio, relié en velours vert] et vers les premiers jours de juin « renouvella au Roy son serment de fidélité, par Messire Olivier de Montauban, son procureur spécial, pour raison du revenu et temporel de ladite abbaye tenu prochement en fief admorty à devoir de prières et oraisons » [Note : Arch. Départ. ; Reg. des hommages, B 1010, fol. 177].

La Chaume, dit frère Jousseaume, est très redevable à cet abbé qui la gouverna pendant quarante ans et maintint toujours avec fermeté les droits que lui contestaient les seigneurs de Rays. Il les obligea de recevoir ses aveux, d'admettre et de reconnaître sa haute, moyenne et basse juridiction sur tous les hommes et sujets relevant des fiefs de la Chaume.

Jacques de la Porte fut le dernier abbé nommé par les barons de Rays ; il mourut à Nantes pendant les troubles suscités par les protestants et sa mort, continue notre auteur, fut célée à ses religieux, afin de les empêcher de procéder à une élection [Note : Frère Jousseaume, dans son historique, donne la date de 1563 comme celle de la mort de l'abbé. Mais il y a là certainement une erreur, puisqu'il lui accorde quarante ans de prélature à partir de 1519, ce qui nous conduit à 1559 ou 1560, date exacte que confirme le serment de fidélité de son successeur, prêté cette même année].

Jacques de la Porte appartenait à une famille originaire du Poitou et bien connue en Bretagne, de laquelle est issu le maréchal duc de la Meilleraye, et portait pour armoiries : de gueules au croissant d'hermines (Pl. III, N° 10).

OLIVIER DE MONTAUBAN
D'après D. Taillandier, cet abbé fut député vers la cour de France par les Etats de Bretagne tenus en 1567. Le 27 avril 1558, il prêta au roi son serment de fidélité, renouvelé le 10 juin 1560, et dont voici la mention : « Révérend père en Dieu, Messire Ollivier de Montauban, abbé de Notre-Dame de la Chaulme, évesché de Nantes, fait au roy le serment de fidélité pour raison du revenu et temporel de ladite abbaye, sans préjudicier au seigneur baron de Rays, dont il dict ladite abbaye estre prochement tenue, à prières et oraisons, en fyé amorty dont il a esté pourveu, par le roy, puis deux ans derniers, et sans prejudice du procès pendant entre ledit baron de Rays et ledit de Montauban » [Note : Arch. Départ. Reg. des hommages. Série B. N° 1009, fol. 91 et 101 ; B 1010, fol. 182 et 191].

Comme on le voit, c'était le roi de France qui avait nommé, se substituant ainsi pleinement aux droits réels des représentants du fondateur. Le 19 décembre 1564, Olivier renouvela son serment à peu près dans les mêmes termes ; et l'article suivant d'un des registres plumitifs de la Chambre des Comptes donne la date de sa mort : « La saesie est apposée sur les fruits temporels et revenus de l'abbaie de la Chaulme, au diocèse de Nantes, vaccante par le déceix de deffunt Me Olivier de Montauban dernier abbé ; et pour regir les fruits, la Chambre a commis Me Michel Loriot, à présent fermier du domaine de Nantes. Du 13 juin 1569 » [Note : Arch. Départ. Série B. 1300, 1568-1569. Reg. plumitifs de la Chambre, fol. IIc XXXIII].

Monsieur de Montauban, archidiacre de la cathédrale de Nantes, nous dit frère Jousseaume, obtint l'abbaye en cour de Rome, per obitum. Il en afferma le temporel à un marchand de Machecoul, auquel il abandonna les droits de lods et ventes sous la condition qu'il paierait les gages des officiers de la juridiction pour en continuer l'exercice.

Le 22 mai 1561, l'abbaye de la Chaume était visitée par Toussaint de Laval, vicaire général d'Antoine de Crequi, évêque de Nantes, qui rapporte en ces termes le procés-verbal de sa visite :

« Nobilis et circumspectus vir Dominus Olivérius de Montauban, abbas commendatarius, abbatie de Calma, abest.

Nomine cujus comparuit frater Johannes Datin, sacrista, qui dixit eumdem dominum abbatem teneri ad integrum officium singulis diebus diurnum et nocturnum.

Frater Franciscus Syphie.

Frater Julianus Le Flave, dyaconus, qui interrogatus confessus fuit se antea religiosus fuisse monasteris de Bourgneuff, nullamque obtinuisse dispensasionem pro commutatione voti.

Johannes Brechard, presbiter.

Petrus Remaud, presbiter.

Mathurinus Jollain clericus.

Legatum en eadem ecclesia per defunctum N... Pellerin, de puna mina in hebdomada, in plena dispositione dicti abbatis obtinet et desservit dictus Syphie.

Retulit nobis dictus Syphie debere esse quinque monachi in eadem abbatia ex antiqua fondatione, présentes sunt tantum duo, et duo presbitari seculares » [Note : Arch. Départ., G. 43. Liber visitationis B. In C. P. D. D. Antonii, Dei gracia episcopus Nannetensis, in Climate Ultraligeris, fol. 42 et 48. L'abaye de la Chaulme ; anno Domini 1561, die vero vigesima secunda maii, etc....].

Cette visite du 22 mai 1561 et la date du décès d'Olivier, antérieure seulement de quelques jours au 13 juin 1569, indiquent positivement que le serment de fidélité prêté au roi le 19 avril 1561, par un Louis de Montauban, est le fait d'une erreur de copiste, qu'il faut lire Olivier et rayer ce Louis de Montauban [Note : Le registre des hommages B 1008, fol. 89, Arch. Départ., dit « Révérend Père en Dieu Messire Louis de Montauban, abbé de N.-D. de la Chaulme, fait au Roy le serment de fidélité qu'il doibt et luy est tenu faire pour raison des revenus et temporel de ladite abbaye qu'il tient à prières et oraisons, en fief amorty sous la juridiction de Nantes, et sans préjudicier aux droits du seigneur d'Annebaut, baron de Rays. 19 avril 1561 ». Les registres de la même série B 1009, fol. 104 et B 1010, fol. 194 reproduisent une mention identique. Mais en présence de nos deux dates 22 mai 1561 et 13 juin 1569, il n'y a qu'une explication possible, celle de la substitution, par un copiste étourdi ou maladroit, du nom de Louis à celui d'Olivier, et par conséquent il faut rayer Louis de Montauban].

Pendant la régence de cet abbé eurent lieu les deux faits suivants.

