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REVOLTE DU PAPIER TIMBRE ET DES BONNETS ROUGES EN BRETAGNE

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Nous connaissons maintenant, en partie au moins, les origines, les incidents, la répression des mouvements séditieux dont la Bretagne fut le théâtre en 1675, à propos de l'impôt du papier timbré.                

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Soixante-cinq ans de repos et de prospérité avaient suivi les guerres de la Ligue. Les besoins financiers de Louis XIV l'amenèrent à décréter (d'une façon assez irrégulière pour notre pays, les Etats n'ayant pas été consultés), l'établissement du papier timbré à 1 sol la feuille, le monopole du tabac à 20 sols la livre, et la marque de la vaisselle d'étain à 1 sol la pièce. Depuis près de dix ans la population entière gémissait sous des charges toujours croissantes : la misère était au comble, et l'exaspération allait grandissant. Le 18 avril 1675, la sédition éclata à Rennes et se signala par le pillage des bureaux du Timbre et du Tabac. Vers le soir, la foule enivrée paraissait disposée à se livrer aux derniers excès, quand M. de Coëtlogon, à la tête d'une poignée de gentils­hommes et d'un faible détachement de la milice bourgeoise, dissipa en un instant l'émeute. Les révoltés perdirent, dans cette première journée, une trentaine des leurs.

Huit jours plus tard, nouveau mouvement et incendie du temple protestant de Cleuné, aux portes de Rennes : l'effervescence augmentait de jour en jour. 

Le 2 mai, M. de Chaulnes arrive de Paris et prend solennellement possession de son Gouvernement. — Le 3 mai, il apprenait que des troubles avaient éclaté dans la plupart des villes de Bretagne, à Dinan entre autres, à Montfort, à Lamballe, à Vannes, et surtout à Nantes. L'agitation s'étendait déjà à toute la Province. Toutefois, on n'était allé nulle part aussi loin qu'à Rennes. A Nantes, la populace s'était saisie de l'évêque, venu en parlementaire, et l'avait échangé contre une femme emprisonnée au début de l'insurrection. Le gouverneur de Nantes, M. de Molac, réussit à tout apaiser par la douceur, ce qui lui valut d'être disgracié. 

Le 23 et le 24 mai, Guingamp se soulevait à son tour ; mais une répression énergique en eut vite raison. 

M. de la Coste, lieutenant du Roi en Basse-Bretagne, fut moins heureux à Châteaulin : battu par les insurgés et grièvement blessé, il dut s'enfermer dans Brest. La rébellion victorieuse fut dès lors maîtresse presque absolue de tout le pays de Poher, et cela pendant plus de trois mois. 

Le 8 juin, malgré les privilèges de la ville, trois Compagnies, appelées de Nantes par le duc de Chaulnes, entraient à Rennes, mèche allumée. Voilà toute la ville en armes, et cette fois, les habitants, quel que fût leur rang, étaient également émus de la violation de leurs franchises. Le 10, il fallut renvoyer à Nantes les troupes si malencontreusement arrivées le 8. Le 11 au soir, tout rentrait dans l'ordre. 

M. de Chaulnes n'éclairait point la Cour sur les vrais caractères du mouvement. Il en déguisait l'importance, sachant qu'on rend souvent les Gouverneurs responsables des désordres survenus dans leurs Provinces. Il n'osait dénoncer les vraies causes de la sédition, c'est-à-dire l'exagération des impôts et la misère croissante, en demandant le retrait des nouvelles charges. Ne voulant accuser ni le Roi, ni lui-même, il accusa avec une souveraine injustice la Noblesse, et surtout le Parlement. Dès le 12 juin, il osait proposer à Colbert une mesure atroce : la destruction des faubourgs, de la moitié de la ville par le fait. Mais, pour réaliser ses desseins de répression, il fallait des troupes régulières, et tout d'abord se débarrasser de la milice bourgeoise, en armes depuis le 8 juin et gardienne des portes. Le Gouverneur joua la comédie de la douceur, et, prenant l'engagement de n'appeler à Rennes aucune force étrangère, il persuada aux naïfs miliciens de se désarmer eux-mêmes. 

