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Pierre MAHIEUX, prêtre guillotiné à Lorient
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.

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245. — M. Pierre MAHIEUX naquit et fut baptisé à Cruguel, non loin de Josselin, le 26 avril 1764. Yves et Louise Dréano, cordonniers de profession, ses père et mère, jouissaient dans le pays de l’estime universelle. D’après ses lettres d’ordination encore pieusement conservées à Cruguel, le jeune Mahieux tonsuré le 24 mars 1787, minoré le 8 mars 1788, sous-diacre le 28 novembre 1788, fut honoré du diaconat le 28 mars 1789 et de la prêtrise le 19 septembre suivant, des mains de son évêque, Mgr Amelot.

246. — Nommé vicaire de Sérent presque aussitôt son ordination, M. Mahieux refusa fermement de s'assermenter ; aussi lorsque l’intrus Perrotin eut été désigné pour occuper la cure de cette paroisse, les jacobins de la localité ne manquèrent pas de signaler le jeune prêtre comme dangereux. En conséquence, dès le 4 septembre 1791, le directoire du Morbihan rendait un arrêté lui prescrivant de se retirer dans sa famille ou à 10 lieues de Sérent. (Arch. Morbihan, L 1192 et L 1206).

On ignore si M. Mahieux obéit immédiatement à celle injonction. Toujours est-il que l’installation du curé-jureur nécessita la présence de la troupe. On en rendit responsables les prêtres insermentés, et il fut décidé que, pour payer les frais de cette expédition, on retiendrait 100 livres sur leurs traitements échus. (Arch. Morbihan, L 1192).

Puis le sieur Perrotin s’étant cru menacé à Sérent, on vint enquêter dans cette localité et plusieurs témoins déposèrent que l’abbé Mahieux était l’un de ceux qui menaient le plus activement la lutte contre le curé constitutionnel. (Arch. Morbihan, L 1129).

Pour éviter l’emprisonnement, M. Mahieux trop vivement pourchassé à Sérent dut cependant chercher un refuge momentané à Cruguel où l’on trouve sa signature sur quatre baptêmes, le premier le 4 février 1792, et le dernier le 31 mai suivant. Il retourna ensuite à Sérent et s’y tint jusqu’au mois de septembre de cette année.

Malgré que ses dispositions le visassent spécialement en qualité de vicaire insermenté, M. Mahieux n’obéit pas à la loi du 26 août 1792 qui le condamnait à l’exil. Les décrets des 21-23 avril 1793 et ceux des 29-30 vendémiaire de cette année ne parvinrent pas à lui faire renoncer au périlleux ministère qu’il remplissait auprès des âmes, alors si privées des secours de la religion. Dès lors, sans domicile fixe, à la merci d’une dénonciation alléchée par la cupidité, le vicaire de Sérent mena l’existence la plus pénible que l’on puisse imaginer. Dès le 12 novembre 1793, le conventionnel Prieur de la Marne avait mis à la disposition d’un seul district une somme de 3.000 livres pour se saisir des « monstres noirs qui pervertissaient les paysans ». (Arch. Nat., AF, II, 125, plaquette 962, p 54). M. Mahieux, dans cette chasse aux prêtres, succomba.

247. — La veille de son arrestation, c’est-à-dire le 16 mai 1794, un vendredi, la brigade de gendarmerie de Ploërmel, aux ordres du lieutenant Mahot, voyageait sur la route de Malestroit derrière le commissaire du district, le citoyen Claude Guillot, munie d'une mission secrète.

Arrivée à Malestroit, elle se renforce de 37 militaires de la garnison et, la nuit venue, prend la route de Sérent, localité mal notée parmi les jacobins. Après plusieurs perquisitions inutiles, elle s’en va au village de la Touche frapper à la porte de Jacquette Merlet, veuve de Joseph Guimart, excellente chrétienne dont la population de Sérent conserve encore précieusement la mémoire. Sur les sommations de la troupe, une fenêtre s’entrouvre, mais se referme aussitôt sur la menace de brûler la cervelle à la personne assez audacieuse pour se montrer. Aussitôt toutes les lumières s'éteignent : il était minuit.

A l’intérieur on hésite ; de l’extérieur on menace ; enfin la porte s’ouvre et, face à face avec les soldats de la Révolution, une femme paraît. « Tu as des prêtres cachés ici ! — Non ». Elle avait répondu avec tant de tremblement de toute sa pauvre personne éperdue que les envahisseurs comprirent oui. Joyeux, ils se précipitèrent à la recherche. Ce fut bientôt fini. A l’étage supérieur, d’un lit en désordre un homme sortait, complètement vêtu, qui portait un crucifix, des saintes huiles, des « hosties » pour dire la messe et une lettre signée « Clément ». C’était M. Mahieux, le proscrit.

