Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

LES OSSUAIRES OU RELIQUAIRES

  Retour page d'accueil       Retour page "Ossuaires bretons"       Retour Histoire de Bretagne 

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Le culte des morts, encore si vivace en Bretagne, a inspiré autrefois à nos ancêtres la construction d'ossuaires ou reliquaires destinés à recueillir les ossements exhumés pour faire place aux générations suivantes.

Malgré les destructions qui ont eu lieu et l'état d'abandon qui a abouti à bien des disparitions, les ossuaires sont encore assez nombreux, non seulement dans le Finistère, mais aussi dans l'ouest des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) et du Morbihan ; ils sont beaucoup plus rares dans les autres parties de la Bretagne. Cependant il en existe encore quelques-uns dans l'Ille-et-Vilaine.

Dans certaines régions de la France ils ont complètement disparu. L'un des plus intéressants de ceux qui subsistent est celui de Marville (Meuse) qui contient 40.000 crânes, soigneusement rangés, alternant avec des fémurs et des tibias.

Il existe encore des ossuaires en Saintonge, mais ils sont tout à fait différents des ossuaires bretons, ce sont des cryptes.

A l'entrée des cimetières bretons, principalement dans le Finistère, se trouve parfois une porte monumentale, dile « arc de triomphe », parce qu'elle figurait l'entrée de l'élu dans l'éternité.

A Pleyben, la porte monumentale est appelée « Porz ar Maro » ou « porte de la mort », parce que tous les défunts de quelque point de la paroisse qu'ils arrivent doivent passer sous cet arc de triomphe, car nos ancêtres avaient une haute idée de l'au-delà et cette porte triomphale symbolisait pour eux le chrétien « revenant victorieux de sa lutte avec le monde et le démon », comme les triomphateurs romains passaient autrefois sous des arcs fleuris au retour de leurs victoires (Notes du chanoine Monfort).

Les ossuaires bretons sont tantôt appuyés à l'église, tantôt isolés.

Les reliquaires d'attache sont parfois enclavés dans l'église, généralement à l'angle sud-ouest. Ils occupent assez souvent l'un des angles rentrants du porche. Ils sont parfois situés entre deux contreforts ou à la base du clocher [Note : Saint-Jean-du-Doigt, 2, Taulé (Finistère), 2, Corlay, Lanfains, Plaintel (Côtes-d'Armor)], rarement à l'est du transept ou au nord. Celui de Confort-Meilars (Finistère) paraît être le seul à l'intérieur d'une église [Note : Ces reliquaires étaient généralement rectangulaires ; celui de Trégastel (Côtes-d'Armor), adossé au porche, a la forme d'un quart de cercle]. Dans l'Ille-et-Vilaine ils étaient souvent situés au-dessus du porche appelé « chapitret ». Celui de Pipriac, dont c'était le cas, était circulaire. De même celui des Iffs qui était couvert en dôme.

Les ossuaires formant un monument isolé de l'église sont généralement situés contre le mur de clôture du cimetière, souvent au sud-ouest. Ceux de Saint-Thégonnec, Lampaul-Guimiliau, Sizun, Saint-Germain de Plogastel, sont soudés à l'arc de triomphe.

Ces ossuaires affectent généralement une forme rectangulaire ; ceux de Lampaul-Guimiliau et de Saint-Thégonnec sont terminés par une abside à pans du type de celles conçues par Philippe Beaumanoir. L'ossuaire de Kermoroch (Côtes-d'Armor) est octogonal, c'est le seul de cette forme [Note : Ces ossuaires étaient généralement orientés plus ou moins exactement nord-sud, quelques-uns seulement l'étaient est-ouest : Trémaouézan, Lanhouarneau, Ploujean, Plourin-Morlaix (Finistère), Plongonver (Côtes-d'Armor), Gourin (Morbihan)].

