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 Description de l'abbaye de Daoulas

La porte d'entrée, à deux arcatures, ouvrant sur l'ancienne cour extérieure de l'ABBAYE ; de part et d'autre, deux bâtiments, transformés en habitation : - à gauche, le CELLIER des moines ; - à droite, les anciennes écuries ; - au-dessus de l'arc principal de l'entrée. Les ARMOIRIES (3 lézards) sont celles de Charles-Maurice Le TELLIER, frère de Louvois, qui faut abbé commendataire (1651-1666).

Vue du jardin botanique

Le Cloître

LE LONG DE L'ALLEE qui mène au cloître, les STATUES : - Saint AUGUSTIN ; - puis un personnage énigmatique, assez grossièrement travaillé, il s'agit peut-être d'une représentation de la fécondité masculine (héritage du culte druidique ancien autour de lafontaine ; - ensuite, saint SEBASTIEN au supplice ; - enfin, à l'arrivée au cloître, sur la droite de l'allée, Saint ANDRE, apôtre, avec sa croix.

LE CLOITRE : C'est la pièce maîtresse de ce qui reste, c'est l'ancienne cour intérieure du monastère, construit sur les quatre côtés, une galerie couverte en appentis en faisait tout le tour, le bas de la toiture reposait sur les arcatures du cloître, tandis que le haut s'appuyait aux bâtiments : - au sud, l'église abbatiale, toujours visible ; - à l'ouest, la maison de l'abbé ; - à l'est, la salle capitulaire, dont le mur de base existe encore avec ses profondes arcatures antiques (de l'époque pré-romane) ; - au nord, l'habitat des moines dont il ne reste rien. Construit entre 1167 et 1173, ce cloître est un reste précieux, il n'a de rival, dans l'ouest de la France, que le cloître roman de l'Abbaye Saint-MELAINE de RENNES. Partiellement démoli après la vente du monastère comme bien national en 1792, il a pu être reconstitué sur 3 côtés, vers 1880. C'est une élégante construction de style roman, dont les arcatures en plein cintre sont portées par des colonnettes simples ou jumelees, en alternance ; seuls les angles ont quatre colonnettes formant pilier.

Les CHAPITEAUX en pierre de Kersanton sont des corbeilles ornées de sculptures végétales légères et harmonieuses : feuilles larges ou aigües, droites ou recourbées, palmettes, volutes, branchages feuillus, remarquables de finesse et de légèreté.

Les TAILLOIRS, au-dessus des chapiteaux, sont couverts d'ornementations géométriques, bâtons brisés, rubans plissés, étoiles, damiers, perles, nids d'abeilles... Le même décor se retrouve sur le pourtour de la vasque circulaire au centre de la cour. Dix panneaux y sont déterminés par une application de dix "têtes coupées" ; il semblerait que ce fut autrefois une fontaine où l'eau, venant d'une colline environnante, jaillissait par un conduit central, pour tomber dans la vasque, d'où elle s'échappait par dix cascatelles sortant des dix bouches des "têtes coupées". Quelques décors demeurent sur le pourtour du cloître : au mur-ouest, les armoiries des ROHAN ; au mur-est : statue de ST-PIERRE, portant la clef, puis la statue d'un moine se rendant à son travail, avec son "sac" de parchemins pour la prière ; on remarque encore les armoiries de l'abbé Guérault, et, au-dessus du mur, une pierre rapportée, ornée de la RESURRECTION du CHRIST : celui-ci a déjà une jambe hors de la tombe, tandis que les soldats sont étendus au bas de la tombe.

LE PARC

  Chapelle et Fontaine du Parc

LA CHAPELLE DE N. D. DES FONTAINES est une construction en bois, élevée à deux pas des fontaines, à la même époque que la fontaine monumentale. La façade en a été remaniée pour accueillir une porte sculptée et une partie de la galerie qui entourait autrefois le choeur des moines dans l'église abbatiale. A l'intérieur de la coquette chapelle, deux statues du XIIIème siècle : une Vierge à l'enfant et un pittoresque polychrome de l'évêque Saint Thélo, enfourchant le cerf dont la course d'une journée devait circonscrire le territoire de l'évêché du Saint. On peut encore y remarquer : dans l'angle sud-est, une statuette (sainte Anne couchée, ou, plus probablement, la Dormition de la Vierge) ; un tableau de l'Assomption ; les armoiries de l'abbé Prédour ; Deux stalles à "miséricorde" de la fin du XIIème siècle ; enfin les sablières, très ouvragées, qui reçoivent la toiture.

