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ABBAYE DE PRIERES

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FONDATION et DOTATIONS

 

I - Sa fondation.

Blanche de Champagne, femme de Jean Ier, duc de Bretagne, avait déjà fondé l’abbaye Blanche, auprès de Quimperlé, et celle de la Joie à Hennebont. Elle voulut en fonder une nouvelle à l’embouchure de la Vilaine, sur le territoire de la paroisse alors appelée Belair, aujourd’hui Billiers. Elle envoya son aumônier à l’évêque de Vannes pour pour l’en instruire, et celui-ci écrivit la lettre suivante : « Cadioc, par la grâce de Dieu, évêque de Vannes, au vénérable et bien-aimé en J.-C. abbé de Cîteaux et aux autres abbés réunis au chapitre général, Salut. Notre auguste et glorieuse maîtresse, Blanche, duchesse de Bretagne, nous a envoyé son chapelain, maître Daniel, pour nous faire savoir qu’elle se propose de fonder, dans la paroisse de Belair, près de Muzillac, au diocèse de Vannes, une abbaye de l’ordre de Cîteaux, qui serait de la filiation de Buzai. — Nous venons par ces présentes lettres vous apprendre que ce projet nous est agréable et que nous le verrons avec bonheur mettre à exécution dans de convenables et justes mesures. Nous accordons volontiers dès ce moment que les religieux de votre ordre, qui devront y résider, jouissent des libertés, privilèges, immunités et indulgences qu’ils possèdent ailleurs. Nous réservons pour l’église de Belair les dîmes sur toutes les terres de la paroisse, même sur celles de l’abbaye à moins de privilège contraire, et pour nous tous les droits épiscopaux sur les personnes des deux sexes, serfs ou colons qui résideront sur les propriétés du monastère, de manière qu’elles demeureront soumises à notre juridiction et à celle de nos sucesseurs les évêques de Vannes. Donné à Conleu, le jour de l’Epiphanie 1250 ».

Le chapitre général ayant adhéré aux propositions qui lui étaient faites, la construction du monastère commença aussitôt, et toutes les dispositions furent prises pour mener promptement l'oeuvre à bonne fin. Les abbés de Moreilles et des Châteliers furent envoyés, en 1252, pour examiner les travaux et rendre compte de l’état des choses. Voici leur rapport : Nous etc., faisons savoir que l’illustre duc de Bretagne ayant voulu fonder une abbaye de notre ordre, avons été députés par le chapitre général de Cîteaux pour l’inspection des lieux. Y étant arrivés le jour de l’octave de saint Jean-Baptiste, nous avons examiné les maisons, la bibliothèque, les appartements, meubles et dépendances, et le tout nous a paru convenable et la dotation suffisante. En conséquence, nous prévenons l'abbé de Buzai (Buzay), que le duc et la duchesse ont voulu constituer père de la nouvelle fondation, d’y envoyer un abbé et des frères pour en prendre possession et s’y installer suivant les formes de nos constitutions. Donné le jour de l’octave de la fête de saint Pierre et saint Paul.

Innocent IV, alors souverain pontife, avait écrit une Bulle au mois d'avril 1251 [ « ... Comme il a été exposé devant Nous, de la part de noble homme le Comte de Bretagne, qu'il veut fonder et doter de ses biens propres le monastère de Prières dans votre diocèse, en faveur de l'ordre des Cîteaux, Nous avons accueilli sa demande, et Nous mandons à Votre Fraternité, par ces lettres apostoliques, d'y établir par notre autorité le dit ordre, et d'introduire dans le monastère un abbé et des religieux, en frappant de censure ecclésiastique les opposants, et cela sans appel, pourvu toutefois que le dit Comte ait assigné au monastère sur des biens propres une dotation suffisante, suivant votre jugement »], et l’avait adressée à l’évêque de Vannes, pour lui enjoindre d’introduire personnellement les religieux dans la nouvelle abbaye, de réduire par les censures ecclésiastiques les opposants au silence, et de conduire l'oeuvre à son terme, pourvu que le duc eût tout réglé suivant les prescriptions du droit et les convenances. Cette Bulle ayant été présentée à Cadioc en temps opportun, grâce à la certitude qu’il avait que la question de l’excommunication du duc avait été bien examinée à Rome, requis ensuite par l’abbé de Buzai (Buzay), il établit et installa Godefroi et ses religieux à Prières, le 31 octobre 1252. Par une bulle du 28 mai 1254, le Pape Innocent IV accorda des biens spirituels au monastère : possibilités pour les religieux prêtres d'entendre des confessions et d'administrer les sacrements, possibilité de recevoir des dons en héritages, dispenses de payer de payer les dîmes ou droits sur les terres mises en culture, interdiction d'aliéner les bénéfices sans le consentement de l'ensemble du chapitre, interdiction pour les évêques d'intervenir dans le monastère, .... La nouvelle abbaye était censée fondée pour trente religieux. Blanche de Champagne avait donné son nom au monastère qu’elle avait fondé auprès de Quimperlé, celui de Notre-Dame de la Joie à celui d'Hennebont pour exprimer l'allégressse de sa dévotion envers la sainte Vierge : Prières, Abbatia Beatœ Mariœ de Precibus porte un nom si spécial qu’il ne laisse aucun doute sur ses intentions et celles de son mari.

