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Suite des déclamations de Brutus Magnier.

Accolade à la femme Février en pleine audience.

Histoire des enfants Aubin.

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Suite des déclamations de Brutus Magnier. Accolade à la femme Février en pleine audience. Histoire des enfants Aubin.

Le zèle des juges s'était retrempé dans ces agapes patriotiques ; aussi l'abbé Mercier Montigny, ancien prêtre de Saint-Léonard de Fougères, ayant paru devant eux le 12 nivôse, ils ne se contentèrent pas de le condamner à mort « parce qu'il avait été vu en compagnie de l'infâme Putod (chef de chouans) », ce qui rendait probable sa connivence avec les chouans, ils introduisirent dans son jugement ce dithyrambe contre les prêtres :

« Les rois coalisés contre la République auraient-ils osé attaquer un peuple libre, si ces monstres n'avaient compté sur des enfants dénaturés qui se sont vendus lâchement à eux, et qui pour assouvir leur ambition, leur intérêt, leur fanatisme, ont consenti de déchirer de leurs propres mains le sein de leur patrie ? De ces scélérats, les plus déterminés, les plus redoutables, étaient les prêtres, aussi était-ce par eux qu'on voulait ramener la contre-révolution ; mais ils ont été bien leurrés dans leurs perfides espérances. Les brigands de la Vendée dont ils ont fomenté la rebellion sont exterminés, et tous les jours la hache de la loi fait justice de leurs traîtres instigateurs ; on reconnaît, à n'en plus douter, que les prêtres seuls sont les auteurs de nos maux ».

Le même jour, la Commission eut à juger deux soldats Gabriel Bourguignon et François Paulvé qui, bien que déjà pourvus de sabres, s'en étaient fait délivrer chacun un autre qu'ils avaient vendu. Ils furent condamnés à cinq ans de fers et trois heures de pilori avec cet écriteau placé au-dessus de leurs têtes : Voleurs et vendeurs d'effets nationaux. Leur jugement, comme ceux de même nature que nous avons déjà cités, indique sous une forme étrange un vrai désir de faire cesser le pillage des soldats :

« Personne n'ignore que, si la République n'avait à faire face qu'aux dépenses légitimes que nécessitent ses nombreuses armées levées pour sa défense, elle ferait beaucoup moins de frais ; mais pour son malheur il est encore dans toutes les classes d'hommes qu'elle nourrit, des âmes basses qui veulent faire leur fortune aux dépens du trésor national, et dilapider les fonds de la République pour assouvir un vil intérêt personnel.

… O chère patrie, comme tu auras bien gagné le bonheur dont tu vas incessamment jouir ! Rassure-toi ! Les traîtres du dedans et du dehors sont exterminés, il ne reste plus qu'à punir leurs restes épars, et à faire justice de certains soldats indisciplinés dont les dilapidations et la lâcheté ont causé ces malheurs ».

Paulvé et Bourguignon auraient peut-être eu quelque peine à faire leur fortune, en vendant le sabre qu'ils s'étaient fait délivrer indûment ; mais ils avaient commis un acte répréhensible dont la Commission les frappait justement.

Deux jours après, un prêtre, l'abbé du Fresne, deux religieuses : Marie Féral et Olive Le Lohen, qui avaient soigné les malades dans les hôpitaux des rebelles, et cinq soldats déserteurs de la Légion Germanique « qui avaient quitté les phalanges républicaines pour entrer dans la féroce bande de cannibales, se disant armée catholique royale, » passèrent ensemble devant la Commission et furent condamnés à mort. Cette réunion assez étrange de religieuses et de déserteurs compris dans le même jugement ne pouvait manquer de mettre en verve Brutus Magnier, aussi commença-t-il ainsi son jugement :

« On a vu, à la tête des scélérats de la Vendée, une petite poignée de nobles qui, s'efforçant de rétablir par tous les moyens possibles, la servitude d'un peuple qui les nourrissait, ont, les premiers, arboré l'étendard de la rébellion contre la France ; mais ces monstres qui, bercés et entretenus de leurs préjugés, ne voulaient pas faire de nécessité vertu, n'auraient pu mettre à exécution leurs détestables projets, s'ils n'avaient trouvé à leur solde de plus scélérats qu'eux. Oui, les prêtres, les nones (sic) et les infâmes déserteurs des armées de la république, sont les premiers instruments dont les nobles ont su adroitement se servir pour fanatiser les paysans, et leur mettre les armes à la main. Ce sont les prêtres et les nobles qui, le crucifix d'une main et le poignard de l'autre, électrisaient les âmes des malheureux cultivateurs et les portaient à commettre des crimes dont le souvenir seul fait frémir, et ce sont les déserteurs de nos armées qui, après avoir employé tous leurs soins pour organiser celle des brigands forçaient, à grands coups de plat de sabre, les paysans à se battre ».