Quand les policiers l’eurent en leurs mains, ils descendirent et se firent désigner la maîtresse de maison. Une autre femme se chauffait au coin de l’âtre. « Quelle est cette personne ? » demanda le commissaire. C’était Jeanne Trégaro, femme Clément, la signataire de la lettre trouvée sur M. Mahieux. On s’empara encore d’un enfant de seize ans et d’un homme d’une trentaine d’années qui assistaient silencieux à cette scène. L’un était le fils, l’autre le domestique de la maison.

248. — Le jour commençait à poindre et les cinq personnes rassemblées dans la cour de ferme se disposaient à partir, lorsque, profitant d’un moment d’inattention générale, la veuve Guimart tendit à M. Mahieux un petit paquet dont elle s’était munie. Mais le gendarme Morice vit le mouvement, saisit le paquet suspect, et, le commissaire l’ouvrant en hâte, y découvre une petite custode remplie d'hosties. « Laissez-le-moi, s’écria la paysanne, c'est consacré, vous ne pouvez vous en servir ».

Voulait-elle dire que les hosties étaient consacrées ou bien que le vase, qui les contenait, était saint et partant inutilisable, on l’ignore. Commissaire et gendarme n’entendirent rien et gardèrent la custode. Après les avoir garrottées, on entraîna vers Ploërmel les victimes de la persécution jacobine. La tradition veut qu’en traversant Sérent, M. Mahieux chantait le beau cantique du Bienheureux de Montfort : « Ah ! que mon sort est charmant ! ».

249. — Dix jours se passèrent. Des prisons de Ploërmel, les malheureux habitants de la Touche furent transportés à celles de Lorient. Le 26 mai 1794, ils comparurent devant le tribunal criminel du Morbihan siégeant à Lorient. M. Mahieux, dans son interrogatoire, déclara avoir usé de sa liberté en ne prêtant pas le serment prescrit à la Constitution. Courageusement, il fit connaître qu’il n'avait jamais été dans ses intentions d'obéir aux lois de proscriptions qui l’atteignaient et de quitter la France. Il se borna à indiquer sommairement les paroisses qu’il fréquentait, couchant, dit-il, le plus souvent dehors, et allant mendier sa subsistance de porte en porte.

Par ailleurs, il prit garde d’apprendre à ses juges rien de plus qu’ils ne sussent déjà. Il ne cacha pas du reste qu’il exerçait à l’occasion son ministère et ajouta, en bon prêtre qu’il était, qu'il ne se croyait, pas en droit de le refuser à ceux qui y faisaient appel.

Les femmes Trégaro et Merlet, dans leurs réponses, firent largement appel au système des restrictions mentales, moins sans doute dans l’espoir inutile de sauver leurs têtes que pour mettre à couvert leurs jeunes familles des conséquences terribles qu’elles redoutaient.

Les cas comme ceux de M. Mahieux et de Jacquette Merlet étaient réglés d’avance, c’était la mort. La loi des 29-30 vendémiaire an II était formelle, ainsi que celle du 22 germinal suivant. Jeanne Trégaro fut adjointe à Jacquette Merlet comme sa complice. Le soir du jour qui les avait vus condamner, vit aussi leurs exécutions sur la place de la Montagne, à Lorient. Procès-verbal fut dressé de leur mort le jour même de leur trépas, 26 mai 1794.

250. — Les victimes moururent sans forfanterie dans le calme de leur conscience, sûres d’elles-mêmes, avec le plus simple héroïsme, le prêtre comme réfractaire, les deux femmes comme ses receleuses, c’est-à-dire les uns et les autres en haine de la Foi.

La tradition du martyre tant de M. Mahieux que de Jacquette Merlet paraît solidement établie dans sa parenté. Les collatéraux du premier conservent encore précieusement une partie de son mobilier dont un coffre, une armoire et une soutane. Non seulement la famille de M. Mahieux est persuadée qu’il a été mis à mort pour la Foi, mais aussi ses compatriotes. Il y a bien longtemps déjà que vis-à-vis son acte de baptême, une main inconnue a tracé ces mots : « Mort martyr en 1794 ». Plusieurs personnes à Sérent se souviennent avoir appris de leurs parents que l’on réquisitionna des cordes pour garrotter les prisonniers et qu’une fois que M. Mahieux se vit couvert de liens à l’image du Divin Maître, il s’écria : « Unis-toi maintenant, mon âme, à Dieu ; ».

BIBLIOGRAPHIE. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne (1845), op. cit., II, p. 30. — R. P. Le Falher, Le Royaume de Bignan, in-8°, Paris, 1913. — Du même, Les Prêtres du Morbihan victimes de la Révolution (1921), op. cit., p. 55-73, publient les actes officiels du procès de M. Mahieux et de ses receleuses.

(Sources : Archives départementales du Morbihan, A 13, anciennement Z 501, L 1569).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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