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CAHIER DE DOLÉANCES DE BRÉAL-SOUS-VITRÉ EN 1789 |
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Subdélégation de Vitré. — Département d'Ille-et-Vilaine, arrondissement
de Vitré, canton de Vitré-Sud.
POPULATION. — 1791, 505 habitants (Arch. Nat., D IV
bis 51).
CAPITATION. — Rôle de 1788 (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 4064) ; 115
articles, environ 30 familles hors d'état de payer la capitation (voir la note
qui suit) ; total, 330 l. 3 s. 11 d. — Total en 1789, 334 l. 18 s. 6 d., se décomposant ainsi :
capitation, 219 l. ; 21 d. p. l. de la capitation, 19 l. 3 s. 3 d. ; milice, 27
l. 19 s. 3 d. ; casernement, 67 l. 16 s. ; frais de milice, 1 l. (Ibid., C 3981).
Note : Le rôle de la capitation de 1787 parle de cinquante pauvres hors d’état de payer la capitation (Arch. d’Ille-et-Vilaine. C 4064). Le recteur, dans sa déclaration, en 1790, dit qu’il y a trente ménages pauvres, qu’il doit secourir (Ibid., série Q, déclarations des biens ecclésiastiques).
VINGTIÈMES. — En 1788, 364 l. 17 s. — Rôle de 1785, 446 l. 16 s. ; 67 articles
(Ibid., C 4632).
FOUAGES. — Fouages ordinaires et taillon, 69 l. 9 s. 1 d. ;
fouages extraordinaires, 117 l. 5 s. 9 d.
OGÉE. — Ce territoire est plus
élevé que ceux qui le joignent ; il est bon, fertile en grains, abondant en
fruits dont on fait du cidre. Il y a aussi quelques prairies, des pâturages et des landes.
PROCÈS-VERBAL. — Assemblée électorale, le 5 avril, au lieu ordinaire des délibérations. — Une première assemblée avait eu lieu, le 29 mars, sous la présidence de François-René Heulot, procureur fiscal de la juridiction séculière du prieuré de Notre-Dame de Bréal, et avait désigné comme députés Pierre Levrot, des Rottes, et Joseph Croissant, des Planches, Mais ces derniers « ont représenté au général que, par cette délibération, il les avait chargés de sa députation pour se trouver à l’Hôtel de Ville de Vitré le premier jour de ce mois, que c’était par erreur et malentendu, puisque ce devait être à Rennes les sept, que leur peu de fortune, leurs embarras de campagne et leur peu de connaisance les mettant hors d’état de remplir leur commission, ils s'en désistaient et priaient le général d'en sommer deux autres à leur place et avec las mêmes pouvoirs. — Sur quoi le général ayant délibéré et n’ayant trouvé parmi eux ni dans la paroisse aucun autre plus en état, il a prié les personnes de Messieurs Laurent-Francois-Marie Chaillou de Kernedern, avocat au Parlement, habitant depuis plusieurs années au château des Brétonnières, proche ce bourg quoiqu’en paroissse d’Erbrée, qui a parfaite connaissance de la situation de cette pauvre paroisse, et M. Bellier de la Frenière, aussi avocat, demeurant à Rennes, rue aux Foulons, l'un des propriétaires de ladite paroisse, auxquels ils donnent par la présente tous généraux et spéciaux pouvoirs tels que les avaient les sieurs Levrot et Croissant... ». — Comparants : les membres composant le général de la paroisse, c’est-à-dire (voir la note 1 qui suit) : Michel-René Barrier (5,10 ; 1 servante, 1,10) ; Pierre Levrot (8 ; 1 servante, 1,10 ; 1 valet, 1,10) ; Joseph Croissant (4,10 ; 1 valet, 1,10) ; André Sauvé (5,10 ; 1 servante, 1,10) ; Jean-Baptiste Accaris (3) ; Jean Peu (7 ; 1 valet, 2 ; 1 autre, 1,10 ; 1 servante, 1,10) ; Joseph Hamelin (5 ; 1 servante, 1,5) ; Pierre Herriau (2) ; Mathieu Bourni (4 ; 1 valet, 1,15) ; Jean Hamelin (3,10) ; François Morinière (4) ; Jean-Baptiste Duval (2,10) ; André Planchais (5 ; 1 valet, 2) ; Nicolas Guedon (2,10) ; Jean Fermin père (4 ; 1 valet, 1). — Députés : Chaillou de Kernedern ; Bellier de la Frenière (voir la note 2 qui suit).