Vue de l'intérieure de la Chapelle

L'allée qui part au nord du cloître, mène, à 200 m, à la fontaine, dédiée depuis des siècles à la Vierge Marie. Un mur d'enceinte entoure à la fois la fontaine, les trois petits et le grand bassins qui recueillent successivement l'eau des sources sacrées. La fontaine elle-même est couverte, au-dessus d'une première voûte, d'un petit oratoire de style gothique : au-dessus d'un arc en anse de panier, se dresse un fronton triangulaire où trône, dans une niche, une belle statue de la Vierge à l'enfant. Le fronton est orné de quatre pinacles gothiques. Juste au-dessus du bassin de la fontaine, au-dessous de l'arc en anse de panier, est sculpté un groupe en haut-relief : au pied de la Croix, sainte Catherine de Sienne, tourmentée par les douze bêtes immondes de sa tentation, est libérée de sa peine. Un banc de repos court sur le pourtour intérieur du mur d'enceinte de la fontaine. Cette fontaine a-telle été autrefois un lieu de culte druidique ? Toujours est-il que le christianisme en a fait un lieu de pélerinage ; on y venait pour être guéri des maladies oculaires ou de la stérilité, et les mamans y baignaient leurs enfants retardés dans la marche. Au revers de la fontaine, une inscription en caractère gothiques date l'ouvrage : " Le Xè jour de Juin lan mil V cent Lte (1550) fut renouvellé cette fontaine p. M.O. du Chatel de Daoulas abbé. ".

Fontaine située près de la chapelle

Arrière de la Fontaine

L'ABBATIALE 

L'église abbatiale, qui faisait partie de l'ensemble du monastère, devenue maintenant église paroissiale, construite en 1173, devait être très proche de celle qui existe actuellement : 

- La nef et le bas-côté nord  (à gauche, en regardant le choeur) datent entièrement de cette époque, ainsi que la façade, à moins que celle-ci ne soit encore plus ancienne.

- Les 2 gros piliers du choeur actuel sont aussi d'origine, comme tous ceux de la nef principale. Avec 2 autres piliers semblables, ils servaient de base au clocher.

Au cours du XVIème siècle, en effet, l'église abbatiale subit d'importantes transformations :

- D'abord, au choeur roman, est substitué (entre 1519 et 1535) un choeur gothique, avec une grande verrière, construit sur toute la largeur de l'édifice, et même au-delà : on peut encore retrouver son mur nord dans la sacristie actuelle. 

Puis, vers 1566, le bas-côté sud roman est remplacé par un bas-côté gothique beaucoup plus élevé et de largeur double. Pour entrer dans l'église par ce bas-côté, est édifié un porche monumental, mélange de gothique et de renaissance. C'est ce porche qui est maintenant à l'entrée du cimetière, sur la place de l'église.

Après cet apogée, vient rapidement le désastre.... Tombe d'abord le clocher roman ; puis, c'est la ruine de tout le choeur gothique. Ils seront démolis entre 1830 et 1835.

L'obstination du curé de Daoulas, l'abbé Robic, et la collaboration de Mr Bigot, architecte diocésain, mèneront à terme, au cours des années 1877-1879, une restauration partielle de l'église, remise en forme romane : 

- Le large bas-côté sud est démoli ; le porche des Apôtres remonté à l'entrée du cimetière.

- On rétablit l'ancien bas-côté sud roman, avec un nouveau porche adapté.

- On reconstruit un choeur roman à une abside et 2 absidioles (note 1).

- Enfin, une nouvelle sacristie est ajoutée à l'est ; elle est formée de l'ancien mur conservé du grand choeur gothique, au nord, et de la façade renaissance de l'ancien ossuaire, au sud. 

LA FACADE OUEST est un exemple type de façade romane (arcatures de portes, fenêtres en plein cintre, ..).

L'EGLISE 

Cette église romane est de dimension modeste : la nef principale a 28 m de long, répartie en 7 travées, et 7 m de large. Mais la hauteur, 12 m 50, est remarquable, pour une église romane. Chacun des bas-côtés est large de 3 m 50.

La qualité de l'édifice résulte de l'harmonie et du jeu des lignes architecturales, et du chaud coloris du matériau employé : la pierre de Logonna-Daoulas.

- Après les 2 colonnes de la première travée, 2 files de piliers tout simples, en forme de croix grecque, reçoivent des arcatures en plein cintre, à doubles rouleaux (note 6). Les angles vifs et les rentrants (note 7) des arcatures et des piliers déterminent d'agréables contrastes d'ombre et de lumière, jouant sur les belles couleurs de la pierre. 

- Le mouvement rythmé des piliers et des arcatures, arrêté provisoirement par le grand arc doubleau (note 8) au haut de la nef, reprend agréablement et se termine dans une courbe savante, aux arcatures plus légères de la nouvelle abside semi-circulaire. 