 

Une vieille liste des premières fondations de Prières a été trouvée à la fin d’un Lectionnaire manuscrit de l'abbaye. On y voit quinze anniversaires, rangés suivant les mois et les jours de l’année, avec les noms des défunts. Les années des décès n’étant pas indiquées, il est parfois difficile de préciser les noms. C’est néanmoins un travail à faire ici, en rangeant les anniversaires, autant que possible, suivant l’ordre chronologique des décès.

On remarque d’abord que sur les quinze anniversaires précités, il en est six qui se rapportent à des personnages décédés avant la fondation de Prières, ou qui n’y figurent qu’à titre de bienfaiteurs de l’ordre de Cîteaux en général. Ainsi, au 5 décembre, on trouve l' « anniversaire de Jeanne, jadis comtesse, de Guillaume et de Ferrand, comte, à célébrer dans tout l’ordre ». — On y trouve également l' « anniversaire du roi Richard d'Angleterre (mort en 1199), à célébrer le mardi après l’octave de Pâques, et, en cas d’empêchement, par un office à douze leçons, au premier jour libre ». — Deux autres anniversaires, placés l’un au 18 janvier, pour la comtesse de Boulogne (?), l’autre au 4 août, pour Jean, comte d'Hibernie ou d'Irlande, se rapportent à des personnages peu près inconnus. — Il n’en est pas de même de « l'anniversaire de Philippe (II), roi des Francs, le 14 juillet (1223), ni de l’anniversaire de Louis (VIII), roi des Francs, le 8 novembre (1226) ». Les jours précis des anniversaires distinguent ces deux rois de tous leurs homonymes.

Tous les autres anniversaires sont postérieurs à la fondation de l’abbaye. On y voit figurer : « L’anniversaire, au 6 octobre, du roi et de la reine de Castille ». Il s’agit ici du roi saint Ferdinand III, mort en 1252, et de la reine sa femme. Ce prince était le cousin germain de saint Louis, roi de France, et l’allié du duc et de la duchesse de Bretagne : son anniversaire à Prières est donc facile à expliquer.

« L’anniversaire de la reine Blanche, au 28 novembre ». La reine Blanche de Castille, mère de saint Louis, mourut le 1er décembre 1252. Elle avait le même prénom que la duchesse de Bretagne, et avait avec elle des liens de parenté.

« L'anniversaire du roi de Navarre, au 12 août ». Ce roi de Navarre était Thibaud IV comte de Champagne ; il était le père de Blanche, femme du duc Jean Ier de Bretagne, et ainsi s’explique la fondation faite pour lui à Prières.

« L’anniversaire du pape Innocent et du cardinal Etienne, au 7 décembre ». Le pape Innocent IV, mort le 7 décembre 1254, avait accordé divers privilèges à l’abbaye, et sa mémoire y était naturellement en vénération.

« L’anniversaire de Bérengère, de la comtesse de Champagne et du duc d'Autriche, au 23 décembre ». La comtesse de Champagne pouvait être une parente de la duchesse de Bretagne ; les relations des deux autres sont inconnues.

 « L’anniversaire du duc de Brabant, au 28 février ». Henri III le Débonnaire, duc de Brabant, mourut en 1261 ; mais est-ce bien de lui qu’il s’agit ici ? Et pourquoi son anniversaire à Prières ?