Note 1 : Les deux assemblées ont été composées exactement des mêmes comparants.
Note 2 : Bellier de la Frenière était imposé aux vingtièmes pour 42 l. 13 s. 3 d. (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 4632).
[Cahier de doléances de Bréal-sous-Vitré, incorporé au procès-verbal du 29 mars].
[Les comparants] ont expressément recommandé :
1° — De charger les députés de leur Etat, se rapprochant du contrat social, par lequel tout individu doit avoir une influence sur la chose publique, de demander que les représentants de l'ordre du Tiers Etat, composant les cent quatre-vingt-dix-neuf centièmes (sic) de la Nation, aient une influence égale aux deux ordres privilégiés composant au plus le centième de la même Nation, d'employer tous les moyens de préférer le vote par tête à celui par ordre, de placer les députés de manière qu'après deux députés de l'Eglise et de la Noblesse, deux députés du Tiers donnent leurs voix et ainsi alternativement, de nommer un orateur sans voix prépondérante et non un président ayant la prépondérance.
2° — De dresser une constitution où l'on constate l'autorité du Roi et où l'on assure la propriété et la liberté individuelle de tous les citoyens sans distintion, ainsi que le droit de la Nation de concourir à la législation.
3° — De faire supprimer tout privilège pécuniaire de quelque nature qu’il soit, de supprimer toutes les lois exclusives contre le Tiers, de supprimer le franc-fief, la corvée (voir la note 1 qui suit), la gabelle qui est la source de bien des vols de chevaux, d'autres vols et meurtres sur ces paroisses qui confinent le Maine, qui cause la corruption des mœurs et endommage les grains par tant de chiens qui vaquent au sel et qui, faute de nourriture, enragent et causent les plus affreux ravages dans le pays (voir la note 2 qui suit), de supprimer également les visites intérieures, le casernement, les fouages et taillées, la fourniture pour les troupes, leurs logements exclusifs, sauf à remplacer ces impôts et ces charges par d'autres moyens supportables indistinctement par tous les citoyens en proportion de leur fortune.
Note 1 : En 1788, la tâche de la paroisse de Bréal, sur la route de Paris à Vitré, était longue de 226 toises ; elle avait son centre à une lieue 1/4 du clocher (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 4883).
Note 2 : A la suite de l’ordonnance royale du mois de mai 1680 portant règlement général sur le fait des gabelles (Recueil des ordonnances des fermes, publ. en 1750 à l'Imprimerie royale), Louis XIV publia, le 30 décembre de la même année, une déclaration qui, tout en maintenant les habitants de la province de Bretagne dans l'exemption des droits de gabelles, fixait les règles à suivre dans les procédures à exercer contre les faux-sauniers et réglementait l'usage du sel dans les paroisses bretonnes voisines de deux lieues des derniers villages ou hameaux des provinces de Normandie, du Maine et de l'Anjou. Les poursuites exercées dans cette zone frontière par les préposés de la gabelle et les tentatives faites à diverses reprises par les fermiers généraux pour accroître et fortifier leurs garanties et leurs moyens de contrôle provoquèrent de vives protestations de la part des Etats de Bretagne (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 3475 et 3476). A la fin de mars 1788, par exemple, cinq employés de la gabelle du Maine descendirent chez un habitant du village de la Huberdière, en Erbrée et y capturèrent trois faux-sauniers qui, d’arbord tranférés à Laval, furent conduits, pour y être jugés, devant la Commission spéciale établie à Saumur par arrêt du Conseil d’Etat, du 3 juillet 1745, et à laquelle un arrêt du 20 juillet 1751 avait donné la connaissance des procès « nés et à naître dans l'étendue des dépôts des sels de la province de Bretagne concernant la contrebande et le faux-saunage » ; sur l’intervention du procureur général syndic des Etats et sur la remontrance du procureur général du Roi, le Parlement de Bretagne rendit, le 3 mai 1788, un arrêt protestant contre cette procèdure et