Dans quelques-uns de ces ossuaires une partie était réservée aux ossements, l'autre, éclairée par une grande fenêtre percée dans l'un des pignons, servait de chapelle pour les cérémonies funèbres [Note : Les reliquaires d'attache sont dépourvus d'autel à l'exception de celui de la Belle-Eglise, en Plouëc (Côtes-d'Armor)].

Les ossuaires de l'un et l'autre type comportent généralement un ou deux bénitiers, rarement plus [Note : N. D. de Châteaulin, 3, Saint-Thégonnec, 4, Commana (Finistère), 4], cependant quelques-uns en sont dépourvus. Ces bénitiers servaient à asperger d'eau bénite les ossements pieusement recueillis ou le cercueil qui y était exposé.

Parmi les ossuaires formant un monument isolé, ceux de Mégrit et de Plélan-le-Petit (Côtes-d'Armor) possèdent une toiture en granit à un seul rampant. Celui de Lanvaudan (Morbihan), également a un seul rampant, était couvert d'ardoises. L'édifice ayant été laissé à l'abandon, sa toiture s'est écroulée, vers 1950, sur les ossements qu'il contient encore.

Les premiers ossuaires qui furent, comme les églises primitives, sans doute construits en bois, ont tous disparu. Celui de Quédillac (Ille-et-Vilaine), dont c'était le cas, n'était pas très ancien ; il a été détruit au XIXème siècle. Il existe toutefois quelques ossuaires dont les montants ou balustres de la claire-voie sont en bois [Note : Lennon (Finistère), Lanfains, Saint-Bihy (Côtes-d'Armor), Lanvaudan, Locmeltro en Guern, en ruines, Inguiniel, Noyal-Pontivy (Morbihan) et Saint-Suliac (Ille-et-Vilaine), détruits].

A Ploërdut (Morbihan), un ossuaire situé à l'angle sud-ouest de l'église et construit entièrement en granit a son ajourage formé de montants de section carrée, très rapprochés, posés en diagonale et, par là même, évoque les constructions de bois.

Les plus anciens ossuaires qui subsistent ne remontent pas au-delà du XVème siècle : Saint-Jean-du-Doigt (Finistère), Lanvellec, Plouzélambre [Note : A Lanvellec et Plouzélambre, les arcatures trilobées reposent sur des colonnettes jumelées], Lanrivain (Côtes-du-Nord).

A Saint-Yvi (Finistère), et à Locmaria-an-Hent dans la même commune, existent des ossuaires d'un ajourage spécial, leurs arcs en plein cintre s'entrecroisent au-dessus d'arcatures trilobées, des ouvertures tréflées ornent les écoincons [Note : Leur ajourage est semblable à celui du cloître de Pont-l'Abbé]. Ils paraissent remonter à la fin du XVème siècle.

Les ossuaires gothiques, généralement moins importants que ceux qu'on a édifiés à l'époque de la Renaissance, sont dépourvus de contreforts à l'exception de celui de Plougonven qui en possède d'obliques aux angles de la façade. Il en était de même antérieurement à celui de Plestin (Côtes-d'Armor).

Le nombre de baies qui varie généralement de deux à six [Note : A Locuon en Ploërdut (Morbihan) et Plovan (Finistère), il n'y a qu'une seule baie surmontée d'un linteau], s'élève à douze à Plougonven où les rampants rehaussés de crochets sont ornés de lions à la base.

A Pleyben, les douze baies en anse de panier, sont encadrées deux par deux sous un cordon en accolade ainsi que l'archivolte de la porte. Au pignon nord il y a quatre baies semblables. Comme à Plougonven les rampants sont ornés de crochets, mais à la base ce sont des guivres.

A la fin de la période gothique les redents disparaissent et les arcatures sont généralement en anse de panier : Roscoff (l'un des ossuaires), Brasparts, Notre-Dame de Châteaulin, Trémaouézan (Finistère), Corlay (Côtes-d'Armor). A Trédrez, Locquémeau, Guénézan de Bégard, Locquenvel (Côtes-d'Armor), Guengat (Finistère), les arcs sont en accolade.