D'autre part, la situation de la Province devenait de plus en plus critique. La misère publique s'y manifestait par une disette extrême de numéraire et par des faillites qui portaient au crédit un coup mortel. Le Parlement, gardant une attitude aussi digne que correcte, suppliait le Roi de suspendre pendant quelque temps le paiement des impôts, de convoquer au plus tôt les Etats ; et le même Parlement prenait à la même heure contre les mutins des mesures que le soulèvement de la Basse-Bretagne tout entière rendait nécessaires. La Cornouaille, en effet, était en feu. Le duc de Chaulnes se rendit au Port-Louis le 10 juillet, et s'y cantonna, pour surveiller de plus près les événements. Le Léon s'allumait à l'incendie qui consumait la Cornouaille. Le diocèse de Tréguier s'agitait. Guingamp se préparait à repousser une nouvelle attaque. Avec une mauvaise foi patente, M. de Chaulnes voulait rendre le Parlement et la Noblesse responsables de ces mouvements. M. de la Borderie démontre facilement qu'il y a là pure calomnie ; mais nous croyons qu'il a tort de chercher dans le Code Paysan des preuves de la sympathie inspirée aux émeutiers par les gentils­hommes des campagnes. Pour notre part, nous y verrions volontiers tout le contraire. Cette pièce capitale, le Code Paysan, et le chant désigné sous le nom de Ronde du papier timbré, sont deux documents du plus vif intérêt, exhumés par M. de la Borderie, et qui appartiennent désormais à l'Histoire, sans que leur valeur ou leur authenticité puisse être sérieusement contestée. 

De ces documents il ressort, avec la plus manifeste évidence, que les impôts furent la première et l'unique cause des troubles ; mais des faits il résulte aussi que les séditieux, comme il arrive toujours quand la bête humaine est démuselée, descendant logiquement la pente où ils étaient engagés, arrivaient promptement aux violences contre le clergé, contre la propriété, et professaient (le bonnet rouge sur la tête) tout bonnement le communisme. — Nil novi sub sole

Le 17 juillet, troisième émeute è Rennes, provoquée en réalité par les agents chargés de la vente du papier timbré : ces pillages des bureaux ne les dispensaient-ils pas de rendre compte, et n'y avait-il pas là pour eux tout bénéfice, surtout quand ils avaient commencé, dès la veille, par enlever leurs effets et leur argent ? En l'absence du Gouverneur, M. de Coëtlogon refusa, cette fois, à la milice bourgeoise, de la réunir pour dissiper les mutins. Entrait-il dans un plan tracé d'avance de provoquer de nouveaux mouvements ou de les aggraver, de les laisser s'étendre et de spéculer sur de plus grands malheurs ? Voulait-on arriver à des scènes qui justifiassent la répression excessive méditée dès le 12 juin ? Peut-être. Toujours est-il que, sans dégénérer en violences graves, l'agitation se perpétuait. Les chevaux attelés sous le carrosse de M. de Tonquédec furent tués. Les habitants de la rue Haute couvrirent d'avanies Mme de Chaulnes, demeurée à Rennes, seule et sans défense. 

Comme une traînée de poudre, la sédition gagnait tout le pays ; il y avait en même temps de nouvelles explosions à Fougères, à Lamballe, à Pontivy : le château de Kergroët était saccagé et brillé. « Toute la Basse-Bretagne était en feu ; ce n'étaient plus seulement les pays de Châteaulin, de Carhaix et les alentours de Landerneau : c'était la Cornouaille entière et les deux tiers du Léon ; dans l'évêché de Tréguier, les pays de Morlaix, de Lannion, de Guingamp ; dans le diocèse de Vannes, ceux d'Auray, d'Hennebont, de Pontivy, presque tout le duché de Rohan : voilà sur quelle étendue dominait la révolte. — D'ailleurs, elle se propageait, marchait, agissait, sans trouver devant elle aucun obstacle. M. de Chaulnes, toujours enfermé dans son Fort-Louis, semblait résolu à ne pas faire contre les rebelles le moindre effort ni la plus minime démonstration, avant l'arrivée des nouvelles troupes qu'il avait demandées au Roi »

Un seul homme essaya d'entraver la furie de ce torrent ; c'était un jésuite, un saint, le dernier apôtre des Bretons, celui auquel la Bretagne a dû d'être ce que nous l'avons vue encore il y a peu d'années : le P. Maunoir. A lui seul, au moyen de ses Missions, par sa parole et son ascendant, il dissipa les attroupements de Plouguernevel, et pacifia le pays à une grande distance. Il alla rendre compte à M. de Chaulnes des résultats merveilleux obtenus par ces moyens pacifiques : hélas ! que ne voulut-on l'imiter ! — Six mille soldats étaient déjà en marche sous les ordres de M. de Forbin. Le 16, ils étaient à Nantes ; à la fin d'août, à Quimper ; jusqu'à la mi-septembre à Carhaix, centre de la révolte. M. de la Borderie conjecture qu'il y eut, aux environs du Tymeur, une bataille qui anéantit la résistance et mit fin au mouvement. Cette bataille n'a laissé de traces que dans la tradition orale et locale. 