« Anniversaire de Pierre, fils de Jean Ier, duc de Bretagne, le 20 décembre ». Ce jeune prince mourut à Paris, le 19 octobre 1268, à l'âge de 27 ans, et c’est naturellement à Prières que son père fonda son service anniversaire.

Tous ces anniversaires n’étaient pas semblables : les uns étaient solennels, avec une messe chantée et une série de messes basses ; les autres avaient l’office et la messe chantée ; ceux-ci avaient l’office récité dans le couvent ; ceux-là des messes basses seulement.

A côté des anniversaires mentionnés dans la vieille liste, il y avait d’autres fondations, dont quelques-unes sont connues par les titres de l'abbaye.

Ainsi, dès 1253, Barthélemy de Questembert fonda une chapellenie à Prières et lui donna pour dot les dîmes qu’il possédait dans la paroisse d'Elven ; il y ajouta peu après la métairie de Talhoet, située dans la même paroisse.

Beaucoup d’autres libéralités furent faites au monastère par divers seigneurs, et il est probable qu’elles n’étaient pas toutes gratuites, et que quelques-unes étaient chargées de services religieux.

Le 8 octobre 1286, mourut le duc Jean Ier, fondateur de l'abbaye : il fut inhumé dans le choeur de l’église, et il eut naturellement un anniversaire solennel ; la duchesse Blanche, sa femme, l’avait précédé le 11 août 1283, et avait été enterrée dans l’église de Notre-Dame de la Joie, fondée par elle.

Leur fils Jean II mourut à Lyon le 16 novembre 1305, et fut inhumé chez les Carmes de Ploërmel. Dans son testament, il légua 55 livres à l'abbaye de Prières pour célébrer son anniversaire tous les ans, au jour de sa mort.

Le 24 (ou 26) juillet 1328 mourut Isabelle de Castille (fille de Sanche IV dit le Grand, roi de Castille et de Léon de 1284 à 1295), seconde femme du duc Jean III (épousée en 1310) ; elle eut sa sépulture dans l'église de Prières, et sans doute aussi son anniversaire, bien que les titres ne le disent pas formellement. Son corps fut inhumé dans le choeur de l'église abbatiale de Prières, au-dessous du tombeau de Jean Ier, et sur son mausolée furent gravés ces mots pleins d'enseignements « sainte, douce, paisible, prudente, affable, modeste, féconde » [Note : Ferdinand III, roi de Castille et de Léon (1229-1252), fonda à Prières un anniversaire pour lui et sa femme]. Sa sœur Béatrice, mariée au roi de Portugal, Alphonse IV (1325-1357), fut prise du désir de ramener ses ossements en Portugal : en conséquence, elle pria Jean XXII de l'autoriser à accomplir son pieux désir. Le pape ne refusa pas, mais chargea les évêques d'Avranches, de Limoges et de Maguelonne de pressentir le duc de Bretagne ; si celui-ci y consentait et quand bien même de son vivant la duchesse eût choisi sa sépulture à l'abbaye de Prières, les mandataires pontificaux autoriseraient l'exhumation (21 août 1332) (Voir pièce justificative). Jean III dut être défavorable à ce projet, car le mausolée d'isabelle de Castille subsista à Prières jusqu'en 1715, époque à laquelle l'ancienne église de l'abbaye fut jetée à bas pour faire place à une autre de plus grandes dimensions [Note : PIÈCE JUSTIFICATIVE. Jean XXII permet de transférer en Portugal le corps d'Isabelle de Castille si le duc de Bretagne y consent. — Avignon, 21 août 1332 (Reg. Vat. 116, secrètes, f. 270 r°.). … Abricensi … Lemovicensi et.. Magalonensi episcopis. Exhibita nobis pro parte carissimorum in Christo filiorum nostrorum Alfonsi, regis, et Beatricis. regine Portugalie illustrium, petitio continebat quod quondam Elizabeth [Note : c’est une erreur du scribe, car tous les auteurs l’appellent Isabelle] ducissa, uxor dilecti filii nobilis viri Johannis ducis Britannie, soror ejusdem regine, olim in partibus illis, sicut Domino placuit, diem clausit extremum corpusque ipsius in monasterio de Prieres, ordinis Cisterciensis, Venetensis diocesis, extitit honorabiliter tumulatum. Cum attamen Rex et Regina prefati ossa dicte ducisse ad regnum Portugalie transferri desiderent ibidem, sicut de beneplacito dicte regine processerit tumulanda, nobis humiliter supplicarunt ut transferendi de ipso monasterio ad prefatum regnum Portugalie dicta ossa concedere licentiam dignaremur, nos itaque dicte supplicationi benignius inclinati licentiam hujusmodi, dummodo dicte translationi assensus dicti ducis accedat, tenore presentium concedentes, fraternitati vestre per apostolica scripta committimus et mandamus quatinus vos, vel duo, aut unus vestrum per vos vel alium seu alios, auctoritate nostra translationem hujusmodi fieri si, ut prefertur, de voluntate dicti ducis processerit etiam si prefata ducissa dum viveret apud dictum monasterium suam sepulturam elegerit faciatis contradictores, etc., non obstantibus quibusvis constitutionibus et privilegiis apostolicis aut statutis seu consuetudinibus monasterii et ordinis predictorum contrariis per que ipsa translatio posset quomodolibet impediri seu si aliquibus communiter vel divisim a sede apostolica sit indultum quod interdici. suspendi vel excommunicari non possint per litteras apostolicas non facientes plenam et expressam ac de verbo ad verbum de indulto hujusmodi mentionem. Datum XII kalendas septembris anno XVI] (G. Mollat).