Chacun sait qu'avant la patriotique institution de l'Hôtel des Invalides, par Louis XIV, les vieux soldats blessés ou amputés étaient envoyés dans les abbayes et monastères. Mais, presque toujours, ces hommes, considérés comme une charge inutile et gênante, n'obtenaient ni les soins ni les égards dus à leur position honorable et malheureuse.

C'est ce qui arriva, en 1555, à Rolland Papin, « religieux et frère lay ou oblat de la Chaume », suivant lettres du roi, et obligé d'intenter un procès à l'abbé pour être admis dans le couvent.

Après maints et maints exploits qui s'échangèrent, depuis 1565 jusqu'en 1576, c'est-à-dire pendant l'espace de onze ans, l'abbé fut condamné à payer et continuer de solder à l'invalide tant qu'il vivrait « quatre solz par jour ».

L'abbé étant décédé, Papin, qui ne savait à qui s'adresser, eut recours au fermier de l'abbaye, appelé Francisque. Nouveau procès, à la suite duquel celui-ci, condamné à payer par le présidial de Nantes la pension et les arrérages depuis sept ans et sept mois, fit intervenir le nouvel abbé, qui à son tour appela de cette sentence.

Papin, soutenait-il, devait montrer trois choses pour être moine lay : 1° la fondation royale ducale, ou comtale ; 2° les lettres à lui expédiées sous le grand sceau ; 3° qu'il « a esté rendu estropiat, et reçeu playes en guerre pour le service du Roy ». Que d'abord l'abbaye de la Chaume n'est ni de fondation royale ou ducale, mais bien des barons de Rais ; qu'ensuite, le poursuivant n'a pas de lettres du roi, mais seulement un titre de provision qui dit qu'il en a, et en troisième lieu, qu'il « n'appert qu'il soit aussi blécé ».

Le malheureux soldat répondait à ces subtilités « que ladite abbaye est fondation royale, et que le Roy a ce droit de régale de pouvoir pourvoir d'un moine et frère oblat. Qu'il avait des lettres, mais qu'il les a perdues, et que la sentence de provision dont est cas, donnée par le substitut du procureur général du Roy, est fondée sur les dites lettres ; quant aux plaies, il montre sa personne qui en porte témoignage ». Le baron de Retz intervint également. La sentence du présidial fut maintenue, 29 septembre 1577, sans préjudice de ses droits, et un conseiller reçut l'ordre de descendre à la Chaume, pour savoir combien elle renfermait de religieux et comment s'y faisait le service divin [Note : Mémoires recueillis et extraits des plus notables et solennels arrêts du Parlement de Bretagne, par du Fail. Rennes, 1579, p. 186].

Le second fait arrivé pendant la prélature d'Olivier de Montauban, qui vraisemblablement, de même que ses prédécesseurs et successeurs, ne résidait guère à son abbaye, est relatif à la dégradation d'un prêtre. Il n'y avait pas d'exemple à Nantes d'une exécution semblable depuis Pierre Mauclerc, c'est-à-dire au moins depuis trois siècles et demi, dit l'abbé Travers [Note : Histoire des Evêques de Nantes, t. II, p. 401. — Le registre de l’évêché, duquel Travers a extrait cette curieuse procédure, n'existe plus], auquel nous empruntons les détails qu'il nous a transmis à ce sujet.

Le 26 janvier 1568, l'évêque de Nantes, Philippe du Bec, assisté de l'évêque de Luçon, Jean-Baptiste Tiescelin, et du doyen de Nantes, Antoine de Saint-Marsal, les deux premiers en habits pontificaux, le dernier en costume de chanoine, procédèrent, dans la salle de l'évêché, où le présidial de Nantes avait fait conduire le coupable, à la dégradation de frère Jean d'Astin, prêtre religieux, sacriste de l'abbaye de la Chaume. Le greffier criminel du présidial lut d'abord l'arrêt du Parlement du 19 janvier 1568, qui ordonnait la dégradation et confirmait la sentence du présidial du 24 décembre 1567.

« L'évêque commença la cérémonie par une exhortation au coupable, qui était à genoux et revêtu des habits sacerdotaux. Il les lui ôta l'un après l'autre et le déclara dégradé et déposé ab officio et beneficio par les canons pour toujours. L'évêque déchargea sa conscience de la procédure criminelle contre d'Astin, et en chargea le parlement ; il livra ensuite le coupable aux juges présidiaux, en leur recommandant d'user de clémence à son égard.

La sentence fut exécutée le même jour ; d'Astin fit amende honorable, audience tenante, en chemise, tête nue, une torche ardente de trois livres à la main ; il fut ensuite tenaillé aux deux mamelles, conduit sur l'échafaud en la place du Bouffay, où il fut tenaillé de nouveau en quatre autres endroits de son corps, mis à la torture d'escarpins, pendu, étranglé et son corps brûlé. Ce misérable, avec d'autres complices, avait abusé d'un jeune homme, et pour en avoir le consentement et l'obliger au secret l'avait tellement brûlé par tisons de feu, ou fers rouges, qu'il en était mort quatre jours après. Astin demanda son renvoi à la Cour qui lui fut refusé ; il en appela ensuite au Parlement qui confirma entièrement la sentence du Présidial de Nantes ».

Olivier de Montauban appartenait à une branche cadette de cette puissante famille bretonne dont une branche était fixée dans le comté nantais. Olivier possédait les seigneuries du Goust, le Mas, le Port-Durand, Rochefort-sur-Sèvre, etc... Elle portait pour armes : de gueules à 7 macles d'or, 3.3.1. au lambel d'argent de 4 pendants (Pl. III, N° 11).

HENRY DE RASTELLI
Au décès de leur abbé, nous apprend frère Jousseaume, « les religieux s'estant assemblés esleurent le vénérable frère Henry de Rastelly, lequel soustint les droits de son abbaye avec beaucoup de vigueur, jusques à sa mort qui arriva en 1594. Il laissa par son testament plus de seize cent escuz d'or, dont il destinoit une partie à la construction de son mausolée. Mais, ayant nommé pour exécuteur de son testament l'intendant du seigneur Albert de Gondy, premier duc de Rets, ledit seigneur s'empara de tout l'or, l'argent, les meubles du deffunt, et le mausolée est demeuré à faire. On a seulement mis une tombe de pierre commune sur son corps qui est au pied du balustre du grand autel ».