C'est alors que commence la répression, répression véritablement sauvage. On remplit les galères ; on pendit sans pitié ; on roua, on écartela sans miséricorde. Le P. Maunoir obtint d'assister les malheureux qu'on exécutait, sans compter, par milliers. C'est dans le livre lui-même qu'il faut lire les détails de cette répression ; l'auteur est sévère, il ne l'est pas trop : « L'historien, dit-il, est un juge : son premier devoir, ce n'est pas la charité, c'est la justice »

Du 18 septembre au 12 octobre, le duc de Chaulnes parcourut la Province, de Carhaix à Rennes, stationnant à Morlaix, à Lannion, à Tréguier ; traversant lentement les évêchés de Saint-Brieuc et de Saint-Malo ; continuant les féroces exécutions qui terrorisaient la Bretagne entière. Pendant ce temps, il écrivait aux Rennais les lettres les plus bienveillantes, les plus rassurantes. Le 12 octobre, il entrait dans leur cité, entouré d'un formidable appareil militaire, et prenait les mesures usitées dans une ville prise d'assaut. Là encore le châtiment fut sans mesure : — le Parlement, exilé à Vannes, y demeura quatorze ans, et n'en revint que moyennant 500.000 livres ; — les bourgeois furent désarmés ; — la rue Haute condamnée à être rasée, et ses habitants bannis : plus de quatre mille personnes furent chassées de leurs demeures, errèrent à l'aventure, mourant de froid et de faim, avec défense de les recueillir, sous peine de la vie. — Il n'y eut qu'un cri sur ces rigueurs impitoyables : M. et Mme de Chaulnes vengeaient trop ouvertement leurs injures personnelles. — Les Etats, réunis à Dinan, avaient eu beau voter d'acclamation (précédent dangereux!) un don gratuit de trois millions de livres ; il y avait des haines privées à satisfaire, et l'on ne s'en fit pas faute.

Les taxes arbitraires ne cessèrent de pleuvoir sur les habitants de Rennes : on ne sait au juste à quelle somme exorbitante elles s'élevèrent. La garnison de six mille hommes, installée chez les bourgeois, était encore, à leurs yeux, la mesure la plus vexatoire. Les remontrances les plus humbles et les mieux fondées ne purent obtenir le moindre adoucissement : M. de Chaulnes s'en irritait : « il était de cette école qui fait un crime aux moutons de bêler, je ne dis pas quand on les tond, mais même quand on les écorche » — Puis les supplices commencèrent : on pendit, on roua, on écartela, on exposa aux portes de la ville les membres des victimes... Qu'on nous permette de passer sous silence ces sanglants détails : ils sont effroyables. 

En novembre, les troupes commandées par M. de Forbin quittèrent le Duché : elles avaient été, il faut le dire, maintenues dans une sévère discipline. Les Etats n'obtinrent aucun adoucissement aux peines dont la malheureuse province était frappée ; bien plus, — et, cette fois, malgré le Gouverneur, qui se rendait compte de l'état de désespoir où se trouvaient ses administrés, et de l'exaspération à laquelle on pouvait les pousser, — une nouvelle armée de dix mille hommes, indisciplinée, sans frein et sans règle, envahit le pays et le livra véritablement au pillage. Ce qui se passa, durant cette invasion de barbares, est inouï ; le vol, les dévastations, le pillage, tout cela n'est rien auprès des violences contre les personnes. Il est impossible d'entrer dans le menu des faits : mettre des enfants à la broche était un amusement pour les bandits déchaînés par Louis-le-Grand sur la Bretagne. Les témoignages contemporains sont là ; malheureusement, il n'y a pas moyen de les récuser. Cela se passait en France, à la fin du grand siècle, sur toute la surface d'une vaste province, et, s'il faut en croire Mme de Sévigné, au même moment c'était encore pis en Guienne. 

La guerre qui continuait sur le Rhin obligea le roi à rappeler ses troupes. Elles quittèrent le pays le 1er mars 1676. Le lendemain, le Parlement enregistrait une amnistie qui n'en était pas une, à raison du nombre de personnes exceptées de cette prétendue grâce. C'est par les noms de paroisses portées sur les Lettres d'amnistie qu'on peut deviner les parties de la Basse-Bretagne où il faudrait faire des recherches pour connaître les détails de la révolte dans cette région (Robert Oheix).

Nota : Voici ce que dit Roland Mousnier dans son étude " La révolte dite du papier timbré en Basse-Bretagne en 1675 " : « Mais de l'analyse des nombreux textes émanés des révoltés, « codes paysans » ou contrats imposés aux seigneurs, il semble bien résulter que les révoltés n'en voulaient ni au régime seigneurial et féodal, ni à la stratification sociale, ni au régime politique, mais seulement à des excès récents de certains seigneurs, à un abus du domaine congéable, qui est d'essence domaniale, non féodale, et aux droits nouveaux imposés par le Roi pour la guerre de Hollande, en violation de la sacro-sainte coutume et des « libertés armoriques », comme le contrôle des actes notariés ou bien la majoration des « devoirs » sur les boissons. Ces droits royaux ont provoqué des représailles sur les seigneurs, parce que, plus qu'ailleurs, le seigneur, en Bretagne, est considéré comme le représentant du Roi. Les paysans bretons semblent avoir été dépourvus d'esprit de classe, d'idéologie sociale et politique. Ils étaient des furieux, non des révolutionnaires ».

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