Quelques DECORS SCULPTURAUX seulement.

- Des décors géométriques ornent la corniche au revers de la façade : étoiles, tresses ... 

- Une tête démoniaque grossièrement taillée se trouve en pénitence à l'angle de la porte d'entrée. 

- Dans la 4ème travée à partir du fond, se trouve. une inscription en caractères gothiques tellement originaux qu'ils ont défié, jusqu'en 1974, les efforts des épigraphistes. Elle a enfin livré son secret : " L'abbé Charles fit en son temps ce bois de céans lan mil V cents avecq (ues ) XX comprins IX ans par O. Garic et ses aidans ". Elle dit donc que l'abbé Charles ( Jégou ) fit refaire en son temps les boiseries de l'église, en 1529, par O. Garic et ses compagnons. 

- Des décors végétaux parent également le chapiteau au sommet d'une des colonnes monumentales de la première travée dans la nef, et ceux des 2 grands piliers à la naissance de l'ancien choeur des moines. Dans la nef, la sablière (note 9) qui couronne le mur nord, est ornée de belles sculptures, en particulier le motif satirique du renard attrapant une poule.

- Au fond de l'église, à gauche, fixée au mur du pignon, une pierre tombale portant l'inscription " Ci-gît le frère Charles Jégou, abbé de ce monastère de Daoulas. Il acquit des biens assez nombreux et fit faire beaucoup de constructions. Il dirigea le monastère selon les lois de l'Eglise pendant 15 ans. Il mourut le 10ème jour du mois de janvier de l'année du Seigneur 1535 ". 

LA STATUAIRE ... Un petit nombre de statues de valeur ornent sans surcharge, les lignes maîtresses de l'édifice :

- Dans LA NEF

- Dans LE BAS-COTE NORD

- Dans LE BAS-COTE SUD 

- Une statue de Sainte Marguerite du XVIIIème siècle. 

 

 

 

- Sur l'autel de l'absidiole, une Vierge à l'Enfant, du XVIIIème siècle également.

 

 

 

 

Quelques éléments divers de l'église :

Porte du fond de l'église

LA SACRISTIE  ... La sacristie est une reconstruction de 1876-1877. Le mur nord-est est ce qui reste de l'ancien choeur. Il renferme grands 3 enfeux gothiques, profondément creusés, sous une voussure gothique ornée de nombreuses colonnettes et de chapiteaux d'ornementation végétale. 

Le mur opposé qui donne sur le cimetière, est encore en souvenir : il s'agit, en effet, de la façade de l'ancien ossuaire, placé à l'angle du cimetière, en parallèle avec la chapelle Sainte Anne, et qui datait de 1585, comme en témoigne l'inscription au-dessus de la porte d'entrée : MEMENTO/ LAN ; 1585 ; MORI ; RS ; FI.

L'intérieur de la sacristie, que l'on ne peut visiter habituellement, conserve d'autres valeurs. La porte d'entrée y donnant accès est une belle porte renaissance, en pierre de Kersanton, surmontée d'une fenêtre de style flamboyant, et accostée d'un bénitier.

LE PORCHE DES APOTRES

Le porche des apôtres avait été bâti au XVIème siècle, pour donner accès à l'église, au flanc du bas-côté gothique qui avait remplacé le roman. La date de la construction est inscrite au socle de la statue de Saint Pierre (1566). En 1880, quand il fallut démolir le choeur (en ruines), Mr Bigot architecte, fit remettre l'église dans sa forme romane primitive, avec en particulier un bas-côté roman.

Du coup le porche des apôtres fut démonté et heureusement conservé grâce à l'action du curé Robic qui obtint l'autorisation de le remonter à l'intérieur du cimetière. La toiture surprenante qui fut réalisée à cette époque qui faisait penser à une toiture à ressauts et à pans coupés de certaines églises d'Allemagne, menaçait ruine. Elle a été enlevée en 1994, avec les cloches qu'elle abritait. 

L'ensemble du monument, classé monument historique en 2006, a été restauré en 2007 sous la direction des « Bâtiments de France » avec la participation d'entreprises hautement qualifiées. 

Le style de l'architecture est un mélange de Gothique et de Renaissance. Un grand arc gothique à voussures multiples (note 10), délimite le décor de la façade extérieure. Par contre c'est un arc en anse de panier, de la Renaissance, qui couronne la porte d'entrée principale, et chacune des 2 petites portes du fond qui donnaient accès à l'église. 

Les colonnettes des voussures et les niches dans les contreforts d'angles sont Renaissance, tandis que les pinacles appartiennent au Gothique. 