« L’anniversaire du comte de Montfort se fait solennellement dans le couvent avec deux ministres, le 27 juin ». Ainsi s’exprime la vieille liste citée plus haut. Ce comte de Montfort est le prince Jean, frère consanguin du duc Jean III, et rival de Charles de Blois à la couronne de Bretagne. Il mourut prématurément à Hennebont, le 20 septembre 1345.

L'abbé Guillaume Elen, élu vers 1346, provoqua la générosité de sa famille à l’égard de son monastère. Son père, Guyomar Elen, donna vingt écus d’or pour la construction d’une nouvelle saline, fut agréé comme associé de la maison et eut ensuite son anniversaire tous les ans au 23 mai. Sa mère, Catherine Prénigou, fut aussi reçue comme affiliée à la communauté, et sa mort est marquée au 24 mai dans le calendrier. Son frère, Maurice Elen, chantre de Tréguier, fut également affilié à la maison, et donna au monastère un calice, beaucoup de livres et de reliques, et une chapelle complète peur l’office des morts ; aussi eut-il son anniversaire, fixé au 21 mai de chaque année.

En 1358, Jean Coupegorge, prêtre de Nantes, donna à l’abbaye de Prières les maisons et le jardin qu’il possédait à Vannes dans la rue actuelle du Nord jusqu’au mur de la ville, en se réservant toutefois la jouissance de ces immeubles pendant sa vie. L’abbé et le couvent de Prières acceptèrent avec reconnaissance cette donation, et promirent de dire à perpétuité trois messes par semaine pour le donateur, de lui appliquer toutes les messes de la communauté au jour de sa mort, et de célébrer ensuite tous les ans son anniversaire. Cette maison avec ses dépendances a porté depuis le nom de Maison ou d'Hospice de Prières jusqu’à la Révolution française.

Le 21 août 1363, Hervé VIII de Léon, seigneur de Noyon, se trouvant à Prières, atteint de la maladie qui devait l’emporter, fit son testament, et donna à l'abbaye une rente de 200 livres sur ses biens des environs d'Hennebont, afin d’avoir une messe quotidienne à perpétuité. Mais le vicomte de Rohan, qui avait épousé la soeur et l’héritière du testateur, fit opposition à la délivrance de ce legs, et fit un long procès à l'abbaye. Enfin, en 1405, intervint une transaction qui réduisit la rente à 50 livres par an et maintint une messe quotidienne, sauf le dimanche, et un service anniversaire par an.

Un chevalier anglais, nommé Robert de Latimer, avait été enterré dans l'église de Prières et avait exprimé, avant de mourir, le désir d'avoir une fondation de messes. Pour répondre à ses voeux, son frère Guillaume de Latimer fonda une chapellenie et la dota d’une rente de 100 livres sur des terres de Bretagne, ce que le duc Jean IV voulut bien autoriser, sur la demande de son compagnon d’armes, le 4 juillet 1366, et amortit en même temps la rente de cette fondation.

Pierre de Talenhoet, professeur de droit, scolastique de Saint-Brieuc, chanoine de Dol et de Vannes, donna, pour fonder son anniversaire, un capital de vingt livres ; cette somme fut employée à l’établissement d’une saline, dont le revenu garantissait la fondation.