A l'époque de la Renaissance on a érigé de très beaux ossuaires ou chapelles funéraires [Note : Quelques-unes de ces chapelles-ossuaires sont dédiées à sainte Anne : Landivisiau, Plourin-Ploudalmézeau, Lannédern, Saint-Hernin] dans ce qu'il est convenu d'appeler la « vallée de l'Elorn ». Le plus ancien de style classique paraît être celui de Lanhouarneau, construit vers 1580 par l'atelier du château de Kerjean. Les plus remarquables sont ceux de La Roche-Maurice et de Saint-Thégonnec [Note : Un clocheton s'élève parfois sur l'un des pignons : Lanhouarneau, Landivisiau, Ploudiry, La Roche-Maurice, Saint-Servais, GuimiIiau, Saint-Thégonnec. Les angles de la façade : Sizun, Landivisiau, Guimiliau, parfois les quatre angles : Lanhouarneau, Ploudiry, La Roche-Maurice, Saint-Servais, sont contrebutés par des contreforts obliques amortis par des lanternons. A Saint-Thégonnec où l'abside est à pans, il y a six contreforts, les gâbles du chevet sont eux-mêmes surmontés par des lanternons dont le total s'élève à neuf. Le tout est d'un bel effet décoratif. La porte en plein cintre est généralement surmontée d'un fronton triangulaire : Landivisiau, Pencran, Ploudiry, Saint-Thomas de Landerneau, La Roche-Maurice, Saint-Servais, Saint-Thégonnec, parfois courbe : Guimiliau, Lannédern. Les baies, également en plein cintre, sont séparées par des colonnettes, lisses à Pencran, Saint-Thégonnec ; cannelées à La Roche-Maurice, Guimiliau ; des pilastres à Daoulas, Saint-Servais, Ploudiry ; des cariatides à Landivisiau, Sizun].

A Sizun dont l'ossuaire est daté de 1585-1588, il y a deux étages, les baies sont surmontées de niches qui a britent les statues des apôtres.

Les ossuaires de Pencran, La Roche-Maurice, Lampaul-Guimiliau, Saint-Thégonnec, possèdent également deux étages, le 2ème comportant aussi des niches, mais elles sont vides.

L'ossuaire de Roscoff, d'un type spécial, possède aussi deux étages, les ouvertures séparées par un bandeau sont encadrées de lourds pilastres gainés. Les baies supérieures sont en plein cintre. L'édifice ne possédait pas de porte [Note : Les reliquaires d'attache étaient généralement dépourvus de porte] et c'est seulement par les ouvertures qu'on pouvait y mettre les os.

Dès l'époque gothique l'ossuaire du Faouët (Morbihan) comportait deux étages à arcatures trilobées. Sur la tablette des baies supérieures étaient disposées des boîtes contenant des crânes [Note : Au moment des exhumations on conservait parfois les crânes ou « chefs », principalement des notabilités, que l'on mettait dans de petites boîtes de bois percées d'une ouverture, souvent en forme de cœur, qui permettait de voir le crâne du défunt. Les autres ossements considérés comme inférieurs étaient mis dans l'ossuaire].

On construisit encore des ossuaires au XVIIIème et même au XIXème siècle [Note : Plufur, 1819, Plougras (Côtes-d'Armor), 1869], mais ils n'ont en général aucun caractère monumental.

Lorsque l'ossuaire était rempli d'ossements ou lors de sa désaffectation ou démolition, on creusait une fosse et au cours d'une cérémonie on y mettait les ossements [Note : A la Roche-Derrien (Côtes-d'Armor), les fidèles qui assistaient à l'office de la Fête des Morts, prenaient un ossement dans le reliquaire, faisaient le tour de l'église et le replaçaient dans l'ossuaire. Cette pratique a été abandonnée il y a une centaine d'années (Mme Hélène Riou)]. A Runan (Côtes-d'Armor), une croix située à quelques mètres de l'ossuaire et portant l'inscription : CROIX DES RELIQUES F : LE CRAN CURE, a été évidemment érigée à cette occasion.