Les statues des Apôtres, leurs niches à coquilles avec les volutes de couronnement sont Renaissance. Mais la Vierge à l'enfant et le Saint Augustin aux niches des contreforts sont nettement de facture Gothique. 

A l'intérieur du porche, seul dans sa Gloire, contre la façade du fond, trône le Christ Sauveur de l'Univers qu'il tient dans sa main gauche. 

Autour de lui, sur les côtés, sont alignés les douze apôtres : 

A la gauche du Christ : 

Pierre, portant sur l'épaule droite la clé du Royaume.

André, la croix en sautoir sur le côté;

Jacques le Majeur avec ses coquilles, le bâton et la gourde de pèlerin.

Jean, imberbe, tenant la coupe du poison représenté par le crapaud accroupi sur la coupe.

Philippe et la pique qui le transperça.

Jacques le Mineur, tenant le bâton de foulon recourbé à la base, qui servit à l'assommer.  

A la droite du Christ : 

Thomas (en face de Pierre), l'équerre à la main (patron des architectes).

Simon, avec la scie de son supplice.

Barthélémy et le coûtela qui l'égorgea.

Jude tenant le livre des Evangiles.

Matthieu, le collecteur d'impôts, avec sa balance à peser la monnaie.

Mathias et la massue.

Ces statues sont l'oeuvre d'au moins 2 sculpteurs : l'un cisèle des personnages larges, trapus, aux costumes à grands plis creusés, dont le plus typique est Jacques le Majeur ; l'autre aime les personnages sveltes, étirés même, tel Barthélémy. 

Les rinceaux comportent de nombreux éléments d'ornements : personnages, feuillages, grappes de raisins, etc.... 

Les disciples du Christ produisent réellement de bons fruits, et les deux vendangeurs placés à mi-hauteur dans les rinceaux en ont le giron bien rempli ! Mais le Mal demeure aussi dans la vie des chrétiens : des bêtes malfaisantes, oiseaux, crapauds, mulots, escargots, serpents et autres, disséminés dans les rinceaux, attaquent et abîment des grappes. 

Le travail en profondeur des sculpteurs a été rendu possible par l'utilisation de la kersantite, au grain très fin. 

Au remontage du porche en 1880 on a paré à la nudité de la façade postérieur (côté cimetière) en la dotant de 3 sculptures une Piéta d'une ampleur et d'une majesté remarquable, un Saint Rioc, évêque (1447) et un autre évêque, à gauche, Saint Clair (1542).

Piéta 

Le porche de la Vie

La statuaire et le décor sculpté du porche, apparemment disparates, sont l'illustration d'un thème unique de la Foi : " Pour reconstituer l'homme voué à la mort par son péché, la Vie est venue en Jésus-Christ. Cette Vie se donne par le ministère de l'Eglise fondée sur les Apôtres... Elle se donne à tous les hommes, réunis dans l'unique Vigne du Seigneur. Une vigne au rendement inconstant... ". 

En effet, au-dessus de l'arc majeur en anse de panier,

- entre deux anges portant les bâtons du châtiment, un personnage barbu et triste, le regard tourné vers la terre : c'est Adam, l'homme du péché et de la mort et de la mort, chassé du paradis terrestre.  

- juste au-dessus, et en correspondance, 2 anges dans l'adoration, autour de l'Enfant-Dieu ? la Vie Nouvelle, couché sur le dos dans la mangeoire, qui regarde vers le ciel. 

Pour donner encore plus de relief à ce thème, l'artiste a écarté aux angles du tympan la Vierge Marie et Saint Joseph, tandis que l'âne et le boeuf de la crèche sont à peine esquissés. 

Le Christ, Vie Nouvelle, a été annoncé : à la face intérieure des contreforts, de part et d'autre de la façade du porche, la Vierge de l'Annonciation reçoit la salutation de l'ange Gabriel. 

A l'extérieur de ce porche, sont deux autres belles statues en kersanton : à l'angle sud-ouest, une Vierge à l'Enfant ; à l'angle nord-ouest, un Saint Augustin sous l'ordre duquel furent placés les Religieux de Notre Dame de Daoulas, au XIIème siècle.  

(note 1) Abside : extrémité en demi-cercle du choeur d'une église. Absidiole : chapelle arrondie de l'abside.

(note 6) rouleau : rangée de claveaux d'un arc.

(note 7) rentrant : angle rentrant : angle supérieur à 180°.

(note 8) arc doubleau : travée d'un vaisseau.

(note 9) sablière : grosse pièce de charpente posée sur l'épaisseur d'un mur, dans le même sens que celui-ci.

(note 10) voussure : montée ou portion de montée d'une voûte.