Le fondateur était, suivant l’usage, frère ou associé de la maison ; il mourut le 15 septembre, on ne sait trop en quelle année.

Le seigneur Jean de Lacy, mort le 3 août 1359 (Pr. I. 1530), fut aussi frère ou associé de Prières. Sa veuve et ses parents fondèrent pour lui une chapellenie, à raison d’une messe tous les jours, et donnèrent à cet effet une rente de 100 livres par an.

En 1373, Agnès de Castel, veuve de Jean de Comenan, pour être admise comme soeur et participer aux prières de la communauté, et aussi pour avoir son anniversaire tous les ans au jour de sa mort, donna au monastère 83 oeillets de marais salants. Sa mort arriva le 17 mars, et c’est à ce jour que fut fixé son anniversaire.

De son côté, Jean Le Guérannic, paroissien de Guérande, voulant participer aux prières du monastère, lui donna libéralement le tiers de ses biens meuble en 1379. Ses héritiers ayant réclamé contre la délivrance du legs, une transaction eut lieu en 1382, et il fut stipulé que les moines se contenteraient d’une rente annuelle de 5 livres, hypothéquée sur les salines du défunt, sans obligation d’anniversaire.

Le 26 septembre 1384 mourut à Nantes la duchesse Jeanne de Hollande ou d'Angleterre, femme de Jean IV. Son corps fut apporté à Prières et inhumé dans le choeur de l’église. Nul doute que le duc ait fondé son anniversaire en ce lieu.

Mais cet anniversaire a-t-il été continué à Prières après la translation des restes de la duchesse à Nantes, ou a-t-il été transféré aussi avec le corps ? - On l'ignore.

Le 10 juin 1387, Marguerite du Parc, tombée malade à Prières, y fit un testament, qui nous a été conservé : on y trouve des détails intéressants qui méritent d’être traduits.

« Je recommande, dit-elle, mon âme à Dieu, mon créateur, et je livre mon corps à la sépulture ecclésiastique, que je choisis dans le cloître du Monastère de Prières, là où l’abbé le voudra. Je donne et lègue à l’abbé et au couvent une rente annuelle de sept livres dix sous, sur une maison que j’ai fait reconstruire à Vannes et qui est occupée par Jean Loppin. (No 2081 du cadastre). Item je donne et lègue au dit monastère tous mes meubles, pour servir aux pauvres et aux infirmes de la maison. Je donne et lègue à chaque moine du convent un franc d'or et à chaque serviteur cinq sous, afin qu’ils prient plus ardemment le Seigneur et la sainte Vierge pour moi. Item je veux qu’au jour de ma mort on célèbre trois messes pour le repos de mon âme, savoir, une du Saint-Esprit, une de la sainte Vierge et une des défunts, et que le célébrant ait cinq sous pour chaque messe chantée, et deux sous pour chaque messe basse. En outre je veux que pendant toute la semaine, jusqu’au septième jour, on fasse de même mémoire de moi ; pour toutes ces messes je donne et lègue douze livres et cinq sous. Item je veux qu’en outre 367 messes soient célébrées pour moi par les frères ou les prêtres que le prieur claustral désignera : je donne et lègue pour ces messes trente francs d’or. De même je donne et lègue à l’abbé et au couvent de Prières deux pipes de vin, une de la Rochelle et une de la Bretagne, deux côtés de lard, avec mes poules et mes chapons, pour augmenter leur pitance pendant la durée de mes services. Je donne et lègue dix francs d’or pour faire l’aumône à 330 pauvres, au jour de ma mort, à raison de huit deniers chacun. Item je veux que les vingt francs d’or que j’ai prêtés à l’abbé, par l’intermédiaire d'Olivier des Prés, son clerc, soient ajoutés à mes legs ; et s’il reste quelque chose après l’exécution de mon testament, qu’on l’emploie à la réparation du pont qui est sous le moulin de Billiers. De même je veux qu’on récite vingt psautiers complets pour le repos de mon âme, et qu’on donne pour chaque psautier récité cinq sous, ce qui fait au total cent sous. Item je veux que mon présent testament soit exécuté par les soins de Frère Guillaume de Saint-Molf, prieur claustral de la maison, entre les mains duquel je mets tous mes biens meubles et immeubles, jusqu’à complète exécution de mes volontés... Fait au dit monastère, le lundi après la fête du Saint-Sacrement, l'an 1387 ». (Cart.).