Dom Taillandier indique Henri de Rastelli comme abbé de la Chaume en 1579, d'après un acte de l'église de Quimper, et nous n'avons sur lui aucun autre renseignement. Sa famille cependant ne devait pas être étrangère au comté nantais, car parmi les chanoines de la collégiale de Notre-Dame de Nantes, se trouve, de 1411 à 1416, Jean Rastelli.

Henri mourut au commencement de l'année 1594, après avoir occupé le siège abbatial pendant vingt-deux ans [Note : Le véritable manifeste de la fondation de l'abbaye de la Chaume, Biblioth. nat., Mss. (latin 12680), p. 9].

PIERRE DE GONDI [Note : Les Catalogues placent ici un Claude-Etienne Nouvellet, abbé en 1594, qu'il faut nécessairement rayer, d'après les documents nouveaux et inédits que nous avons sous les yeux]
Frère Jousseaume nous apprend que les religieux de la Chaume furent « empeschez de s'assembler pour procéder à l'élection d'un abbé ». Le cardinal Pierre de Gondi, comte de Joigny, seigneur de Villepreux, et évêque de Paris, frère d'Albert de Gondi, duc de Retz, obtint l'abbaye en cour de Rome et en prit aussitôt possession.

Pierre de Gondi congédia les juges de la juridiction de la Chaume, et en confia l'exercice aux officiers de la juridiction de Machecoul, complètement à la discrétion du duc de Retz [Note : La juridiction de la Chaume s'exerçait publiquement dans une des maisons du marché de la ville de Machecoul nommée le Porche. (Monasticon Bénédictinum, latin 12680, mm. Biblioth. nationale)]. Cette mesure porta le plus grand préjudice au monastère, et lui causa par la suite une perte de plus de cinq cents livres de rente annuelle ; elle fut l'origine du procès intenté à la duchesse de Lesdiguières, dont il sera parlé plus loin.

Le Cardinal voulut imposer aux religieux des règlements que ceux-ci refusèrent d'accepter ; et plutôt que de s'y soumettre, ils quittèrent l'abbaye, dans laquelle ils furent remplacés par « six seculiers, tant prêtres que clercs, qui servaient de chapelains au duc de Retz, et vinrent s'établir dans le logis abbatial ». Il afferma tout le temporel de l'abbaye, se réservant le casuel, dont il confia la recette au receveur du duc de Retz, qui la fit toujours depuis cette époque. De sorte, ajoute Frère Jousseaume, « que Madame la duchesse s'est imaginé que cette recette a toujours été faite au nom des seigneurs de Machecoul, ses prédécesseurs, et non point au nom des quatre abbez, ses oncles, qui se sont succédés les uns après les autres à ladite abbaye ».

Le cardinal Pierre de Gondi, fils d'Antoine de Gondi, seigneur du Perron, et de Marie de Pierrevive, gouvernante des enfants de France, naquit à Lyon en 1533 et mourut à Paris le 17 février 1616, âgé de quatre-vingt-quatre ans. Il tenait en commende les abbayes de Saint-Jean des Vignes, de Saint-Crespin de Soissons, de Saint-Aubin d'Angers, de Saint-Martin de Pontoise, de Sainte-Marie de Champagne et de Lespau au diocèse du Mans [Note : Histoire généalogique de la maison de Gondi, par M. de Corbinelli ; Histoire des grands-officiers de la couronne, par le P. Anselme, t. III, etc].

La maison de Gondi, originaire de Florence, avait pour armoiries : d'or à 2 masses d'armes de sable, posées en sautoir, liées de gueules. (Pl. III, N° 12).

M. Hauréau omet à tort Pierre de Gondi dans sa liste des abbés de la Chaume. Corbinelli et le Père Anselme ne citent pas non plus ce monastère au nombre des riches bénéfices possédés par le cardinal, qui en eut cependant la jouissance depuis 1594 jusqu'en 1616, et non 1606, comme le disent D. Taillandier et l'abbé Tresvaux, ce qui nous oblige à rayer encore Olivier de Montauban, second du nom, inscrit comme abbé en 1615, par ces deux derniers auteurs.

HENRI DE GONDI
Henri de Gondi, fils d'Albert de Gondi, premier duc de Retz, pair et maréchal de France, général des galères, et de Claude-Catherine de Clermont-Vivonne [Note : Claude-Catherine de Clermont-Vivonne, une des femmes les plus spirituelles et les plus accomplies de son temps, avait épousé en premières noces Jean d'Annebaut, baron de Retz, de la Hunaudaye, etc..., fils de Claude d'Annebaut, maréchal de France, et de Françoise de Tournemine. A la mort de son mari, elle reçut à titre de douaire la pleine propriété de la baronnie de Retz qu'elle apporta en dot à Albert de Gondi, en faveur duquel cette terre fut érigée en duché-pairie en 1581], succéda à son oncle Pierre de Gondi en 1616. Il laissa les choses dans l'état où il les trouva, et confirma la commission donnée aux receveurs du duc son père pour la perception des droits féodaux de son abbaye.

En 1618, deux ans après sa prise de possession, il rétablit dans le monastère de la Chaume la règle de saint Benoît en y introduisant des religieux de la société de Bretagne, et congédia les prêtres que son oncle y avait placés. Il régla les pensions de ces religieux sur le chiffre du revenu temporel, et, désireux de les faire participer au casuel, il donna ordre au receveur de son pèse, chargé de cette recette, de compter aux moines la somme annuelle de trente livres, qui fût régulièrement payée depuis 1618 jusqu'en 1675, date du refus fait par les officiers de la duchesse de Lesdiguières de continuer à servir cette rente.

Henri de Gondi ne figure ni sur la liste de D. Taillandier, ni sur celle de l'abbé Tresvaux. M. Hauréau l'indique comme abbé depuis 1596 jusqu'en 1622, c'est-à- dire pendant vingt-six ans. En réalité, il ne jouit du titre d'abbé de la Chaume que pendant six ans, de 1616 à 1622, date de son décès, arrivé au camp du roi devant Béziers, le 13 août de cette dernière année. Il était alors âgé de cinquante ans, évêque de Paris, cardinal depuis 1618, et possédait en commende les abbayes de Buzay et de Saint Jean des Vignes de Soissons.

JEAN-FRANÇOIS DE GONDI
Jean-François de Gondi, frère puîné du précédent et premier archevêque de Paris, eut également l'abbaye de la Chaume en commende, et ne changea rien au mode de perception des revenus de sa communauté qu'il posséda pendant trente-deux ans. Il mourut à Paris le 21 mars 1654, âgé de soixante-et-onze ans, titulaire des abbayes de Saint-Aubin d'Angers, de Saint-Martin de Pontoise, prieur de Montlean et d'Aulnay.