A Trégastel (Côtes-d'Armor) un autel a été placé sur la fosse et porte l'inscription : OSSA PATRUM REQUIESCANT IN PACE 1895.

Quand l'ossuaire devenait insuffisant on en construisait parfois un deuxième comme on peut encore le constater à Saint-Jean-du-Doigt, Guimiliau, Roscoff, Plounéour-Trez, Plabennec, 3, Milizac, Bourg-Blanc (Finistère) [Note : A Saint-Thégonnec, l'un des ossuaires a été détruit en 1850 ; à Pleyber-Christ, vers 1900 à Ploudiry, fin 1957. A Inguiniel (Morbihan), il ne subsiste que le reliquaire d’attache qui contient encore des ossements, l'autre qui contenait aussi des ossements a été détruit en 1945].

A Saint-Pol-de-Léon, 9 ossuaires des XVème et XVIème siècles [Note : L'un d'eux est daté de 1500. Saint-Jean de Saint-Vougay possède un ossuaire du même type et de la même époque, mais à arcatures trilobées. Il en existe aussi, mais plus tartifs, à Plougoulm, Sibiril, 1743, Tréflez, Plabennec. Il semble que ce type d'ossuaire soit particulier au Léon], font corps avec le mur du cimetière, ils comprennent trois ou quatre arcatures peu profondes et abritaient des boites. contenant des crânes [Note : On peut encore remarquer des boîtes de ce genre à l'ossuaire de Plutur qui contient en outre de nombreux ossements, à celui de Plouzélambre, aux porches de Tréguidel et de Lanloup (Côtes-d'Armor)]. Dans le même cimetière, la chapelle Saint-Pierre constituait en outre un vaste ossuaire, le plus important de Bretagne. A l'occasion de grosses réparations effectuées en 1878, cette chapelle fut désaffectée comme ossuaire, de même que les reliquaires de la clôture du cimetière. On creusa une fosse au centre de l'hémicycle où figure le chemin, de croix et on y enfouit les ossements. La croix qui en marque l'emplacement est l'œuvre de Yan Larhantec. Les boîtes contenant des crânes furent placées sur le chancel de la cathédrale. L'une d'elles, en forme de chapelle, contient le « chef » de Monseigneur Neboux de la Brosse [Note : L'inscription indique DE LA BROUSSE, mais elle est erronée], ancien évêque de Léon, mort en 1701 [Note : Il y a 35 boîtes, la plus ancienne est celle du chanoine Hamon Barbier, mort en 1552, à qui l'on doit le château de Kerjean. La plus récente est datée de 1863. Tout récemment ces boîtes ont été déplacées et mises dans un enfeu].

Tous les ossuaires bretons sont actuellement désaffectés [Note : De nombreux ossuaires ont été désaffectés au XIXème siècle. A Runan (Côtes-d'Armor), les ossements furent enlevés pendant la Révolution après avoir été profanés par les « patriotes » de Pontrieux], Cependant il en existe quelques-uns dans les Côtes-d'Armor et le Morbihan qui contiennent encore des ossements [Note : Glomel (Trégornan), Gouarec (Saint-Gilles), Kergrist-Moëlou (Saint-Lubin), Kerpert, Lanrivain, Magoar, Mégrit, Plaintel, Plufur, Quintin, Saint-Bihy, Saint-Nicolas-du-Pélem (Bothoa), Trégastel, Trémargal (Côtes-d'Armor), Guern (Locmeltro), Inguiniel, église et chapelle de Lochrist, Lanvaudan, Persquen, Ploërdut (Locuon), Plouray (Morbihan). A Calan, Guéhenno (Morbihan), Saint-Clet (Côtes-d'Armor), les ossements sont dans des châsses]. Dans le Finistère il n'en subsiste plus, à l'exception de celui de Plourin-Morlaix qui en renferme dans la crypte [Note : Au revers du socle du calvaire de Laz (Finistère) une petite logette contient quelques crânes et ossements].