En 1402, le 31 mai, Jean Richard, de la presqu'île de Batz, pour avoir deux messes par semaine et un anniversaire solennel, et participer à toutes les bonnes oeuvres de la communauté, donna tous ses prés de Méan en Montoir, toute sa juridiction et ses revenus de Clis en Guérande, une rente annuelle de 114 sous sur la prévôté de Piriac, et tout ce qui lui appartenait dans ces différents lieux. (ibid.).

En 1411, Maître Guy Raoul fonda une Messe du Saint-Esprit, à célébrer dans l’église de Prières le 21 mai, durant sa vie, et à remplacer, après sa mort, par une messe des défunts, le lundi de la Passion ; il donna à cet effet le livre intitulé Catholicon. Ce titre a été donné à un dictionnaire breton-français-latin, imprimé à Tréguier en 1499, Est-ce le même ouvrage qui est ici mentionné dès 1411 ? C’est un problème bibliographique qu’il serait peut-être intéressant d’examiner.

Vers le même temps, Olivier Garrec, prêtre, fonda une messe du Saint-Esprit à célébrer également pendant sa vie, et à remplacer, après sa mort, par une messe des défunts, au jour anniversaire de son décès ; pour cela il donna douze livres à placer en revenu.

Antoine Riez et Pétronille, sa femme, dotèrent aussi une messe à célébrer au 16 octobre, et après leur mort au jour de leur décès, et ce à perpétuité.

Le 9 février 1409 (N.. S.), les héritiers de Perrot Verveau, de la paroisse de Guérande, donnèrent à l’abbaye treize oeillets de saline pour fonder une messe par semaine, à dire dans l’église du couvent, pour le dit défunt.

Le 3 mars 1431 (N. S.) le duc Jean V fonda dans l’église de Prières la fête de la Présentation de la sainte Vierge au 21 novembre de chaque année, avec office, messe solennelle et plusieurs messes basses. Il marqua lui-même les honoraires des divers employés, comme avait fait Marguerite du Parc : au prêtre qui aura chanté la grand’messe 5 sous, au diacre 4 sous, au sous-diacre 3 sous, au célébrant d’une messe basse 2 sous et 6 deniers, au chantre du lutrin 2 sous, à chaque novice 1 sou et 8 deniers. — L’abbé devait prélever 20 livres par an pour l’entretien du monastère, et le reste de la fondation devait être appliqué à l’augmentation de la pitance des religieux. (Cart.).

Le 30 octobre 1476 mourut Vincent de Kerleau, évêque de Léon et ancien abbé de Prières. Comme il avait donné à l'abbaye cent livres pour avoir une rente de cent sous, les religieux décidèrent qu’on ferait tous les ans un service pour lui, au jour anniversaire de sa mort.

Telle est la dernière fondation mentionnée dans le Cartulaire de l'abbaye. L’introduction des abbés commendataires et la ruine du monastère n’étaient pas de nature à provoquer de nouvelles fondations. Après l’établissement de la réforme, il est possible qu’on y ait fondé d’autres services religieux, mais les titres, s’il y en a eu, sont perdus. 

 

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II - Les Dotations.

Si Blanche de Champagne apparaît dans les actes de la fondation de Prières, son mari seul apparaît dans ceux de la dotation. Il y avait visiblement entre eux union de coeur et d'esprit. Le XIIIème siècle était un temps de foi vive et forte mélangée de passions parfois ardentes et brutales. On savait se repentir, lors même qu’on ne se corrigeait pas entièrement, et lorsque la conscience criait encore on faisait une aumône. Aussi les actes de donations commencent-ils ainsi : Reminiscentes bonitatem Dei dicentis : date eleemosinam, et omnia munda fiant vobis. En faisant des gratifications au monastère on s’attendait à une participation quelconque aux prières et oeuvres pieuses des bons moines. — Tels furent les motifs qui poussèrent plusieurs seigneurs et autres personnes à contribuer avec le duc à la dotation de notre abbaye. Entrons dans quelques détails. 