Quand la commission acquittait, il lui paraissait quelquefois que le prévenu était digne d'une réhabilitation spéciale ; elle lui accordait, dans ce cas, l'accolade fraternelle. En voici deux exemples :

David Gouesnel, volontaire républicain, avait été fait prisonnier par les chouans ; il put, par ruse, sauver son cheval et ses effets ; il déroba même un drapeau tricolore « destiné, sûrement à être solennellement brûlé par ces scélérats ». Pour cette conduite méritoire, Gouesnel, qui avait été emprisonné par erreur, fut non-seulement acquitté, mais gratifié de « l'accolade fraternelle » par les membres du tribunal.

Ce fut une femme qui, pour la manifestation de ses sentiments patriotiques, obtint une autre fois la même faveur ; les termes du procès-verbal sont même assez ambigus pour faire croire que l'initiative de cette fraternelle démonstration fut prise par la femme Perrine Février. Elle était accusée d'avoir recelé des brigands ; mais elle fut acquittée faute de preuves :

« Lui ayant observé qu'elle a eu un frère qui a été guillotiné, il y a huit jours [Note : Il fut jugé le 18 pluviôse et Perrine Février fut acquittée le 3 ventôse], et demandé si cela ne la rendait point aristocrate, avec fermeté elle a répondu qu'elle aimait et aimerait la République, qu'elle se réjouissait de ne plus avoir pour frère un scélérat, et à ce moment a donné l'accolade fraternelle au président et à ses collègues ».

Scène et sentiments étaient dignes de Brutus Magnier et de ses collègues.

On vit le 18 nivôse, dans la salle du Présidial, un spectacle à coup sûr sans précédent dans les fastes judiciaires. Neuf prévenus étaient assis sur le banc des accusés : Joseph Chevrier, qui fut condamné à mort pour avoir fait partie de l'armée vendéenne, une femme nommée Aubin, une servante Anne Denis et six enfants, dont l'aîné avait quatorze ans et le plus jeune cinq ans. Femmes et enfants étaient également accusés d'avoir fait partie de l'armée catholique !

Ils racontèrent leur triste et touchante histoire. Le mari de la femme Aubin était parti pour Nantes avec son cousin, le père des six malheureux enfants qui comparaissaient devant le tribunal ; ils étaient tous six restés sous la garde d'une servante fidèle, Anne Denis. L'armée de Mayence approchait du bourg de Rezé qu'habitaient ces pauvres gens ; les soldats de cette armée, les Mayençais, comme on les appelait, étaient pour tous un objet de juste terreur, car ils ne faisaient grâce à personne. La femme Aubin avait donc fui, emmenant avec elle son fils unique âgé de quatre ans ; Anne Denis l'avait suivie avec les six petits Aubin ; « ils craignaient le feu, disaient les enfants ». Après avoir traversé la Loire à Mauves, ils errèrent en Bretagne pendant deux mois, mendiant de village en village ; l'enfant de la femme Aubin mourut de misère dans ce triste voyage, et tous ces malheureux vinrent s'échouer à Bazouges-la-Pérouse [Note : Bourg de l'arrondissement de Fougères], où les républicains les arrêtèrent et d'où ils les envoyèrent dans les prisons de Rennes. On ne pouvait accuser sérieusement des femmes et des enfants d'avoir fait partie de l'armée vendéenne ; ils eussent été en tout cas des ennemis bien peu redoutables ; les enfants d'ailleurs affirmaient n'avoir été que trois jours dans....

« Le derrière de l'armée des brigands, où ils avaient « remarqué beaucoup de canons ». Pour trouver prétexte à accusation, on reproche aux femmes d'avoir exposé les enfants à toutes les calamités possibles :

« Ces femmes fanatiques, dit le jugement, qui ne se sont pas contentées de mettre dans la main des hommes l'étendard de la rébellion, mais n'avaient pas craint d'emmener avec elles, et d'exposer à toutes les calamités possibles, des enfans en bas âge, étaient coupables envers l'humanité ».

Elles furent condamnées à mort, et les six enfants durent être enfermés à l'hôpital général [Note : Les registres des hospices de Rennes, qui, même à cette époque, paraissent assez régulièrement tenus, ne font cependant pas mention de l'entrée des petits Aubin]. La femme Aubin et Anne Denis auraient pu répondre qu'en Vendée les soldats de la République n'épargnaient point les enfants ; qu'il s'en trouvait même d'assez cruels pour porter en se jouant leurs cadavres au bout de leurs baïonnettes ; elles auraient pu ajouter que l'âge le plus avancé ne mettait pas les femmes à l'abri des outrages des soldats qui ensuite les égorgeaient [Note : Lequinio, Guerre de la Vendée et des chouans, page 45, et discours de Maignen, député de la Vendée à la Convention, lors du procès de Carrier]. Mais à quoi bon discuter avec des juges qui faisaient asseoir sur le banc des accusés des enfants de cinq ans !.

(Hippolyte de la Grimaudière).

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