Quelques rares ossuaires possèdent des cryptes. On ne peut guère citer que ceux de Lampaul-Guimiliau et de Saint-Thégonnec. La crypte de ce dernier contient une belle Mise au tombeau en bois, œuvre du Morlaisien Jacques Lespaignol [Note : La crypte de l'ossuaire de Lampaul-Guimiliau possédait aussi un sépulcre en pierre blanche (1676), œuvre d'Antoine ; il se trouve actuellement à l'église]. La crypte de l'ossuaire de Goulven a été comblée.

La chapelle-ossuaire de Notre-Dame-des-Vertus, à Saint-Martin de Morlaix (1445), possédait déjà une crypte. Guillaume Feulon s'en inspira lorsqu'il construisit, en 1624, pour l'église Saint-Mathieu, la chapelle Sainte-Marguerite qui eut aussi une crypte avec sépulcre. Cet ossuaire servait en outre de charnier [Note : Dans plusieurs cimetières parisiens, notamment à celui des Innocents, les galeries servaient de charnier et les combles d'ossuaire] et possédait « une rangée de tombes profitables pour la Fabrique ». (Archives départementales du Finistère, dossier 150 G 148).

L'ossuaire de Daoulas (Finistère) a été transformé en sacristie ; les reliquaires d'attache de Trégrom, Moustéru, Le Moustoir (Côtes-d'Armor), Lanrivoaré, Guilers, Saint-Nic, Ploéven, Kerlaz, Plonéïs, Pouldreuzic, Plovan, Ergué-Armel, Redéné (Finistère), en baptistère.

Certains ossuaires furent utilisés comme écoles, principalement au temps de Louis-Philippe : Plobannalec, Pleyben, Brasparts, Sizun, Goulven, Roscoff, Henvic, Ploujean (Finistère) [Note : Louis OGÈS, L'Instruction primaire dans le Finistère sous le régime de la loi Guizot, 1935, p. 48]. A Saint-Juvat (Côtes-d'Armor), l'ossuaire avait déjà servi à cet effet dès 1655. De même à Saint-Quay-Perros, en 1732. « En 1743, à Guissény (Finistère) l'on prévoit lors de la construction de l'ossuaire une chambre pour les petites écoles ».

En 1625, le sire de Barach est dit avoir transporté le siège de sa justice de Perros-Guirec dans un lieu « indécent », le reliquaire [Note : René COUFFON, L'Architecture classique au pays de Léon. Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne, tome XVIII, 1948, p. 76].

Les ossuaires de Mespaul (Finistère) et Plougonver (Côtes-d'Armor), sont utilisés comme maison d'habitation [Note : La façade de ceux de Plouzévédé et de Tréflévenez (Finistère) a été incorporée dans une maison d'habitation], ainsi que celui de Saint-Thomas de Landerneau « qui fut réquisitionné en 1794, pour servir d'atelier aux cordonniers requis pour faire des souliers « quarrés » à la troupe de la République » (René COUFFON, ouvrage cité, p. 72).

L'ossuaire de Pencran fut utilisé comine débit de tabac, celui de Guiclan également.

L'ossuaire de Pleyben qui eut diverses affectations fut utilisé comme mairie, ainsi que celui de Ploudaniel, de 1850 à 1865. L'ossuaire de Saint-Hernin, l'un de ceux du Bourg-Blanc et de Plabennec, une partie de celui de Plougonven, sont occupés par une bibliothèque, d'autres servent pour le catéchisme. On comprend moins que l'un d'eux puisse être utilisé comme salle de ping-pong. Celui de Gourin a été récemment mutilé et transformé en forge pour la réparation des outils des cantonniers.

L'ossuaire de Trébeurden était occupé par des fraudeurs ; pour mettre fin à ce scandale, le recteur, l'abbé Nayrod, le fit démolir en 1778.