JEAN-FRANÇOIS-PAUL DE GONDI
Jean-François 'Paul de Gondi, damoiseau souverain de Commercy, prince d'Euville, fils de Philippe-Emmanuel de Gondi, comte de Joigny, général des galères, et de Françoise-Marguerite de Silly, naquit en octobre 1614, et était neveu des deux abbés précédents. Bien connu sous le nom d'archevêque de Corinthe et de coadjuteur de Paris, il fut promu au cardinalat en 1652 et mourut le 24 août 1679, âgé de soixante-cinq ans. Il possédait en commende les deux abbayes bretonnes de Buzay, Quimperlé, et s'était démis en 1671 de celle de la Chaume, qu'il avait gardée pendant seize ans.

Ce fut lui qui laissa aux religieux la jouissance du jardin et du logis abbatial dans lequel ces derniers construisirent « neuf chambres fort raisonnables et belles du dortoir, dans la longueur et la largeur dudit logis, qui ont l'aspect du côté de l'Orient et du jardin qui est carré et fort grand. Il donna mille écus pour aider à refondre les quatre cloches et refaire le clocher pour les mettre » [Note : Mémoire de frère Jousseaume].

C'est ici que doit prendre place l'incident du long procès, engagé par l'abbaye contre la duchesse de Lesdiguières, au sujet des lods et ventes et de la rente de trente livres dont il a été parlé. La duchesse invoqua la possession immémoriale des officiers de la seigneurie, et les religieux, malgré leur bon droit incontestable, perdirent leur cause et furent condamnés aux dépens. La Bibliothèque nationale possède la copie d'un long factum, probablement rédigé par frère Jousseaume et dont nous citerons seulement les dernières pages qui résument assez bien l'ensemble de ce mémoire [Note : Le véritable manifeste de la fondation de l'abbaye de Notre-Dame de la Chaume et des devoirs et droits seigneuriaux qui y sont affectés par son fondateur. Monasticon Benedictinum, latin 12680, mm.] :

« ....... On aurait pu répondre que ce temps immémorial ne pouvait être véritable, puisqu'il commença dès l'an 1594, que cette illustre famille des Gondi entra en jouissance de l'abbaye de la Chaume, dont elle demeura maîtresse pendant l'espace de soixante-seize années, pendant lesquelles les seigneurs abbez de ladite famille en ont eu la possfssion. Le premier desdits seigneurs abbés, après en avoir pris possession, fit cesser, de son autorité, l'exercice de la juridiction de l'abbaye, en congédiant les officiers établis par les abbés réguliers ses prédécesseurs, et en obligeant ses sujets à reconnaître la juridiction de Monseigneur le duc de Retz son frère. C'est ce qu'on appelle maintenant temps immémorial, moyen dont se sont servis les seigneur et dame de Retz pour faire débouter les religieux de ce droit de juridiction.

Ce fut ce même seigneur cardinal abbé qui entra en jouissance des droits de lods et ventes, à la manière qu'en avaient joui ses prédécesseurs abbés ; mais ne pouvant en faire lui-même la recette, il en chargea le receveur du duc de Retz son frère, nommé Danisy. Cette commission se prouve par les acquits qu'il a donnés des sommes versées pour ledit droit de lods et ventes, au nom dudit seigneur cardinal abbé. Cette commission ayant été approuvée par chacun des trois seigneurs abbés, ses neveux, qui lui ont succédé dans ladite abbaye, les uns après les autres, il s'ensuit que cette recette a dû être faite au nom desdits trois seigneurs abbés, et non point au nom des seigneurs de Machecoul qui ont succédé à Monseigneur Albert de Gondi, premier duc de Retz, qui avait trouvé bon que le sieur Danisy, son receveur général, fit la recette en particulier de ce droit de lods et ventes au nom du seigneur cardinal Pierre do Gondi son frère, et de Monseigneur le cardinal de Retz son fils, qui lui succéda immédiatement après sa mort, et entra en la même jouissance de ce droit de lods et ventes. Cette jouissance se prouve par le commandement qu'il fit au receveur, de payer annuellement sur les deniers de cette recette la somme de trente livres aux religieux de la Chaume, qui leur fut régulièrement payée pendant six ans, que ledit seigneur cardinal fut abbé. Cette somme de trente livres continua d'être payée par les receveurs des seigneurs de Machecoul, pendant trente-deux ans que Monseigneur Jean-François de Gondi, archevêque de Paris, son frère, en eut la jouissance, laquelle ayant passé à Monseigneur le cardinal de Retz, son neveu, il eut la bonté de ratifier tout ce que ses deux prédécesseurs avaient ordonné au sujet du paiement de cette rente de trente livres, provenant de la recette des droits de lods et ventes que continuaient de faire les officiers des seigneurs et dames de Machecoul, en vertu de la première commission que leur en avait donnée Monseigneur le cardinal Pierre de Gondi, abbé en l'an mil cinq cent quatre-vingt-quatorze. Laquelle commission ayant été ratifiée, comme il a été dit, par chacun de ses trois successeurs abbés, à leur entrée en ladite abbaye, il s'ensuit, par une conséquence incontestable, que la recette de ce droit de lods et ventes a dû être faite au nom desdits seigneurs abbés, et non au nom des seigneurs de Machecoul, puisque la continuation du paiement des trente livres s'est toujours faite sans interruption depuis mil six cent dix-huit jusqu'en mil six cent soixante-dix-sept, des deniers de ladite recette et non point des deniers desdits seigneurs et dames de Machecoul, qui n'auraient point approuvé que les seigneurs abbés de la Chaume eussent chargé leur recette du paiement annuel de ladite somme de trente livres ; ce qui est encore une preuve certaine que lesdits seigneurs et dames de Lesdiguieres ont été abusés par leurs officiers, qui leur ont persuadé que l'abbaye de la Chaume n'avait jamais eu aucun droit de juridiction sur les hommes et sujets de l'abbaye, puisque de temps immémorial les sujets les reconnaissaient pour leurs propres seigneurs, et la juridiction de Machecoul comme leur propre barre, et par conséquent que les droits de lods et ventes qu'on recevait sur les dépendances de ladite abbaye leur appartenaient légitimement, et non point aux abbés et religieux de la Chaume qui n'ont aucun droit de juridiction sur les suites des dépendances de l'abbaye.