1° Deux villages se trouvaient alors à l’embouchure de la Vilaine, Bagan et le Duen. Ils furent détruits et remplacés par les maisons de l’abbaye. Au mois de juillet, 1250, le duc les avait acquis d'Eudes, seigneur de Malestroit, et d’Agathe sa femme. Pierre de Muzillac y possédait aussi 30 sols de rentes, et il en devait autant au duc sur son château qu’il tenait en qualité de fief. Ils firent un échange. 

2° Le village de Bramboudu fut également transformé par la construction de l’abbaye. Agathe, du bourg ou maison noble de Noyal-Muzillac, écrivit le samedi d’avant l'Ascension 1252, à Cadioc, évêque de Vannes, pour lui dire qu’elle avait été exactement payée pour sa part audit village. Guillaume, orfèvre, à Muzillac, et Théophane sa femme, vendirent une portion et en donnèrent une autre. Ils concédèrent en outre un terrain pour élever le moulin de l'abbaye. — Guillaume de Bignan fit la même chose.

3° Le passage de la Rochebernard (Roche-Bernard) sur la Vilaine fut acheté par Jean Ier en 1252, de Guillaume, seigneur du lieu, qui accepta en échange des vignes et un pressoir à Port-Thibaut en Anjou. 

Comme ce passage a toujours été beaucoup fréquenté, et non sans péril, jusqu’à la confection du beau pont suspendu qui le remplace, je vais en tracer l’histoire en quelques mots. En 1273, le seigneur de la Roche-bernard prétendit s’être réservé des droits féodaux sur la moitié de la rivière et 35 sols de rentes sur le passage. Une sentence rendue par le sénéchal de Nantes, nommé Rialan, adjugea plein droit de seigneurie et juridiction à l’abbaye sur les deux rives, et le contendant promit de ne plus arrêter les bateaux et de ne jamais leur causer de dommages. — En 1380, faute du paiement des 35 sols, demeurés en litige, les hommes du seigneur s’emparèrent d’un bateau. — En 1467, même manoeuvre, et une transaction a lieu par laquelle le seigneur renonce aux taxes et amendes qu’il demandait, de même qu’aux arrérages des 35 sols. Il reconnaît de plus les droits de juridiction et seigneurie de l’abbaye sur les deux rives et sur les limites du passage. —

En 1634, le seigneur prétend au droit pour lui-même, ses domestiques, les gens de la ville et leurs marchandises, de passer la rivière, moyennant un denier annuel par ménage, que les religieux iraient chercher de porte en porte le lendemain de la fête de saint Mahé. Le religieux, chargé de cette mission, devrait avoir un bréviaire sous le bras, être accompagné des hommes du bateau et avoir un sonneur devant lui.  Une sentence du palais des requêtes de Rennes, du 11 janvier 1636, condamna le réclamant sur tous les points, mais exigea de l'abbaye la solde annuelle de 35 sols et un bateau conduit par six hommes pour courir la quintaine les jours de Noël et de saint Etienne. — Même difficulté et même résultat en 1677. — Enfin un Mémoire de 1790 constate que les religieux, d’après les délibérations des Etats de la province, ont fait construire des bascules sur les deux rives pour les embarquements et débarquements des voitures, que leurs fermiers, en vertu de leurs baux, sont obligés de les tenir en bon état et de s’en servir ; qu’un bateau est continuellement à flot pour les voyageurs à pieds ; qu’une pancarte est affichée aux deux bords pour donner les prix fixes qu’on ne peut dépasser ; que les deux chaussées sont tenues en bonne voie de sécurité, et que les juges du présidial de la Roche-bernard ont mandat de l'abbaye de recevoir toutes les plaintes afin de punir les infracteurs des règlements surtout les fermiers, quand ils y manqueraient.  Le Floch du Cosquer et Sauveur obtinrent à la même époque suppression de tous les droits de l'abbaye et liberté absolue du passage. 

4° Le duc donna en 1252, toute sa propriété et seigneurie de Lenclis, en Guérande, à Prières, et y ajouta tous ses marais salants dans les environs avec exemption de dîme. Quelques années après il concéda des terres vagues et incultes dans les paroisses de Guérande et de Batz pour y faire de nouveaux marais. En 1420, une sentence du juge universel de Bretagne confirma, par suite d’un long procès, l'abbaye dans ses droits de haute, moyenne et basse justice de Lenclis, de moulin et de four banal, de garenne et de refuge. Comme les religieux ne pouvaient mettre en marais salants tous leurs terrains qui y étaient aptes, ils firent, aux XIVème et XVème siècles des concessions partielles à différentes familles, à condition qu’elles jouiraient une trentaine d’années du fruit de leurs travaux et rendraient au bout de ce temps-là les oeillets à l'abbaye.