Outre leur fonction principale de recueillir des ossements, de servir de chapelles funéraires, les reliquaires contribuaient à l'édification des fidèles par les inscriptions et les sculptures dont ils étaient décorés [Note : Les emblèmes funéraires n'apparaissent qu'à la Renaissance].

Parfois les sculptures figurent l'ankou (la mort) représenté par un squelette armé d'une faux (Brasparts) [Note : Egalement à la fenêtre sud-ouest de l'église de Lannédern. La sacristie de Ploumiliau (Côtes-d'Armor) possède une statue en bois représentant l'ankou avec une faux et la pelle du fossoyeur ; elle se trouvait primitivement à l'église, chapelle des Trépassés], ou d'une flèche (Cléden-Poher), des tibias, des os croisés. A La Martyre, un homme barbu brandit un crâne et un tibia sous les yeux d'une femme qui fait un geste de terreur. A Brasparts, évocation du jugement dernier, un ange sonne de l'olifant avec ces mots : REVEILLE TOI.

A Ploudiry, Landivisiau, l'ankou est armé d'une flèche, on y trouve une réduction de danse macabre [Note : Quelques charniers et ossuaires possédaient des danses macabres plus développées ; la plus célèbre de celles qui subsistent se trouve à l'aître Saint-Maclou de Rouen]. De même à La Roche-Maurice où l'ankou à cheval sur un bénitier darde une flèche vers divers personnages en disant : JE VOUS TUE TOUS [Note : Allusion au Triomphe de la mort lequel, représenté à l'une des sablières de Pleyben, est dans doute inspiré d'Orcagna].

A Saint-Thégonnec, un véritable crâne est encastré sur la corniche, au-dessus de la porte axiale.

Au reliquaire d'attache d'Inguiniel (Morbihan) la tête de mort et les os croisés sont placés sur des ailes de chauve-souris (Influence italienne, vraisemblablement siennoise).

A Hanvec, un ange tient le voile de la Sainte-Face, d'autres le monogramme du Christ et de la Vierge.

La chapelle funéraire de Guimiliau où figurent également une tête de mort et des os en croix de saint André [Note : Les crânes et os en croix de saint André, armes parlantes de la mort, figurent aussi à la base de certaines croix ainsi qu'au lambris de la voûte de la chapelle des Trépassés à l'église de Runan (Côtes-d'Armor), qui en est toute parsemée], a une particularité, sa chaire extérieure, qui occupe l'emplacement de l'une des fenêtres [Note : Au centre du cimetière de Plougasnou (Finistère), se trouve une chaire à prêcher, utilisée autrefois comme à Guimiliau, à l'occasion de la fête des morts].

Les inscriptions [Note : Les inscriptions mentionnent parfois le nom du recteur : Le Folgoat (Guicquelleau), détruit, Plouzévédé, Goalven, Sibiril, Saint-Yvi (Locmaria-an-Hent), (Finistère), Bonen, détruit, Loguivy -Plougras (Côtes-d'Armor) ; du fabricien : Ploudiry, 1762, détruit et 1635, Lampaul-Guimiliau, Saint-Thégonnec (Finistère) ; du recteur et du fabricien : Lannédern, Saint-Hernin (Finistère). Deux ossuaires seulement mentionnent le nom de ceux qui les ont fait construire. A Saint-Pol-de-Léon, l'un des reliquaires porte, en caractères gothiques, l'inscription suivante : M. LE CAM PRE CHORISTE ET SOUBSDIACRE DE LÉON FEIT FAIRE CE RELIQUAIRE LAN M V C. A Combrit (Finistère) : FRANCOIS FRANCOIS ET MARGUERITE CARIOU ONT FAIT BASTIR CE RELIQUAIRE 1700. DIEU LES BENISSE], tantôt en latin, en breton ou en français, invitent à prier pour les trépassés, évoquent l'idée du Jugement dernier, de l'enfer et rappellent que la mort vient inexorablement pour tous. Certaines sont très émouvantes ; ce sont parfois les âmes du purgatoire qui implorent les prières des vivants.