Voilà la croyance dans laquelle étoit feue Madame la duchesse de Retz, lorsqu'elle déffendit à ses officiers de continuer le paiement de ladite somme de trente livres, attendu qu'elle étoit persuadée que c'étoit une charité, et non pas un droit, qu'on avoit toujours fait aux religieux de la Chaume, qui, s'en pouvant passer présentement, ne leur devoit point être continué.

Mais Madame ayant été désabusée de cette erreur par le raisonnement que je lui fis de la vérité de ce droit de lods et ventes et du paiement de ladite somme de trente livres, qui leur avait été continuée depuis mil six cent dix-huit jusqu'à la mort de Monseigneur le cardinal, en mil six cent soixante-dix-sept : elle me demanda si j'avais des actes authentiques concernant les preuves de tout ce que je lui avais avancé au sujet de la jouissance et possession du droit de lods et ventes que nous prétendions appartenir à l'abbaye de la Chaume, et au sujet du droit de juridiction que nous prétendions avoir sur les hommes et sujets des dépendances de l'abbaye. Luy ayant répondu que nos archives en étaient remplies, ce fut pour lors qu'elle me dit agréablement, en me mettant la main sur l'épaule : « Soyez persuadé, Père Procureur, que je ne veux point mourir avec du bien de l'Église, ny laisser à ma famille un bien qui ne m'appartient pas. Je vous demande seulement que vous me fassiez connaîttre la vérité sur ce droit de lods et ventes, et la création de cette rente annuelle de trente livres que mes officiers vous ont payée depuis un si longtemps, suivant leurs journaux de mises ». Et en me congédiant elle eut la bonté de m'exhorter à y travailler au plus tôt.

Mais mon travail a été inutile. La mort nous enleva cette pieuse et généreuse princesse pour la récompenser de ces saintes intentions de nous rétablir dans la jouissance des droits de notre abbaye, dans lesquels ses prédécesseurs, les anciens barons de Retz, et même Monseigneur Albert de Gondy, son grand-père, nous avaient maintenus, pendant plus de soixante années qu'il avait vécu, puisqu'il trouva bon que son receveur général fit la recette particulière de ce droit de lods et ventes au nom de Monseigneur le cardinal Pierre de Gondy, qui avait succédé au dernier abbé régulier de l'abbaye.

Mais j'ai lieu d'espérer que Madame la duchesse de Lesdiguières, qui jouit présentement de ce droit, entrera dans les sentiments de feue Madame la duchesse sa mère, après avoir reconnu la vérité que ce droit appartient légitimement à l'abbaye de la Chaume, et qu'elle ne voudra pas engager sa conscience pour un bien qui ne lui appartient pas ».

Les dernières lignes laissent deviner l'issue de ce procès. La duchesse de Lesdiguières résida fort peu au château de Machecoul, démantelé par ordre de Louis XIV. Dans ses mains, comme dans celles des de Villeroy, le duché de Retz ne fut plus qu'une terre régie par un intendant, et les religieux ne purent opposer aucune entrave à l'usurpation commise par les officiers de la juridiction ducale.

GUY DE LOPRIAC
Nommé sur la démission du précédent, Messire Guy de Lopriac de Coëtmadeuc prit possession du siège abbatial en 1670. « Il est très honneste homme, écrivait F. Jousseaume, et passe pour docte ; aussi est-il docteur de Sorbonne et chantre de la cathédrale de Quemper-Corentin. Il fait beaucoup d'estime des religieux de son abbaye ; c'est aussi tout ce qu'ils peuvent espérer de lui ».

Celui-ci, clerc tonsuré du diocèse de Rennes, reçut donc des bulles de nomination du Pape. Le 17 avril 1671, il nomma pour son procureur spécial, écuyer Jean Bourdin, conseiller du roi, auditeur de la Chambre des Comptes de Bretagne, qui le 31 mai se rendit dans la salle du chapitre de la Chaume. Là, « en présence des Révérends frères Jean Hermier, prieur ; Gilles Le Moulnier, sous-prieur ; Corisante Cormier et Félix de Renusson, les tous religieux, » il lut les lettres apostoliques, et prit possession de l'abbaye au nom du nouveau dignitaire [Note : Arch. de l'Evêché. Reg. des insinuations, du 20 février 1670 au 18 août 1678].

Le 17 septembre de la même année, il prêta au roi son serment de fidélité « pour raison du temporel de ladite abbaye avecq ses appartenances et dépendances, qu'il tient et releve prochement du roy en fief amorty à debvoir de prières et oraisons, sous la jurisdiction de Nantes » [Note : Arch. Départ. Reg. B.1008, fol. 379].

Messire Guy de Lopriac de Cëtmadeuc, conseiller et aumônier de la reine, docteur en Sorbonne, abbé perpétuel et commendataire de l'abbaye de Notre-Dame de la Chaulme, ordre de Saint- Benoît, rendit aveu au roi le 23 juillet 1678, pour tout ce que l'abbaye possède sous la vicomté de Loyaulx [Note : Arch. Départ. de la Loire-Inférieure. Domaines ecclésiastiques, aveux de la Chaume].

Le procès-verbal des visites faites au climat de Retz, par l'archidiacre de Nantes, en 1689, contient, au sujet de notre monastère, l'intéressante mention que voici [Note : Arch. Départ. de la Loire-Inférieure. Procès-verbaux des visites faites aux églises du climat de Retz par V. et D. Mre Antoine Binet, abbé de Meilleray, et grand archidiacre de Nantes en 1689. Fol. 44] :

« Notre Dame de la Chaume, de l'ordre de Saint-Benoît, en la nomination du Roy, sise à un quart de lieue de la ville de Machecou, en allant d'icelle à Fresnay, consistant en une grosse maison conventuelle, dans laquelle il y a un prieur, sous-prieur, un procureur et quatre religieux reformés dudit ordre, et en une belle église, cours, jardins. Plus en fiefs, juridictions et rentes, plus en trois métairies en cette paroisse, prés, marais salants ; et en dixmes en cette paroisse, celles de la Trinité, de Saint-Cyr, de Fresnay, de Sainte-Marie de Pornid, de Sainte-Pazanne, de Saint-Mesme et du Bois de Cené, tant pour l'abbé que pour les religieux, pouvant valoir cinq mille livres ; dont on a dit que la part de l'abbé étoit affermée 1500 livres à un fermier qui payoit outre ladite somme les décimes ordinaires et les aumosnes. Et que ladite abbaye estoit chargée de tout l'office ordinaire des Abbayes, et d'une aumone annuelle de 158 boisseaux de bled, seigle, jarosse et feuves mesure de Machecou ; laquelle aumosne se paioit aux receveurs du Bureau des pauvres des deux paroisses de Machecou… ».

