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SEBASTIEN LE BALP |
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Sébastien Le Balp, notaire et chef d'insurgés. — On sait que lors de la révolte dite du Papier timbré ou des Bonnets rouges, qui ensanglanta la Bretagne en 1675, les révoltes du pays de Poher trouvèrent dès la première heure dans la personne de Sébastien Le Balp, notaire de la trêve de Kergloff en Cléden-Poher, un chef intelligent et audacieux, et qui, par l'autorité qu'il sut prendre sur eux, resta, jusqu'à la fin, l'âme de l'insurrection.
Voici ce qu'a écrit à ce sujet M. Jean Lemoine dans l'ouvrage qu'il a publié en 1898 sur la révolte du papier timbré. Le Balp, l'un des vingt-huit notaires royaux ressortissant à la Cour royale de Carhaix, appartenait à cette catégorie de gens ruinés qui, se trouvant bien du désordre « menacent, pour le maintenir, les bons de leurs maux s'ils ne les suivent ». Son père, François Le Balp (époux de Louise Caroff), meunier ne lui avait guère légué, en mourant, qu'une situation très embrouillée et de tristes exemples. C'est à l'occasion du mariage de son fils Sébastien, à l'âge de 22 ans, avec la fille de Mathieu Riou, que le meunier François acheta moyennant 1.200 livres, pour le jeune fiancé, la charge de notaire royal autrefois possédée par Louis Baellec, sieur du Plessis. Mais le père oublia de payer ce prix de cession, et le fils essaya de réaliser ce paiement sans bourse délier au moyen de faux qui l'amenèrent en janvier 1674 dans les prisons de Carhaix. On devine donc ses ressentiments et ses haines quand, l'année suivante, les paysans révoltés contre les édits fiscaux du roi mirent entre ses mains les armes de la vengeance. Pendant deux mois — juillet-août 1675 — l'insurrection régna en maîtresse, dans la région de Carhaix. |
C'est à Carhaix même, les 6 et 7 juillet, qu'eut lieu le premier rassemblement important. La foule attaqua la demeure de Claude Servan, sieur de Châteaufort, fermier des grands et petits devoirs des Etats. Sa maison et ses bureaux furent pillés ; un de ses commis fut massacré. Quantité de vins et eaux-de-vie furent bus, les papiers brûlés ou emportés.
Le même dimanche 7 juillet, à Spézet, à l'issue des vêpres, les insurgés pillent la maison de notre ancien camarade Henri Porcher, greffier et notaire, chargé du contrôle des actes et des affirmations. Ils enfoncent plusieurs barriques de vin, et brûlent ou dispersent les papiers du contrôle et du greffe.
La femme du notaire-contrôleur est contrainte de s'enfuir et de se cacher derrière le grand autel de l'église. Son cousin, le sieur Rouxel du Parc voulut s'opposer au pillage. Les séditieux « lui hostèrent ses pistolets et son épée, le frappèrent à coups de bâton et de pierres, et le laissèrent comme mort sur la place, tout baigné de sang ».
Autre bureau du contrôle — nous dirions de l'enregistrement — brûlé à Callac le 12 juillet. Le contrôleur — nous disons receveur ou receveur-contrôleur, — était, selon un usage très répandu, le notaire du lieu : Me Yves Le Bouédec.
Le 21 juillet, de nombreuses bandes envahirent Pontivy, pillèrent la maison du sieur Lapierre, fermier des devoirs, et burent ou répandirent le contenu de 440 muids de vin. (A noter que, décidément, les fonctionnaires et officiers des finances du grand Roi ne font pas figure de sujets « secs »).
Le lendemain les mêmes bandes revinrent, se proposant d'attaquer une maison occupée par les bureaux du papier timbré, et qui appartenait au frère du syndic de la ville. Mais cette fois, les assaillants se heurtèrent au sieur du Lavoir, aidé du sénéchal de la ville, et d'une quantités de bourgeois « un peu moins espouvantés » et durent se retirer, après avoir eu 16 tués et de nombreux blessés.