5° Comme l'évêque avait réservé la dîme de la paroisse pour le recteur de Billiers, le duc, en 1252, lui accorda 13 livres de rentes sur son domaine de Vannes à la place de ces dîmes. Plus tard, eu égard à la dépréciation de l’argent, ces 13 livres finirent par monter à une somme de 600 livres.

6° En 1255, le duc acheta d'Eudes de Silz en Arzal la propriété du Bourg-l'Etang, près de l'abbaye, pour la somme de 61 livres. Il donna 20 liv. et l’abbé 41.

7° Le village de Guédas en Marzan, auprès du passage de la Roche-bernard, fut acquis, au mois d’avril 1257, des religieux de saint Gildas de Rhuis. — En 1256, Philippe de l'Isle, écuyer du duc, avait donné tout ce qu’il possédait au même endroit.

8° La propriété du Menhir, au nord-est de l'abbaye, fut donnée, en 1260, par Joachim du Couétro, écuyer, et Aliénore, sa femme. Cette terre était située dans le fief de Rolland de Penmur, et pour avoir aussi ses droits, les religieux lui donnèrent tout ce qu’ils avaient à Pénesclus, qu’ils tenaient d'Eudes, seigneur de Kerdréan, en Noyal-Muzillac. — Dès 1252, Agathe de Malestroit avait concédé les sources et fontaines qu’elle possédait au Menhir avec toutes les franchises nécessaires pour conduire les eaux à l'abbaye. En 1270, Payen, son fils, confirma cette gratification. En 1472, il restait une maison que les religieux achetèrent.

9° En 1253, Barthélemy de Questembert donne à l'abbaye, pour y fonder une chapelle, des dîmes s’étendant sur trois frairies de la paroisse d'Elven ; celle de saint Christophe une gerbe sur quinze, celle de Botcolo une gerbe sur trente-trois. Je n’ai pu savoir quel était le nom de la troisième frairie. Plus tard la famille Quifistre de Bavalan prétendit descendre de celle qu’on nomme ici de Questembert. 

10° En 1260, le duc donne à Prières des dîmes sur les paroisses de Sarzeau, Arzon et Rhuis, par suite de défrichements qu’il opère et qu’il va opérer dans les bois et forêts qui lui appartiennent sur ces lieux. — En 1272, concession de dîmes dans la paroisse de Liffré, eu égard aux défrichements opérés dans la forêt de Rennes. Une Bulle d'Alexandre IV permit aux religieux de Prières d’avoir des dîmes dans toutes les forêts que le duc ferait défricher et labourer pour la somme de 200 liv. Une sentence, rendue en 1435 par l’évêque de Saint-Brieuc entre eux et les Trinitaires de Sarzeau, constate qu’ils percevaient la dîme dans le grand parc du duc ainsi que dans celui de Bernon. — En 1435, François Ier décharge l'abbaye d’un dîner qu’elle donnait chaque année aux fermiers du duc, et qui lui coûtait de 7 à 8 liv. Sentence du présidial de Vannes, en 1696, qui adjuge aux religieux la dîme à la onzième gerbe dans la paroisse d'Arzon.

11° La veille de la saint Nicolas d'hiver 1252, Philippe de Ville donne à l’abbaye le droit de lever huit deniers sur chaque chaland qui passerait chargé de marchandises sous les ponts de Nantes. — En 1260, Amice Deudon, femme de Robert de Bomer, concède huit autres deniers, et qui, d’après Galteran de Châteaugiron, son héritier, devaient former une rente annuelle de 10 livres, somme suffisante alors pour l'entretien d’un religieux, but que s’était proposé la donatrice.

12° Le village du Louch, non loin de l'abbaye, fut acquis des seigneurs Senal et Rozel par le duc, comme on le voit par les lettres qu’ils écrivirent à l’évêque de Vannes en 1252. Josselin de Penmur vendit également ses droits au même lieu en se réservant la pêche de l'étang pendant sa vie ou la faculté de le dessécher suivant son bon plaisir.  Nous abandonnons ici la question des donations, que nous reprendrons plus tard à mesure que nous en trouverons de nouvelles (extraits des notes de l'abbé Piederrière).

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