Guy de Lopriac, fils de Guy de Lopriac sr de Kermassonnet, conseiller à la cour du parlement de Bretagne, et de Julienne Grignon, était frère de René de Lopriac en faveur duquel la seigneurie de Coëtmadeuc fut érigée en baronnie en 1637. Cette ancienne famille du comté de Vannes, qui posséda dans le comté nantais la vicomté de Donges et la seigneurie d'Assérac, portait : de sable au chef d'argent chargé de trois coquilles de gueules. (Pl. III, n° 13).

Mgr TURPIN DE CRISSÉ DE SANSAY
Christophe-Louis Turpin de Crissé de Sansay, nommé évêque de Rennes, le 15 octobre 1712, fut transféré sur le siège de Nantes en 1723.

Le roi le nomma à l'abbaye de la Chaume, vacante par le décès de M. de Coëtmadeuc le 21 mai 1725 [Note : Dom Taillandier dit donc à tort qu'il fut pourvu en 1723 « des abbayes de Quimperlé et de la Chaume, en place du doyenné de Saint-Martin de Tours qu'il avait remis au roi ». Lors de sa nomination à l'évêché de Rennes, Mgr Turpin avait dû résigner sa dignité de doyen du chapitre de Tours. L'abbé Tresvaux commet aussi une erreur en disant qu'il fut pourvu de l'abbaye, « étant évêque de Rennes »]. Les bulles données à Rome, à Sainte-Marie Majeure le 4 des nones d'août 1725, furent contrôlées à Paris le 1er octobre ; et le 9 du même mois M. Meslier, curé de la Trinité de Machecoul et doyen de Retz, prenait possession de l'abbaye au nom du prélat nantais, en présence d'une nombreuse assistance, ainsi que de Dom Louis- Jacques de Chiré, prieur ; frère Isaac Hugonier, sous-prieur; frère Léonard Colomb [Note : Arch. de l'Evêché de Nantes. Reg. des Insin., du 12 mai 1724 au 24 novembre 17291 fol. 44, verso].

Mgr Turpin de Crissé de Sansay mourut le 29 mars 1746. Ses armes étaient un écu losangé d'argent et de gueules. (Pl. III, n° 14).

M. DE POLY DE SAINT-THIÉBAULT
Gaspard de Poly de Saint-Thiébault, prêtre du diocèse de Besançon, licencié en théologie, fut nommé abbé commendataire de la Chaume par brevet du roi daté de Versailles le 17 avril 1746. Ses bulles, contrôlées à Paris le 17 juin, sont datées de Castel-Gandolfo, le 11 des calendes de juin.

Après la nomination du Roi, et avant l'investiture, les titulaires des bénéfices prêtaient au souverain pontife un serment dont la formule était la même pour tous. Voici le texte de celui prêté par le nouvel abbé ; la date fautive (1725) est évidemment celle qui a rapport à Mgr Turpin de Crissé de Sansay :

Forma juramenti. Ego Gaspardus de Poly de Saint-Thiébault, perpetuus commendatarius Monasterii Sanctœ Maria de Calma, ordinis sancti Benedicti, Nannetensis diœcesis, ab hac hora in antea fidelis et obediens ero Beato Petro sanctæque Apostolicæ Romanæ ecclesiæ et domino nostro domino Benedicto decimo quarto, ejusque successoribus canonice intrantibus non ero in consilio aut consensu vel facto ut vitam perdant et membrum, seu capiantur aut in cos violenter manus quomodo liber ingerantur, vel injuriæ aliquæ inferantur, quovis quæsito colore consilium vero quod mihi credituri sunt per se aut nuncios super literas ad eorum damnum me sciente nemini pendam ; Papotum Romanum et Regalia sancti Petri adjutor ejus ero ad retinendum et defendendum contra omnem hominem ; legatum apostolicæ sedis in eundo et redeundo honorifice tractabo et in suis necessitatibus adjuvabo ; jura honores privilegia et authoritatem Romanæ Ecclesiœ Domini nostri Papæ et successorum predictorum conservare, defendere, augere et promovere, curabo ; nec ero in consilio vel facto seu in tractatu in quibus contra ipsum Dominum nostrum vel Eamdem Romanam Ecclesiam aliqua sinistra vel prejudicialia personnarum, juris, honoris, status et potestatis eorum machinentur, et si talia a quibuscumque tractari novero vel procurari impediam hoc pro posse, et quanto citius potero commode significabo eidem domino nostro vel alteri per quem ad ipsius notitiam poterit pervenire ; regulas Sanctorum Patrum, decreta, ordinationes, sententias, provisiones, dispositiones, reservationes et mandata apostolica totis viribus observabo et faciam ab aliis observari ; hæreticos, schismaticos et rebelles Domino nostro vel successoribus prædictis pro posse persequar et impugnabo. Vocatus ad sinodum veniam, nisi præpeditus fuero, canonica præpeditione. Possessiones vero ad Mensam meam pertinentes neque vendam, neque donabo, neque impignerabo, neque de novo infeodabo, vel aliquo modo alienabo, etiam cum consensu conventus et Monasterii mei, inconsulto Romano Pontifice et constitutionem super prohibitione investiturarum bonorum jurisdictionalium ad ecclesias inferiores spectantium.

Datum anno Domini 1725. Editam servabo, sic me Deus adjuvet et hæc sancta Dei Evangelia. Brunet [Note : Arch. de l'Evêché. Reg. des Insin., fol. 161 verso].