MEMENTO MORI : Lannédern.

RESPICE FINEM : Guengat, Daoulas, Lannédern.

HODIE MIHI CRAS TIBI : Loguivy-Plougras (Côtes-d'Armor), Saint-Thégonnec.

REQUIESCANT IN PACE : Saint-Thégonnec, Combrit (Finistère), Bégard (Botlézan), Ploubazlanec, Plougras (Côtes-d'Armor).

JESUS : MARIA : CREDO : Plouisy (Côtes-d'Armor), détruit.

A Berné (Morbihan) :

ECCE 1774 HOMO

VIDE (crâne et os croisés) TE.

A Saint-Briac (Ille-et-Vilaine), dont l'ossuaire a malheureusement disparu :

HOMME VOILA TON SORT ! POUR TOI QUEL SOUVENIR !

APPRENDS EN ME VOYANT QU'IL FAUT ENFIN MOURIR.

DE VOTRE PITIE J'IMPLORE L'ASSISTANCE.

SECOUREZ-MOI CHRETIENS, HATEZ MA DELIVRANCE.

A Guicquelleau, ancienne paroisse dépendant aujourd'hui du Folgoat, on pouvait lire une inscription en breton :

AN ESKERN MAN BRUZUNET O DEVEZO CALS A JOA. CERTENAMENT NI A RESUCITO.
(Ces ossements-ci fragmentés auront beaucoup de joie. Certainement nous ressusciterons) (Chanoine Guéguen, ancien recteur du Folgoat).

A La Martyre, également en breton :

AN MARO AN BARN AN IFERN IEN
PA HO SOING DEN E TLE CRENA
FOL EO NA PREDER E SPERET
GUELET EZ EO RET DECEDI
(La mort, le jugement, l'enter froid Lorsqu'il y pense l'homme doit trembler Fol est celui dont l'esprit ne réfléchit Qu'il faut que chacun meure.).

A Pencran :

CHAPEL, DA SA ITR(OP) HA KARNEL DA LAK(A)T ESQ(E)RN AN POB.
(Chapelle à Saint-Eutrope et charnier pour mettre les ossements du peuple).

A Trémaouézan et Ploudiry :

BONE GENT QUE ICY PASSES
PRIEZ DIEU POUR LES TREPASSES
[Note : Des inscriptions du même genre rappelant toujours la prière pour les trépassés se lisent encore, en breton, contre le mur du cimetière de Ploubezre (Côtes-d'Armor) : TUD MAT O PATER A LAVERFET O TREMEN PLOESBEZRE O BERRET (Bonnes gens votre pater vous direz en passant à Ploubezre (devant) le cimetière). Et sur les piliers d'entrée : SICOUR. A l'entrée de l'ancien cimetière de Saint-Mathieu de Morlaix sur le contrefort du clocher une inscription actuellement en partie illisible était ainsi conçue : MORS TUA MORS CHRISTI FRAUS MUNDI GLORIA CELI ET DOLOR INFERNI SINT MEMORANDA TIBI. A l'abbaye Saint-Mathieu, un autel en kersanton, porte en caractères gothiques l'inscription : VOUS QUI PAR ICI PASSEZ PRIEZ POUR LES TREPASSES MISERERE MEI DEUS. Au calvaire de Plougonven (Finistère) : CESTE CROIX FUST FAICTE LAN M V L IIII (1554) A L’HONNEUR DE DIEU ET NOTRE DAME DE PITIE ET MONSEIGNEUR ST YVES (patron de la paroisse), l'inscription se termine ainsi : PRIES DIEU POUR LES TREPASSES].

Et en outre en breton à Trémaonézan :
GANT DOUE HAN BED MILIGUET EO
NEPNA LAVAR MAT PENA TEO. (Par Dieu et le monde est maudit Celui qui ne dit le bien ou ne se tait).