Mais les exploits de Sébastien Le Balp furent en somme d'assez courte durée, et le notaire général de bande ayant rencontré sur sa route un subtil et hardi gentilhomme languedocien, Charles de Persin (ou Percin), marquis de Montgaillard, eut le tort de vouloir s'emparer du château de Tymur (ou Tymeur), propriété du Languedocien par les femmes, ce qui lui valut de se voir transpercer de part en part, au début de septembre, par l'épée du marquis, ancien colonel du régiment de Champagne. Ainsi mourut l'un des hommes les plus célèbres de la Bretagne révoltée, et quoique notaire, ennemi du papier timbré.
L’acte
du décès de Sébastien Le Balp, daté du 4 septembre 1675 stipule : «
Le corps de M. Sébastien Le Balp, notaire royal, âgé de 30 ans ou environ,
demeurant à Garzangroas, décédé au château du Tymeur dans la nuict du 2 au
tiers jour du présent mois, a esté enterré en l'église tréviale de Kergloff
par vénérable messire Jean Le Gall, prestre de Poulaoen, assisté du
soussignant Hourman, curé, et assistèrent au convoy funèbre Mathieu Riou son
beau-père et Anne Riou, sa veuve, qui ne signent, ce jour quatriesme septembre
mil six cens septante et cinq. Hourman prestre ».
Note : Voici ce que dit la comtesse de Laz en 1897 : « Le président de Kerjean ne vécut que deux années après la mort de son père : nous n'avons pas trouvé son acte de décès, mais sa mort prématurée pourrait être due aux émotions terribles de la révolte de la région, en 1675. Quoique étant l'un des grands dignitaires du Parlement de Bretagne, il plia devant la sédition de ses nombreux vassaux, et se laissa extorquer une renonciation à beaucoup de ses droits, déclarée ensuite nulle comme obtenue par la violence. Malheureusement le curieux récit de cette attaque nous manque : ce fut très certainement au château de Glomel, et dans l'été de 1675. Un notaire de Kergloff, près de Carhaix, nommé Sébastien Balp, ayant, comme faussaire et voleur, passé 3 années dans les prisons de Morlaix, fut le grand instigateur de la révolte qui devint formidable : il dirigea de nombreuses hordes, armées de fourches et de bâtons ferrés, vers toutes les demeures importantes ; ces bandes, avides de pillage, pillèrent les bureaux des fonctionnaires de Carhaix, abordèrent les manoirs, les abbayes telles que celle de Langonnet qui, en l'absence de l'abbé de Marbeuf, récemment élu, plia devant la menace ; mirent, en juillet, à feu et à sang le château de Kergoët, près de Carhaix, et furent sans doute cause de la mort de la marquise de Trévigny survenue quelques jours après ; de là, ils se portèrent vers un château non moins important, également auprès de Carhaix, celui du Tymeur, qu'ils vinrent plusieurs fois menacer et qu'ils cernaient au nombre de 2.000 paysans armés, Balp en tête, le 2 septembre 1675, lorsque le. marquis de Montaigaillard [Note Claude de Percin, marquis de Montgaillard, marié en 1655 à Marguerite de Bassabat de Pordéac, était le frère aîné de Claude-Maurice de Percin, marquis de Montgaillard et de la Barthe, qui avait épousé en 1663 Mauricette-Renée de Ploeuc, marquise du Timeur, veuve de Donatien de Maillé, marquis de Carman. Il devait dix jours après périr, dans Carhaix même, victime d'une embûche dressée par deux gentilshommes ennemis, officiers des troupes du duc de Chaulnes, messieurs de Quengo de Pontgand, et de Beaumont], frère aîné-du seigneur du Tymeur, voué à une mort certaine et prisonnier dans son château, arrivant de Rennes avec sa belle-soeur, et se trouvant à parlementer avec Balp, à minuit, dans un appartement, lui passa brusquement son épée au travers du corps, et les bandes se dispersèrent emportant le corps de leur chef. Les jours suivants arrivait à Carhaix avec de nombreuses troupes le duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne [Note : Le duc de Chaulnes est nommé gouverneur de Bretagne en 1665 et garde son poste jusqu'en 1689], et les notables de Carhaix et des environs signaient, le 24 septembre suivant, au nombre de soixante [Note : En tête de ces signatures étaient Henri, Guillaume de Kerampuil, père et fils, et Sébastien de Kerampuil, diacre], une déclaration solennelle que le sieur de Montgaillard en mettant à mort Sébastien Le Balp avait sauvé la ville et tout le pays ».
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