A la suite de cet acte, nous donnons en entier le procès-verbal de prise de possession de l'abbaye de la Chaume le 1er juillet 1746, qui présente un certain intérêt par les détails qu'on y trouve :

« En vertu du Bref du Roy portant nomination de l'abbaye de Notre-Dame de la Chaume, ordre de Saint-Benoît, diocèze de Nantes, à Messire Gaspard de Poly de Saint-Thiébault, prêtre du diocèse de Bezançon, licentié en théologie de la faculté de Paris, de la maison de Sorbonne, demeurant à Paris en la maison de Sorbonne, paroisse de Saint-Benoist, donné à Versailles le dix-sept avril de la présente année 1746, signé Louis, et plus bas, Phelipeaux ; des Bulles de Cour de Rome, données par le pape Benoist XIV, au château Gandulphe, diocèze d'Albe, le 11 des calendes de juin dernier l'an sixième du Pontificat de Benoît XIV, impétrées en cour de Rome, par Brunet Baudry, banquiers ex-péditionnaires de la cour de Rome, vérifiées à Paris par Tournay et Marchand, expéditionnaires banquiers de ladite cour, le dix-sept dudit mois de juin, demeurants à Paris, controllées audit lieu ledit jour par ledit Marchand ; de la forme de prestation de serment envoyée de ladite cour de Rome, signée Brunet ; de l'attestation portant que ledit sieur Poly de Saint-Thiébault a signé le formulaire de foy dressé en exécution des constitutions de Nos Saints Pères les Pape Alexandre sept et Innocent dix, des 31 mai 1653 et 16 octobre 1656, contre la doctrine des cinq propositions de Cornelius Jansenius contenues dans son livre intitulé Augustinus, donné à Paris le 18 dudit mois de juin, signé de la Tousche, secrétaire de l'Archevêque de Paris ; de l'acte de fulmination desdites Bulles, par M. François de Ramaceul, prêtre, chanoine de l'Église cathédrale de Nantes, docteur en théologie et official de l'évêché de Nantes, le siége épiscopal vaquant, en date du 22 du même mois de juin, signé au délivré de Mandato Dni officialis J. Bahon, canon-secrétaire, scellé du sceau du chapitre de la cathédrale, et de la procuration consentie par ledit sieur de Poly de Saint-Thiébault à N. et D. Messire Pierre-Mathurin Sohier, prêtre, chanoine de l'église cathédrale de Nantes, etc., pour lui et en son nom, prendre possession de ladite abbaye de Notre-Dame de la Chaume, et requérir tous actes ce concernant, donnée à Paris le dit jour dix-sept dudit mois de juin, signée dudit sieur de Poly de Saint-Thiébault, Desmeure et son collègue notaires au Châtelet de Paris, laquelle procuration signée en marge Sohier, reste annexée aux présentes pour y avoir recours en cas de besoin : Nous soussigné René Deluen, notaire royal apostolique de la cour et diocèze de Nantes, reçu au Présidial dudit lieu, résident en la ville de Machecoul, à la requisition et de compagnie dudit sieur Sohier, demeurant au Palais épiscopal dudit Nantes, paroisse de Saint-Jean en Saint-Pierre, et de présent en cette ville logé à l'auberge des Trois Roys, sommes transportés à ladite abbaye de la Chaume, seize paroisse de Sainte-Croix de Machecoul, où étants arrivés et entrés au monastère de ladite abbaye, y aurions trouvé les Révérends Pères, Dom Louis Le Roy, sous-prieur, Dom Louis Vincent, procureur, et Dom Pierre Cherpentier, tous prêtres et religieux, à ladite abbaye et y demeurants, auxquels ledit sieur Sohier, en qualité de procureur général et spécial dudit sieur de Poly de Saint-Thiébault, ayant déclaré son transport et le sujet de sa commission, ont dit n'avoir aucun moyen empêchant la prise de possession dont est cas, au contraire être prest d'y assister, toutes fois cependant sous la réserve de leurs droits et sans qu'icelle y puisse préjudicier.

A l'instant lesdits religieux ont fait ouverture de la porte de l'église de ladit abbaye de Notre-Dame de la Chaume, et ledit sieur Sohier, audit nom, en conséquence desdits Bref, Bulles, prestation de serment, attestation, fulmination et procuration, ci-dessus dattés et référés, étant revêtu de soutane, surplis et étolle, serait entré dans ladite église, aurait pris de l'eau bénite qui lui auroit été présentée par ledit Révérend Père Dom Louis Le Roy, auroit monté au haut de l'église, se seroit agenouillé devant le Saint-Sacrement, auroit fait prières et oraisons, se seroit levé et monté à l'autel auroit baisé, ensuite descendu fait génuflexion devant le Saint-Sacrement, auroit ensuite été conduit, par le révérend Père Dom Louis Le Roy, en le chœur de ladite église, dans la première stalle du côté droit, désignée à l'abbé, s'y seroit assis et auroit levé ladite stalle, sonné les cloches et fait tous actes de bonne et valable possession.

Sortis à la porte de ladite église, nous avons lu et publié, tout ce que dessus, et la présente prise de possession à haute et intelligible voix, à ce que personne n'en ignore. Ce fait sommes allés dans le chapitre de ladite abbaye, ou ledit sieur Sohier, en ladite qualité, a pris place, aurions ensuite été conduits dans une grange apartenante à l'abbé, où ledit sieur Sohier est aussi entré, ouvert et fermé les portes et le portal d'icelle, et dans la cour y a arraché herbes, fait émotion de terre, et généralement fait et observé toutes les formalités requises et nécessaires pour une bonne et valable possession, prendre et acquérir audit sieur de Poly de Saint-Thiébault, de ladite abbaye de la Chaume, et de ses droits, appartenances et dépendances sans aucun trouble ni opposition de personne quelconque. De tout quoi ledit sieur Sohier, audit nom, nous a requis lui rapporter le présent acte, ce que nous lui avons accordé pour valoir et servir audit sieur de Poly Saint-Thiébault, ce que de raison. Le tout fait en présence de Messire Jean-Baptiste Galipaud, prêtre vicaire de la Trinité de Machecoul, demeurant au doyenné dudit lieu, et de N. H. François Moquard, docteur en médecine, demeurant en la ville de Machecoul, Grande-Rue, dite paroisse do la Trinité, témoins à ce requis et appellés suivant l'édit, qui ont signés avec ledit sieur Sohier et lesdits révérends Pères Dom Louis Le Roy, Vincent Cherpentier et Messire François-Pierre de Saint-Aubin, à ce présent, l'an 1746, le premier juillet, environ les onze heures du matin.

Signé sur la minute : Sohier ; J.-B. Galipaud, prêtre vicaire ; F. Moquard D. M. ; de Saint-Aubin ; fr. Louis Le Roy ; fr. Louis Vincent ; fr. Pierre Cherpentier, et Deluen notaire royal apostolique qui a ladite minute.

Controlé à Machecoul le 2 juillet 1746, par de Lamotte, qui a reçu six livres. Deluen notaire royal apostolique » [Note : Arch. de l'Evêché. Reg. des Insin., du 8 juillet 1745 au 7 novembre 1747. Fol. 165 verso et 166].