A Sizun :
VOUS NOS ANFENS QUE PAR ICY PASSES
SOUVENEZ VOUS QUE NOUS SOMMES TREPASSES.
HIRIO DIME (Aujourd’hui à moi)
VARHOAS DIDE (Demain à toi).

A Landivisiau :
LA GLOIRE DE CE MONDE EST UNE CHOSE (VAINE);

A La Roche-Maurice, en outre de l’inscription mentionnée ci-dessus :
MEMOR : ESTO : JUDICH : MEI : SIC : ERIT : ET : TUUM : HODIE : MIHI : CRAS : TBI : 1639
MOMENTO : HOMO : QUIA : PULVIS : ES : 1640.

A Saint-Thégonnec, sur tout le pourtour de la chapelle funéraire se développe cette inscrition :

CEST : UNE : BONNE : ET : SAINCTE : PANSEE : DE : PRIER : POUR : LES : FIDELLES : TREPASSES : REQUIESCANT : IN : PACE : AMEN : HODIE : MIHI : CRAS : TIBI : O : PECHEURS : REPANTEZ : VOUS : ESTANTS : VIVANS : CAR : A : NOUS : MORTS : IL : NEST : PLUS : TEMPS : PRIEZ : POUR : NOUS : TRESPASSES : CAR : UN : DE : CES : JOURS : VOUS : EN : SEREZ : SOIEZ : EN : PAIX :

Il subsiste de l’ossuaire Saint- Melaine de Morlaix , une plaque en pierre de Locquirec dont l’inscription gothique maintenant en grande partie illisible était ainsi concue :
BONES GENS QUE PAR ILLEC PASSES
PRIES DIEU POUR LES TREPASSES.

L’ossuaire de la cathédrale de Quimper, détruit vers 1842, comportait une inscription du même genre :
VOUS QUI PAR ILLECQUES PASSEZ
SOUVENEZ VOUS QUE NOUS SOMMES TREPASSES
[Note : Des inscriptions à peu près semblables rappelant l’idée de la mort, de la prière pour les trépassés, se lisaient autrefois sur l’ossuaire de Marville (Meuse ) ; à Montfort-l’Amaury (Seine-et-Oise) ; au cimetière des Innocents et à la porte de celui de Saint-Séverin à Paris ; à l’entrée du grand cimetière d’Orléans ; contre le mur extérieur de l’église de Beauval ( Somme) et sans doute dans des cimetières de la plupart des régions de la France. Des épitaphes de 1277 dans l’église d’Andelot (Haute-Marne) et de 1342 dans celle des Récollets de Tournay (Belgique), comportente avec quelques variantes des inscriptions de ce genre].

A la lecture de ces nombreuses inscriptions où plane sans cesse l'ombre de la mort, nous songeons tout naturellement à cet éternel lieu commun cher à tant de poètes lyriques et qu'a su exprimer avec une si grande émotion et avec une si touchante sincérité le plus ancien d'entre eux, notre François Villon... Qui ne se souvient en effet de l'appel pathétique qu'il lance, du fond de sa cellule de condamné à mort, à ses « frères humains » pour les préserver du sort horrible qui l'attend et pour leur demander bien humblement une pieuse pensée pour ceux qui ne sont plus ? Nous ne citerons que le vers qui termine chaque strophe de la célèbre ballade des pendus, refrain plein d'angoisse et de ferveur :
MAIS PRIEZ DIEU QUE TOUS NOUS VEUILLE ABSOUDRE.

Nous souhaitons vivement que tout soit mis en œuvre pour protéger les ossuaires qui font partie du patrimoine artistique et des traditions de la Bretagne, que ces touchants monuments soient désormais mieux préservés, mis à l'abri de mutilations comme celle dont l'ossuaire de Gourin a été victime et que ceux qui contiennent encore des ossements soient aussi bien entretenus que celui de Marville.

(publié avec l'aimable autorisation de la famille d'Alfred LE BARS).

© Copyright - Tous droits réservés.