ordonnant le transfert à Vitré des individus poursuivis, pour qu’ils y soient jugés au siège des traites de cette ville (Ibid., série B, fonds du Parlement, arrêts de Grand’Chambre). — Pour ce qui est des revages exercés par les chiens, rappelons que des lettres patentes du 5 décembre 1722, rendues sur arrêts du Conseil d’Etat des 3 mars et 30 juin précédents, interdisaient à tous habitants des provinces limitrophes de la Bretagne d’avoir, nourrir ou élever des chien mâtins, à peine de 500 l. d’amende et d’être poursuivis comme faux-sauniers ; l’arrêt du 3 mars observait que les faux-sauniers enferment ces chiens « plusieurs jours sans leurs donner à manger, et après avoir attaché à leur col douze à quinze livres de sel enveloppé et roulé dans des colliers de toile cirés, ils les lâchent pendant la nuit ; que ces chiens, pressés par la faim, ne manquent jamais de retourner chez leurs maîtres avec leur sel, par la même route par laquelle ils ont été amenés ; que d'ailleurs ces chiens, pressés par la soif qui est occasionnée par le sel qu’on met ordinairement dans leurs nourriture, deviennent enragés » (Ibid., C 3475). Les archers de la gabelle, non contents d’opèrer des perquisitions dans les maisons suspectes, commettaient de nombreaux meurtres sur des faux-sauniers ou des individus soupconnés d’être tels (Ibid., et PARIS-JALLOBERT, Anciens registres paroissiaux de Bretagne ; paroisse du Pertre, pp 62-64 et passim.). Les Cahiers des paroisses de la province du Maine, publiés par Bellée et Duchemin, contiennent aussi des renseignements à ce sujet.
4° — De vérifier la dépense de l'Etat et surtout celle des pensions, et de supprimer celles données à des personnes riches, sauf à remplacer la suppression par une décoration, afin de détruire l'esprit d'un intérêt tel qu’il semble partout substitué à l'honneur et au patriotisme [Note : Rapprochez cet articles de l’art. [33] du cahier d’Etrelles].
5° — De consentir à des impôts qui, pesant plus sur les choses que sur les personnes, soient dans le cas d'être unis et perçus avec une égalité plus proportionnée aux fortunes, mais de ne s'occuper des impôts qu'après avoir arrêté la réforme des abus relatifs à l'administration.
6° — De solliciter la suppression des justices seigneuriales et leur réunion dans le centre d'un arrondissement peu étendu où il sera établi des juges gradués, ayant exercé pendant un certain nombre d'années, âgés de vingt-cinq à trente ans, d'y juger sans appel les affaires modiques et de porter les autres sans intermédiaires au tribunal souverain, de supprimer également toutes les juridictions d'attribution.
7° — D'établir dans toutes les villes et bourgs principaux une assemblée de district, où deux fois par an les campagnes puissent envoyer, à un jour fixé par la loi, des députés, afin d'y porter leurs doléances, y faire les arrêtés qu'ils croiront convenables ; d'établir pendant leur interruption un comité avec lequel elles puissent correspondre et qui soit chargé des affaires de l'arrondissement.
8° — De supprimer tout droit de péage, pancarte, quintaine, guet et autres, moyennant une indemnité fixée sur le prix de la ferme et des baux courants.
9° — De concourir enfin avec les autres députés électeurs assemblés à la municipalité de Vitré, former le cahier des charges qu’ils estimeront le plus convenable et le plus utile aux citoyens quelconques et surtout à ceux des campagnes, leur recommandant d’y faire insérer que le bien de l’agriculture exige que les baux puissent être faits pour un terme aussi long que le propriétaire et le fermier le jugeront à propos (voir la note qui suit) et de solliciter la destruction des fuies, colombiers et garennes qui dévastent les semences et les grains prêts à récolter et détruisent l'espérance du pauvre laboureur...
Note: Les lods et ventes étaient dus, en effet, pour les baux de plus de neuf ans, en vertu de l'article 65 de la Coutume de Bretagne, qui considérait de tels baux comme opérant une véritable translation de propriété.
(H. E. Sée).
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