M. de Poly de Saint-Thiébault portait pour armoiries : d'azur à la fasce d'or chargée d'une quintefeuille d'azur. (Pl. III, n° 16).

M. DU CLUZEL
Pierre-François du Cluzel appartenait à une ancienne famille du Périgord, qui porte pour armes : d'or au pin de sinople au cerf passant de gueules sur une terrasse de sinople ; supports deux lions (Pl. III, n° 16). Il était chantre et doyen de la cathédrale de Tours, lorsque par bulles signées à Rome le 12 décembre 1778, contrôlées à Paris le 2 janvier 1779, il obtint l'abbaye de la Chaume, de laquelle il fit prendre possession le 11 janvier par M. Simon Blanchard, recteur de Sainte-Croix de Machecoul [Note : Arch. de l’Evêché. Reg. des Insinuations, du 9 janvier 1775 au 22 juillet 1779]. M. du Cluzel mourut au mois de mai 1782.

MESLÉ DE GRANDCLOS
Julien-Jacques Meslé de Grandclos, vicaire général du diocèse de Saint-Malo, fut nommé le 4 août 1782, par brevet du roi, dont voici la teneur :

« Aujourd'huy quatrieme jour du mois d'aoust mil sept cent quatre vingt deux, le Roy étant, à Versailles, bien informé des bonnes vie, mœurs, piété, suffisance, capacités et autres vertueuses qualités du sieur Jacques-Julien Meslé de Grandclos, vicaire-général de Saint-Malo, et voulant par ces considérations le gratifier et le traiter favorablement, Sa Majesté lui a accordé et fait don de l'abbaye de la Chaume, ordre de Saint-Benoît, diocèse de Nantes, qui vaque à présent par le décès du sieur du Cluzel, dernier titulaire, à la charge de sept cent soixante livres de pensions annuelles et viagères, que sa Majesté veut être dorénavant payées et livrées sur les fruits et revenus de ladite abbaye, scavoir: quatre cent vingt livres au sieur Boisseau, aumonier du regiment de Grenoble, artillerie ; cent soixante dix livres au sieur Le Grand d'Arcantère, chantre de l'église de Varry, diocèse d'Auxerre, et cent soixante dix livres au sieur Pignot, curé de la Roche, diocèse de (blanc). Lesdites pensions payables, tant par ledit sieur de Grandclos, que par ceux qui posséderont après lui laditte abbaye ; m'ayant Sa Majesté commandé d'expédier toutes lettres et dépêches nécessaires en cour de Rome, pour l'obtention des Bulles et provisions apostoliques de ladite abbaye, et cependant pour assurance de sa volonté, le présent brevet qu'elle a signé de sa main, et fait contre signer par moi, conseiller secrétaire d'état et de ses commandements et finances. Signé Louis.

Et plus bas, Amelot » [Note : Arch. de l'Evêché. Reg. des Insin., du 24 février 1781 au 27 janvier 1783. Folio 200 v°].

Les bulles, datées de Rome, 1782, furent contrôlées à Paris le 27 décembre. La prise de possession du monastère abandonné eut lieu suivant la forme usitée, le 8 octobre de la même année, par Messire Julien Genevoy, prêtre recteur de la Chevrolière, assisté du doyen de Retz, M. Hervé de la Bouche.

M. de Grandclos était fils de M. Jacques Meslé de Grandclos et de Madame Thonmse-Marie Gouasson. M. de Grandclos, très riche armateur, avait obtenu du roi Louis XV des lettres de noblesse, dont les considérants fort honorables méritent d'être reproduits, pour montrer la faveur avec laquelle le gouvernement traitait alors le commerce, aujourd'hui abandonné et qui de plus en plus tend à s'anéantir et disparaître.

« ... Notre cher et bien amé le sieur Pierre-Jacques Meslé de Grandclos, négociant-armateur à Saint-Malo, étant un des négociants de notre royaume qui ont le plus contribué à le rendre florissant, Nous Nous sommes déterminés à lui conférer la noblesse comme une juste récompense de ses travaux. Issu d'une ancienne famille de négociants-armateurs, petit-neveu du sieur de Lépine D'Anican, qui mérita d'être annobly par le feu Roy notre très honoré seigneur et bisayeul, Nous sommes instruits que formé par les leçons et par les exemples de Jacques Meslé de Grandclos, son père, il s'est livré à la navigation dès sa plus tendre jeunesse, et qu'il a suivi cette carrière avec tant d'intelligence et de succès, que son père l'ayant ensuite associé à son commerce et à ses armements, il les a dirigés jusqu'à ce que l'âge de son père l'ayant déterminé à se retirer, il est resté seul à la teste de son commerce, qu'il a même considérablement augmenté ; qu'après avoir donné des preuves multipliées de son zèle pour l’Etat, par les différents armements qu'il a faits en course pendant la guerre, il a repris les entreprises maritimes aussitôt que le retour de la paix le lui a permis, et qu'il les a continuées jusqu'à ce moment ; qu'il est propriétaire de neuf grands navires, qui sont dans une activité continuelle sur les différentes mers, et de plusieurs autres bâtiments d'un rang inférieur, pour le service desquels il entretient plusieurs milliers de matelots et d'ouvriers de tout genre ; que quelques-uns de ses navires ont été employés pour Notre service, et qu'il est propriétaire d'une manufacture de cordages et agrès, où notre marine a trouvé quelques fois des secours utiles ; Aces Causes… A Versailles au mois d'avril 1768.
D'azur à un vaisseau d'or, ayant pavillon français, allant à pleines voiles sur une mer de sinople mouvante de la pointe de l'écu, et dirigé d'un pôle à l'autre par une étoile d'argent posée à l'angle droit du chef. (Pl. III, N° 17).
Enregistré à la C. des C. le 21 juin 1768 »
[Note : Arch. depart. Série B. Chambre des Comptes, Livre des mandements 54 1766-1770].

M. de Grandclos, qui clôt la liste des abbés de la Chaume, fut dépouillé de son bénéfice en 1792. Il avait l'habitude d'abandonner aux pauvres les revenus de ses bénéfices et partie de sa fortune particulière. Il rendit d'éminents services aux prêtres émigrés en Angleterre, et revint après la révolution à Saint-Malo, où il est décédé le six mars 1812, âgé de près de 82 ans, chanoine honoraire et vicaire général de l'évêché de Rennes.

 

Sceau de la Chaume et armoiries des abbés.

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